L. latine 371.  >
À Heinrich Meibomius,
le 16 septembre 1665

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Heinrich Meibomius, le 16 septembre 1665

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=1404

(Consulté le 12/10/2024)

 

[Ms BIU Santé no 2007, fo 196 ro | LAT | IMG]

Au très distingué M. Heinrich Meibomius, à Helmstedt.

Très distingué Monsieur, [a][1]

Je dois réponse à quatre de vos lettres, je les ai sous les yeux et m’y attelle. Je n’ai pas encore vu le livre du très distingué Schefferus de Philosophia italica[1][2][3] Quelqu’un m’a dit qu’on ne le trouve pas à Paris ; on l’y trouvera pourtant un jour, et alors je me le procurerai. On a vu ici la double comète ; [4] des loyolites et autres gens ont écrit à leur propos, quelques-uns en écrivent même encore. [2][5] Certaines gens peu dignes de foi pensent que ce genre d’étoile annonce force calamités, ce que je ne crois pas car ce ne serait probable que si quelque malheur public ne survenait jamais en l’absence de comète, ce qui est faux. Les Anglais, les Hollandais, et même tous les Européens ont de quoi manger : qu’on nous laisse donc en paix avec la comète ! [6] Ce prêtre nommé Gendron, curé de Vauvre près de Chartres, sur le chemin d’Orléans, a jadis été chirurgien ; [7][8] à présent, il est prêtre ; pendant quelques mois, il a soigné la reine mère ; [9] mais enfin, on lui a ordonné de s’éloigner d’elle, à cause de son impéritie, ou du moins parce que son traitement n’avait guère de succès. [3] À sa place, on en a fait venir un autre, qui dit être médecin en Lorraine et qu’on appelle maître Alliot : [10] on le dit expert en chimie, c’est-à-dire dans l’art de mentir et de tromper ; [11] il prétend connaître beaucoup de secrets, il fait les louanges de Van Helmont, [12] il emploie l’arsenic et d’autres poisons. [4][13] Ce qui adviendra révélera l’homme ; en attendant, on le tolère à la cour, comme si les princes voulaient être dupés. Voilà maintenant que les médicastres auliques disent que la maladie de la reine n’est pas un cancer, mais qu’il s’agit seulement de carnosités fongueuses ; [14] d’autres disent que ce sont des scrofules [15] qui ont poussé sur le sein et se sont attachées aux parties voisines. [5] Quoi qu’il en soit, ils ne savent que dire ni que faire. Ainsi meurent rois et reines, Dii meliora piis ! [6][16][17] Deuxièmement, notre océan est menacé d’être envahi par les navires anglais et hollandais [18] et la peste provoque un immense carnage à Londres. [19] Tout cela fait que nos politiques se persuadent aisément qu’il faut entreprendre en secret quelques consultations entre les deux nations pour conclure un traité et garantir la paix : [20] Dieu veuille qu’ils y parviennent ! Je me procurerai volontiers tout ce qui paraîtra de M. Conring. [21] On va enfin voir ici les Cælii Rhodigini Lectiones antiquæ, c’est un excellent livre. [7][22] Ezechiel Spanheim [23] est ami de mon Carolus, [24] qui vous envoie ses compliments. [8] J’adresse les miens au très distingué M. Rolfinck, [25] à qui j’ai récemment écrit par l’intermédiaire de M. Volckamer, médecin [Ms BIU Santé no 2007, fo 196 vo | LAT | IMG] de Nuremberg, [26] et lui ai envoyé quelques livres qu’il m’avait demandés. [9] Troisièmement, je n’ai rien reçu de notre Scheffer, médecin de Francfort ; [27] j’attends pourtant une lettre de lui, ainsi que ce que vous lui avez envoyé pour moi. Quel plaisir j’ai pris à lire votre Epistola de Longævis ! Je vous remercie d’y avoir mentionné mon nom ; veuille Dieu vous accorder la longévité de Nestor. [10][28][29] Quatrièmement, je n’ai toujours rien reçu de Scheffer. Je loue fort le dessein qu’a le très distingué M. Hermann Conring d’éditer ses Epistolæ ; je souhaite qu’elles paraissent rapidement. [11][30] Je tiendrai le jeune et savant Johannes Amenannus pour très recommandable ; rien ne lui manquera de ma part, s’il a besoin de mon argent ou de mon aide. Sur ordre du roi, [31] les docteurs de Sorbonne examinent la nouvelle bulle pontificale qui a été envoyée en France ; ensuite, le Parlement de Paris et le roi en personne la tortureront. [12][32][33][34][35] Je vous prie de ne rien envoyer par mer, tant que la paix ne sera pas tout à fait assurée, laquelle sera salutaire pour toute l’Europe. Vale, très distingué Monsieur, et continuez de nous aimer.

De Paris, le 16e de septembre 1665.

Vôtre, etc.


Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr
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