François DEVARS
Musée dentaire de Lyon

Nombreux et variés sont le outils qui servent à extraire les dents.

On peut remarquer, chez eux, une forme générale qui correspond à la technique utilisée et de multiples modifications qui sont propres à un cas particulier ou au désir précis d’un praticien.

Chacun ayant toutefois ses habitudes, n’en utilise qu’un nombre assez limité.

Il est possible de les classer en trois principales familles.

1. Les instruments simples ou fixes   

Déchaussoirs, élévateurs, pieds de biche, langue de carpe et poussoirs divers. La force s’exerce avec une main en utilisant un appui sur l’index de l’autre.

Poussoirs

Pieds de biche

Langues de carpe (manche droit)

Langues de carpe (manche en T)

2. Les instruments possédant une articulation

Ce sont tous les leviers qui se distinguent par le mouvement de l’opérateur.

Le pélican

Il est formé d’un manche, en os, bois ou métal, d’un crochet et d’un appui opposé au manche. L’appui se fait en avant de la dent du côté opposé de l’arcade, perpendiculairement au crochet. Le praticien effectue un mouvement horizontal, d’arrière en avant et la dent doit quitter son logement ; avec parfois certains dégâts. Le premier modèle a été décrit par Giovanni d’Arcole dans Pratica Medeca en 1542. Il peut être simple, double et réglable.

Figure : Instrument pour les dents, Journal de Médecine, 1759, p. 59.

Pélican double fixe

Pélican réglable

Les leviers

Ils utilisent un principe analogue : avec la différence que l’appui se fait au niveau de la dent à extraire ou de sa gencive. Le mouvement de l’opérateur est cette fois vertical.

leviers avec appui dentaire

leviers avec appui gingival

instrument de May Flower

instrument de Jourdain

tiretoire du Tonnelier

Leviers et pélicans sont souvent confondus ; sauf chez les auteurs de langue allemande.

Jourdain, en 1759, décrit un instrument de sa conception, utilisable à la fois comme levier et pélican.

Il est d’usage de dire que ces instruments sont une miniaturisation du Tiretoire du tonnelier.

Les clés

Elles se composent d’un manche, généralement en T, d’une tige, se terminant par un appui, le paneton (qui peut être articulé), opposé à un crochet que l’on peut changer et inverser.

L’appui se fait, en principe, au niveau de la dent à extraire.

Un mouvement de rotation, de couple, reprenant celui de la clé dans la serrure, permet d’extraire le dit organe.

Clé de Fothergill

Fothergill (portrait)

Il peut être possible de modifier la position du paneton et du crochet (modèles de Ritouret et de Linderer).

Les daviers

Pinces ou forceps, sont connus depuis fort longtemps (Grecs et Romains).

D’abord rustiques, ils deviennent performants après les travaux en Grande-Bretagne de Tomes et d’Evrard, un coutelier français émigré.

Davier ancien

Davier d’Evrard

L’avantage du davier est de permettre des luxations sur des axes différents.

Il est d’usage de distinguer selon la forme de l’articulation, les formes GB et USA.

Il est toutefois utile de mentionner un instrument particulier, œuvre d’un médecin militaire de Mont-de-Marsan, qui apparaît vers 1860, et qu’il nomme « Attractif ».

Le principe était de faire glisser la dent sur un plan incliné. Le premier modèle nécessitait l’usage des deux mains ; le second, chef d’œuvre d’ajustage, n’a pas eu de succès, étant plus onéreux que performant.

Instrument d’Eugène d’Estanque

Revenons à la clé dite de Garengeot, car aucun de ses ouvrages ne permet de lui en attribuer la paternité.

On reprochait à la clé le fait d’être obligé de mettre le doigt dans la bouche pour maintenir le crochet plaqué sur la dent.

En 1855, le sieur Jean Ferrand Vernier dépose un brevet pour un instrument qu’il nomme  » Clé Davier « .

Il s’agit d’une clé de forme classique, avec un manche en T, sur laquelle est adjoint parallèlement à la tige un levier articulé qui par un astucieux système de cames permet de serrer la dent entre le crochet et le paneton.

Nous possédons à Lyon un exemplaire où figure le nom de Ferrand.

Il existe d’autres clés daviers, ouvrages de différents fabricants.

FV et Schmith (CH)

Métal Schmith

Lafay à Lyon

? Lafay

?  » Luxe

Il y en a encore d’autres : Favre Vitry, etc.

À la suite de ces différents modèles, j’ai cherché à savoir à qui appartenait réellement l’invention. L’Institut National de la Propriété Industrielle, contacté, n’a pas pu retrouver d’autres pièces complémentaires.

La durée est également imprécise à cette époque ; elle serait de 10 ans (15 au plus). Le brevet ne couvrait que la France.

À cette époque, les dépôts étaient bien moins nombreux et ne devaient pas être protégés avec la même rigueur.

On peut donc penser que ces autres modèles étaient, soit des copies illégales, soit des copies en accord avec le propriétaire, sans que cela figure sur la pièce, soit que le brevet était tombé dans le domaine public ; il n’y a pas de catalogues à cette époque, soit non couvertes car fabriquées à l’étranger, comme la pièce de Schmidt, à Genève.

Nous possédons également dans notre collection un instrument ayant la même fonction et le même système de serrage que celui de Ferrand Vernier.

Il se présente toutefois différemment car les deux manches sont semblables comme pour une pince ou un davier.

FV et Crespin

Clé de Crespin

Détail

En démontant le mécanisme, on trouve gravé sur les pièces les lettres FV, montrant bien qu’il s’agit de la protection du même brevet. Cette magnifique pièce est signée par Crespin, fabricant d’instruments de chirurgie à Lyon, 16 rue de la Barre, ex-ouvrier de la maison Charrière. Son signe est le C couronné.

Signe de Crespin

 

Cet instrument est proche du davier bien qu’il conserve le principe de la clé. Si notre langue le permettait pour des objets, on pourrait parler de  » Mutant « . il est évident que par ce système il était possible de faire des luxations avec une amplitude, certes assez réduite.

On peut dire que ce nom de Clé Davier donné par son créateur était juste et évocateur ; il a parfois été question de Clé à Bascule.