Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 5 manuscrit, note 54.
Note [54]

Cet article continuant celui qui précède, je l’ai transposé ici, depuis le haut de la page suivante (page 35 du manuscrit).

Jacques Sadolet est le nom français de Jacopo Sadoleto (Modène 1477-Rome 1547), prélat catholique et prolifique écrivain latin, qui fut nommé, en 1517, évêque de Carpentras, capitale du Comtat-Venaissin, {a} et cardinal en 1520. Il a notamment laissé 16 livres de lettres (Epistolarum libri sexdecim), qui sont dans ses Opera omnia, {b} édition à laquelle se référait apparemment le Borboniana (avec une erreur sur le premier chiffre de la première page) : la lettre xiv (et avant-dernière) du livre xiv, pages 359‑363, datée de Carpentras le 29 novembre 1541, est la seule du recueil qui soit adressée Hermanno Archiepisc. Coloniensi [Hermann (von Wied), archevêque de Cologne]. {c} Sadolet lui donnait son opinion sur le livre qu’il venait de lire, une des éditions des :

Canones Concilii Provincialis Coloniensis, sub Reverendiss. in Christo Patre D. Hermanno S. Coloniensis Ecclesiæ Archiepiscopo, etc., anno m d xxxvi celebrati. Item Enchiridion Christianæ Institutionis opus omnibus Christianæ pietatis cultoribus longe utilissimum. Diligentiam, qua nos in operis castigatione usi sumus, prudens lector per se ipse facile (si volet) animadvertet. Indicem in calce quærito.

[Règles du concile provincial de Cologne, réuni, au nom du Christ notre Père, sous la direction du révérendissime Hermann, archevêque de l’Église de Cologne, etc., en l’an 1536. Et aussi le Manuel de l’Institution chrétienne, {d} ouvrage de loin le plus utile à tous les pratiquants de la foi chrétienne. Le sage lecteur remarquera aisément (s’il veut bien) le soin que nous avons mis à le corriger. L’index se trouve à la fin]. {e}


  1. Appartenant alors aux États pontificaux, v. note [10], lettre 601.

  2. Iacobi Sadoleti Card. et Episcopi Carpentoractensis viri disertissimi, Opera quæ exstant omnia : ad Eloquentiam, Philosophiam, ac Theologiam pertinentia. Nunc primum e variis Bibliothecis simul edita et aucta….

    [Toutes les Œuvres qui existent du très éloquent M. Jacques Sadolet, cardinal et évêque de Carpentras : elles touchent à l’éloquence, la philosophie et la théologie. Éditées et augmentées pour la première fois, tirées de diverses bibliothèques…]. {i}

    1. Mayence, Balthasarus Lippius, 1607, in‑8o de 1 336 pages.

  3. V. supra note [53].

  4. Ce « Manuel » (Enchiridion) était ce que le Bornoniana appelait le catéchisme pour son diocèse « qui contenait la somme de notre religion ». Le mot purgatorium [purgatoire] (v. note [28], lettre 79) ne s’y lit en effet nulle part. Il vaut la peine de s’y attarder car le débat porte sur une distinction théologique radicale entre le dogme catholique et celui des protestants, alors en gestation.

  5. Vérone, Antonius Putelletus, 1541, in‑8o de 646 pages.

  • Dans sa longue lettre, le cardinal, dont les mœurs étaient réputées irréprochables, commence par féliciter l’archevêque pour la pertinence de son livre et de ses rudes critiques à l’encontre des impiétés commises par certains ecclésiastiques :

