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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits. Ana de Guy Patin : Borboniana 3 manuscrit

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(Consulté le 24/04/2024)

 

Ms BnF Fr 9730 page 13 [1]

  • Le lundi 14e de décembre 1637. Je me doutais bien que le Père Caussin [2] ne garderait guère cette place de confesseur du roi : [3] c’est un pauvre esprit de Champenois ; il n’est guère fin pour un jésuite ; il régentait à Blois [4] à 50 écus de gage avant que s’être mis avec eux. Il est fils d’un médecin de Troyes, [5] qui y avait été autrefois principal du collège, [6] qui n’était pas grand personnage. M. Grangier [7] a raison de dire que deux moutons et un Champenois sont trois bêtes, car il sont bien pauperes spiritu[1]

  • Aut regem aut fatuum nasci oportet : c’est un proverbe qui est bien et doctement expliqué dans Érasme ; [8] il est pris de Sénèque [9] in ludo de morte Claudii Cæsaris[2][10] Il y a encore d’autres adages dans Érasme, merveilleusement bien expliqués, comme Dulce bellum inexpertis, Scarabæus aquilam, Sileni Alcibiadis et Spartam quam nactus es orna[3]

  • Messire Jean-Pierre Camus, évêque de Belley[11][12] eut permission du pape de tenir avec son évêché le doyenné de Saint-Germain, [13] que lui avait fait donner le cardinal de Bérulle, [14] < durant > cinq ans ; au bout desquels il l’a changé. Il est à présent bien riche : il a plus de trente mille écus d’argent comptant ; il est grand ménager, il ne dépense rien. [4]

  • J’ai succédé à G. Critton [15] en sa charge de professeur du roi : il est mort l’an 1611, avec la vérole. [16] Il se maria peu d’années avant sa mort avec une Blacvod, [17] fille d’un conseiller de Poitiers ; [18] laquelle s’est remariée à M. de La Mothe Le Vayer, [19] qui avait autrefois été pensionnaire de Critton, et depuis substitut du procureur général. Critton et sa femme n’étaient pas en trop bon ménage, et < il > eut regret de s’être marié. Il donna à son insu mille écus aux jacobins[20] et quelque chose à d’autre Écossais qu’il aimait. Il était bâtard d’un apothicaire d’Écosse. Il était savant homme. [5]

  • Il y a eu un autre Jac. Criton [21] en Italie, fort savant : il promettait répondre de omni scibili ; [6] il avait été précepteur du jeune duc de Mantoue, [22] par lequel il fut tué en un bordel, lui demandant pardon à genoux de ce qu’il était allé voir sa garce ; < ce > dont le prince [23] fut si indigné qu’il ne voulut voir son fils de longtemps. C’est à ce Jacques Criton que Manuce [24] a dédié ses commentaires sur les [page 14] Paradoxes de Cicéron : [25] il le fait là fort savant ; et néanmoins, ses vers n’étaient guère bons. Vide Præmetias G. Conæi, pag. 40. [26] De illo Critonio, vide Gabr. Naudæi Paranymphum, in Elogio Nic. Helioti ; [27][28][29] vide Critonum in duab. Orationib. habitis, etc., in‑8o, 1609, pag. 31. Voyez les Avis de Parnasse, p. 256. [7][30]

  • Marie Stuart [31] étant en France, était présomptive héritière d’Angleterre. Tandis que Marie d’Angleterre [32][33] vivait, femme de Philippe, prince d’Espagne, [34] on mit Élisabeth [35] prisonnière, laquelle même, on eût fait mourir, mais Philippe l’empêcha, non pour bien qu’il lui voulût, mais par envie qu’il portait à la France, à cause qu’Élisabeth morte et Marie, sa femme, mourant après, comme elle fit, sans enfants, l’Angleterre venait de droit au roi de France, [36] mari de Marie Stuart. Marie d’Angleterre était stérile, quia exsucca[8] fort maladive et pulmonique, et fort laide.

