L. 965.  >
À André Falconet,
le 8 septembre 1669

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À André Falconet, le 8 septembre 1669

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0965

(Consulté le 12/12/2024)

 

Monsieur, [a][1]

Un de nos médecins des plus étourdis conseilla à Philippe Chartier, [2] autre jeune fou, de prendre un remède purgatif [3] dans sa fièvre qui était accompagnée d’un flux dysentérique ; [4][5] et ensuite, il lui fit avaler du vin émétique [6][7] dont il mourut peu d’heures après : cito Stygias ebrius hausit aquas[1][8][9] Aujourd’hui sa charge [10] est au pillage. [2] Plusieurs la demandent, il y a cinq compétiteurs pour lesquels des plus grands de la cour s’emploient. On a donné avis au roi [11] que ce serait le plus court de la mettre à la dispute et la donner à celui qui y montrerait plus de mérite. Nous ne sommes pas encore assez sages pour prendre de ces règles-là. Mme la princesse de Conti [12] était ici près, à L’Isle-Adam, [3][13] à l’intention d’y passer le reste de l’été. Elle y est tombée malade et a été ramenée à Paris. Tout le monde plaint cette princesse qui est la fleur des dames de la cour en sagesse, en piété, en probité, et dont la Maison est réglée tout autrement mieux que toutes les autres. Elle est nièce du feu cardinal Mazarin, mais elle vaut mille fois mieux que lui. Cette princesse est une autre sainte Catherine de Sienne. [4][14] Il y en a qui disent qu’elle est sainte comme saint Charles Borromée, [15] qui fuit serio Christianus [5] bien qu’il fût neveu d’un méchant homme, savoir du pape Pie iv[16][17] lequel eut pour successeur Pie v, duquel fut fait ce distique : [18][19]

Papa Pius quintus moritur, res mira ! tot inter
Pontifices tantum quinque fuisse pios
[6]

On parle ici fort diversement du malheur arrivé à M. de Beaufort. [20] Quelques-uns disent que le roi en a eu grand regret et qu’il en a écrit en colère à M. de Navailles, [21] avec commandement de tout quitter et de venir de deçà incontinent. Le roi envoie à sa place M. le maréchal de Bellefonds [22] avec 4 000 hommes. [7][23] Je traite malade un de nos médecins, qui est M. Mentel, [24] âgé de 72 ans. Il est heureusement échappé d’une dangereuse et forte dysenterie, [25] et d’un dégoût étrange de toute sorte de liqueur ; [8] mais il y a bien de la peine à revenir, tant est vrai ce que Cicéron [26] a dit, senectus ipsa morbus est ; [9][27] mais l’auteur François [28] a encore dit autrement, L’an prochain, vieillesse sera maladie incurable à cause des années passées[10] M. Mentel est ravi d’être saigné [29] et porte bien ce remède, mais il hait fort toutes sortes de médicaments, et particulièrement tous les purgatifs. M. le Dauphin [30] est encore malade, il a eu quelques frissons et de mauvaises nuits ; si cela continue, on croit que le roi n’ira point à Chambord. [11][31] On dit que Mme de Vendôme, [32] mère de feu M. de Beaufort, vient de mourir ; elle était fille de M. le duc de Mercœur [33] qui mourut l’an 1602 à Nuremberg, [34] à son retour de Hongrie. [12] Je vous baise les mains et suis de toute mon âme votre, etc.

De Paris, ce 8e de septembre 1669.


Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr
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