    Cum legissem commentarios, quos tu de concilio episcoporum provinciæ tuæ, more maiorum per te habito actoque, de corrigendis moribus sacerdotum, deque Ecclesiæ sacramentis eruditissime scriptos, in lucem edisti : equidem commotus admiratione tui præstantissimi consilii, eiusque actionis, qua nulla maior hoc tempore, nec christianæ Reip. utilior suscipi potuit : auxi maiorem in modum benevolentiam erga te meam, quam aliquot de causis conceptam antea habebam : teque et magnum virum et optimum antistitem, omnique honore ab omnibus dignissimum iudicavi. Non enim solum tu primus aliquot iam seculorum spatio eam ad rite et sancte gerendum sacerdotium tuum, viam tibi aperuisti, quæ antea ob diuturnam desuetudinem, tanquam impeditissimis stirpib. penitus erat obsepta : sed etiam cæteris exemplum illustre præbuisti, ut te imitarentur, si qui vellent, et si quorum in cordibus pietas et religio Christianæ locum aliquem haberet. Nec tamen omnibus hoc liberum fortasse, nec par atque eadem cunctorum conditio est. Vidi enim ego, cum in Urbe essem, et cum in senatu nostro hæc de communi omnium Episcoporum concilio habendo, causa ageretur : multa revera ostendi impedimenta, quæ Pontificis Maximi studium retardarent. Sed tamen ego et tunc ita sensi, et tunc sentio, aut una hac ratione concilii rite congregandi, subveniri posse his tot incommodiiis quotidianisque detrimentis, quibus urgetur et ad interitum agitur Christiana Respub. aut si hoc remedium non sit profuturum, nullo alio hominum consilio a peste summi exitii Remp. posse prohiberi. Non enim si concilium caste legitimeque habitum non proderit, alia erit expectanda medicina quæ opem ferat. Sed illud certe ab omnibus nobis existimandum, Deum infensum delictis nostris, reposcentemque à nobis scelerum et peccatorum pœnas, quæ ipse ad summum intelligat esse perducta, supremum iam decretum de interitu nostro fecisse. Quapropter occurrere illius iracundiæ nos oportet, et precibus atque operibus quæ a vera humilitate in nobis, vera religione, vera pœnitentia veterum malefactorum, novaque insequentis vitæ integritate et iustitia proficiscantur, antevertere vindicantis severitatem, cuius lenitatem tolerantis tamdiu despeximus. Hoc enim si egerimus, et confugerimus ad ipsius misericordiam, gemitusque eos ediderimus, quos acer peccati dolor a nobis expresserit : flectetur ipse, et ut bonus est infinite, ac misericors, converteretur ab ira sua, simul ac nos conversos a peccato senserit. Quo nobis reconciliato atque placato, cessabunt continuo ista quæ domi forisque perturbant, non solum hostilis arma crudelitatis, sed etiam venena domesticæ perfidiæ. Verum hæc reconciliatio nullo alio prorsus pacto universa et integra commode fieri potest, nisi generalis concilii quodam quasi feriendo fœdere sanciatur. Nam si uniuscuiusque arbitrio (id quod fere nunc sit) suæ vitæ correctio permittatur : primum, haud ita multi sunt, qui sua sponte moveantur ad pie religioseque vivendum. Deinde, quam multos esse existimamus, qui iter rectum nesciant : quam multos, qui in hoc vitiorum regno, quæ nostra hac ætate plurimum pollent vigentque, multa sibi arbitentur licere, quæ tamen improba et reprehenda sint. De quibus etsi possint a sacris literis, et earum gnaris ac peritis doctoribus admoneri : tamen in hoc pene communi generis humani ad vitia consensu, obstrepit bonis et veris admonitionibus mala consueduto, magisque plerisque mores suos ex pravis eorum qui præsunt moribus, quam ex eorundem proba oratione effingunt : cum præsertim severa lex nulla sit, quæ homines a delinquendo coerceat.

