Sacha BOGOPOLSKY

Nous allons faire un tour de France afin de présenter les principales manufactures de céramiques ayant fabriqué des boîtes de brosses à dents en faïence ou en porcelaine pendant la période 1820-1920. Certaines de ces boîtes n’ont pu être classées que par leur décor, ne présentant aucun signe distinctif de marque et d’autres n’ayant pas d’histoire, car pour les unes les documents ont été supprimés en fin de fabrication et pour les autres elles ont été détruites du fait de la guerre.

Bayeux

L’histoire nous apprend qu’après la fermeture de la faïencerie de Valognes, Langlois s’installa dans l’ancien couvent des Bénédictins, actuellement rue de Verdun.

Le conservateur du Musée Baron Gérard, après avoir examiné cette boîte, nous précise que celle-ci « est bien d’origine bayeusaine. Son décor bleu, rouge et vert associé à un dessin noir de contour et d’ exécution rapide fut exécuté à la manufacture de porcelaine de Bayeux » dès le début de la période de direction de Sophie et Jenny Langlois ( 1848-1849) et sous la période Gosse (1849-1878) qui a succédé à celle des deux soeurs.

L’activité de la manufacture s’étend de 1812 à 1951 mais il semble que la datation de cette boîte se précise entre 1850 et 1870.

Ces deux périodes de fabrications se distinguent par des marques de fabriques différentes. Les sœurs Sophie et Jenny ont repris le sigle de leur mère ; Gosse, au début de sa direction a fait de même, mais en la personnalisant d’un G pour enfin l’abandonner au profit de son propre patronyme.

Malheureusement ces productions ont la caractéristique d’être rarement signées. Ainsi le L marqué sous la boîte, n’est pas une marque de fabrique mais une signature liée à l’exécution même de l’objet.

Le décor semble être cuit au « feu de moufle ». Après l’émaillage et la cuisson, le décor est peint et une troisième cuisson à 800° pendant 2 à 3 heures est alors nécessaire pour fixer ce dernier.

Creil

Nous poursuivons par la région parisienne qui possède de nombreuses fabriques dont certaines entrent dans le cadre de notre recherche, en particulier, avec la Faïencerie de Creil

Il est bon de rappeler que le ministre Vergenne signa avec l’Angleterre en 1786, un traité de commerce désastreux, permettant la libre circulation, en particulier, des céramiques anglaises sur le territoire français. Au cours de la Révolution ce traité a été remis en cause et de ce fait, Chantilly, Sèvres, Creil ont pu de nouveau concurrencer les faïences anglaises. Visant alors à une production abondante, les faÃ�enceries se transformèrent complètement, ce qui n’était encore qu’un art artisanal allait devenir une industrie et ce fut Creil qui contribua le plus à cet essor.

Le 26 Mai 1797, un cristallier parisien, Robert Bray O’Reuilly passait devant Maître Huguet notaire à Paris un acte par lequel il proposait « d’établir sur les bords de l’Oise, une manufacture de poterie dites terres anglaises et de verrerie ». Il vend sa manufacture de cristaux établie au Gros Caillou à Paris et porte son choix sur la ville de Creil. Ce choix est judicieux car cette ville est située près d’une voie navigable, d’une région boisée pour le combustible et d’une carrière de sable. Après bien des aventures, des avatars et des modifications de statuts de la Société, c’est St. Cricq, Casaux et Tarbe qui reprennent la Société en 1805 et le premier en devient seul propriétaire en 1815.

Les glaises arrivaient de Montereau, les silex du pays de Thelle, qui étaient alors calcinés et broyés à Nogent avec les sables d’Apremont. Enfin le Kaolin venait de St. Yrieix ou d’Angleterre, la potasse arrivait d’Amérique et le plomb, la céruse, le minium provenaient de Clichy. Cette faïencerie occupait 900 personnes en 1834.

