L. latine 404.  >
À Werner Rolfinck,
le 16 août 1666

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Werner Rolfinck, le 16 août 1666

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=1438

(Consulté le 19/03/2024)

 

[Ms BIU Santé no 2007, fo 208 vo | LAT | IMG]

Au très distingué M. Werner Rolfinck, à Iéna. [a][1]

J’ai récemment reçu le paquet que m’avait envoyé notre ami, le très distingué M. Volckamer ; [2] plusieurs livres que j’y ai trouvés m’ont fait grand plaisir, dont votre thèse de 1650, de Diaphoreticorum usu eximio ; [1][3][4] je vous remercie tout particulièrement de me l’avoir offerte. Je loue et approuve vos opinions en tout cet opuscule. Au chapitre iv, qui traite de Affectibus capitis, page H verso, je ne puis suffisamment vanter l’avis de Ludovicus Septalius, [5] car il repose sur d’excellents arguments et l’expérience le renforce tous les jours. [2][6] Page suivante, H 2, j’ai de quoi dire et redire, mais n’en ferai rien sans votre permission et sans vous avoir prié de prendre en bonne part tout ce que j’écrirai. [3][7] Même page, ligne 4, il faut lire Nic. Piètre, Med. Parisiensis[4][8][9][10] Souffrez, mon cher Werner, je vous prie, que je ne tolère pas qu’un si éminent personnage soit cité sans être loué. Ô le grand homme, et même le plus grand de tous, au double motif de sa probité et de son érudition ! Mon cœur palpite de joie et je fonds en larmes au très doux souvenir d’un tel géant. Tandis que je vous écris ces lignes, je contemple ici son portrait, qui m’est le plus cher parmi les nombreux autres que j’ai sous les yeux. Le seul que je range devant lui est Fernel, [11] que Piètre lui-même adorait et vénérait.

Dij majorum umbris, tenuem et sine pondere terram,
Spirantésque crocos, et in urna perpetuum ver ;
Qui præceptorem sancti volvere parentis Esse loco
[5][12]

Je n’aurais presque rien appris de bon en médecine, ne serais guère devenu probe et, pour ainsi dire, n’aurais guère été qu’un empirique [13] ignorant ou un charlatan [14] si, pour ma très grande chance, encore jeune homme, je n’avais rencontré Nicolas Piètre, homme de tout premier rang et prince des médecins de toute l’Europe. [6] Ô l’excellent homme, remarquable, avisé ! Pour tout dire, ô le plus savant, le plus sage, le meilleur de tous ! Il a vécu 80 ans, pour le bien public de toute la France, et il est mort en l’an du Christ 1649, doyen et ancien de la Faculté de médecine de Paris, [7][15] ayant surpassé de très haut toute gloire, toute jalousie et toute louange. [Ms BIU Santé no 2007, fo 209 ro | LAT | IMG] Il était oncle de notre Jean Riolan. [8][16] En un mot, ce fut un homme immense ; à la fois l’autre Socrate, [17] l’autre Hippocrate [18] et l’autre Galien [19] de son siècle. Mais, direz-vous, mon cher Werner, pourquoi tout cela ? Je vous écris ainsi pour que vous sachiez bien à quel point Nicolas Piètre a été estimé chez nous et que, s’il vous vient une autre occasion de nommer un si grand personnage, vous le louerez publiquement en considération de son mérite et l’appellerez Nic. Pietreus, Med. Paris. vir doctissimus, aut vir maximus[9] car il est sacrilège d’évoquer un si grand homme sans faire l’éloge de sa dignité. Et voilà pour votre thèse sur l’emploi des diaphorétiques. J’en viens à votre Medicina specialis : [10] ce livre est tout plein de bon fruit. Parmi bien d’autres choses, j’y loue surtout et particulièrement ce que vous avez écrit de natura medicamentorum purgantium, mais j’aurais bien aimé que l’imprimeur mît une table des chapitres à la tête d’un si volumineux ouvrage. [11][20] Vive et vale, très distingué Monsieur, et aimez-moi.

De Paris, le 16e d’août 1666.

Vôtre de tout cœur, Guy Patin.


Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr
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