    [Quand j’ai lu les commentaires, si doctement rédigés, que vous avez publiés sur le concile des évêques de votre province que, suivant la coutume de nos prédécesseurs, vous avez réuni et présidé, quant à la nécessité de réformer les mœurs des prêtres et les sacrements de l’Église, {a} j’ai été frappé d’admiration pour votre très remarquable sagesse et pour son efficacité, qui n’a pas pu être égalée en notre siècle, ni avoir plus grande utilité pour les intérêts de la chrétienté. La bienveillance que j’avais déjà quelques raisons de nourrir à votre égard s’en est considérablement accrue et je vous ai pareillement jugé comme étant un grand homme et un excellent prélat, tout à fait digne d’unanime louange. Non seulement, le premier depuis fort longtemps, vous avez pris ce chemin qui conduit à mener rigoureusement et saintement votre sacerdoce, et qu’une désuétude prolongée avait presque barré jusqu’alors ; mais vous avez aussi montré aux autres un brillant exemple à imiter, s’ils en ont la volonté, et si la piété et la religion chrétiennes tiennent quelque place en leurs cœurs. Cependant, tous n’ont peut-être pas cette liberté, et tous ne sont pas de même et égale condition. En effet, lorsque j’étais à Rome et que notre consistoire envisageait de réunir un concile général des évêques sur ces questions, j’ai vu qu’en vérité maints obstacles freinaient le zèle du souverain pontife. {b} Toutefois, je pensais alors et je pense encore que convoquer solennellement un concile sur cette seule question pourrait aider à contrer tous les fâcheux assauts qui accablent quotidiennement la communauté chrétienne et la poussent vers sa destruction ; mais aussi que, si ce remède n’y aidait pas, nulle autre concertation des hommes ne pourrait empêcher que cette peste ne l’anéantisse. De fait, si un concile honnêtement et légitimement réuni est sans effet, il ne faudra attendre aucun secours de quelque autre médecine que ce soit. Cela dit, tous les nôtres n’estiment pas que Dieu, furieux de nos fautes, réclamant la punition de nos crimes et de nos péchés, qu’il sait avoir atteint leur comble, a déjà prononcé la sentence suprême de notre disparition ; et qu’il nous faut donc aller au devant de sa colère, et que, par nos prières et nos efforts, émanations de notre véritable piété, de notre véritable religion, de notre véritable repentir des fautes invétérées que nous avons commises, et par la nouvelle intégrité et justice de notre vie future, nous devons prévenir la sévérité de sa vengeance, lui dont nous avons de si longue date méprisé la tolérante mansuétude. En agissant ainsi, en nous réfugiant dans sa miséricorde, en poussant ces gémissements que l’amère douleur d’avoir péché fait monter de nos cœurs, il fléchira ; et comme il est infiniment bon et miséricordieux, sa rage se dissipera à mesure qu’il sentira le repentir de nos fautes. Une fois que nous aurons retrouvé son amour et l’aurons apaisé, cessera ce qui sème le trouble au dedans comme au dehors : et la cruauté des armées en guerre, et les poisons de la perfidie qui hante nos maisons. En vérité, cette universelle et entière réconciliation ne peut convenablement s’obtenir par nul autre pacte que l’accord, ratifié et comme dûment scellé, d’un concile général. Car si chacun règle à sa guise la réforme de sa propre vie (liberté qui n’existe guère aujourd’hui), alors, premièrement, ceux qui adopteront spontanément une existence pieuse et religieuse ne seront pas légion ; ensuite, nous estimons que quantité de gens ignorent le droit chemin, et que beaucoup, en cette souveraineté des vices qui prévalent et fleurissent de nos jours, se jugent autorisés à commettre une abondance de fautes qui sont pourtant malhonnêtes et répréhensibles. Les Saintes Écritures et les docteurs qui les connaissent et les maîtrisent pourraient le leur rappeler, mais dans cette complaisance pour les vices, qui est commune à presque tout le genre humain, la mauvaise habitude fait obstacle aux bonnes et sincères mises en garde : la plupart des gens règlent bien plus volontiers leurs propres mœurs sur celles, dissolues, de ce ceux qui les dirigent, que sur leurs vertueux discours ; car, surtout, nulle loi, si sévère soit-elle, ne contraint les hommes à ne pas fauter].

  • Dans la seconde partie, Sadolet en vient à la confession, {c} à la rémission et à l’expiation des péchés, et au purgatoire :

