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Consultations et mémorandums (ms BIU Santé  2007) : 1  >

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits. Consultations et mémorandums (ms BIU Santé 2007) : 1

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=8131

(Consulté le 19/03/2024)

 

[Ms BIU Santé no 2007, fo 235 ro | LAT | IMG]

Rhumatisme fébrile chez une femme jeune
[consultation non datée] [a][1][2]

Cette noble jeune fille est donc clouée au lit par un rhumatisme. J’appelle rhumatisme un déluge d’humeur séreuse dans n’importe quelle partie du corps. De même, en effet, que les fleuves ne sont pas capables de demeurer dans leur lit après les grosses pluies, mais inondent les champs avoisinants, de même, quand cette humeur séreuse trop abondante s’est échauffée dans les veines, elle ne peut être contenue dans leur réservoir, mais se rue dans les parties voisines et s’y répand. Voilà d’où est venue la douleur qui a obstinément résisté aux remèdes, même prescrits avec sagacité. La cause de cette obstination est cette humeur séreuse dont la pesanteur vient de la très chaude intempérie des viscères nutritifs, laquelle engendre la sérosité plus copieusement encore et bouillonne dans les veines. Voilà d’où est venue cette fièvre légère qui s’accentue à l’approche de la nuit ; [3] elle rend aussi ladite sérosité plus âcre et plus abondante, et ces deux qualités la poussent hors des veines. Voilà pourquoi, tant pour tempérer la chaleur des viscères que pour chasser la sérosité ainsi engendrée, je ne connais pas d’autres remèdes, et crois qu’il n’en existe pas d’autres, que ceux qui ont été prescrits, à savoir : appliquer des épithèmes d’oxycrat dans la région du foie et les renouveler ensuite ; [1][4][5] mais aussi injecter de fréquents lavements composés d’orge, de son, de chicorée blanche, qui modèrent ce feu. [2][6][7][8][9][10] Il sera en outre nécessaire de recourir à un secours particulier : pour évacuer une partie de cette humeur séreuse, il faudra saigner de manière répétée, du bras, du pied, peu m’importe. [11] Ces procédés ayant modéré l’ardeur, il faudra évacuer le débordement qui attise la maladie, en purgeant [12] doucement à l’aide de sirop de roses pâles et de fleurs de pêcher, [13][14] préparé avec séné et casse. [15][16] Quant à la douleur de tête, il est à espérer qu’elle cessera quand la chaleur des viscères se sera calmée : le fait est que, par ce feu, des vapeurs âcres attaquent les méninges et les distendent ; cette douleur s’évanouira donc quand elles auront été jugulées. Vous ne devez pourtant pas vous étonner si la maladie dure alors plus longtemps, car c’est cette humeur qui entretient le mal en état de crudité : [17] si la nature seule ne veut en venir entièrement à bout, il faut alors espérer cela de l’art, que ce soit ou non facile ; si, toutefois, la malade se plie aux remèdes que vous avez prescrits, j’espère qu’elle sera bientôt délivrée par la singulière faveur de Dieu, comme je le souhaite de tous mes vœux.

Le sang a en effet une très grande parenté avec le lait : de même que dans l’ardeur de l’été, la chaleur transforme le lait en petit-lait, [18] de même l’incendie de la fièvre assèche le sang.

[Ms BIU Santé no 2007, fo 235 vo | LAT | IMG]

La malade guérira, très distingué Monsieur, si elle se soumet à vos conseils et permet qu’on lui administre les remèdes que nous recommandons ; et enfin, elle sera libérée de la maladie et des symptômes qui l’ont jusqu’ici tourmentée. Il s’agit d’une fièvre continue, [19] à laquelle s’ajoutent une douleur colique et un écoulement rouge foncé par l’utérus. La guérison de tout cela sera plus aisée car la bile en est la cause unique : [20] étant très âcre, elle a engendré la fièvre en provoquant la putréfaction ; se répandant dans les membranes qui recouvrent les viscères nutritifs, elle les irrite, d’où vient la douleur ; et une fois chassée de toutes les parties, cette même bile se retire par la matrice. L’intempérie bouillante des viscères échauffe la bile, de sorte que la malade ne guérira pas tant que l’ardeur n’aura pas été tempérée et que le débordement bilieux n’aura pas été expulsé. Pour ce faire, on tirera du sang des deux bras comme des deux pieds, et ensuite on purgera avec fol. Oriental. et med. siliq. Ægypt. mêlés en décoction ; [3] cela accompli, elle se plongera dans le demi-bain, [21] où elle restera pendant deux heures. Enfin, l’emploi du lait d’ânesse sera très utile. [22] Si on ajoute à tout cela un excellent régime alimentaire, [23] réfrigérant et humidifiant, j’espère qu’elle retrouvera sa santé d’avant.

De même que, dans un duel, celui qui laisserait entrer en lice les témoins de son adversaire lui concéderait indubitablement la supériorité et la victoire, de même, dans les combats de la chaleur innée, [24] contre la maladie, celui qui attaque la résistance de la nature avec des narcotiques, [25] semblera la ligoter, l’empêchant alors de ne rien pouvoir accomplir, permettant donc ainsi à la maladie de prendre le dessus ; ce genre de médicament anéantit presque la nature, de sorte qu’elle ne puisse plus rien opposer aux causes de la maladie. Il y a lieu d’en tirer une conjecture plus certaine : bien que, par la somnolence, la maladie semble avoir accordé un répit, et qu’induire un très agréable repos soit à tenir pour un don des dieux, par la puissance non contenue du remède pernicieux, les malades se sentent beaucoup moins bien d’avoir été plongés dans un profond sommeil ; et étant donné qu’insensiblement la maladie a cédé aux narcotiques, la vigueur de la chaleur innée se trouve épuisée jusqu’à être réduite à néant. [4]

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Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr
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