À Sebastian Scheffer, le 24 mai 1665, note 86.
Note [86]

Page 415 (Paris, 1646), ligne 23, fin (§ 22) du chapitre sur la mandragore (v. supra note [85]), à propos de ses vertus somnifères, remplacer ex cortice coct. et contus. [avec l’écorce qu’on a cuite et écrasée] par ex cortice radicum cocto et contuso [avec l’écorce des racines qu’on a cuite et écrasée] (sans abréviation des deux participes passés) :

Utimur in eam rem oleo de Mandragora compos. Nicolai Alex. sola illita fronte, puls. etc. Qui narbus etiam indere volunt, debent illud temperare lacte muliebri, oleo ros. etc. Simplicius est, quod ad Mesuem, in quem vide Monachos. Ubi haberi possunt poma, ex illis fit : apud nos ex cortice [radicum] coct. [cocto] et contus. [contuso], et tandem calamento addito reliquis.

[Pour ce faire, nous recourons à l’huile composée de mandragore de Nicolas d’Alexandrie, appliquée seule au front, aux pouls, etc. {a} Ceux qui veulent en mettre dans les narines doivent l’atténuer avec du lait de femme, de l’huile de rose, etc. Ce que Mésué en dit est plus simple, voyez là-dessus les Moines. {b} Là où on peut s’en procurer, on la fait avec les fruits ; mais dans nos contrées, avec l’écorce (des racines) qu’on a cuite et écrasée, en ajoutant de l’herbe-aux-chats au résidu]. {c}


  1. Dans l’Antidotarium Nicolai [Antidotaire de Nicolas (Præpositus, ou d’Alexandrie), v. note [3], lettre 15], la description de L’Oleum mandragoratum [Huile mandragorée] (édition de Venise, 1471, fo 22 vo) commence par :

    < O;>leum mandragoratum quod facit ad nimios dolores capitis et freneticis male dormientibus fronti illinitum et naribus iniectum summe opitulatur : pulsibus brachiorum inunctum et plantis pedum illinitum quocunque modo vigiliis factis cum omni celeritate soporem reddit.

    [L’huile mandragorée, qui agit sur les violentes douleurs de la tête et chez les agités qui dorment mal, est extrêmement efficace quand elle est appliquée sur le front et dans les narines ; en onction sur les pouls [saignées ou plis] des bras ou sur les plantes des pieds, comme on voudra, elle rend le sommeil aux insomniaques].
  2. Dans ses Medicamentis officinalibus, Caspar Hofmann a plusieurs fois renvoyé aux commentaires des Monachi [Moines] sur Mésué. Ses références numérotées m’ont mené à l’édition intitulée : In Antidotarium Ioannis Filii Mesue cum declaratione simplicium medicinarum et solutione multorum dubiorum, ac difficilium terminorum… [Sur l’Antidotaire de Jean Mésué, le fils (v. supra note [12]), avec la description des médicaments simples et l’explication de nombreux termes douteux et difficiles…] (Venise, Bartholomæus de Zannetis, 1543, in‑8o), écrit par Venerandos Patres et Iesu Christi, servos Fratres Bartholomæum Urbevetanum, et Angelum Paleam Iuvenatiensem ordinis minorum observantiæ Romanæ [les vénérables pères et frères, serviteurs de Jésus-Christ, Bartholomæus d’Orvieto et Angelus Palea de Giovinazzo, de l’observance romaine des frères mineurs (franciscains)].

    La mandragore y est traitée dans le chapitre ccccxxvi de la douzième distinction, pages 313‑314 ; il plaide pour l’innocuité ordinaire de la plante crue, dont certains paysans se nourrissent tous les jours en abondance, et se conclut sur cet anathème :