St . Cricq s’était associé avec l’artiste anglais Bagnall depuis 1816 jusqu’à sa mort en 1823 (St. Cricq fit de même avec Lebeuf à Montereau avec lequel il fusionnera en 1819). Après une première exposition en 1831, c’est à l’exposition de 1834 qu’il présente des pièces fines si bien glacées qu’il leur donne le nom de « porcelaine opaque ». La Manufacture de Creil fut jugée digne de la Médaille d’or, pour la qualité de sa pâte, ses prix raisonnables et la variété des ses formes.

Mais la désignation de « porcelaine opaque » allait soulever des polémiques. Stéphane Flachat dans « l’Industrie » (1834) journal de l’époque écrit que « le style anglais est bien imité, le goût national s’y trouve aussi avec une pureté de ligne souvent remarquable. » ce qui ne l’empêche pas plus loin de soutenir au sujet de la porcelaine opaque que : « cette dénomination n’est pas exacte ; cette prétention n’est pas fondée. Les poteries de Creil et de Montereau n’ont rien qui approche de la porcelaine. C’est de la faïence fine fabriquée avec beaucoup de soin, toute l’économie que peut permettre une matière inférieure. Ce genre de produit devrait s’appeler « Faïence dure » « 

Exemple de boîte :

Décor de semis de fleurs polychrome. Email très fin glacé. Fond blanc à reflets métalliques. Elle comporte une marque imprimée sous couverte de Saint-Cricq Casaux et Cie.

Le Musée Municipal actuel se trouve situé dans la maison d’origine, bâtie en 1788, sur une partie du Château de Charles V qui fut léguée par Mme Gallé Juillet à la commune. La nièce de Mme Bagnall, dont le mari Jacques avait exploité en locataire la manufacture de porcelaine opaque et de faïence fine pendant la période du 1er tiers du XIXème s. avec l’aide de son neveu par alliance le docteur Jules Juillet, put continuer l’exploitation. Ce dernier fut Maire de Creil sous Napoléon III.

Creil ferme ses portes en 1895.

Choisy-le-Roi

La Manufacture de Choisy-le-Roi,  faïencerie créée par Hyppolite Boulenger vers 1905 et fermée en 1934.

Une série « Oxford » faïence blanche avec oiseaux et feuillage en noir, porte la marque H.B. & Cie, datant environ de 1836, à boîte rectangulaire et coins arrondis avec couvercle bombé. Le décor est à compartiments triangulaires avec feuillage en relief et filets bleus sur le couvercle. Information d’après le GEDA, dont les dimensions sont H6, L19, l 8 et se trouve au musée de Creil

Le rachat du groupe Creil Montereau amène de nouvelles techniques, comme la peinture au pochoir, les décalcomanies.

Boîte rectangulaire à coins arrondis bombée datant d’environ 1836. Décor à compartiments triangulaires avec feuillage en relief et filets bleus sur le couvercle.

H. 6 L.19 l.18 d’après le GEDA

Montereau et Creil-Montereau

En rapport avec les Manufactures de Montereau et Creil-Montereau, Etienne François Mazois se lance en 1745 dans la fabrication de la faïence fine à pâte blanche  » terre de pipe « , poteries vernissées de formes encore grossières. Première dynastie de faïenciers, son commerce fut repris par sa veuve jusqu’en 1800.

De 1825 à 1833 Louis Lebeuf et Thibault louent la Faïencerie en 1819, ajoutent des rehauts polychromes faits à la main aux impressions noires sur fond blanc.

En 1840 Lebeuf, Millet et Cie. fusionnent avec Creil qui permet l’amélioration de la qualité de la faïence , toujours plus blanche et plus dure. Le  » petroceram  » apparaît en 1844 appelé aussi  » feldspath porcelaine  » et le célèbre décor  » Flora  » en impressions de vignettes colorées en bleu et orange avec dorures, sur des thèmes littéraires ou historiques, influences venues des expositions coloniales et universelles, dont de nombreuses boîtes de brosses à dents ayant la plupart du temps une forme galbée à angles arrondis. Clark ,Shaw et Cie s’établissent en 1846 à Montereau pour fabriquer de la faïence anglaise appelée « Queen’s Ware » puis en 1895 toutes les activités de Creil seront transférées à Montereau.