    Unum tantum in tuo libro est, quod ego desiderarim, quodque mihi percontatione dignum visum sit. Sum enim tacitus me cum nonnihil admiratus, quod tu capite eo libri tui, in quo de sacramento pœnitentiæ verba facis : ubi ad tertium illum membrum, quod satisfactio est, venitur nullam prorsus in eo mentionem purgatorii facias, cum et hoc maxime locus ille requirere videatur, et nos cum catholica ecclesia, una teneamus, illa satisfactionis opera non tam ad declinandas temporias pœnas, quas in hac vita a nobis pro peccatis nostris Dei severitas reposcit, quam ad levandas illas et mitigandas, quæ in altera vita nobis purgandis proponuntur vim habere. Nisi hoc fortasse tu eodem modo intelligis, in pœnasque temporarias etiam eas includis, quæ subeuntur in purgatorio igne. Est enim temporarium, quicquid non est æternum. Verumtamen (ut mihi videtur) oportuit in eo loco aliquam purgatorii fieri mentionem : ne adversariis in hac re fidem catholicæ ecclesiæ impugnantibus, quasi quodam silentio victoria traderetur : qui iniuste certe et sine ratione insimulant ecclesiam. […] Deinde multi, qui gravia et improba multa admiserunt, postquam redierunt ad cor, et ex pœnitentia in gratiam sunt restituti, pœnas tamen hasce in hac vita effugerunt : in quo esset quædam quasi iniustitia summi iudicis, si nullas usquam hi solverent peccatorum pœnas, et nimirum nisi pœnæ in purgatorio abeuntibus his ex hac vita, quanquam a culpa absolutis, sint propositæ (si tamen pœnæ appellandæ sunt, quæ non puniunt, sed purgant) videatur vacillare Dei severitas, et iustitia : cuius ratio reddi idonea nulla potest, quamobrem ex eodem scelere hic in hac vita a Deo puniatur, ille impunitus evadat : nisi, quod et impium est ita de Deo cogitare, et in purgatorio æqua sit omnium compensatio. Deinde, cuius esset erroris accersere sibi quempiam præsentia corporis incommoda, ut futura in hac eadem vita devitaret : ieiunare, algere, sudare, bona sua elargiri : ut paupertatem in posterum effu Tout cela n’aurait pas de sensgeret, ut ærumnam, ut vigiliam, ut famem, præsertim quæ forsitan non essent eventura, sicut non omnibus qui peccarunt eveniunt ? Non cohærerent ista, si effugiendarum huius tantum vitæ temporalium pœnarum causa pœnas quasdam nobis in satisfactione, voluntarias adscisceremus. Sed hæc opera satisfactionis suscipiuntur omnia, primum obedientiæ et humilitatis causa : Deo enim et sacerdoti præcipienti obtemperamus : deinde, ut aliquo nostri hic corporis incommodo aut tollamus omnino, si forte datum sit, aut certe minuamus alterius vitæ purgatorias pœnas : earumque aut magnitudinem, aut longinquitatem contrahamus. Quæ potior mihi ratio ex sententia ecclesiæ semper visa est, quare nobis sacerdos confessis peccata nostra, opera illa satisfactoria post absolutionem imperet : quæ etsi valent, aptaque sunt ad nos in bono more recteque pieque agendi, magis confirmandos, quod et confiteor, et tecum una, cumque ecclesiasticis cæteris doctoribus sentio : tamen id potissimum in illis spectatum est, ut quoad possumus, post extremum diem, semper abundante erga nos Dei misericordia, aut nulla aut levia purgatorii ignis cruciamenta perferamus, cum eorum iam nonnullam in hac vita eiusmodi operibus subierimus partem.

    [Votre livre ne m’inspirerait qu’un seul regret, qui me semblerait digne d’enquête. {d} La section où vous parlez du sacrement de pénitence m’a en effet laissé muet d’étonnement : {e} dans son troisième chapitre, qui traite de l’expiation, vous ne faites absolument aucune mention du purgatoire, alors qu’il m’aurait semblé y trouver parfaitement sa place, et que nous soutenons, avec l’ensemble de l’Église catholique, que cet acte de rémission a moins le pouvoir d’éviter les punitions temporaires, que la sévérité de Dieu exige de nous en cette vie pour nos péchés, que celui d’alléger et d’atténuer les peines que nous devrons purger dans l’autre vie. Si vous n’entendez pas les choses de la même façon, peut-être est-ce parce que vous incluez dans les punitions temporaires celles qu’on subit dans le feu du purgatoire, car est temporaire tout ce qui n’est pas éternel. {f} Néanmoins (me semble-t-il), il fallait à cet endroit mentionner le purgatoire, afin de ne pas concéder, par ce silence, un semblant de victoire à ceux qui attaquent la foi de l’Église catholique sur ce point de doctrine. (…) Par conséquent, beaucoup de ceux qui ont confessé leurs nombreuses et lourdes fautes, après avoir sondé le fond de leur cœur et être revenus dans la grâce par le repentir, n’ont plus à en être punis en cette vie ; mais il y aurait là comme une injustice du suprême juge, s’ils étaient définitivement lavés de leurs péchés : la sévérité et la justice de Dieu paraîtraient vaciller si ceux qui quittent cette vie, bien qu’ils aient été absous de leur faute, n’en subissaient pas le châtiment dans le purgatoire (s’il convient pourtant d’appeler châtiment ce qui ne punit pas, mais ce qui nettoie). Aucun raisonnement ne peut convenablement rendre compte de cela, car alors, ici-bas, pour un même crime, Dieu punirait l’un et absoudrait l’autre ; {g} à moins que, pour Dieu, tous n’acquittent une dette égale dans le purgatoire, ce qu’il est profondément impie de penser. {h} Ensuite, qui refuserait de recourir à son enveloppe charnelle actuelle pour expier sa faute, afin d’éviter qu’elle ne lui soit de nouveau reprochée dans l’au-delà ? Jeûner, souffrir le froid et le chaud, dispenser ses biens en vue d’échapper plus tard à la pauvreté, au dénûment, à la faim, à l’insomnie, toutes choses dont la survenue est particulièrement incertaine, n’est-ce pas ce à quoi se plient tous ceux qui ont péché ? Cela n’aurait pas de sens si, dans le seul but d’éviter les peines temporaires de cette vie, nous tirions entière satisfaction de punitions que nous nous infligeons volontairement. Obéissance et humilité sont les fondements de tous les actes de contrition : nous nous soumettons à Dieu et au prêtre qui prescrit la sanction ; ensuite, par quelque pénitence infligée ici-bas à notre corps, soit nous supprimons entièrement, si telle grâce peut jamais nous être donnée, soit, plus sûrement, nous diminuons les souffrances du purgatoire en l’autre vie, en en réduisant la rigueur ou la durée. La raison avancée par l’Église m’a toujours paru plus sensée : quand nous avons confessé nos péchés, après l’absolution, le prêtre ordonne leur expiation ; et quelle qu’en soit la dureté, elle est propre à nous raffermir dans la droite et pieuse résolution d’adopter de meilleures mœurs. Voilà ce que je pense et proclame, tout comme vous et comme les autres docteurs de l’Église. Néanmoins, eux ont regardé comme essentiel le fait que, passé le dernier jour, par l’inépuisable miséricorde de Dieu à notre égard, et selon notre mérite, soit nous échapperons aux légères tortures des feux du purgatoire, {i} soit nous les endurerons, n’ayant subi qu’en partie ici-bas l’expiation de nos fautes].


