Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Naudæana 4, note 47.
Note [47]

V. note [23], lettre 449, pour l’énigmatique livre « des trois Imposteurs », pamphlet anonyme athée et clandestin, apparemment écrit en 1538 et publié pour la première fois en 1598, qui excitait alors beaucoup la curiosité des milieux libertins (où on n’en parlait que par ouï-dire). Je n’en ai pas trouvé de trace imprimée certaine avant l’édition critique, latine et française, publiée par Philomneste Junior (Bruxelles, 1867).

Un ouvrage n’a sans doute pas innocemment repris ce titre pour s’attaquer aux thèses sceptiques d’Edward Herbert de Cherbury, {a} de Thomas Hobbes {b} et Baruch Spinoza : {c}

De tribus Impostoribus magnis Liber, cura editus Christiani Kortholti, S. Theol. D. et Professoris Primarii.

[Livre des trois grands Imposteurs, édité par Christianus Kortholtus, [d} docteur et premier professeur de théologie sacrée]. {e}


  1. De Veritate, prout distinguitur a Revelatione, a Verisimili, a Possibili, et a Falso. Cui Operi additi sunt Duo alii tractatus : primus, de Causis errorum ; alter, de Religione laici ; una cum Appendice ad Sacerdotes de Religione Laici, et quibusdam Poematibus. Autore Edoardo Barone Herbert de Cherbury in Anglia, et Castri Insulæ de Kerry in Hibernia, et Pari utriusque Regni.

    [De la Vérité, qui se ditingue de la Révélation, de la Vraisemblance, du Possible et du Faux. Ouvrage auquel aont été ajoutés deux autres traités : le premier, sur les Causes des erreurs ; le second, sur la Religion du laïc. Avec un Appendice contre les prêtres sur la Religion du laïc, et certains poèmes. Par le baron Edoardus Herbert {i} de Cherbury en Angleterre et du château de l’île de Kerry en Irlande, et pair des deux royaumes]. {ii}

    1. Edward Herbert (1582-1648), diplomate et philosophe rationaliste anglais.
    2. Londres, sans nom, 1645, in‑4o en deux parties de 250 et 124 pages.
  2. V. note [1], lettre 267.

  3. Mentionné dans la note [9], lettre 60.

  4. Christian Kortholt (1633-1694) professait à l’Université de Kiel.

  5. Kiel, Joachimus Reumannus, 1680, in‑8o de 294 pages.

V. note [1], lettre 62, pour Arnauld de Villeneuve (mort en 1313). Philomneste Junior a sèchement réfuté cette piste (page 77) : « Naudé, par une ridicule méprise, croyait ce Traité des trois Imposteurs d’Arnauld de Villeneuve, écrivain grossier et barbare. » Philomneste s’en explique de manière fort convaincante (pages 72‑73) :

« Le premier qui ait parlé du livre comme existant en 1543 est Guillaume Postel dans son traité de la conformité de l’Alcoran avec la doctrine des luthériens ou des évangélistes, qu’il nomme anévangélistes, {a} et qu’il entreprend de rendre tout à fait odieux, en voulant faire voir que le luthéranisme conduit droit à l’athéisme. Il en rapporte pour preuve trois ou quatre livres composés, selon lui, par des athées, qu’il dit avoir été des premiers sectateurs du prétendu nouvel évangile : id arguit nefarius tractatus Villanovani De Tribus Prophetis, Cymbalum mundi, Pantagruelus et novæ insulæ, quorum autores erant Ceneuangelistarum antesignani. {b} Ce Villanovanus, que Postel dit auteur du livre des trois Imposteurs, est Michel Servet, fils d’un notaire, qui, étant né en 1509 à Villanueva en Aragon, a pris le nom de Villanovanus dans la préface qu’il ajouta à une Bible qu’il fit imprimer à Lyon en 1542, par Hugues de La Porte, {c} et prenait en France le nom de Villeneuve, sous lequel on lui fit son procès, après avoir fait imprimer en 1553, à Vienne en Dauphiné, la même année de sa mort, son livre intitulé Christianismi restitutio, un livre devenu extrêmement rare, par les soins qu’on prit à Genève d’en rechercher les exemplaires pour les brûler ; {d} mais dans tous les catalogues des livres de Servet, on ne trouve point de livre De tribus Impostoribus. Ni Calvin, ni Bèze, ni Alexandre Morus, ni aucun autre défenseur du parti huguenot qui ont écrit contre Servet, et qui avaient intérêt de justifier son supplice et de le convaincre d’avoir composé ce livre, aucun ne l’en avait accusé. Postel, ex-jésuite, est le premier qui, sans autorité, l’a fait. »


  1. Guillaume Postel est le signataire de l’épître dédicatoire du : {i}

    Alcorani seu legis Mahometi et Evangelistarum concordiæ Liber, in quo de calamitatibus orbi Christiano imminentibus tractatur. Additus est libellus de universalis conversionis, iudicii ve tempore, et intra quot annos sit expectandum, coniectatio, ex divinis ducta authoribus, veroque proxima.

    [Livre de la conformité de l’Alcoran ou loi de Mahomet avec les évangélistes, qui traite des calamités qui menacent le monde chrétien. Avec un petit livre sur le moment de la conversion universelle ou jugement, et une conjecture sur le nombre d’années à attendre, tirée des divins auteurs, mais dont la survenue est très prochaine]. {ii}

    1. V. supra note [45].

    2. Paris, Petrus Gromosus, 1543, in‑8o de 123 pages.

    Postel y donne aux luthériens le nom de Ceneuangelistæ (pour sine euangelistis, « sans évangélistes », ou prédicateurs de la bonne nouvelle), que Philomneste a traduit par « anévangélistes ».

  2. « ce que montrent l’abominable traité de Villeneuve sur les trois prophètes, le Cymbalum mundi, Pantagruel et les nouvelles îles, dont les auteurs furent jadis les porte-drapeaux des anévangélistes » (page 72 du livre de Postel).

    V. notes [23] (notule {a}), lettre 449, pour la « Cymbale du monde » de Bonaventure Des Périers (1537), et [9], lettre 17, pour François Rabelais, son Pantagruel (1532) et son Cinquième livre (1564), que Postel appelait les « nouvelles îles ».

  3. Biblia sacra ex Santis Pagnini tralatione, sed ad hebraicæ linguæ amussim novissime ita recognita et scholiis illustrata, ut plane nova editio videri possit [La Sainte Bible, selon la traduction de Sante Pagnini (bibliste hébraïste dominicain italien, 1470-1541), mais si strictement et nouvellement conforme à la langue hébraïque, et éclairée de commentaires, qu’elle peut être parfaitement tenue pour une édition originale] (Lyon, Hugo a Porta, 1542, in‑8o), avec épître intitulée Michaël Villanovanus lectori S. [Michel Villanovanus salue le lecteur].

  4. V. note [49] du Procès opposant Jean Chartier à Guy Patin en juillet 1653, pour Michel Servet, son destin tragique et son « Rétablissement du christianisme » (Vienne, 1533), où il a décrit la petite circulation du sang avec une sidérante exactitude.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Naudæana 4, note 47.

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(Consulté le 19/04/2024)

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