Nevers

Il est curieux de constater que dans la région du Centre, comprise entre Limoges et Bourges, où se situent de nombreuses fabriques de céramiques et de nombreux musées (dont le Pôle de la porcelaine avec le musée de Charles VII) c’est seulement au Logis St. Georges-Le bout du Monde, Fayencerie de Nevers, que j’ai trouvé une boîte de brosses à dents.

L’histoire remonte à Charles IX qui a accordé le duché de Nevers à Louis de Gonzague le 25 mars 1556. Son épouse Henriette de Clèves, fit venir dans sa « cour » de nombreux artistes dont une famille de faïenciers originaire d’Italie, de la ville d’Albissola, à la demande de ses parents. Ils étaient trois frères « Conrade » : Augustin installa le premier atelier de vaisselle blanche au Logis St. Gildas en 1585.

Il s’associa avec des verriers, puis avec Julio Gambin de Faenza. Ils ont exercé leur talent pendant 30 ans, et c’est son neveu, Jean Baptiste Conrade qui donna à la première faïencerie le nom des « Conrade », pendant la période de 1646 à 1665, date de la disparition de la famille.

Ils étaient maîtres de la technique du grand feu. Le frère de Jean Baptiste, Dominique eu l’occasion d’écrire à Colbert ces propos : « Que parmi les beaux-arts, je crois que seluy de la fayence est un des plus beau, qui se voye, et qui met plus une ville en estime, et plus marchand que cet art là »

L’une des plus anciennes est celle d’Antoine Montagnon (1795-1899), qui achète à M. Signoret, le 1er Janvier 1875, la « Manufacture du Bout du Monde  » qui au départ en 1648 se composait de l’appentis d’une auberge à l’enseigne du « Bout du monde » et jouxtait un petit atelier nommé le Logis St Georges. Il relança la fabrication artistique des faïences.

Antoine Montagnon participe à de nombreuses expositions en 1878 et 1889 ce qui lui vaut le titre de « Rénovateur de la Fayence de Nevers » et l’une des dernières participations de cette faïencerie eut lieu à la Maison de la Culture en 1987.

Gabriel Montagnon, Maître faïencier de 1899-1937, prend la suite et réalise des boîtes à brosses à dents qui portent la marque « nœud vert + Montagnon avec la signature G.M. étant à droite du logo » dont le modèle ci-dessous représente un exemplaire unique :

Le dessin du coq polychrome sur fond blanc a été créé en 1835 dans la faïencerie du Bout du Monde par le Gof avant la reprise de la fabrique par A. Montagnon et appliqué à partir de 1850 pour des services entiers, et fut repris ensuite par Antoine lors de l’achat de la fabrique. Ce décor fut conçu pour les  » utilitaires  » dont la fabrication a été arrêtée en 1914. Ces boîtes sont façonnées à la main et le décor est fait à main levée. Actuellement, la fabrication de ce décor a été reprise et comporte toujours :

Le beau coq gaulois au poitrail jaune tacheté de noir à la crête dressée, aux bajoues pendantes du plus bel écarlate et à la queue ondoyante, fièrement campé sur une branche de feuilles vertes avec au centre et à l’extrémité des fleurs jaunes et rouges semblent vouloir créer un retentissant « cocorico ». Les gros bouquets sont composés de fleurs stylisées, marguerites rouges ou roses sur fond d’abondants feuillages. Tous ces ensembles sont gais, vivants, chantant la splendeur de nos campagnes.

Cette boîte est une faïence grand feu, décor au rouge de fer. Elle ne se fabrique plus et les cartons d’archives ont été tous supprimés après la fabrication

La continuité de la fabrique fut assurée par J. Montagnon et enfin par Gérard et Raymonde depuis 1978. La fabrique bien que touchée pendant la guerre, a fêté ses 350 ans en 1999 et fonctionne toujours à la Porte du Croux, à Nevers.

Les Porcelainiers de Paris

A partir de 1770 jusqu’en 1850, Paris devient le centre des arts et cultive la qualité, le précieux, et tous les chefs-d’œuvre convergent vers elle . Une telle ville se devait d’avoir aussi ses « porcelaines ». Ainsi de nombreuses fabriques plus ou moins importantes se créent-elles dans Paris.

