< L. 184.
> À Nicolas Belin, le 19 juin 1649 |
Codes couleur
×
×
Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. –
À Nicolas Belin, le 19 juin 1649
Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0184 (Consulté le 03/12/2024) | ||||||||||||
Je suis bien aise que monsieur votre père [2] se trouve mieux. Il est infaillible qu’il se portera mieux dorénavant propter mitiora tempora, [1] s’il veut un peu s’aider : il faut qu’il continue de se purger [3] afin de se décharger tout à fait. Quand il voudra voir le livre du P. Jarrige, [4] je l’ai céans et m’offre de lui envoyer. Ce père révolté n’a pas tout dit, il viendra par ci-après un autre volume du même homme qui pourra dire le reste. [2] Monsieur votre père se devrait faire saigner [5][6] du bras même du côté de son mal. Nous le faisons faire ici fort souvent et nous en trouvons bien. Je l’ai fait faire trois fois depuis un mois cum felici successu. [3] Qu’il ne se hâte point de m’écrire, il me suffira toujours d’apprendre qu’il soit en bonne santé, de par vous ou par autrui. On dit ici que le roi [7] et toute la cour sont sortis de Compiègne [8] pour aller à Amiens, [9] mais nous n’avons pas encore lettre qu’ils y soient arrivés. [4] Ceux de Bordeaux [10] sont en paix et ont mis les armes bas. M. d’Épernon [11] y est entré avec 200 chevaux et y a profité ; au moins l’avantage a semblé être de son côté par la division qui a été entre le peuple et le parlement ; nous avons ici été plus sages et plus heureux. La reine [12] y a envoyé M. de Comminges, [5][13] lieutenant des gardes, y faire exécuter les articles du traité de paix à la place de M. d’Argenson [14] qui avait tout gâté. [6] Elle a aussi envoyé en Provence [15] M. d’Étampes de Valençay, [16] conseiller d’État, pour pacifier la province, laquelle est toute en armes contre le gouverneur qui est le comte d’Alais : [17] Aix, [18] Arles et Marseille [19] se sont de nouveau réunies ensemble pour s’opposer aux efforts et aux entreprises de ce tyranneau. [7] Le mariage de M. de Mercœur [20][21][22] avec l’aînée maroquine n’est ni fait, ni conclu ; il pourra pourtant bien se faire si Principes nostri in tanta qua hactenus vixerunt socordia firmiter perseverent. [8] Il y a ici force procès de banqueroutiers frauduleux, de maltôtiers, partisans et gens d’affaires quos genuit quoties voluit Fortuna iocari ; [9][23][24] desquels on peut dire ce que Tacite [25] a dit des astrologues, [26] genus hominum quod in civitate nostra semper vetabitur et semper retinebitur. [10] On continue toujours ici de faire des libelles mazarinesques ; [27] aussi le temps y est-il fort propre, difficile est satyram non scribere, etc. [11][28] Il y a du bruit en Italie entre le pape [29] et quelques princes qui l’ont menacé d’y faire venir le Turc ; [12][30] et cela pourra bien être qu’il y viendra sans qu’on le mande, les princes de la chrétienté sont assez méchants pour mériter ce fléau. J’ai peur qu’à la fin Dieu ne se lasse d’être chrétien, les voyant si cruellement méchants. Je vous baise les mains, à M. et à Mme Belin, et à tous nos amis, et suis, Monsieur, votre très humble et très obéissants serviteur, Patin. De Paris, ce samedi 19e de juin 1649. M. le Prince [31] est allé en Bourgogne. Je vous ai écrit celle-ci en hâte afin que ne fussiez en peine de moi. Je m’en vais partir bien malgré moi pour aller vers Fontainebleau y voir le fils d’un trésorier de l’Extraordinaire des guerres [32] qui y est fort malade. Le père et la mère m’y mènent dans leur carrosse, c’est sur le chemin de Provins. [13][33][34] Adieu Monsieur. | |||||||||||||
| |||||||||||||
Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr | |||||||||||||
|