À Charles Spon, le 15 décembre 1654, note 17.
Note [17]

« de là ces larmes » (v. note [32], lettre 197).

Dauber : « battre sur le dos à coups de poings, comme font les petites gens et les écoliers ; signifie figurément médire de quelqu’un, le railler en son absence » (Furetière).

V. notes [12], lettre 372, pour Louis de Fontenettes, docteur en médecine de Montpellier professant à Poitiers (que Guy Patin connaissait mais disait n’avoir jamais vu, bien qu’il eût étudié à Paris), et [13], lettre 376 pour sa traduction des Aphorismes d’Hippocrate en vers français (Paris, 1654). Datée de Poitiers, sa dédicace à Patin exprime son admiration pour l’auteur du Traité de la Conservation de santé, dont il avait adopté bien des préceptes contre les chimistes, les occultistes et les astrologues :

« Faudra-t-il toujours croire que si l’on n’a des sphères, des lunettes de Galilei, {a} des astrolabes {b} et des fourneaux, on ne saurait connaître ou guérir les infirmités humaines ?

La médecine ne consiste-t-elle pas à mettre et à ôter, ce qui se fait par des aliments et des remèdes que la bonté de Dieu a répandus sur la face de la Terre, et que l’abondance devrait rendre à bon marché si l’avarice et la malice des hommes ne les rendaient secrets pour les rendre chers ?

N’y a-t-il pas, au rebours, {c} grande apparence de conjectures que le Diable, qui n’est qu’un singe, n’a inventé que des arts dommageables et dont il a rendu les principes obscurs pour augmenter la curiosité, qui est naturelle à l’homme, et parce qu’il fait parfois de faux miracles, il arrivera que ses inventions profiteront à deux ou trois afin d’en tromper ou d’en perdre un million ? […]

Ces exemples {d} doivent assez excuser mon effort auprès des esprits complaisants et raisonnables ; et cet ouvrage, qui est aujourd’hui feuilleté par les doctes et les indoctes, n’en sera pas moins estimé pour être burlesque, s’il est assez heureux pour être lu et s’il a ce génie qui fait vieillir et approuver les livres.

Vous êtes son parrain et son tuteur. Si vous jugez que ce soit un enfant faible ou difforme, étouffez-le, jetez-le dans l’eau,

dona veneris, Telesine, marito, {e}

employez-le à quelque plus vil usage ; mais si vous y prenez tel goût qu’il soit assez heureux pour vous plaire et pour vous délasser de vos sérieuses occupations, visites, conférences, lettres, tant avec les doctes de France qu’avec les étrangers, et surtout de cet excellent et illustre Docteur Alcide Musnier,

qui panem facit, et facit farinam ; {f}

faites-le lire les soirs au garçon qui suit et gouverne votre bidet, il servira peut-être pour en faire un docteur au Bourg-la-reine, ou à Vanves ; et à mesure que le savantissime en rira, l’ignorant en fera son profit ; mais qu’il ait l’approbation ou qu’il ne l’ait pas, qu’il soit ridicule ou recommandable, qu’il soit fructueux ou inutile, je suis assez accoutumé de n’avoir pas ce que je désire, et me sens assez heureux et assez consolé de votre suffrage, tu mihi mille theatra, et totidem calculi, si valeas et plaudas, valeat et plaudat qui poterit. {g}

Voilà, Monsieur, l’abrégé de mon dessein, et des souhaits que j’ai pour ce petit ouvrage, lequel je vous présente comme à mon meilleur et plus fidèle ami. »


  1. Galilée (v. note [19], lettre 226).

  2. V. note [30] du Faux Patiniana II‑2.

  3. Au contraire.

  4. Fontenettes a vanté les mérites des auteurs qui n’ont pas peur d’amuser leurs lecteurs.

  5. « donne-le, Telesinus, au mari (Vulcain) de Vénus » (Juvénal, Satire vii, vers 25).

  6. « qui fait le pain, et qui fait la farine », Martial (Épigrammes, livre viii, 16, Contre Ciperus) :

    Pistor qui fueras diu, Cypere,
    causas nunc agis et ducena quaeris :
    sed consumis et usque mutuaris.
    A pistore, Cypere, non recedis :
    et panem facis et facis farinam
    .

    [Après avoir été longtemps boulanger, tu plaides maintenant, Ciperus, pour gagner deux cent milles sesterces. Mais en attendant, tu dépenses force argent et tu empruntes sans cesse. Tu n’as pas cessé d’être boulanger, Ciperus : tu fais encore du pain et encore de la farine].

    Fontenettes devait bien connaître Alcide Musnier, ami et correspondant de Patin : il plaisantait trivialement sur son nom en le rapprochant du mot « meunier ».

  7. « vous valez pour moi mille théâtres et tout autant d’approbations ; si vous approuvez et applaudissez, alors qu’approuve et applaudisse aussi qui pourra. »

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 15 décembre 1654, note 17.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0384&cln=17

(Consulté le 26/04/2024)

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