Cependant, afin d’échapper aux privilèges royaux de 1745 qui interdisent la fabrication des porcelaines ailleurs que dans les Manufactures Royales ( Sèvres, Vincennes), ces nouvelles fabriques se mettent sous la protection de grands personnages pour avoir le droit de produire des porcelaines. Elles ignorent ainsi ces édits royaux et franchiront de la sorte le cap de la Révolution. D’autres naîtront sous l’Empire, tout en demeurant soumises à l’octroi d’un privilège. Par ailleurs, bien qu’il fût également interdit aux ouvriers de quitter les Manufactures d’Etat, une véritable ruée de ces derniers se fait vers Paris dès 1750 (20).

La noblesse et la bourgeoisie du XIXème s. représenteront pour elles une clientèle sûre. Ces porcelaines de pâte dure sont caractérisées par leur blancheur, leur grain fin et leur parfaite vitrification. Les terres viennent du Limousin. Leur style est néo-classique sans emphase. Ainsi, peut-on citer les manufactures qui reçoivent alors les protections de :

  • Monsieur 1775, frère du Roi, ou du Comte de Provence, rue de Clignancourt (n°52). Vers 1771, création par Deruelle, puis en 1792-1799 sous la direction d’Alexandre Moitte. On y trouve des nécessaires de toilette peints avec des camaïeux bistres par le peintre viennois Lambrecht, qui innove et devance la Manufacture Royale de Sèvres.

  • du Comte d’Artois, futur Charles X. Cette fabrique du Faubourg St. Denis doit son origine, en 1771, à un aventurier Pierre Antoine Hannong, fils de Paul le fameux faïencier de Strasbourg.

  • de la Reine – André Marie Leboeuf s’installe rue Thiroux et sera protégé par la jeune reine Marie- Antoinette dès 1776. ( n°60 )

  • du Duc d’Orléans rue Amelot, fondée par Messieurs de Lamarre de Villiers et Outrequin de Montarcy en 1786. Caron et Lefèvre y travaille de 1806 à 1828.

  • de J.B. Locré, (58) loue les bâtiments de la rue de la Fontaine au Roi, dans le quartier de la Courtille, en 1772. Il est né le 25-10-1726, épouse à Leipzig Christina Caritas Hoffmann. Dépose sa marque de fabrique en 1773 sous le nom de « Fabrique de la Courtille ». Il rassemble des artistes créateurs de modèles et fait venir d’Allemagne des faïenciers et des porcelainiers. C’est Laurantin Russinger, fin sculpteur ayant travaillé à la manufacture de Höchst, qui lui succède à sa mort en 1787 (3).

    Il est le créateur de l’appellation « Porcelaine de Paris », par un arrêté paru en 1887, qu’il ne faut pas confondre avec les porcelainiers de Paris dont les fabrications ne doivent pas porter ce titre. Il passe en 1793 convention avec Poyat de Limoges

    En 1820, la fabrique est rachetée par J.M.Clauss qui s’installe 8 rue de la Pierre Levée jusqu’en 1990 pour se fixer dans le Cher où seuls les décors en chromo sont réalisés. En 1887 la firme fut reprise par Achille Bloch puis en dernier par la famille Bloit dont le dernier représentant était Michel Bloit habitant à Neuilly et décédé en fin 2000.

  • du Duc d’Angoulème, fils du Comte d’Artois, rue de Bondy , en 1773, porcelaine semblable à celles de la Reine ou de Monsieur. Composée de frises de roses sur pointillé d’or, de fleurs et motifs animaliers, empruntés aux planches de Buffon.

Voici une porcelaine fine de Paris de 1880, décorée par Samson (1845-1980) Il travailla à la Manufacture de Porcelaine et de Faïence de Montreuil-sous-Bois avec un dépôt à Paris, 7 rue Vendôme. Il déposa des marques de fabrique en 1873,76,85, puis il ne fit plus que de la décoration dans son atelier 7 rue Béranger à Paris avec un magasin de vente 30 Av. de l’Opéra où il reproduisit surtout des copies de musées.