    1. À la différence des conciles généraux ou œcuméniques, convoqués par le pape et réunissant tous les évêques et cardinaux de l’Église romaine, les conciles provinciaux rassemblent les ecclésiastiques d’une province, sur décision du prélat local, pour statuer sur l’organisation, la discipline et les pratiques sacerdotales des diocèses. Celui de Cologne, en 1536, avait outrepassé ses droits en examinant des questions cruciales de dogme et en publiant des canones [règles], tandis que l’Allemagne était dans la pleine ébullition des idées réformatrices luthériennes, dont une revendication matérielle était la suppression des lucratives indulgences que Rome vendait à son profit pour abréger les souffrances du purgatoire.

    2. En 1541, le concile que méditait Rome pour contrer la Réforme était celui de Trente (1545-1563, v. note [4], lettre 430). Le pape du moment était Paul iii (v. note [45] du Naudæana 3).

    3. La confession des péchés (sacrement catholique de la pénitence) était un point majeur de discorde entre catholiques et protestants : avec des nuances entre luthériens et calvinistes, et sans vouloir être exhaustif sur la question, la confession existe chez les réformés, mais le pardon (rémission) est un don gratuit de Dieu, qui ne s’assortit pas obligatoirement d’une déclaration singulière (auriculaire, v. note [6], lettre 25) des péchés à l’officiant, et exclut formellement les notions de purgatoire et d’indulgences.

    4. Dans la section des Canones du concile de Cologne (Vérone, 1541) consacrée aux « sacrements du Nouveau Testament » (De Sacramentis Novi Test.), venant après le baptême et l’Eucharistie, la confession (De Pœnitentia) occupe les chapitres xxx‑xxxix (pages 115‑133).

    5. Il me semble qu’ici, pour éviter toute allusion agressive à l’Inquisition romaine, le cardinal n’a pas innocemment préféré le mot percontatio à inquisitio, « enquête », son plus banal synonyme.

    6. Le cardinal offrait une esquive à l’archevêque : dans la foi catholique, le purgatoire est certes temporaire, comme la vie terrestre, mais il appartient à la vie céleste, où il est un passage intermédiaire facultatif, entre l’enfer et le paradis, qui sont les deux séjours possibles des âmes après la mort, et pour l’éternité.

    7. Relativité et fragilité de l’absolution prononcée par un confesseur, que doit confirmer ou infirmer celle que Dieu prononce après la mort, quand l’âme du défunt se présente à lui.

    8. Le dogme catholique établit que certaines âmes pures de péché montent directement au paradis sans passer par le purgatoire.

    9. Les flammes du purgatoire sont tenues pour moins cruelles que celles de l’enfer. Leur perspective reste néanmoins effrayante, et les indulgences procurées par l’Église pour en soulager les fidèles sont donc particulièrement bienvenues. Le concile de Trente allait bientôt établir définitivement le dogme catholique du purgatoire : il ne figure pas dans la Bible, mais a été conçu par les Pères de l’Église, comme moyen de renforcer la crainte du péché chez les fidèles.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 5 manuscrit, note 54.

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(Consulté le 19/04/2024)

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