À André Falconet, le 28 mai 1666, note 3.
Note [3]

Factum pour Maître François Blondel, {a} Docteur régent de la Faculté de médecine en l’Université de Paris et ancien doyen d’icelle, contre l’auteur du libelle intitulé : La Défense de la Faculté de médecine de Paris, contre Maître François Blondel, {b} docteur régent en ladite Faculté. {c}


  1. Farouche meneur des derniers opposants à l’antimoine, v. note [11], lettre 342.

  2. Par Jacques Thévart (dit le Camus), parue en 1666, v. 2e notule {a}, note [5], lettre 873.

  3. Sans lieu, ni nom, ni date, in‑4o de 68 pages, soit 8 feuilles et demie.

Ce Factum est une longue diatribe qui reprend par le menu chaque point de la dispute entre Blondel et ses collègues de la Faculté (Thévart, François Le Vignon, les antimoniaux). Elle s’achève sur ces phrases très dures :

« Il était enfin bien raisonnable que cette même prétendue Faculté, qui avait à la sourdine introduit l’antimoine, en donnât aussi l’approbation de même sorte par un exemple tout nouveau. Cette Faculté, couvée sous la perruque du sieur Le Vignon, qui d’une même portée a mis au jour ces quatre suppôts qui la composent, docteurs en licence, {a} tous apostés pour servir de faux témoins, éclos de la bassière {b} et de la lie du vin émétique, qui bouillait il y a 14 ans, a besoin de cette souveraine et salutaire ordonnance, de s’aller rafraîchir et de prendre médecine. Que si d’ailleurs ce doyen a de nouveaux droits d’attribution à sa charge pour donner approbation et permission d’imprimer ce libelle, {c} on le renvoie à M. le procureur général. Les mieux sensés et les plus judicieux n’auront pour ce sujet aucun égard à toutes les impostures, calomnies et faussetés dont il est farci ; et pour toutes ses vacations et écritures, son chétif avocat sera payé d’un mépris. »


  1. C’est-à-dire « docteurs en débauche » : Thévart, Le Vignon et deux autres qu’il est difficile d’identifier avec certitude dans la logorrhée haineuse qui précède.

  2. « Vin au bas, qui est près de la lie » (Furetière).

  3. La première Défense de Thévart.

Le moins qu’on puisse en dire est que c’est l’œuvre d’un esprit égaré par la rage et le dépit, pour ne pas dire d’un paranoïaque en franc délire. Son livre inédit contre l’antimoine (v. infra note [4]) apporte une preuve complémentaire de ce lourd diagnostic.

Une cause de la fureur de Blondel avait été une attaque de Thévart sur le collage de deux feuillets dans les Comment. F.M.P. (v. note [10], lettre 328). On la lit, non datée (sans doute 1666), dans un Extrait des registres du Parlement [BnF, cote Z Thoizy-326 (TER), fo 128] :

« Copie de l’opposition supprimée dans les registres de l’École, qui sont comme des dépôts sacrés, dans lesquels ont été collés deux feuillets ensemble, laquelle < opposition > ne tend qu’au bien public et à entretenir la discipline de l’École par la recherche de la vérité, et < à > maintenir les statuts et décrets d’icelle, autorisés par les arrêts de la Cour, et de plus, par les expériences journalières des médecins sur le sujet de l’émétique, composé d’antimoine, auxquelles on peut ajouter celles de Leurs Majestés, qui en ont pris dans leurs plus grandes maladies avec un très heureux succès ; et néanmoins, ledit sieur Blondel, docteur régent en ladite Faculté de médecine, dans le procès qu’il a intenté audit sieur Thévart, aussi docteur régent en ladite Faculté et professeur en médecine, pour empêcher que ladite opposition ne soit remise dans lesdits registres, a dit : Que si le décret de la Faculté, qui fait mention de l’opposition dudit sieur Thévart, n’a pas voulu, conformément au premier de 1566, condamner le vin émétique de poison, ç’a été pour ne point aigrir tous les esprits amoureux de cette nouvelle drogue, et poison privilégié ; et que ledit Thévart se devait souvenir que cette Faculté est limitée à la bonne doctrine, et non à semer des hérésies et nouveautés à son vouloir. Enfin, bien loin que ledit décret auquel il est opposant se détruise, qu’il ne fait que permettre l’usage de l’émétique, y étant contraint par le malheur des temps, et < par > l’empirique qui règne à présent et tient rang de la seule, ancienne et véritable médecine dogmatique.