    Demum omittimus scribere tot uaniloquia : quæ de radice mandragoræ, a multis dicuntur : et in libris quorumdam leguntur. Et quod habeat formam hominis s. masculus masculi : et fœmina fœminæ : etc. Multas nempe effodimus huiusmodi plantas : ac propriis extirpauimus manibus : sed nunquam audiuimus uocem : nec inuenimus habere formam humanam. Verum est, quod habent radices magnas, cum pluribus ramis : ex quibus aliquæ de facili possunt aptari in formam pueri, uel puellæ : ut aliqui impostores, et circumforani, hæc et alia, maliciosæ studioseque effingunt, ad illudendum ignaros homunculos, et simplices personas : ut extorqueant ab eis, quicquid pecuniæ habent. Et similiter faciunt ex Brioniæ radicibus : et consimilibus. Vhe illis. Sunt enim huiusmodi fraudes, furta manifesta : nec possunt absolui, qui talia agunt : nisi restituant : uel propriis dominis : si est possibile, ut cognoscant eos : uel tanquam de incertis : distribuant pauperibus : et ecclesiis : etc. Fugite ergo hos pestilentes. Immo effigandi sunt et ipsis : atque expellendi a ciuitatibus : uel puniendi tanquam fures, et latrones, atque malefici : qui non solum bona temporalia : sed æterna quoque simul auserunt : quia multas animas ducunt in perditionem : quoniam sine dubio, et sæpius, docent simplices plurimas superstitiones, et maleficia, adversus sanctum ecclesiæ catholicæ dogma.

    [Nous nous abstenons d’écrire ici toutes les inepties que maintes gens profèrent sur la racine de mandragore, et qu’on lit dans les livres de certains : que la plante mâle a la forme d’un homme ou d’un sexe viril, que la femelle a celle d’une femme, etc. {i} Nous avons déraciné quantité de ces plantes, en les déterrant de nos propres mains, mais jamais nous n’avons entendu qu’elles parlaient, ni vu qu’elles avaient forme humaine. La vérité est qu’elles ont de grandes racines avec de nombreuses excroissances, dont certaines peuvent facilement correspondre à la forme d’un garçonnet ou d’une fillette ; si bien que certains imposteurs et charlatans façonnent celles-ci ou celles-là, avec malice et application pour tromper les faibles hommes ignorants et les esprits simples, et leur extorquer tout l’argent qu’ils possèdent. Ils vont jusqu’à frelater pareillement des racines de brione ou de semblables plantes. {ii} Malheur à eux, car les fourberies de ce genre sont des vols manifestes ! On ne peut absoudre ceux qui agissent de la sorte, à moins qu’ils ne restituent leur argent soit, si possible, à leurs propriétaires, quand ils les connaissent, ou sinon, qu’ils le distribuent aux pauvres et aux églises, etc. Fuyez donc ces pestes ! Il faut même les éviter et les chasser des villes ; voire les punir comme voleurs, brigands et criminels qui ont attenté aux biens temporels, mais aussi éternels, parce qu’ils mènent bien des âmes à la perdition, et que, sans doute et très souvent, ils enseignent quantité de superstitions et de maléfices contre le saint dogme de l’Église catholique].

    1. V. supra notue {b}, note [85], pour un dessin de ces deux sortes de mandragore dans Matthiole.

    2. V. supra notule {g}, note [85].

    La trouvant plus simple, Jean de Renou a préféré la recette de Mésué à celle de Nicolas Præpositus pour préparer l’Oleum de pomis mandragoræ [Huile de fruits de mandragore]. On la lit à la page 672 de ses Œuvres pharmaceutiques (Lyon, 1626, v. note [37], lettre 104) :

    ℞ Succi pomorum mandragoræ maturorum, olei sesamini, vel communis an. partes æquales.

    Coque in diplomate ad succi evaporationem. Dein succi tantumdem adhuc superfunde, et coque, ut prius : idem ter fac et usui repone.

    [Prenez une quantité égale de jus de fruits de mandragore et d’huile de sésame ou d’huile ordinaire.

    Cuisez dans un vase à deux corps jusqu’à évaporation. Puis ajoutez encore la même quantité de jus et cuisez comme la première fois ; faites de même trois fois et préparez à l’emploi].

    Renou conclut son commentaire en disant :

    « Cette huile éteint et supprime toutes inflammations, {i} apaise toutes douleurs, stupéfie et assoupit le sens, soulage les frénétiques et ceux qui souffrent de grandes passions de tête ; et enduit sur la région des reins, tempère et corrige les ardeurs et inflammations que les malades y sentent bien souvent. »

    1. V. note [6], lettre latine 412.
  3. La cataire, autrement appelée calament ou herbe-aux-chats (nepeta cataria).

    Renou (ibid. supra) :

    « Toutefois, si on ne trouve pas assez de pommes de mandragore pour la confection de cette huile, je suis d’avis qu’on y ajoute le suc de ses racines, n’y ayant aucun substitut plus légitime et voisin que celui qui se prend d’une autre partie d’une même plante. »


La réédition de Francfort (1667, pages 330) a appliqué ces trois corrections.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Sebastian Scheffer, le 24 mai 1665, note 86.

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(Consulté le 24/04/2024)

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