« Voyez l’Elizabetha de G. Camdenus, à l’année 1567, pages 105. »
Hormis le numéro de la page (105 pour 110), cette référence renvoie au volume 1 des Annales rerum Anglicarum et Hibernicarum, regnante Elizabetha… [Annales des affaires anglaises et irlandaises sous le règne d’Élisabeth…] de William Camden (Guilielmus Camdenus), {a} au premier paragraphe de l’année 1567 (première partie, page 110) :
Darlius Rex Scotorum occiditur.
Verum priusquam delegati illi à Scotorum Regina advenerint, uno et altero mense post Scotiæ Principem baptisatum, Rex eius maritus altero et vicesimo ætatis anno, intempesta nocte, atroci et horrendo scelere, quod boni omnes sunt detestati, in lecto strangulatus est, et in hortum proiectus, ædibus pulvere sulphurei subrutis. Rumor illico late per Britanniam sparsus, crimen in Mortonium, Moravium, et confœderatos contulit ; illi imbelli sexui insultantes, in Reginam transtulerunt. Quid Georgius Buchananus hac de re cum in Historia, tum in libello, cui Detectio titulum fecit, prodidit, ex libris impressis nemo non novit.
Buchananus ab Ordinib. Scotiæ falsi damnatur.
Cum autem ille partium studio, et Moravii munificentia abreptus, ita scripserit, ut libri isti salsitatis damnati fuerint ab Ordinibus regni Scotiæ, quorum fidei plus tribuendum ; et ipse ingemiscens coram Rege, cui fuit pædagogus, subinde se reprehenderit (ut accepi) quod tam virulentum calamum in Reginam bene meritam strinxisset, moriensque optaverit ut tantisper superesset donec maculas, quas maledicentia falso asperserat, revocata veritate, vel sanguine elueret ; nisi (quod ipse dixit) hoc vanum esset, cum præ ætate delirare videretur. Liceat mihi (ut altera etiam pars audiatur) rem omnem tum ex aliorum scriptis quæ eo tempore prodierunt, sed in Moravii gratiam et Reginæ odium in Anglia suppressa, tum ex Legatorum atque fide dignissimorum literis, quantum intelligere possum, sine omni amoris aut odii fuco, paucis explicare.
[Darnley, roi d’Écosse est tué. {b}
Toutefois, deux mois après le baptême du prince d’Écosse, avant l’arrivée de ces députés de la reine d’Écosse, le roi son mari, en sa 21e année d’âge, au cours d’une funeste nuit, fut étranglé dans son lit : atroce et détestable meurtre qui a horrifié tous les honnêtes gens. Son corps fut ensuite jeté dans le jardin et on fit sauter sa maison avec une charge de poudre. {c} Sur-le-champ, par toute la Grande-Bretagne, se répandit une rumeur qui attribuait ce crime à Morton, Murray et ceux de leur parti ; mais eux, faisant insulte au sexe faible, en accusaient la reine. {d} Nul n’en a rien ignoré grâce aux livres que George Buchanan a publiés sur cette affaire : tant son Histoire que son pamphlet intitulé Detectio. {e}
Le Parlement d’Écosse condamne Buchanan pour mensonge. {b}
Poussé à cela par la grande libéralité de Murray, il a écrit ses livres avec une telle partialité que le Parlement du royaume d’Écosse les a condamnés pour impudence, verdict auquel ont doit accorder plus de crédit qu’à leur contenu. Par la suite (à ce qu’on m’a dit), se lamentant devant le roi, dont il avait été le précepteur, il se serait lui-même blâmé d’avoir dégainé une plume si virulente contre une reine qui avait bien mérité sa reconnaissance, souhaitant qu’avant de mourir il aurait rétabli la vérité sur les taches dont sa médisance l’avait trompeusement éclaboussée, ou que, sinon, il les laverait de son sang ; mais ce propos (comme l’a lui-même dit le roi Jacques) était dénué de sens, sauf à penser qu’il délirait avant l’âge. Qu’il me soit maintenant permis (pour faire entendre la partie adverse) d’expliquer toute l’affaire, dans la mesure où je puis la comprendre ; mais sans le moindre semblant d’amour ou de haine, en me fondant tant sur d’autres écrits de l’époque qui ont paru en Angleterre, après que s’y furent éteintes la faveur de Murray et la détestation de la reine, que sur les correspondances d’ambassadeurs parfaitement dignes de foi]. {g}
- Londres, 1615, v. note [18], lettre 642.
- Sous-titre imprimé dans la marge.
- V. note [32], lettre 554, pour Lord Darnley, Henry Stuart, cousin germain et second époux de Marie Stuart, reine d’Écosse, veuve de François ii, roi de France. Depuis son mariage (29 juillet 1565), Henry était roi consort d’Écosse ; il venait d’être assassiné (nuit du 9‑10 février 1567). Un prince héritier avait vu le jour à Édimbourg le 19 juin 1556 : prénommé James et baptisé catholique le 17 décembre suivant, il allait devenir roi d’Écosse (couronné dès le 29 juillet 1567), sous le nom de Jacques vi, puis roi de Grande-Bretagne (24 mars 1603, à la mort de la reine Élisabeth ire d’Angleterre), sous le nom de Jacques ier.
Quand débute ce récit, les députés écossais étaient en chemin pour Londres en vue d’annoncer la naissance de James : nouvelle qu’on allait recevoir dans la consternation parce qu’elle désespérait la noblesse anglicane en faisant un héritier légitime et de premier rang, mais catholique et écossais, pour la Couronne britannique.
- James Stuart, comte de Murray, demi-frère de Marie Stuart, et James Douglas, duc de Morton, étaient les deux principaux meneurs du parti écossais protestant. Tous deux allaient successivement assurer régence du royaume d’Écosse pendant la minorité de Jacques vi.
- V. note [39] du Naudæana 3 pour la relation de ce complot par George Buchanan dans sa Rerum Scoticarum historia [Histoire des affaires écossaises] (Édimbourg, 1582).
Buchanan a aussi publié une Detectio Mariæ reginæ Scotorum [Mise en lumière de Marie, reine d’Écosse] {i} qui a plus tard été traduite en écossais, en anglais et en français :
Histoire de Marie, reine d’Écosse, touchant la conjuration faite contre le roi, et l’adultère commis avec le comte de Bothwell, {ii} histoire vraiment tragique, traduite du latin en français. {iii}
- Londres, 1569 et 1571.
- V. note [38] du Naudæana 3.
- Édimbourg, Thomas Waltem, 1572, in‑8o de 176 pages.
- Passage transcrit par le Borboniana, que j’ai mis en exergue. Seul y diffère le contenu de la parenthèse, qui a été complété par Rex Jacobus [le roi Jacques] de manière à rendre la citation compréhensible.
Buchanan mourut en 1582, quand le roi d’Écosse était âgé de 26 ans.
- Les 11 pages suivantes visent à disculper Marie Stuart en attribuant catégoriquement l’assassinat de Darnley à un complot ourdi par Morton et Murray.
Un coup de feu tiré par un partisan de Marie Stuart mit fin à la régence de Murray (1567-1570) ; celle de Morton (1572-1578) se termina par sa décapitation à l’aide d’une machine, dénommée the Maiden [la Jeune fille], une ancêtre de la guillotine qu’il aurait lui-même inventée. Sur ordre de la reine Élisabeth, Marie Stuart connut le même sort (mais par le moyen, alors plus commun, d’une hache) en 1587 après une incarcération de 18 années.
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