- L’Histoire des Pays-Bas, {a} depuis l’an mil cinq cent soixante jusques à la fin de l’année mil six cent et deux. Contenant tout ce qui s’y est passé de plus mémorable, tant sous les gouvernements de la duchesse de Parme, du duc d’Albe, du grand commandeur de Castille, du Conseil royal, de Don Jean d’Autriche, du prince de Parme, du comte de Mansfeld, des archiducs Ernest et Albert, que sous le gouvernement du prince d’Orange, des États généraux des Provinces-Unies, du comte de Leicester et du prince Maurice de Nassau. Avec sommaire, annotations et indices. Volume i, {b} contient un long Extrait de la légende du cardinal de Granvelle (volume i, pages 11‑36), dont deux passages correspondent au propos du Borboniana.
- Descente du cardinal (livre premier, pages 11‑12) :
« [Il] {c} eut pour grand-père (car plus avant il n’est connu) un maréchal de la ville de Nozereth en la Franche-Comté, {d} duquel le nom est supprimé, pour avoir été d’un métier tant abject. Son père fut Nicolas Perrenot (qui premier prit le surnom de Granvelle, d’une seigneurie qu’il acheta) {e} ayant été simple clerc de pratique et, depuis, subtil et cauteleux procureur postulant en la Cour de parlement à Dole qui, pour son esprit vif, par la recommandation du chancelier de Bourgogne, fut avancé en état de secrétaire à Madame Marguerite, duchesse douairière de Savoie, tante de l’empereur Charles v ; {f} où il fit si bien ses affaires qu’après le trépas du chancelier, il entra au service de l’empereur, non seulement en qualité de secrétaire, mais bien de conseiller principal ; et petit à petit, vint en tel crédit qu’au prix de lui, {g} tous les autres n’étaient rien ; tellement qu’il eut beau moyen d’amasser grandes richesses qu’il laissa à ses enfants. »
- Cardinaux signalés de notre temps (livre premier, pages 35‑36) :
« Aussi, afin que les princes et rois remarquent les humeurs de cette ambitieuse sorte de gens qui se nomment ecclésiastiques, lesquels seront aisés à connaître, si on considère leur vie, celle de ce cardinal servira de modèle et préavertissement ; et tout d’un même chemin, qu’ils se représentent les grands maux et très dangereux inconvénients qui sont survenus à la chrétienté par quelques cardinaux signalés. {h} Dont le premier fut Julian qui, rendant son maître Ladislas, roi de Pologne et de Hongrie, parjure en la paix faite avec Amurat, sultan des Turcs, fut cause de la mort de ce prince, au grand détriment de toute la chrétienté, < mais de la > prospérité et accroissement de ce Barbare et de sa postérité jusques aujourd’hui. {i} Le second, Charles, cardinal de Lorraine a, par l’espace de plusieurs années que son crédit a duré sous les rois Henri ii, François ii, Charles ix et Henri iii, mis la France à feu et à sang, fait infinis maux à ses maîtres et sujets, comme maintes histoires publiées le vérifient distinctement. {j} Et pour le troisième, Antoine Perrenot, cardinal de Granvelle, qui à son trépas (ayant par ses mauvais conseils et pire conduite) laissé tout les Pays-Bas en tels troubles et désordres, comme nous les voyons, sera cause de la perte générale et indubitable d’iceux pour la postérité de son maître, mort sans y avoir pu mettre ordre. »
- Par Jean-François Le Petit (1545-1615), « greffier de Béthune en Artois » (selon le Salut de l’imprimeur aux lecteurs).
- Saint-Gervais, Jean Vignon, 1604, in‑8o de 1 582 pages.
- Antoine de Granvelle (v. supra note [19]) dont est présentée la généalogie (« descente »).
- Pour Le Petit, Pierre Perrenot (v. infra note [23]) était un maréchal-ferrant originaire de Nozereth, ancien nom de Nozeroy, ville située à 15 kilomètres au nord-est de Champagnole, dans l’actuel département du Jura.
