V. note [11], lettre latine 75, pour les états généraux réunis à Blois par Henri iii, d’octobre 1588 à janvier 1589, marqués, en décembre, par le double assassinat du duc, puis de son frère, le cardinal de Guise.
Dans les Mélanges des Annales de Bourgogne, H. Drouot a publié un article fort bien documenté, intitulé Un sujet : la carrière d’Étienne Bernard (1934, tome vi, fascicule iv, pages 366‑371). J’y ai puisé ces renseignements sur ce Dijonnais injustement oublié et sur son fils Jean.
- Sur Étienne Bernard (mort en 1609, âgé de 57 ans) :
« avocat au parlement de Dijon, échevin et maire de cette ville, député du tiers état du bailliage de Dijon aux états généraux de 1588 et de 1593, conseiller et garde des sceaux au parlement en 1593-1595, négociateur < du duc > de Mayenne en 1593, en 1594, en 1595, sur les libelles et le procès qu’ils lui valurent après la soumission de Dijon à Henri iv, sur sa mission de Marseille en 1596, sur sa lieutenance générale du bailliage de Chalon-sur-Saône de 1596 à 1609, – et l’on voit cependant, à travers cette simple énumération de titres et de charges, se profiler une figure –, on n’a quasi rien écrit encore. »
- Sur son fils, Jean Bernard, qui succéda à son père dans la lieutenance générale de Chalon-sur-Saône, charge qu’il assura de 1609 à 1639, il existe un « recueil factice des propos et harangues tenus à l’entrée des rois et de Richelieu à Chalon ».
- En revanche, les références abondent sur Claude Bernard (Dijon 1588-Paris 1641), surnommé le Pauvre Prêtre, autre fils d’Étienne et le plus célèbre membre de sa famille : allié et émule de Vincent de Paul, {a} Claude a excellé dans les œuvres de charité et créé, en 1639, le séminaire dit des Trente-Trois (ou xxxiii), pour permettre aux plus pauvres d’accéder à la prêtrise ; cette institution demeura en activité jusqu’en 1792. Son ami, Jean-Pierre Camus, évêque de Belley, {b} lui a consacré l’un de ses très nombreux ouvrages : Éloge de piété, à la bénite mémoire de M. Claude Bernard, appelé le Pauvre Prêtre. {c} Il ne s’agit que d’une des hagiographies qui ont paru dans les années suivant la mort de Bernard. On y lit un long Éloge du père de notre défunt (pages 51‑68), Étienne, mais sans les anecdotes relatées par le Borboniana.
Les procès en béatification de Claude Bernard ont jusqu’ici échoué. Le commandeur Joseph-Jean de Broqua, « camérier secret de cape et d’épée de S.S. Pie x, membre et lauréat de plusieurs sociétés savantes, postulateur de la cause de Claude Bernard » a publié une vie du postulant, intitulée Claude Bernard dit le Pauvre Prêtre, {d} ornée du portrait de son héros.
Le débat sur le bénéfice abbatial de Soissons y est relaté dans le chapitre vi (pages 142‑148) : insistance de Richelieu et d’Anne d’Autriche, et lettre de refus définitif du prêtre, datée du 25 juillet 1637, au profond mécontentement de son frère Jean Bernard. L’abbaye bénédictine Saint-Crépin-le-Grand située dans les murs de la ville, aujourd’hui devenue le lycée Saint-Vincent-de-Paul, n’y est toutefois pas citée : « C’était probablement l’abbaye de Longpont, {e} de l’Ordre de Citeaux ». La lettre de renoncement du pieux homme figurait déjà dans La Vie de Claude Bernard, dit le Pauvre Prêtre. Faite et composée par son successeur Thomas Le Gauffre, prêtre, conseiller du roi et maître ordinaire en sa Chambre des comptes à Paris, {f} chapitre xxiii, Du mépris qu’il a fait des richesses et des honneurs, pages 223‑232, avec cette interrogation :
« Quelle apparence donc y aurait-il que je dépouillasse les uns pour revêtir les autres, et ôtasse le pain le pain de la bouche des pauvres de Soissons pour le donner à ceux de Paris ? »
- V. note [27], lettre 402.
- V. note [9], lettre 72.
- Paris, Gervais Alliot, 1641, in‑8o de 694 pages distribuées en 6 parties.
- Paris, P. Lethielleux, 1914, in‑8o de 270 pages.
- Située à 20 kilomètres au sud-ouest de Soissons (v. note [8], lettre 253).
- Paris, Claude Sonnius et Denis Béchet, 1642, in‑8o de 567 pages.
Tallemant des Réaux s’est fait l’avocat du diable dans sa courte historiette intitulée Le Père Bernard (tome ii, pages 68‑69) :
« Ce Père Bernard avait été autrefois fort débauché ; puis il s’était jeté dans la dévotion, faute de bien ; et son zèle et son emportement l’avaient canonisé parmi le peuple avant sa mort. Il prêchait dans les salles et sur l’escalier de la Charité ; {a} et une fois, il dit : “ Il faut finir car voilà l’heure qu’on va pendre un pauvre passement d’argént ”, et se mit à crier un demi-quart d’heure Passement d’argént. {b} À sa mort, on vendit trois ou quatre guenilles qu’il avait, au poids de l’or. Il avait laissé ses souliers à un pauvre homme ; les dames les lui mirent en pièces pour en avoir chacune un morceau, et lui donnèrent de quoi avoir des souliers tout le reste de sa vie. Pour faire le conte bon, on disait qu’une d’elles avait acheté son prépuce tout ce qu’on avait voulu. Quelque temps durant, on disait qu’il se faisait des miracles à son tombeau ; enfin cela se dissipa peu à peu. » {c}
- Hôpital parisien du faubourg Saint-Germain (v. note [4], lettre latine 71).
- « Il faut l’e ouvert » (note de Tallemant). Un passement est une dentelle (ici brodée en fil d’argent), qui a laissé A. Adam perplexe : « Les commentateurs avouent leur embarras et ne réussissent pas à comprendre comment on va pendre un pauvre passement d’argent, de quelque manière qu’on prononce le mot. »
Il est vrai que le changement de prononciation, d’argeint (è fermé ou bref) en argeant (é ou ê ouvert ou long) ne provoque aucun effet comique aujourd’hui perceptible, mais pousse simplement à croire que le prêcheur réclamait l’aumône à hauts cris. Littré (DLF) ne m’a guère secouru avec le proverbe qu’il explique : « “ C’est un pauvre prêtre, s’il n’a point d’argent caché ”, se dit d’un homme de peu d’industrie, de peu de capacité. »
La Curne de Sainte Palaye a donné à passement le sens oublié de « contrats ou actes passés par les notaires », mais cela n’explique guère mieux la raillerie de Tallemant des Réaux.
- Difficile de plaider la béatification du Pauvre Prêtre après un tel réquisitoire.
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