Un joli nécessaire de poupée de porcelaine blanche (1860) à contour bleu et dont le couvercle, percé de trous est parsemé de roses et de feuillage multicolore. L 7,1 l 3,5 h2 cm.

Sèvres : la Manufacture de Sèvres, 1851-1855 / 1860-1864

Un service de toilette commandé par Eugénie pour recevoir la reine Victoria, au château de Compiègne par Napoléon III et elle-même, à l’occasion de sa visite à Paris. Il portait son chiffre, peint à l’or fin avec un décor de bouquets de fleurs placé librement sur une fine porcelaine blanche.(21) Caractéristiques d’un renouveau des procédés de décoration sous l’impulsion donnée par le Conseil de Perfectionnement nommé en 1848. Il comporte je pense, une boîte de brosse à dents lobée de dimensions : 5,5 x 21 x 9 cm. (22). Ce service se trouve à Compiègne.

Une boîte lobée de fond blanc à filets or datant de 1854, d’un modèle plus petit que les autres. Une série de 44 boîtes lobées identiques qui se trouvent au château de Fontainebleau datant de 1854 à 1858.

1896, St Amand et Hamage, Cléopâtre

1958, Hamage et Moulin des Loups

Saint-Amand-les-Eaux, Hamage

La région du Nord et de l’Est comporte de nombreux points de fabrication et nous relèverons parmi ceux-ci Les Faïenciers de St Amand-les-Eaux

La première faïencerie fut fondée vers 1700 par Nicolas Desmoutiers, mort en 1750. Ses produits sont marqués par des décors polychromes ou en camaïeu bleu grand feu (avec fleurs ou animaux…. ) On peut citer ensuite, en 1786, Fauquez et sa porcelaine et faïence fine

C’est dans les environs que l’on trouve les marques de boîtes à brosses à dents en : 1896 à St. Amand et Hamage

Boîte en faîence présentant un décor en contour de dessin noir de marque « Cléopâtre » et « Hamage-ors », elle est teintée jaune pâle avec un filet or et le corps à éléments dentelés à formes diversement inclinée et dorés. Couvercle à rinceaux pour la prise en main

Et en 1954 à Hamage et Moulin des Loups, marque déposée en 1958 : boîte de faïence beige bordé d’un contour bleu-vert limité par un filet d’or torsadé. Boîtes de L 22 l 9 et H 7 env. La dernière faïencerie de St. Amand-les-Eaux a fermé en 1980 et fut rasée en 1990.

Lunéville

J. Chambrette fonde une fabrique en 1723 grâce au « Duc Francois et à Stanislas, feu Roy de Pologne » (25) afin de produire une faïence de même style qu’à Strasbourg. Il fait faillite en 1786 et s’installe à St. Clément en 1788, dans une fabrique dirigée par la famille Thomas depuis 1757-58 et qui fermera ses portes en 1980 A la mort de Chambrette, sa veuve obtint le titre de Manufacture Royale et le privilège exclusif de faire pendant 10 ans de la fayence à Lunéville et qu’elle dût céder cependant à la faïencerie de Keller et Cuny. Le Conseil confirma leurs privilèges en 1788. Deux ans plus tard, commença la fabrication de la faïence en terre de pipe blanche, faïence fine et populaire avec la raison sociale « Keller et Guérin » ( beau-père et gendre ) et la marque « KG Lunéville » alors que la marque KG daterait d’avant 1830 suivant certains experts(11). Elle devint très importante dans la spécialité de la vaisselle quotidienne, avec pour décor les roses, puis les fleurettes bleues, violettes et jaunes. Emile Gallé à ses débuts vient s’installer à St. Clément.

Parmi les boites que j’ai répertoriées,

  • La première porte la marque KG de chaque coté d’un ange de 1879 et intitulée « Ombelles » de faïence blanche de forme arrondie et à décor de feuilles de couleur violette.

  • La deuxième de forme rectangulaire porte la marque KG-Lunéville dans un éventail à décor de personnages chinois violets.

  • La troisième également de forme rectangulaire à décor chinois en violet représentant sur le couvercle une lanterne et un coquillage entouré d’un motif décoratif géométrique. Le corps est décoré d’animaux et d’une tête de chinois sur un arc. La marque est KG-Lunéville dans un éventail.

