< L. latine 3.
> À François Citois, le 7 juin 1639 |
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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. –
À François Citois, le 7 juin 1639
Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=1036 (Consulté le 04/10/2024) | ||||||||||||
[Ms BIU Santé no 2007, fo 19 vo | LAT | IMG] Copie d’une lettre que M. G. a envoyée à M. Citois en 1639. Très distingué Monsieur, [a][1] Ex una et eadem fidelia, soit dit sans vous offenser, duos parietes dealbabo, [1][2] car alors que je m’apprêtais à vous remercier pour l’insigne service que m’a valu la rare bienveillance de votre fils à mon égard, voilà qu’en me gratifiant d’une nouvelle magnificence, vous me comblez et me défiez presque en m’offrant un livre. C’est ce beau et savant ouvrage que vos veilles ont élaboré et que vous avez véritablement ressuscité, tout récemment enrichi de vos soins renouvelés et d’additions dont on ne peut se plaindre, et que notre collègue, le très savant Moreau, m’a fait parvenir. [2][3] D’abord, j’évoquerai le service pour lequel votre fils s’attire toutes mes bonnes grâces ; je vous en remercie de tout cœur, avec cette promesse et ce vœu que, pour ne jamais oublier ce qu’il a fait, je suis disposé à lui rendre la pareille, tant que j’en aurai le pouvoir, chaque fois que l’occasion s’en présentera. [3] Ensuite, mon cher Citois, je n’enfouirai pas votre présent sous un silence ingrat ; bien au contraire, je le vanterai hautement et sans réserve. J’entends votre livre, que je puis très sincèrement qualifier de gemme et de trésor. Comme je m’étais contenté de l’ouvrir pour m’en faire une idée, voulant seulement m’en délecter quand j’en aurais le temps, il s’avéra si agréable qu’il m’inspira le désir d’aller plus loin (Sénèque, lettre 46), [4][4] en dépit d’une imminente poussée de fièvre. [5] Ce qui vous dira à quel point il m’a plu, c’est qu’il m’a semblé court, bien qu’il ne soit de circonstance ni pour moi (à cause de ma maladie), ni pour vous (à cause de tout le soin dont vous entourez l’éminentissime duc) ; [6] mais pour ce qu’on peut y discerner d’Hippocrate ou de Galien au premier coup d’œil, [7][8] votre livre m’a tant enchanté et tenu si occupé que je l’ai lu tout en entier avec avidité, et presque d’une seule traite. La nuit tombante m’invitait au sommeil, la maladie se rappelait à moi, la douleur menaçait ; et pourtant, je l’ai entièrement dévoré, non seulement pour charmer mon esprit languissant, mais aussi pour le revigorer. L’épître dédicatoire à notre incomparable héros pourpré m’a inondé d’une joie vraiment indicible : tout y exhale les talents de l’éloquence de Cicéron et rappelle son admirable génie. [5][9] J’ai aussi lu avec grand plaisir et grand profit votre dissertation, qui est belle et déborde de la plus pure doctrine, De tempestivo phlebotomiæ ac purgatione usu, contre ces fâcheux hématophobes ; [6][10][11] je pense qu’il n’existe rien de plus pur et de plus achevé chez les plus distingués auteurs de notre métier. Vous avez choisi de fouiller cette matière avec autant de compétence que de bonheur : puisqu’elle est féconde, puisse-t-elle, par sa pénétration, réveiller sur-le-champ les esprits qu’une certaine léthargie perfide de notre siècle a engourdis et assoupis, et les ramener dans le droit chemin ; en particulier l’esprit de ceux qui, parce qu’ils ne perçoivent pas les divins pouvoirs de la saignée, demeurant aveugles face à ce soleil, méritent d’être appelés bourreaux du genre humain plutôt que médecins. Je n’en dirai pas plus. Vale, très distingué Monsieur, et comme vous avez fait jusqu’à présent pour la France, qui vous est tout entière reconnaissante, et finalement pour l’immense bien de nous tous, [Ms BIU Santé no 2007, fo 19 ro | LAT | IMG] mettez toutes les ressources de votre génie à protéger l’auguste chef : j’invoque ici notre divin Armand, dont la bonne santé conditionne le salut et la conservation non seulement de la France ou même de l’Europe, mais aussi de toute la chrétienté. [7] Et derechef, vale, très éminent Monsieur, au service de qui je vivrai entièrement dévoué et enchaîné pour l’éternité par la loi des féaux et des vassaux. G. Paris, le 7e de juin 1639. | |||||||||||||
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Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr | |||||||||||||
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