  • Ubertus Folieta [37] était de Gênes. [38] Le président de Thou [39] confesse avoir quelquefois pris de lui comme d’un homme fort docte, et dit : Qui enim potuissem melius ? [9] Et néanmoins, H. Estienne [40] a écrit adversus Ub. Folietam. Obiit anno 1581. Vide Thuanum, tom. 3. p. 534. 534. e. tomi. 3. [10]

  • Ces Grecs qui viennent de deçà se moquent de ceux qui prononcent η en êta, ουτος εστιν βαρβαρισμος. [11] Vide logicam Jo. Alstedii, pag. 753. et 754. [41] Vide Alphabetum Græcum Rob. Stephani cum scholiis Th. Beza, in Signatura C p. 11 et in sign. D. p. V[12][42][43][44]

  • Le Père Joseph [45] est fils du président Leclerc. [46] Il fut baptisé à Sainte-Croix de la Bretonnerie, [47] tambour battant, avec fifres et clairons. M. François d’Alençon, [48] duc de Brabant, frère de Henri iii [49] fut son parrain. [13] Il tua un homme étant jeune, et cette affaire lui aida bien à le faire résoudre à être moine. Les capucins [50] le voulurent mettre dehors durant son noviciat, à cause qu’il était maladif, et peu de chose les en empêcha. Même, il est encore fort malsain aujourd’hui ; il a des cautères, [51] des ulcères fort puants, des érysipèles. [52] On dit qu’il sera bientôt cardinal ; je crois néanmoins qu’il ne vivra plus guère, car il est bien cassé. Il est fort laborieux, il passe plusieurs nuits sans dormir et expédie beaucoup d’affaires. Il serait homme de bon conseil s’il n’avait tant d’ambition dans la tête. C’est un homme infatigable : quand il allait autrefois au champ, il faisait 20 et 22 lieues par jour, et tuait tous ses compagnons à force de les faire aller vite. Il a été fort malade au mois de mai, l’an 1638 ; le bruit de cette maladie alla partout ; et comme on en racontait l’histoire à M. de Bassompierre [53] qui était dans la Bastille, [54] il répondit qu’il trouvait le Père Joseph bien malade, et qu’il en mourrait, que ce mal était mortel puisque le pourpre [55] lui était rentré ; il faisait allusion à la pourpre des cardinaux, comme si le Père Joseph eût été malade de regret de n’avoir pas encore été fait cardinal. [14] Le Père Joseph s’est rendu capucin par pauvreté : il n’avait pas vaillant un liard. Il était un jour dans une salle, comme M. Petit, [56] médecin de la reine mère, [57] se plaignait à des capucins, de son fils qui s’y était rendu, et disait qu’il voulait le ravoir. Un vieux capucin disait à M. Petit pour le consoler : « Monsieur, Dieu se sert de divers moyens pour nous attirer à lui. Je vous alléguerais bien l’exemple d’un jeune homme de riche maison, fils d’un président de la Cour, qui a depuis peu quitté le monde [page 15] pour se mettre avec nous » (il entendait le Père Joseph qui était tout contre lui). M. Petit lui répondit en colère : « Je sais qui il est celui-là, ne me le nommez pas, c’est un fou ; et encore plus fou eût-il été s’il eût eu du bien, mais il n’en avait point. Il était gueux, et c’est pourquoi il s’est fait moine. » Le 1er d’août 1638. Il fit quelque temps les doux yeux à la fille du président de Jambeville ; [58] mais quand il vit qu’on ne < la > lui voulait point donner, et qu’il ne pouvait pas plus longtemps demeurer dans le monde, faute de biens, il délibéra de se faire capucin, et s’en alla prendre l’habit à Orléans. [15]

  • Carolus Paschalius [59] était natif de Carmagnole. [60] Il était savant. Il est mort fort riche à Abbeville, [61] l’an 1625, sans enfants ; mais il a laissé tout son bien au fils de sa femme, nommé M. Lavernot. [16][62]

  • Belurger [63] était bourguignon, < né > près de Sainte-Reine. [64] Il avait la pérégrinomanie [65] dans la tête : il fut en Italie, en Espagne, en Angleterre, et est mort en Alexandrie. [17][66]