Boite de porcelaine à fond blanc craquelé, décor vert Empire décoré de feuilles de laurier en blanc bordé d’un filet or 1 x8 x 8 Marque Keller et Guérin

KG Ombelle, 1879

Keller et Guérin, 1830

Modèle Joséphine, 1890

Sarreguemines : La Manufacture de Sarreguemines

Trois négociants, les frères Nicolas-Henry et Augustin Jacobi (ou y) de Strasbourg et Joseph Fabry installèrent une fabrique de faïence dans un moulin à huile vers 1765. Ils avaient 20 ouvriers et 1 seul four pour faire de la faïence fine de deux types : terre à pipe et callouitage. Les deux frères se retirent et cèdent leurs parts à Joseph Fabry. (13)

L’emplacement est conditionné par sa situation géographique, en effet, cette ville frontière est appelée « Porte de France ». Il est difficile de reconstituer les données car toutes les archives ont été détruites au cours de la dernière guerre. Cependant cette ville a été la propriété des ducs de Lorraine et son nom s’est transformé successivement en : Guemündt, Gemünde, Zargemünde, Saar-Gemünde, Saargemünde, Sarreguemines.

Son importance est déterminée par deux raisons : d’abord l’abondance de bois, (10 Kg de bois pour 112 gr de produit fini transporté par flottage sur voie d’eau, étant au confluent de la Sarre et de la Blies) et ensuite l’alimentation des moulins par cette même voie.

Le fruit de la réussite de François Paul Utzschneider, qui né en 1771 à Rieden, en Haute Bavière, (mort en 1844 à Sarreguemines) après un passage en Angleterre, et venu s’installer en France, le fut grâce à son oncle le baron André, secrétaire particulier de Marie-Anne Palatinat. Au début de la Révolution , il se trouve à Sarreguemines et s’associe avec J. Fabry ( négociant en tabac) en 1784. Le nom de terre rouge carmélite ou de terre de Naples est commercialisé sous le nom de « La terre de Feu » (20). Il reçoit une récompense à l’exposition de 1801 pour la création de nouveaux grès imitant des pierres dures . Il crée un dépôt à Paris, rue du Fg. St. Denis.

Son gendre le baron Alexandre de Geiger prend la suite en 1836 et en bon politique partagera le marché avec Villeroy et Boch.

Première fabrique en France de faïence fine à reflets d’or ou d’argent, et à partir de 1875 des pots de nécessaires de toilette avec un décor imprimé marron « Narcisse ». C’est en 1870 qu’apparaît la « majolique », faÃ�ence fine recouverte de glaçures colorées. On trouve alors dans les catalogues la mention des boîtes de brosses à dents et des porte cure-dents.

Son fils installe une succursale en 1877, à Digoin, puis en 1877 à Vitry-le-François où l’on ne fabriquera plus que des nécessaires de toilette.

Pendant la seconde guerre mondiale, la fabrique fut mise sous séquestre et confiée à Villeroy et Boch et enfin rachetée en 1979 par le groupe Lunéville – St. Clément. Malheureusement toutes les archives ont été détruites par les bombardements.

Voici les boîtes que j’ai retrouvées :

  • Faïence blanche à forme arrondie et modelée à décor de feuillage vert

  • Une boîte de nécessaire de poupée en faïence blanche rectangulaire de L12 x l 6 x H 5 décorée d’animaux en train de jouer.

Ces deux exemplaires portent la marque de Sarreguemines Utzscheinder et Cie. utilisée entre 1871 et 1920

Dans le sud de la France il existe également une production de faïence pour nécessaire de toilette qui comporte des boîtes de brosses à dents telles que celles de :

Marseille

Fabrique de Geneviève Etienne située du 15 au 21 rue Ferrari en faïence blanche à filets d’or bordée de violet en haut du corps de la boîte et sur le couvercle dont la prise est assurée par un gland à feuillage à filets d’or. 19 x 08 x 04,5

Toulouse

C’est en 1676 que Guillaume Olivier et Ch. Favier installent une faïencerie à Toulouse.

