L. latine 28.  >
À Johannes Antonides Vander Linden,
le 26 décembre 1653

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Johannes Antonides Vander Linden, le 26 décembre 1653

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(Consulté le 19/03/2024)

 

[Ms BIU Santé no 2007, fo 27 ro | LAT | IMG]

Au très distingué M. Johannes Antonides Vander Linden, docteur en médecine et professeur, à Leyde.

Paris le 26e de décembre 1653.

Très distingué Monsieur, [a][1]

Je vous écris de nouveau pour vous remercier une fois encore pour votre Medicina physiologica, qui ne m’a pas encore quitté les mains depuis le jour où notre excellent ancien, [2] M. Riolan, [3] me l’a rendue. Je vous dois aussi des remerciements particuliers pour y avoir flatteusement mentionné mon nom, en témoignage de votre affection pour moi, dont vous avez donné la preuve à vos lecteurs avec tant de bienveillance, page 770, quand vous citez certains manuscrits de feu mon ami le très distingué Hofmann. [1][4] Je possède en effet un très grand nombre d’écrits de ce Sevo[2] que j’ai rachetés fort cher à ses héritiers, [5] sans jamais d’autre intention que de les faire imprimer aussitôt. Pourtant, je n’ai pas encore pu y parvenir, en raison de la dureté des temps et du tumulte des guerres dans lesquels notre France a été ballottée jusqu’à ce jour ; et nous ne voyons pas la fin de tant de calamités publiques et n’osons même l’espérer, à moins qu’un Dieu mieux disposé ne prenne rapidement et sérieusement l’amas de nos malheurs en pitié. Trois ans et plus ont passé depuis que j’ai confié ces trois traités physiologiques du bonhomme Caspar Hofmann à un libraire de Lyon pour qu’il les imprime. Un médecin de Lyon, fort mon ami, me l’avait recommandé et je l’avais soigné en une très grave maladie alors qu’il séjournait ici. [3][6][7][8] Auparavant, Jansson, libraire d’Amsterdam, [9] avait déjà eu ces traités en mains pendant nombre d’années et avait donné au dit auteur l’espoir d’une prompte édition. Ces trois-ci sont de Spiritibus et calido innato, de Partibus similaribus et de Humoribus[4] Ce dernier est aussi le plus volumineux de tous. [10] Ce Lyonnais n’a pourtant encore rien accompli de tout ce qu’il m’avait alors promis, tandis que j’avais l’esprit occupé à mille autres choses. Je n’ai pu rien en tirer ni obtenir, même si, souvent tourmenté par mes rappels et mes prières, il promet qu’il va entreprendre de les éditer sous quelques jours. Il prétexte la guerre, les mauvais jours, la suppression du libre commerce et quantité d’autres abominations que la vertu humaine n’a le pouvoir ni de corriger, ni de supporter. Les excuses ne lui manquent pas ; pour moi, je ne lui vois pourtant aucune raison bien solide de tarder. Maudit soit celui qui cause tant de calamités, s’il ne revient rapidement à la raison et dans le droit chemin ! [11] J’ai aussi en mains ici d’autres manuscrits de feu ce même auteur : principalement les Chrestomathiæ physiologicæ et pathologicæ, dont je fais légitimement très grand cas. Je m’échine à en procurer l’édition à Paris, faisant tout ce qui est en mon pouvoir pour la hâter et la diriger en vue d’éviter les erreurs typographiques ; sinon, leur nombre serait infini, étant donné l’ignorance et la nonchalance trop communes de nos imprimeurs. [5][12][13]

Notre ami M. Riolan a récemment publié quatre petits traités contre les livres de notre autre ami M. Thomas Bartholin, de Lacteis thoracicis, de Vasis lymphaticis, Dubia anatomica de lacteis thoracicis, et contre son Anatomia reformata. Il a aussi voulu y mettre à la fin les mêmes quatre opuscules de Bartholin, afin de procurer aux lecteurs la justification des deux points de vue. [6][14][15][16][17][18] Le livre est petit ; dès que possible, je vous l’enverrai en cadeau avec quelques autres. Riolan écrit maintenant contre l’antimoine, [19][20] médicament absolument délétère et funeste, pour faire voir sa nature vénéneuse à tout le monde. Puisse Dieu, dans sa bonté et sa grandeur, lui accorder qu’il achève un opuscule si utile et profitable à notre État, contre les imposteurs paracelsistes qui, par tous les moyens, bons comme mauvais, par leurs poudres mortifères et par leur pernicieux vin énétique[7][21][22] massacrent quiconque passe à leur portée, en abusant de l’injustice et de l’impunité de notre siècle au préjudice de quantité de gens, par l’excessive indulgence de la divine Thémis, [23] et pour le plus grand malheur de nos concitoyens.

Mais je reviens à votre livre, très distingué Monsieur, où partout me semble déborder la plus haute érudition. Puissent votre loisir et votre santé vous permettre, ces prochaines années, d’accomplir le même dessein dans les matières pathologiques et sémiologiques. Ce faisant la république médicale vous sera certainement redevable d’un immense bienfait. Je m’étonne pourtant que dans un si grand livre il n’y ait absolument aucun index car, pour la grande richesse de son contenu, il semblait en requérir un, et même un qui fût de très vastes dimensions ; il n’aurait vraiment pas été inutile dans un si épais ouvrage et si empli de bon fruit. [8] Si pourtant [Ms BIU Santé no 2007, fo 27 vo | LAT | IMG] vous êtes d’un avis différent, alors je m’y range et m’avoue vaincu. J’en finis pourtant et vous demande, pour vous en convaincre, d’avoir à Paris un homme qui soit parfaitement disposé, dévoué et attaché à vous rendre tout genre de services et de devoirs ; si vous m’y prenez à l’essai, alors vous découvrirez que vous avez un ami fidèle et constant. Vale, très sage Monsieur, et aimez-moi, moi qui suis de toute mon âme,

votre Guy Patin, natif de Beauvaisis, docteur en médecine de Paris. [9][24][25][26]


Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr
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