Ledit sieur Blondel se fonde particulièrement sur un décret de la Faculté, suranné de 1656, qui condamne l’antimoine de poison, n’étant pas lors encore assez connu et dans la pratique ordinaire. Mais (il est à noter) que la même Faculté, dans sadite Défense faite par ledit sieur Moreau et imprimée aux frais d’icelle, par l’ordre de la Faculté, comme il se voit au volume xiii des dits registres, fo 152, {a} use de ces termes, pages 155 et 156, qui décident et jugent entièrement le différend des parties, et détruisent les injures et les calomnies que le sieur Blondel dit contre ses confrères : Il est vrai que nous avons autrefois condamné l’antimoine comme venin, et quelques autres médicaments chimiques comme violents. Il est vrai aussi qu’en les proposant, nous les approuvons dans notre livre. Ce n’est donc pas sans raison que nous l’avons condamné, de peur qu’étant mis à la discrétion des ignorants, comme une épée en la main d’un furieux, il n’en arrivât des effets sinistres et calamiteux, tels qu’on a autrefois observé. Nous l’approuvons maintenant en le mettant dans la main des médecins sages et prudents qui s’en sauront bien aider en temps et lieu, et selon la préparation que nous lui donnons. Posteriora derogant prioribus. {b} Après ces preuves si décisives et convaincantes, on peut dire que ledit sieur Blondel Amat ignorare quod alii gaudent cognovisse, Tertull. » {c}


  1. V. note [8], lettre 57, pour la Défense de René Moreau parue en 1641.

    Le renvoi aux Comment. F.M.P. (tome xiii, fo 152 vo) porte sur cette rubrique des dépenses de la Faculté en 1641‑1642 (seconde année du décanat de Guillaume Du Val) :

    Mo Renato Moreau Doctori Medico et Professori Regio pro Libello Apologetico eleganter et erudite a se edito, et typis mandato Gallice, pro Facultate Medicinæ Parisiensis adversus calomniatorem Theophrastum Renaudot Gazetæ Magistrum cuius libelli Gallice scripti titulus est La Defense de la Faculté de Medecine de Paris, contre son Calomniateur, dediée à Monseigneur l’Eminentissime cardinal Duc De Richelieu. A Paris m.dc.xli. Responde stulto iuxta stultitiam suam, ne sibi sapiens esse videatur. Proverb. 26. Pro Libello inquam, illo Apologetico distribui prædito Mo Renato Moreau Authori, septuaginta quinque Libellas juxta Decretum Facultatis latum die xvii. Maij 1641.

    [À Maître René Moreau, docteur en médecine et professeur royal, pour le libelle de défense qu’il a publié et imprimé en français, en faveur de la Faculté de médecine de Paris, contre son calomniateur, Théophraste Renaudot, directeur de la Gazette, et dont le titre français est La Défense de la Faculté de médecine de Paris, contre son calomniateur, dédiée à Monseigneur l’éminentissime cardinal-duc de Richelieu, à Paris, 1641, « Réponds au fou conformément à sa folie, de peur qu’il ne paraisse sage » (Proverbes, 26) ; pour ce libelle apologique, dis-je, j’ai versé à son auteur, le susdit Maître René Moreau, soixante-quinze livres, en application du décret de la Faculté prononcé le 17 mai 1641].

  2. « Les actes ultérieurs dérogent aux actes précédents », maxime de Droit définissant la dérogation.

  3. « Se plaît à ignorer ce que d’autres se réjouissent d’avoir découvert » : Amant ignorare, cum alii gaudeant cognovisse (Tertullien, Apologétique, chapitre i).

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À André Falconet, le 28 mai 1666, note 3.

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(Consulté le 13/12/2024)

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