- La seigneurie de Granvelle, acquise par Nicolas Perrenot (v. infra note [23]), se trouvait sur l’actuelle commune de Grandvelle-et-le-Perrenot (à 20 kilomètres au sud-ouest de Vesoul, dans l’actuel département de la Haute-Saône).
- Marguerite d’Autriche (1480-1530), tante de Charles Quint, gouverna les Pays-Bas de 1507 à sa mort, et fut duchesse de Savoie de 1501 à 1504, année où mourut son époux, Philibert ii de Savoie, ce qui lui valut dès lors le titre de duchesse douairière.
- Par comparaison avec lui.
- Mes petites retouches ont rendu la phrase intelligible, mais sans rendre élégant le style de Le Petit.
- Sur le conseil du cardinal Julian (Giuliano) Cesarini (1398-1444), Ladislas iii Jagellon (1424-1444), roi de Pologne en 1434 et de Hongrie en 1440, ne respecta pas la trêve de dix ans qu’il avait signée avec le Grand Turc Amurat ou Mourad ii (1404-1451). Le cardinal et le roi furent tués par les Ottomans au cours de la bataille de Varna (10 novembre 1444).
- Charles de Lorraine (1524-1574) fut nommé cardinal en 1547. À la mort de son frère aîné, François ier de Lorraine, duc de Guise (1563, v. note [156], lettre 166), Charles devint le chef de la Maison de Guise, et l’un des ardents défenseurs du catholicisme dans sa lutte contre le protestantisme.
- Thomas Perrenot (Besançon 1521-Anvers 1571), frère puîné d’Antoine, a possédé de nombreux titres de noblesse hispano-flamands, dont celui de comte de Cantecroix (ou Cantecroy, terre proche d’Anvers). Il fut ambassadeur d’Espagne à Vienne, à Paris et en Angleterre, chambellan et sommelier de l’empereur Maximilien ii (v. infra notule {g}, note [24]). Après lui, le comté passa à son fils François, qui fut ambassadeur de l’empereur à Venise. Mort sans descendance, François transmit le titre de Cantecroix à son neveu, Thomas-François d’Oiselet, fils de Perronne Perrenot, épouse d’Antoine d’Oiselet, baron de Villeneuve.
- V. note [4], lettre 25, pour Philippe de Fresne-Canaye et ses Lettres et ambassades (Paris, 1635-1636). J’ai recouru au tome second de la réédition de 1644, {a} qui contient (aux années 1604-1605) contient trois passages sur le comte de Cantecroix.
- Livre troisième, page 277, lettre à M. de Beaumont, {b} datée de Venise le 9 juillet 1604 :
« Nous y avons {c} depuis peu de jours le comte de Cantecroix, neveu et héritier du feu cardinal Granvelle, ambassadeur ordinaire pour l’empereur : {d} il y est venu avec un ameublement correspondant à ses richesses, car ceux qui ont vu les meubles qu’il a apportés les évaluent à deux cent mille écus. Cela donne à discourir à quelques curieux, qui s’imaginent qu’on ne lui ait pas donné cette ambassade sans quelque grande occasion ; mais si c’est pour embarquer cette République à la guerre contre le Turc, j’oserais assurer qu’il y perdra son temps. Aussi crois-je qu’il ait désiré cette charge pour sa commodité, sans regarder plus loin que de se rendre l’empereur favorable en un grand procès qu’il a contre quelques siens parents. »
- Ibid. pages 286‑287, lettre à M. de Villeroy, {e} datée de Venise le 14 juillet 1604 :
« Le comte de Cantecroix est arrivé secrètement et ne se veut point laisser voir qu’il ne soit guéri de sa goutte. Ceux qui ont vu ses meubles disent qu’il en a apporté pour plus de deux cent mille écus. Ce grand apparat donne sujet à quelque curieux de s’imaginer qu’il soit envoyé pour grandes occasions, et même pour traiter une ligue contre le Turc ; mais je n’en crois rien, l’empereur ayant été fraîchement refusé d’une petite somme qu’il demandait en prêt. Il a dit à un des miens, par lequel je l’ai fait visiter, qu’il avait une commission pour ses fiefs qui relèvent de l’Empire par toute l’Italie, pour recevoir les profits, aveux et dénombrements, et donner les investitures. Je crois que s’il eût eu autre charge extraordinaire, il ne l’eût pas celée. Il dit avoir demandé permission à l’empereur de me voir souvent, pour avoir beaucoup de parents et d’amis en France, et que l’empereur l’assura qu’il le trouvait bon et qu’il était en bonne amitié avec Sa Majesté, {f} et ne craignait rien de sa part ni de ses ministres. »