  • Bénévent[67] qui a fait une paraphrase sur la Morale d’Aristote, [68] a pris de divers auteurs, mais particulièrement d’Eustratius. [18][69]

  • Αδιαθετος dicitur qui obiit sine testamento, qui non habet jus neque factionem testamenti, cum testamentum facere posset. Vide Theophilum in Institutionib. Inst. 3. tit. 1. [70][71] Theophilus ille non est antiquus ; non multo superat sæculum Accursii. [72] Vide Lexicum Rob. Constantini, [73] pag. 30, de loco Plutarchi[19][74][75]

  • Bodin [76] sans doute était juif : [77] il avait été carme ; [78] habebat aliquid ferini ; maledixit sine causa de Cujacio atque Turnebo[20][79][80] Quand il dit quelque chose, il tâche de la prouver toujours par le Vieil Testament. [81] Témoin, son Théâtre de nature, in quo vix meminit Aristotelis[21] Il est auteur d’un livre manuscrit qui court, lequel il a nommé Heptalomeres[82] où il fait disputer un juif, un chrétien et un turc ensemble, et fait avoir toujours l’avantage au juif. Ce livre ne s’imprimera jamais, on n’oserait. J’ai quelquefois remarqué des fautes dans son Oppian[83] Il était savant, mais non pas exact, ni assez capable pour reprendre les autres. Il a tort de s’être moqué de Cujas in præfatione Cognit. Historiæ. Il haïssait à parler de Jésus-Christ. Dans sa République, il cite souvent des vers de Baptista Mantuanus ; [84] je pense qu’il avait lu des vers de ce carme quand il était novice. Il contrefit le ligueur durant la Ligue. Bodin était un étrange compagnon en fait de religion. Voyez la lettre de M. Gillot [85] à Jos. Scaliger, touchant Bodin, pag. 439. [22][86]

    Il fait bon avoir réputation de se lever matin, < et puis on se recouche après cela, et > on dort jusqu’à midi. [23]

  • On a mis dans le recueil de mes poèmes [87] deux vers de M. Du Val[88] professeur du roi, pour épitaphes de Henri iv[89] mais il n’en est pas l’auteur : il n’a changé que le nom de Henri, car c’est l’épitaphe de Mathieu Corvin, [90] roi de Hongrie, qui est en son éloge dans P. Jove ; [91] je les ai lus aussi dans des recueils d’épitaphes. [24][92][93]

  • Buchanan [94] a fait deux épitaphes bien sanglantes à Jean Hamilton, [95] arch. d’Édimbourg, qui fut pendu comme complice de la mort de Henry Stuart, [96] père de Jacques. [97] La première commence ainsi :

    Prostibulum plebis miseræ, lupa publica mater, etc.

    [page 16] Et la seconde ainsi :

    Corpus Hamiltoni jacet hac antistitis urna, etc.

    Vide edit. Salmuriensem Poematum Buchanani, pag. 146 2. partis[25]

  • Pontanus[98] le jésuite qui a commenté le Virgile[99] n’était guère savant : tout ce qu’il a mis de bon là-dedans, il l’a pris mot à mot des critiques ; il n’en savait pas de la moitié assez pour ce grand auteur ; tout ce fatras de commentaires est cento loyoliticus ; propterea nihil[26]

  • Du P. Petau[100] Le Père Petau, jésuite, est fils d’un marchand d’Orléans. [101] Son frère aîné [102] étant chanoine, lui quitta son bénéfice et se fit chartreux ; [103] et lui quitta le même bénéfice, se faisant jésuite, à son autre frère, docteur en théologie. [104] Étant fort jeune, il enseignait la philosophie à Bourges, [105] avant que les jésuites fussent revenus en France ; et s’étant réinstallés à Bourges, malgré eux, il continua son cours dans leur collège, et fallut qu’ils attendissent jusqu’à la Saint-Rémy. On a balancé si on le prendrait pour être confesseur du roi, ou le P. Sirmond ; [106] mais ce dernier s’y est trouvé plus propre. Ils ont eu de grandes querelles ensemble, et ont été prêts d’écrire l’un contre l’autre. Le P. Sirmond est un homme doux, mais Peteau est tetricus atque morosus[27] avec une fort mauvaise mine. Le P. Sirmond écrit mieux que le P. Petau, et est bien plus doux, plus poli, plus agréable et plus retenu que lui.

