À Charles Spon, le 6 novembre 1657, note 15.
Note [15]

Jean Labadie (Bourg-en-Guyenne 1610, Altona, Danemark 1674) eut une des vies religieuses les plus tourmentées de son siècle. Novice de la Compagnie de Jésus en 1625, il s’y était d’abord fait remarquer par sa grande piété, et ses talents de théologien et de prédicateur, mais son mysticisme le rendit suspect et le général des jésuites lui fit donner son congé en 1639.

Monté de Bordeaux à Paris, le jeune prêtre s’était rapproché des oratoriens et de l’évêque d’Amiens, François Le Fèvre de Caumartin (v. note [8], lettre 298), qui le laissa exprimer toute son exaltation sur les chaires de son diocèse.

Au début des années 1640, Labadie s’était rapproché de Port-Royal pour devenir bientôt l’un des plus zélés défenseurs des thèses jansénistes. Critiqué pour l’ardeur de ses prédications et victime de calomnies sur sa vie privée, il tomba sous le coup de lettres de cachets et dut se retirer dans le diocèse de Bazas en Aquitaine, pour entrer chez les carmes en janvier 1650. Les dénonciations et les poursuites ayant très vite repris contre lui, Labadie avait abjuré le catholicisme pour le calvinisme en octobre 1650. Cette apostasie a, entre autres, servi d’argument aux jésuites pour accuser les religieuses de Port-Royal « d’être plus proches de Charenton [v. note [18], lettre 146] et de Genève que de Rome et de Notre-Dame de Paris ».

En 1652, Labadie avait pris des fonctions de pasteur et recteur d’académie protestante à Montauban, mais sans se mettre à l’abri des poursuites des jésuites et de la Compagnie du Saint-Sacrement (v. note [7], lettre 640). Obligé de quitter la ville en octobre 1657, il se rendit à Orange, alors terre étrangère, pour y devenir pasteur jusqu’en 1659. Toujours suspect, toujours dérangeant, mais subjuguant son auditoire avec toujours plus de talent et de conviction, Labadie erra de place en place le reste de son existence : Genève de 1659 à 1666, puis Utrecht (où il devint intime d’Anna Maria van Schurman, v. note [74], lettre 150), Middelburg, etc., puis enfin Altona.

Il est resté de lui plusieurs ouvrages de théologie et de polémique religieuse, et quelques adeptes, les labadistes, dont une partie chercha sans succès durable à s’implanter sur la côte Est des États-Unis (Dictionnaire de Port-Royal, pages 553‑555).

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 6 novembre 1657, note 15.

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(Consulté le 28/03/2024)

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