À Charles Spon, le 16 novembre 1655, note 8.
Note [8]

« que peut-il avoir de bon ? »

Guy Patin haïssait visiblement Charles de Saint-Germain, mais sans en donner la raison profonde. Il aurait sûrement explosé de rage s’il avait vécu assez longtemps pour voir aboutir le dessein de ce « peintre » bon à rien : en avril 1668, dans le prolongement de l’arrêt prononcé par le Conseil en 1648 pour mettre fin aux querelles entre les médecins de Paris et ceux des provinces, {a} il avait réuni les partisans de l’intégration et s’était fait nommer leur procureur syndic. En janvier 1669, il dressa un tableau de leur Compagnie où figuraient les noms de 48 docteurs en médecine provinciaux (dits étrangers) autorisés à exercer dans Paris : c’était l’acte fondateur de la Chambre royale des médecins des universités provinciales à laquelle appartenaient nombre de praticiens influents tels qu’Antoine Vallot, Antoine d’Aquin, Jean Pecquet ou André Esprit. {b} L’humiliation de la Faculté de médecine de Paris devint complète avec les Lettres patentes du roi, concernant l’établissement de la Chambre des médecins des universités provinciales de France, en confirmation des arrêts du Grand Conseil, avec attribution de juridiction au dit Grand Conseil. Vérifiées au Grand Conseil le dix-dept avril 1673, {c} qui commencent par cet exposé des motifs :

« Les rois nos prédécesseurs ayant établi plusieurs universités dans les principales villes de notre royaume, et leur ayant accordé plusieurs droits, privilèges et prérogatives, et entre autres, que tous les docteurs reçus en icelles pourraient exercer les fonctions de leur doctorat par toutes les villes de notre royaume, ces établissements auraient attiré {d} quantité d’étudiants dans lesdites universités pour y cultiver les sciences, et particulièrement la médecine ; où, après avoir obtenu les degrés dus à leurs mérites et capacités, ils se seraient répandus par toute l’Europe, et principalement dans notre bonne ville de Paris, où l’assistance et le concours continuel de toutes provinces et de toutes nations auraient attiré des docteurs en médecine de diverses universités, pour les traiter et gouverner dans leurs maladies ; {e} ce qui aurait été fort avantageux non seulement au public, mais encore particulièrement aux rois nos prédécesseurs, qui ont presque toujours choisi pour leurs premiers médecins des docteurs qui avaient été reçus en diverses universités du royaume, et qui s’étaient venus établir et exercer la médecine dans notre ville de Paris ; et comme nous avons aussi jugé à propos de faire pour la conservation de notre santé dans le choix que nous avons fait de défunts les sieurs Vautier et Vallot, et à présent du sieur D’Aquin, pour nos premiers médecins ; {f} et comme la rencontre des docteurs de diverses universités aurait produit plusieurs débats et démêlés pour le pas et le rang qu’ils doivent tenir dans leurs assemblées et consultations, et qu’outre ce, plusieurs ignorants sans aveu ni lettres de docteurs se seraient glissés sous le nom et titre de médecins étrangers, et auraient pratiqué et pratiqueraient encore tous les jours la médecine dans Paris au grand préjudice et désavantage du public, {g} notre grand Conseil aurait été obligé d’y pourvoir par plusieurs arrêts et bons règlements, et entre autres par celui du 10 mars 1648 rendu contradictoirement entre les doyen et docteurs de médecine de l’Université de Paris, et Antoine Madelain, docteur en médecine de l’Université de Montpellier, établi et pratiquant la médecine dans Paris, portant défenses respectives aux parties de se méfaire ni médire dans l’exercice de leur profession ; {a} et par celui du 14 mai 1669, aurait ordonné que la liste des médecins de Montpellier, Reims et autres universités résidant dans la ville et faubourgs de Paris serait enregistrée sur les registres du dit Grand Conseil, et que les dénommés dans ladite liste pourraient pratiquer et exercer la médecine dans notre bonne ville de Paris et partout ailleurs, et se trouver aux assemblées et consultations sans aucun trouble ; {h} et par un autre arrêt du 15 octobre 1672, aurait fait défenses à tous docteurs en médecine des dites universités et à toutes autres personnes de faire la médecine dans notre dite ville de Paris, qu’auparavant ils n’eussent fait apparoir {i} leurs lettres de docteur, soutenu une thèse sur la médecine dans la Chambre des docteurs des dites universités, afin que le public ne fût à l’avenir abusé ; et en outre, aurait ordonné plusieurs bons statuts et règlements, en conséquence desquels lesdits docteurs auraient arrêté entre eux et signé plusieurs autres réglements et statuts pour le bon gouvernement de leur chambre, qu’ils désireraient à jamais être gardés, observés et exécutés. »


  1. V. note [30] de L’ultime procès de Théophraste Renaudot contre la Faculté de médecine de Paris.

  2. P. Delaunay, pages 15, 306 et 383.

  3. Sans lieu ni nom, 1673, une feuille in‑4o.

  4. J’ai respecté les temps conditionnels de conjugaison, qui étaient habituels aux édits de justice.

  5. Sic pour « traiter et gouverner les habitants de Paris dans leurs maladies ».

  6. François Vautier, docteur de Montpellier, a été premier médecin de Louis xiv de 1646 à 1652, suivi par Antoine Vallot, docteur de Reims (de 1652 à 1671), puis Antoine D’Aquin, docteur de Montpellier (de 1671 à 1693). Jacques ii Cousinot (1636 à 1648) manque à la liste car il état docteur de Paris.

  7. Les Commentaires de la Faculté, Décrets et assemblées de 1650-1651 contiennent le décret que les docteurs en médecine de Paris ont adopté le 12 mai 1651 sur ce sujet.

  8. V. note [1], lettre 948.

  9. Connaître.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 16 novembre 1655, note 8.

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(Consulté le 24/04/2024)

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