  • Le cardinal Duperron [107] étant jeune, tua un homme, dont il en fut en grande peine, jusque sur la sellette. [108] M. de Tiron [109] fut cause que le président de Harlay [110] lui fit sauver la vie ; ce que MM. de Harlay, de Thou, [111] Servin [112] et autres gens de bien du Parlement lui reprochaient tacitement aux états généraux de 1615, [113] quand il fit sa grande harangue contre le tiers état. [28][114][115] Il était fort débauché in venereis : [116] quand il était à Rome, il courait le bordel toute la nuit, et le lendemain dormait jusqu’à midi, sans aller au consistoire ; dont les autres cardinaux se moquaient de lui. Roma quid est ? Amor est ; quis amor ? præposterus : unde ? Roma mares ; noli dicere plura, scio[29][117][118] À cause de cela, il laissa mauvaise réputation de son nom à Rome, où on fit ce pasquin contre lui : « Plus charlatan qu’éloquent ; [119] plus éloquent que savant, plus savant qu’homme de bien. » M. de Tiron et lui avaient sué la vérole ensemble ; [120] il était beaucoup obligé à ce M. de Tiron, qui ne l’appela jamais, depuis qu’il fut cardinal, que sapientissime Magister noster. Quand il revint d’Italie, il était si rompu de la débauche qu’il ne pouvait se tenir sur ses genoux. [30][121]

  • L’an 56e est un grand climatérique[122] et principalement aux savants : M. de Pibrac [123] y mourut ; et M. de Foix, [124][125] ambassadeur à Rome, maître du cardinal d’Ossat ; [31][126] Scipio quoque, apud Ciceronem, in Somnio Scipionis, ille est Publius Scipio Africanus Minor, [127][128] qui mortuus in lecto inventus est. Vide de illo Scipione Dupleix, [129] tom. 2 de L’Histoire Rom. p. 277 ; ut et de hoc anno climacterico 56 ; Henricum Rantzovium, [130] Tractatu de annis climactericis, pag. 216. et seqq. Vide Lud. Duretum in Coacas Hippoc. p. 439[32][131][132]

  • Si j’avais ce qui manque aux œuvres de Cicéron, Tite-Live, [133] Salluste, [134] Tacite, [135] Quinte-Curce, [136] Dion, [137] Varron, [138] Polybe, [139] César, [140] Diodore, [141] Origène, [142] Ammien Marcelin, [143] Pline, [144] Denys Halicarnasse, [145] Velleius Paterculus, [146] Strabo, [147] Appien Alexand., [148] Plinius major, [149] Trogus Pompeius, [150] Fabius Pictor, [151] je m’estimerais bien riche : j’aurais bientôt des marchands. [33]

    Plutarchus est princeps divitiarum, et pronus Condus scientiæ omnigenæ[34]

  • Bodin savait beaucoup de choses, mais Turnèbe savait mieux que lui.

    Multa novit vulpes, sed echinus unum magnum.
    Vide Adag. Jos. Langii. p. 450
    [35][152][153]

    Ce Bodin était un esprit présomptueux et audacieux. Il a mal à propos attaqué Cujas et Turnèbe. Voyez une préface latine qui est devant la République française, il y traite fort mal ce grand Cujas, qui était si savant et si bon homme : [page 17] Ferre non debemus, inquit, clarissimum ordinem advocatorum forensia pecora vulturesque togatos appellari a Cujacio, qui profecto aliter sentiret, nisi ab Asino Apuleii [154] rudere potius, quam latine loqui a Marco Tullio didicesset, etc. [155] Sunt illa forensia Cujacii pecora, quæ discipulis ad intuendum et ad imitandum proponere debuerat, non Apulieium istum, qui primus fœda barbarie Latini sermonis puritatem, ac detestanda maleficarum sortium impietate sacram philosophiam conspurcavit, etc[36]

