L. latine 435.  >
À Johann Georg Volckamer,
le 4 août 1667

[Ms BIU Santé no 2007, fo 217 ro | LAT | IMG]

Au très distingué M. Johann Georg Volckamer, docteur en médecine, à Nuremberg.

Très distingué Monsieur, [a][1]

Pour répondre aux deux vôtres : j’ai remis à M. Nicolas Picques, [2] afin de vous le faire parvenir, l’Aristote grec et latin de Guillaume Du Val in‑fo, de la meilleure édition, qui est celle de 1619 ; [1][3][4] je n’ai reçu aucun paquet de vous, ni n’en ai entendu parler. Je me réjouis profondément que votre pieux et sérénissime prince se soit heureusement rétabli de sa grave blessure. [2][5] Je n’ai jamais vu ici de livre qu’on ait publié sur les écrits de Pythagore, [6] et il ne s’y vend rien de tel ; je me souviens pourtant de fragments qu’on en a publiés en Allemagne in‑8o[7] et de sa vie qui a été imprimée à Rome. [3][8] Notre roi a déjà pris de nombreuses villes en Flandre, en dépit des efforts des Espagnols et de l’empereur ; [9][10] lequel semble pourtant n’y avoir envoyé aucune troupe : se seraient-elles arrêtées en Utopie ? [4][11] Indiquez-moi, je vous prie, où en votre Allemagne se situe Curia Nariscorum, et dans quelle province. [5][12] Je salue les très distingués Richter, [13] Dilherr, [14] Felwinger, [15] Fabricius, [16] etc. Vale et aimez-moi.

De Paris, le 4e  d’août 1667.

Vôtre et sien, [6][17] Guy Patin.

[Ms BIU Santé no 2007, fo 217 vo | LAT | IMG]

Adressez tout ce que vous aurez à m’envoyer, de votre part ou de celle de vos libraires, bien emballé à M. Du Clos, docteur en médecine à Metz, pour être envoyé à M. Patin, à Paris[18] car ceux d’ici me créent des embarras et perturbent cette sorte de commerce de livres, guidés par l’appât du gain et animés par la passion de plaider. [19] Veuillez en avertir les vôtres afin qu’ils s’abstiennent dorénavant de faire passer leurs expéditions par Bâle : [20] c’est la voie qui m’a valu un procès, qui n’est pas encore terminé, contre ces vauriens, savoir les directeurs de la librairie. [7][21]


a.

Brouillon autographe d’une lettre que Guy Patin a écrite à Johann Georg Volckamer, ms BIU Santé no 2007, fo 217 ro et vo.

1.

V. note [3], lettre latine 429, pour les œuvres complètes d’Aristote éditées par Guillaume Du Val (Paris, 1619, pour la première édition).

2.

Ce « pieux et sérénissime » (pius et S.) prince bavarois était probablement le duc-électeur de Bavière, Ferdinand Maria von Wittelsbach (v. note [4], lettre 405) : le 18 mai 1667, allié aux Lorrains, il avait participé à la bataille de Verdun contre les Français.

3.

Références à deux ouvrages sur Pythagore (v. note [27], lettre 405), philosophe de la Grèce antique à qui nul écrit ne peut être indubitablement attribué :

4.

Seule allusion de Guy Patin, dans ses lettres, à Thomas More (Morus ; Londres 1478-ibid. 1535), le plus grand humaniste anglais de son siècle, et l’ami d’Érasme. Devenu chancelier du royaume, ses convictions religieuses et politiques l’ont mené à l’échafaud (v. note [42] du Borboniana 10 manuscrit).

Dans son livre le plus célèbre, De optimo reipublicæ statu, deque nova insula Utopia [La meilleure forme de république, ou la nouvelle île d’Utopie], paru en 1516, More a donné le nom d’Utopie (mot forgé à partir du grec ou topos, « nulle part ») à l’île qu’il a inventée pour figurer un gouvernement idéal, régi par l’égalité et la tolérance.

Nom propre alors strictement lié à cette référence, utopie (sans majuscule initiale) est aujourd’hui un nom commun courant de la langue française. Patin l’employait ici pour dire que l’empereur Léopold ier, en dépit de ses promesses, n’avait alors engagé aucune troupe dans la guerre de Dévolution afin de venir en aide aux Espagnols contre les Français.

5.

Guy Patin interrogeait Johann Georg Volckamer pour la troisième fois sur ce nom latin de la ville d’Hof-sur-Saale en Bavière (v. note [3], lettre latine du 29 février 1664).

6.

Ce « sien » [suus] était probablement à l’intention de Johann Christoph Volckamer, le fils aîné de Johann Georg, qui était alors âgé de 23 ans (v. note [15], lettre latine 29).

7.

L’adresse de Samuel Du Clos est en français dans le manuscrit.

V. note [1] de la lettre latine 436 pour les déboires de Guy Patin avec les libraires parisiens, liés à sa contrebande de livres.

s.

Ms BIU Santé no 2007, fo 217 ro.

Cl. viro, D. Io. Georgio Volcamero, Med. Doctori, Noribergam.

Duabus tuis respondeo, Vir Cl. Aristotelem Græco-Lat. Gul. du Val, in
fol. optimæ editionis, nempe anni 1619. Tibi transmittendum tradidi D. Nic.
Picques. Nullum à Te fasciculum accepi, nec de eo audivi. Principem tuum
Pium et S. ex tanto vulnere feliciter convaluisse seriò lætor. Nihil
unquam prostat vidi de scriptis Pythagoræ hîc editum, nec quidquam eorum
prostat : memini tamen me vidisse fragmenta quædam in Germania edita,
in 8. et ejus vitam typis mandatam Romæ. Rex noster in Belgio multas
urbes jam recepit, frustra nitentibus Hispanis, et ipso Cæsare, cujus copiæ
nullæ videntur : an morantur in Utopia ? Indica mihi quæso ubinam
sit in Germania vestra, et in qua provincia, Curia Nariscorum ? Cl.
viros saluto, Richterum, Dilherum, Felwingerum, Fabricium, etc. Vale,
et me ama. Parisijs, 4. DecAug. 1667.

Tuus et suus, G.P.

t.

Ms BIU Santé no 2007, fo 217 vo.

Quidquid habueris mihi destinatum, vel ex Te, vel ex Bibliopolis, bene compactum,
mitte à M. du Clos, Docteur en Med. à Mets, pour estre envoyé à M. Patin, à Paris : hîc enim
negotium mihi facessunt Bibliopolæ nostri, et turbant tale commercium, lucri spe ducti
et litigandi studio impulsi : de quo velim moneas Bibliopolas vestratos, ut in poste[rum]
abstineant à via Basilensi, quæ mihi peperit litem, nondum terminatum, adversus
istos nebulones, præfectos nempe rei librariæ.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Johann Georg Volckamer, le 4 août 1667

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=1468

(Consulté le 26/04/2024)

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