Boîte arrondie à fond blanc dont le couvercle de feuillage bleu à filets dorés, de marguerites marron et d’oiseaux bleus. Le corps est bleu foncé parsemé de feuillage vert à fleurs marron. Marque « Valentine » 1820

Bordeaux

En 1843, David Johnston, maire de Bordeaux, reprit 77 quai de Bacalan, une fabrication de porcelaine tendre phosphatique d’après les procédés de St. Amand. Il employa jusqu’à 80 ouvriers

La fabrique passa en 1845 à J. Vaillard qui reprit la manufacture et fabriqua de la porcelaine dure. Une marque de A. Veillard obtint une médaille d’or.

Marque E. Vieillard et Cie. Boîte à couvercle à forme arrondie et galbée sur fond blanc et dessin bleu représentant des dragons. L’impression n’est pas nette, le bleu étant un peu délayé. On peut supposer Bordeaux étant un lieu d’arrivée de la Malle des Indes, qu’il a voulu copier les impressions chinoises.

Bordeaux, 1845, E. Vieillard

Marseille, Gen. Etienne

Toulouse, 1820, Valentine

Sarre : Villeroy et Boch

Bien que sur le territoire allemand, l’origine de cette fabrique est française lorraine et sarroise en même temps.

Pierre-Joseph Boch Fondateur des manufactures d’Audun-le-Tiche et de Septfontaines

Nicolas Villeroy Fondateur de la faïencerie de Vaudrevange

François Boch se lança, avec ses trois fils, dans la fabrication de pièces de vaisselle en céramique en 1748 dans un petit village lorrain d’Audun-le-Tiche. En 1765 à la mort de Stanislas Leczinski, la Lorraine fut rattachée à la France et les potiers lorrains entrèrent en concurrence avec les potiers français. Ce qui peut expliquer leur installation en 1766 à Septfontaines au Luxembourg qui appartenait alors à l’Autriche.

Après la Révolution française, c’est Pierre-Joseph Boch qui entreprit de rebâtir cette usine se trouvant dans un état désolant pour la vendre à la fin à Villeroy en 1882 . Son fils Jean-François acquit l’abbaye bénédictine sécularisée de Mettlach en 1809, qui appartenait à Boch-Buchmann , et y installa la fabrique de céramique actuelle.

Une fabrique fut fondée en 1790 par le lorrain Nicolas Villeroy à Wallerfangen (Vaudrevange) sur les bords de la Sarre. alors qu’en 1785 Nicolas Villeroy crée une autre fabrique à Trauenberg sur la Blies. Pour des raisons économiques l’usine Villeroy et celle de Boch fusionnèrent en 1836 en prenant le centre de Mettlach qui en devint l’usine principale. Celle-ci est depuis restée une entreprise familiale. Le développement par la diversification des fabrications et la multiplication des points de vente est l’œuvre d’Eugen von Boch.

Les boîtes de brosses à dents en faïences fines datent de 1875 et leur fabrication cessa vers 1940 environ. Pendant la deuxième guerre mondiale les ouvriers furent payés moitié en salaire et l’autre moitié en nécessaires de toilette qu’ils échangeaient pour de la nourriture avec les agriculteurs de la région.

Une boîte de brosses ou de peignes (peut-être à dents) se trouve dans le service de toilette de Louis II de Bavière. Décor polychrome et or de petit feu. Il existe en deux exemplaires, une copie au musée et l’original à Neuschwanstein. L’opulence des couleurs et la qualité de l’or veulent rappeler la splendeur des émaux cloisonnés et certains objets liturgiques. Cet ensemble a été exécuté par l’artiste allemand Julius Hofmann.

Une autre boîte dans le service de toilette présumé appartenir à Prosper-Louis, Duc d’Aremberg né à Bruxelles (1785-1861) qui servit dans l’armée française et habitait dans son palais à Bruxelles. On trouve trace également d’un prince d’Aremberg dans le centre de la France, dans le Berry, à l’est de Bourges, à Mennetou-Salon. Cette boîte est en porcelaine blanche, bordée de rouge aux armes du duc.

