< L. latine 167.
> À Johann Daniel Horst, le 16 juin 1661 |
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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. –
À Johann Daniel Horst, le 16 juin 1661
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[Ms BIU Santé no 2007, fo 102 vo | LAT | IMG] Au très distingué M. Johann Daniel Horst, à Darmstadt. Très distingué et affectueux Monsieur, [a][1] Aussi bien que tout mortel, vous tenez pour absolument certain que la conception ne se fait pas hors de l’utérus. [2] C’est pourquoi ce qu’ont vu les excellents Digby et Pentz, soit était sorti de l’utérus, soit n’était pas un fœtus : [3][4] si cela était sorti de l’utérus, alors il s’agissait d’un fœtus pétrifié, comme divers auteurs en ont observé avant eux ; [5] si cela était sorti d’ailleurs que de l’utérus, alors il ne s’agissait pas d’un fœtus, mais d’un sarcome, de quelque formation, etc. [1][6][7][8] Le fœtus que Riolan a décrit dans une trompe de l’utérus n’était pas hors de l’utérus, et lui-même n’y a pas cru ; mais il l’a pourtant décrit pour ne pas paraître enlever tout crédit à l’homme de la cour qui jurait l’avoir vu. [2][9][10][11] Si la conception se faisait hors de l’utérus, alors la chylose se ferait aussi bien dans l’utérus, l’hématose dans l’estomac, etc. [3][12][13] Puisse pourtant la paix régner en notre sein, afin que chaque petite partie de nos corps s’acquitte de sa fonction et que se dissipe entre vous et moi, ou plutôt loin de nous, cette manière chicaneuse de débattre. Vous louer ne me suffit pas, je vous aime, vous honore et vous vénère comme un homme d’immense érudition, qui appartient vraiment à la race des Horst. [Ms BIU Santé no 2007, fo 103 ro | LAT | IMG] Dieu veuille que nous voyions un jour les réponses de divers médecins qu’a recueillies M. votre gendre ; je ne doute pas qu’elles seront excellentes, puisqu’elles ont été choisies par un savant homme et surtout rédigées par de doctes personnages, particulièrement en ces temps où nous revenons pour la plupart à de meilleurs procédés et à de plus saines études qu’auparavant. [4][14] M. Pentz n’aura à acheter ni les Opérations de chirurgie en français, [5][15] ni les deux livres de Bourgeois et les deux autres de Pierre Petit, deux desquels chauffent encore sous la presse, [6][16][17], ni deux petits livres qu’on m’a dédiés : [7] c’est moi qui vous les procurerai et vous les enverrai ; je n’exige de vous rien d’autre que d’accepter un petit présent pour témoignage de ma reconnaissance. Cet Aubry [18] est un impur, je dirai même un pur, vrai et franc vaurien, empirique et chimiste famélique, qui gagne sa vie en faisant le maquereau, et non le machaon ; [19][20][21] ivrogne et imposteur, il est digne d’être accablé de la haine générale. Il n’y a pas à s’étonner de l’approbation du roi : nos nomophylax approuvent tout au nom du roi, [8] ayant acquitté les droits accoutumés, mais ne gardant que ce qui est bon pour eux, c’est-à-dire l’argent avec lequel ils conservent ces privilèges. Quant à Borri, il est parti en Hollande, où il ne fera pas de meilleures affaires qu’en Allemagne, car là-bas vivent de très savants hommes qui découvriront sans tarder les fourberies et les artifices de cet Italien. Ses Consilia ne sont pas ce que vous m’enverrez et je vous en saurai gré. [9][22] Je hais les novateurs d’une haine plus que vatinienne, [10][23] s’ils ne se montrent pas honnêtes et n’accomplissent pas ce qu’ils promettent. Je n’ai besoin d’aucune innovation, je ne souffre d’aucune pénurie de médicaments. Si je désirais quelque chose en ce domaine, je demanderais à Dieu tout-puissant que nous ayons en France, ou ici dans nos campagnes, du séné aussi bon et doucement purgatif que celui qui pousse en Arabie. [24] Avec une livre du meilleur séné nouveau, je purgerais plus de malades que la chimie ne peut le faire avec 200 livres de ses purgatifs. [25] Le malheur de notre médecine est pourtant que tant de souffleurs ignorants y accourent, qui n’ont d’autres vœux que de faire rapidement fortune par quantité de fraudes et d’impostures, sous couvert de nouveauté et de diversité des remèdes ; à tel point que notre art très sacré semble parfaitement semblable à cette noire terre d’Homère, qui nourrit quantité d’imposteurs et de charlatans. [11][26] En vérité, je me plains en vain quand il n’y a aucune place pour la reconnaissance des fautes commises, tant cette corruption universelle a poussé de profondes racines dans tous les métiers ; mais après le Mazarin, le pire des vauriens politiques, qui a quitté le monde des vivants, [27] nous viendront peut-être des temps meilleurs et plus doux ; puisse Dieu accomplir cela ! En attendant, vous, très distingué Monsieur, vive, vale et continuez de m’aimer comme vous l’avez fait jusqu’alors, et l’avez prouvé à celui qui n’en est peut-être pas digne, mais qui n’en est pas ingrat à votre égard. Je salue M. votre très distingué gendre et lui offre toute sorte de services. Ayez soin, je vous prie, de remettre rapidement la lettre ci-incluse à M. Sebastian Scheffer, [12][28] médecin de Francfort. Vale, encore et encore, très éminent Monsieur. De Paris, ce jeudi 16e de juin 1661. Votre Guy Patin de tout cœur. | |||||||||||||
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Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr | |||||||||||||
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