À Hugues II de Salins, le 31 octobre 1656

Note [1]

M. Forests est un correspondant bourguignon de Guy Patin dont il n’a pas reparlé ailleurs. V. note [1], lettre 439, pour le peu qu’on sache de l’avocat La Ville.

V. note [1], lettre 437, pour la transcription des leçons de Guy Patin au Collège de France par un de ses élèves. Sans le redire ici, il comptait sur les talents de Hugues ii de Salins pour les recopier et les corriger : v. note [1], lettre 437.

Les Opera [Œuvres] (Hanau, 1610, v. note [3], lettre 9) de Giovanni Argenterio (Jean Argentier, mort en 1572) commencent par un surprenant Oratio… habita in initio suarum lectionum anno 1555. quarta Novemb. [Discours… prononcé au début de ses leçons, le 4 novembre 1555], où, sans prôner le paracelsisme (v. note [7], lettre 7), il éreinte rudement les vénérés auteurs médicaux de l’Antiquité. Ce paragraphe donne un aperçu du mépris où il recommandait de les tenir (page †† 4) :

Nam Hippocrates dumtaxat exigua quædam, et illa quidem rudia et inculta Medicinæ semina nobis reliquit, Galenus dum infinitam librorum multitudinem conscripsit, quorum minimam partem, in tot tantisque voluminibus quæ adhuc extant habemus, et illi vix intra multos annos legi possunt, fateturque se non omnia digenter scripsisse, sed quædam in Adolescentia, ad sui exercitationem, alia adversus suos æmulos, ad contentionem et victoriam potius quam ad veri investigationem, alia amicorum quorundam gratia, nullum unquam opus, ut facile ostendere possem, rescripserit, omnia sparsim, et in locis incertis tradat, ac in singulis ubertate illa Asiatica redundet, nobis profecto nisi omnia ociosi, et plus æquo aliis addicti esse velimus, multa reliquit excogitanda.

Auicenna (ut optime nouistis) morte præventus opus suum expolire absolvereque non potuit, Oribasius vero, Paulus, Aetius, Trallianus, et alii universi Græci, qui Galenum sunt sequuti, si audeo dicere quod sentio, aut Medici non fuerunt, quippe cum integra capita, et etiam libros integros, ex aliis transcribant, aut certe tales sunt authores, ut ab illis Medicinam discere possimus, quando quidem nulla ponunt principia, nullas adhibent probationes, et multas Medicinæ partes intactas prætermittunt.

[De fait, Hippocrate ne nous a laissé que quelques maigres graines de médecine, qui sont assurément à tenir pour grossières et incultes. Galien a ensuite rédigé une infinie multitude de livres, et nous n’avons qu’une infime partie de l’immense amas qu’il a produit, mais on peinerait déjà à la lire en y consacrant nombre d’années. Il avoue lui-même ne pas avoir bien soigneusement écrit tous ses volumes : certains l’ont été dans sa jeunesse, pour son apprentissage ; d’autres, contre ses rivaux, pour disputer et triompher, plutôt que pour explorer le vrai ; d’autres encore, pour l’agrément de certains amis. Je pourrais aisément démontrer qu’il n’en a revu aucun, car il relate tout sans ordre et il est par endroits confus, particulièrement quand il abuse de sa redondance asiatique. {a} Si nous n’avons pas le loisir d’en lire absolument tout et ne voulons pas nous y consacrer plus qu’il n’est raisonnable, il a néanmoins laissé à réfléchir sur bien des sujets.

La mort (comme vous savez parfaitement) a empêché Avicenne de polir et d’achever entièrement son œuvre. {b} Quant à Oribase, Paul, Aétius, Trallianus {c} et à tous les autres Grecs qui ont suivi Galien, si j’ose dire ce que je pense, soit ils n’étaient pas médecins, étant donné qu’ils ont recopié des chapitres, voire des livres entiers venant d’autres auteurs, soit ils l’étaient certainement, à en juger sur leurs écrits où nous pouvons apprendre la médecine, bien qu’ils n’y établissent aucun principe, n’y fournissent aucune démonstration et y omettent maintes parties de cette science sans même y toucher].


  1. Propre à l’Asie Mineure : Galien (iie s. de notre ère) était originaire de Pergame, près d’Izmir (v. note [6], lettre 6).

  2. Avicenne (v. note [7], lettre 6) a été l’un des grands interprètes persans de Galien au xie s.

  3. V. note :

    • [9], lettre latine 61, pour Oribase de Sardes (ive s.) ;

    • [13], lettre 153, pour Paul (Paulus) Éginète (viie s.) ;

    • [4], lettre de Charles Spon datée du  21 novembre 1656, pour Aétius d’Amide (ve s.) ;

    • [10], lettre 488, première notule {a}, pour Alexandre de Tralles, (Trallianus, iie s.).


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Hugues II de Salins, le 31 octobre 1656, note 1.

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(Consulté le 26/04/2024)

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