- Livre quatrième, pages 576‑577, lettre au roi Henri iv, datée de Venise le 4 mai 1605 :
« Le comte de Cantecroix, qu’on appelle ici l’ambassadeur de la Blanque parce qu’il ne parle d’autre chose que d’une blanque {g} qu’il veut faire de ses bagues, me vint voir hier, au sortir d’une grosse maladie qui l’a pensé emporter, dont il est encore si faible qu’il ne peut mettre un pied devant l’autre, pour me prier de supplier très humblement Votre Majesté lui faire savoir si vous auriez agréable qu’il se pourvoie par requête en votre Conseil, pour se plaindre du déni de justice que lui fait l’archiduc Albert, {h} n’ayant jamais voulu permettre qu’il exécute un jugement qu’il a obtenu au Conseil de l’empereur contre le sieur de Thoraise ; {i} et si, ledit déni bien vérifié, Votre Majesté lui octroiera lettre de marque contre les sujets du dit archiduc ; parce qu’en ayant votre parole, il est résolu de se retirer en France et épouser votre service avec la même fidélité qu’il a portée jusqu’ici à la Maison d’Autriche ; résolution que je trouve d’autant plus extravagante qu’en tous ses propos il se montre plus espagnol que les Espagnols, et exalte la grandeur de ce roi-là {j} avec des hyperboles si plates qu’il s’y rend insupportable, avec ce, qu’il dit avoir une pension de lui de trois mille écus ; mais je crois que ce qui le presse, c’est qu’il n’aime point ses vrais héritiers et désire laisser son bien à deux petits bâtards qu’il a avec lui, et pour cela désire les mettre en votre protection, n’ayant pas peut-être opinion de la faire longue, comme les médecins le lui promettent, ou s’il continue sa vie désordonnée. Il y a quelque temps qu’à la même prière du dit comte, j’avais touché quelque chose de cette sienne intention ; mais il désire une assurance plus particulière sur laquelle il se puisse résoudre d’abandonner tout ce qu’il a sous l’obéissance du dit archiduc. Il dit que sa mère était héritière de la Maison de Bréderode et avait l’honneur de vous appartenir. {k} Je supplie très humblement Votre Majesté me commander ce qu’il lui plaît que je lui réponde. »
- Paris, veuve de Mathurin Du Puys, in‑4o de 677 pages.
- Christophe de Harlay, comte de Beaumont, était ambassadeur ordinaire de France en Angleterre ; fils d’Achille i (v. note [19], lettre 469), il mourut en 1615 (Popoff, no 106).
- Ici, à Venise.
- Rodolphe ii (v. note [39] du Borboniana 3 manuscrit).
- Nicolas i de Neufville, v. note [5] du Borboniana 8 manuscrit.
- Henri iv, roi de France.
- Loterie.
- Albert d’Autriche, gouverneur des Pays-Bas (v. notule {b}, note [23] du Grotiana 2), frère de l’empereur Rodolphe ii.
- Marguerite Perrenot de Granvelle, fille aînée de Nicolas, avait épousé Jean d’Achey, baron de Thoraise. Il s’agissait probablement de leur fils Antoine : ce cousin germain du comte de Cantecroix avait hérité de tous les biens de leur oncle, le riche abbé Charles Perrenot de Granvelle.
- Philippe iii, roi d’Espagne.
- Thomas Perrenot, le père du comte de Cantecroix, avait épousé Hélène de Bréderode, issue d’une noble famille hollandaise de vieille souche, qui luttait alors pour l’indépendance des Provinces-Unies, avec le soutien de la France.
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