Dans le cadre des boîtes de brosses à dents on distingue 25 formes différentes ayant 5 décors en 3 couleurs et portant chacune un nom personnalisé : Arta, Amy, Bosna, Donau, Spree, Erft, on trouve également des services de toilette pour nécessaire de poupées.

1900/1910, décor chromolithographique

1890/1915, décor peint à la main

1890/1910, décor Agnès

Manufacture royale de Meissen, Manufacture D’Etat en 1831

C’est l’alchimiste J.F Böttger aidé du savant E.W. Tschwirnhausen qui découvre en 1709 le secret de la porcelaine dure des chinois et fonde en 1710 la manufacture.

Le Duc de Saxe et Roi de Pologne Auguste Le Fort leur apporte une protection, des privilèges, un soutien précieux sur le plan financier et le monopole de production.

Avec les connaissances de l’orfèvre Irminger, il met au point une première palette de couleur et à la mort de Böttler, c’est l’émailleur J.G. Höroldt qui complète la palette avec le fameux bleu des « chinoiseries ».

La manufacture se spécialise dans la fabrication des récipients et dans les procédés de décalcomanie pour la décoration mais ne remplacera jamais le travail de peinture à la main. La fabrication des couleurs et les procédés de cuisson ont été mis au point par Kühn (1788-1870) alors directeur de la Manufacture.

Il existe un coupe ovale pour brosses à dents d’un auteur inconnu. Ce modèle a été conçu en 1848/49 et cette coupe date de 1860. Ses dimensions sont de 3,0 x 25,5 x 8,5 avec pour décor un « dragon en corail rouge » orné d’or poli, le rouge étant obtenu du cuivre.

House Tone, 1840

Boîte de cristal à couvercle en argent percé (fin 19e)

ANGLETERRE

L’Angleterre a également une production de ces boîtes :

en faïence à fond blanc et à décor représentant un village bleu et décorées également à l’intérieur du même village. La marque fine bleue présente un cadre couronné et porté par deux lions et avec l’inscription « Houston ».

Il existe une copie moderne de cette boîte fabriquée en Chine, de fond blanc et comportant également un village identique au premier uniquement sur le corps de la boîte alors que le couvercle est dessiné de motifs bleus. La marque fait la différence car elle est peu lisible et différente de l’autre Une autre est à fond blanc à filet rouge décorée de glands verts et fleurs rouges sur le couvercle. La caractéristique de cette dernière est de présenter des trous de forme rectangulaire sur chaque coté et en bas du corps de la boîte et non pas sur le couvercle. Fin du XIXème.

Pour citer une exception, j’ai trouvé deux boîtes, l’une à Londres et l’autre à Paris, toutes deux en cristal travaillé avec un couvercle en argent dont l’un est perforé pour le séchage de la brosse. Les couvercles sont armoriés et celui qui est perforé porte une couronne ducale avec les anagrammes de la famille, datant de 1851 environ.

BELGIQUE

MANUFACTURE IMPERIALE ET ROYALE BELGE

Elle est située à Nimy en Belgique (Petite localité près de Mons, province du Hainaut)

Fondée le 5 Mars 1789 par Dieudonné-Joseph Antoine natif de Namur et par la Famille Bousies, puis exploitée à partir de 1845 par Declerq et revendue en 1849 à Maizin, Lecat et Cie. pour être reprise vers 1921 par la Société Céramique de Maestricht. Fin de la production en1951.

Pendant la longue période de son existence Nimy a produit des faïences d’une qualité très hétérogène. Et tout le monde connaît les cruches et bassins de la marque Nimy. Ce sont des produits de masse. Mais à coté de ceux-ci, Nimy a réalisé des pièces qui font penser à celles d’Andenne, peintes à la main dans le style des « faïences de l’Est »

On voit souvent des pièces sobrement décorées de petits motifs floraux , empruntés à la porcelaine de Chantilly.

On rencontre d’ailleurs ces décors dans beaucoup de centres belges. (On y cite aussi la Terre de Fer) comme celle que je vous présente.

(Sources Marleen De Vliegher)

Marque de 1898-1921