En 1599, Marie Bruneau de Rechignevoisin (Sedan 1584-Oradour-sur-Glane 1641), fille d’un riche intendant originaire de Troyes, avait épousé Charles de Rechignevoisin, seigneur Des Loges, dans le Poitou, qui était gentilhomme ordinaire de la Chambre du roi et apparenté aux Guron de Rechignevoisin (v. note [75], lettre 219). Tallemant des Réaux lui a fait les honneurs d’une historiette, opportunément intitulée Madame Des Loges et Borstel (tome i, pages 606‑608) :
« Comme ç’a été la première personne de son sexe qui ait écrit des lettres raisonnables et que, d’ailleurs, elle avait une conversation enjouée, et un esprit vif et accort, elle fit grand bruit à la cour. {a} […]
Celui qui a eu le plus d’attachement avec Mme Des Loges, ç’a été un Allemand, nommé Borstel. {b} Étant résident des princes d’Anhalt, il fit connaissance avec elle, et apprit tellement bien à parler et à écrire qu’il y a peu de Français qui s’en soient mieux acquittés que lui. Il la suivit en Limousin. Le prétexte fut qu’ils avaient acheté ensemble de certains greffes {c} en ce pays-là. Il avait transporté tout son bien en France. Comme il se vit en un pays de démêlés, il ne voulut point se mettre parmi la noblesse ; et comme il n’avait pas une santé trop robuste, il se feignit encore plus infirme qu’il n’était afin de rompre tout commerce avec ces gens-là. Il fut même quelques années sans sortir de la chambre. Cela fit dire qu’il avait été dix-huit ans sans voir le jour qu’à travers des châssis, {d} et qu’il fut longtemps sans pouvoir décider s’ils étaient moins sains de verre que de papier.
Mme Des Loges morte, Borstel eut soin de ses affaires et de ses enfants. Borstel vint à Paris et on parla de le marier avec une fille de bon lieu, assez âgée, nommée Mademoiselle du Metz ; mais l’affaire ne put s’achever car il avait appris quelque chose qui ne lui avait pas plu, mais il ne le voulut jamais dire. […]
Borstel, quelque temps après, en cherchant une terre, trouva une femme ; car il épousa une jeune fille bien faite qui était sa voisine à la campagne, et il en a eu des enfants ; mais il ne s’en porta pas mieux. Il envoya ici, en 1655, un mémoire pour consulter sa maladie ; {e} il avait mis ainsi : “ Un gentilhomme de cinquante-neuf ans, etc. ” Feret, son ami, secrétaire du duc de Weimar, porta ce mémoire à un nommé Lesmonon, médecin huguenot, qui est à M. de Longueville, qui consulta avec d’autres et rédigea après la consultation par écrit. Il commençait ainsi : “ Un gentilhomme âgé de soixante-neuf ans, et qui s’est marié depuis quatre ou cinq ans à une jeune fille, etc. ” Feret, voyant cela, lui dit qu’il ne l’avait pas prié de tuer M. Borstel, mais bien de le guérir s’il y avait moyen ; et que de lui parler de son âge et de son mariage, c’était lui mettre le poignard dans le sein. On changea ce commencement. Il avait soixante ans et plus quand il se maria, et était si incommodé qu’il ne pouvait dormir qu’en son séant. {f} Il mourut de cette maladie pour laquelle on avait fait la consultation. »
- Aucun écrit de Marie Des Loges n’a été publié. Son renom est lié aux gens de lettres qu’elle réunissait chez elle.
- Dans une note, Antoine Adam, l’éditeur des Historiettes, le nomme Adolphe de (Adolf von) Borstel :
« Il était fils de Conrad de Borstel, premier ministre d’État des princes d’Anhalt [v. note [3], lettre latine 19], gouverneur général de cette principauté. Adolphe de Borstel fut envoyé en France en 1620 par Frédéric v, électeur palatin, pour le représenter auprès de Louis xiii. Il se fit naturaliser et devint gentilhomme ordinaire de la Chambre. »
- Charges de greffier.
- Fenêtres.
- Le Patiniana laisse imaginer que Guy Patin fut l’un des médecins qui se penchèrent sur le cas de cet hypocondriaque.
- Ne pouvoir dormir qu’assis (orthopnée, v. note [35], lettre 216) est un signe fidèle d’insuffisance cardiaque.
V. note [4], lettre 125, pour Iohannes Tilemannus (Johann Tilemann) Stella, Bipontinus [natif de Deux-Ponts (Zweibrücken en Rhénanie-Palatinat)]. |