De Roland Desmarets de Saint-Sorlin, Avant 1650
Note [12]
Roland Desmarets résumait un passage du Policraticus (pages 123‑124) de Jean de Salisbury : {a}
Si vero mathematicorum via esset usquequaque laudabilis, on tantopere pœnituisset magnum Augustinum se eorum consultationibus inclinasse. Ad hæc doctor sanctissimus ille Gregorius qui melleo prædicationis imbre totam rigavit et inebroavit ecclesiam, non modo mathesin iussit ab aula recedere, sed ut traditur a maioribus, incendio dedit probatæ lectionisScripta, Palatinus quæcunque tenebat Apollo,in quibus erant præcipua, quæ cœlestium mentem, et superiorum oracula videbantur hominibus revelare. Quid multa ? Nonne satis est quod hanc vanitatem catholica et universalis Ecclesia detestatur, et es, qui eam ulterius exercere præsumpserint, legitmis pœnis mulctat ? Sed ne planetariorum non tam persequi, quam sequi videamur errorem, iam ad reliqua perogrediatur oratio. Qui enim huic curiositati inserviunt, non magis veraces esse possunt, quam humiles et sobrii, qui primos recubitus in cœnis appetuunt, et epulantur quotidie splendide. Postremo plurimos eorum audivi, novi multos, sed neminem in hoc errore diutius fuisse recolo, in quo manus fomini condignam non exercuerit ultionem. {b}
« Au reste, si le procédé des mathématiciens était si louable, le grand saint Augustin {c} ne se fût pas tant repenti d’avoir suivi leurs consultations. Davantage, un des plus doctes des Saints Pères, j’entends Grégoire le Grand {d} qui, par la pluie sacrée de sa prédication arrosa toute la Terre, et l’enivra du torrent de son éloquence, ne bannit seulement pas la judiciaire de la cour, {e} mais encore jeta dans le feu
Les écrits qu’Appollon gardait au Capitole, {f}dont les principaux étaient ceux qui semblaient révéler l’intention des dieux, et les oracles du ciel. Quoi plus ? Vous suffit-il pas que l’Église universelle déteste cette vanité, en châtiant par des supplices légitimes ceux qui l’osent désormais exercer ? Mais de peur qu’on ne nous accuse de suivre plutôt l’erreur des judiciaires que de la poursuivren passons au reste ; car il est certain que ceux qui s’attachent à cette curiosité sont aussi peu véritables que ceux qui affectent les premières places à table, et qui font tous les jours festin peuvent être sobres. En un mot, j’en ai entendu parler de plusieurs, et j’en ai connu quantité, mais il ne me souvient point qu’aucun ait persévéré longtemps dans cette erreur, sur qui la main de Dieu n’ait exercé une équitable vengeance. »
- Livre ii, chapitre xxvi {i} (pages 123‑124), du plus célèbre ouvrage (écrit vers 1159) de Jean de Salisbury, {ii} Policraticus, sive de nugis Curialium, et vestigiis Philosophorum, Libri octo… [Policraticus, {iii} ou huit livres sur les sornettes des courtisans et les vestiges des philosophes…]. {iv}
- Quod sentientia Dei moveri potest, quod consilium Dei immutabile est, et voluntas Dei prima omnium causa, et quod mathesis via damnatione est, « Que Dieu peut rétracter ses arrêts, encore que son conseil soit immuable ; Que sa volonté est la première cause de tout ; Que l’astrologie judiciaire est le chemin de l’enfer » (traduction de François-Eudes de Mézeray, v. infra notule {b}).
- V. note [4], lettre 949.
- Policraticus est un néologisme associant deux mots grecs, polis, « la cité », et kratos, « pouvoir », pour désigner « l’exercice du pouvoir sur la cité », ou « policratique ».
- Leyde, Ioannes Maire, 1639, in‑8o de 931 pages, ouvrage dédié par le libraire à Claude i de Saumaise.
- J’ai recouru à la fidèle traduction française de François-Eudes de Mézeray (v. note [11], lettre 776) : Les Vanités de la cour (Paris, Toussaint Quinet, 1639, in‑4o de 655 pages) (page 193).
- Augustin d’Hippone, v. note [5], lettre 91.
- Le pape Grégoire ier (au vie s., v. note [19] du Naudæana 3).
- L’astrologie divinatoire condamnée par la cour pontificale.
- Ce propos (sans autre source latine identifiée) désigne les écrits que conservait la bibliothèque du mont Palatin établie par Asinius Pollio (v. note [2], première lettre de Demarets). Peu d’entre eux étaient consacrés à l’astrologie, mais elle était le prétexte de leur destruction, dont la véritable raison était le paganisme, qu’entendait anéantir l’Église romaine.
V. notes [41] du Faux Patiniana II‑2 pour l’avis de François i La Mothe Le Vayer sur cet autodafé, et [74] du Naudæana 1 pour celui qui a été commis par l’autre saint pape, Grégoire vii (1073-1085).