  • René de la Fon [156] en sa Réponse au plaidoyer de M. Marion[157] parlant à lui et à son gendre, M. Arnaud, [158][159] allègue ce vers de Catulle : [160] Socer generque perdidistis omnia ; et Egregiam vero laudem, et spolia ampla refertis, Tuque generque tuus[161] C’est en la page 13 et 14. Ce René de la Fon est un nom supposé : c’est Richeome [162] qui a fait tous ces livres, et < ceux > de François des Montaignes. [37][163][164]

  • Les Scaliger étaient très nobles pour leur doctrine, mais je ne crois pas qu’ils soient descendus des princes de Vérone. [165] Jules-César obtint lettre de naturalité en France l’an 1526 [166] (M. Guyet [167] m’a dit les avoir vues), où il se qualifie seulement Julius Cæsar Scaliger de Burdonis, Medicus Veronensis ; [38] s’il eût été prince, il n’eût pas oublié de le dire, et principalement à ce grand roi François ier[168] qui eût en ce cas été son parent, et qui aimait tant les hommes doctes. Un jour, on disait que Joseph Scaliger [169] était parent de Rodolphe ii[170] lequel aussitôt répondit : « Je n’ai point, Dieu merci, de parents qui soient pédants. » La mère de Joseph Scaliger [171] était fille d’un apothicaire. Il dédia son Manile [172] à Henri iii, qui ne lui donna rien ; on lui avait pourtant donné espérance qu’il en aurait mille écus. Henri iv lui faisait bonne mine, mais ne l’aimait point, et fut bien aise de s’en défaire en l’envoyant en Hollande à la place de Lipse. [39][173][174]

  • M. < de > Cospéan, évêque de Lisieux, [175] me disait l’autre jour pluris facio unum Turnebum decem cardinalibus ; [40] et moi, j’aimerais mieux être Buchanan que roi d’Écosse, ou bien Érasme, [176] ou Scaliger.

  • Le fils de Barclay[177][178] qui est aujourd’hui à Rome (qui vint en France avec le légat Barberin, [179] l’an 1625) a depuis peu écrit en colère à M. le cardinal de Rich. [180] que son père et lui avaient trop fait d’honneur à la France de se dire Français, pour un mécontentement qu’il avait de notre ambassadeur à Rome ; M. de Saint-Malo [181] en a vu la lettre. Ce petit Barclay n’est qu’un fou ; il est encore trop pauvre pour être glorieux[41]

  • Nancelius[182] le médecin de Madame de Fontevraud, [183][184] a laissé un fils fort savant, [185] qui a été substitut du procureur général. Il était beau-frère de M. Scarron l’Apôtre, [186] et ont eu de grands procès ensemble pour la succession de leur belle-mère. Ce Nancel demeure près d’Angers, en une terre qui vaut environ deux mille livres de rente. [42]

  • Pour la Sagesse de Charron[187] j’ai ouï dire que c’est un fort bon livre, mais je ne l’ai point lu. Je ne lis jamais de livres français ; que si cela m’arrive quelquefois, il me semble que je bois de l’eau, qui n’est guère bonne à un Champenois comme moi. [43][188]

  • M. de Bourbon a régenté en trois collèges, savoir Harcourt, [189] Calvi [190] et les Grassins, [191] [page 18] et y a fait partout la première. [44]

  • Il y a plus de vingt ans que Salmasius est huguenot. [45][192][193]

  • Muret [194] disait qu’il eût voulu avoir été damné un mois, et être l’auteur des Géorgiques de Virgile, [195] tant il les trouvait belles et bien faites. J’ai ouï dire la même chose encore d’un autre que de Muret.

  • Si les princes protestants d’Allemagne, comme Saxe et Brandebourg, se font catholiques, cela aidera bien à rabaisser la Maison d’Autriche : notre alliance avec eux ne sera pas si odieuse à Rome.

  • Le jésuite Garasse [196] était fils du lieutenant criminel d’Angoulême, [197] lequel fut tué au tumulte que l’on fit contre M. d’Épernon [198] l’an 1588. [46] Il porta aux jésuites 8 000 lt prenant leur habit ; et comme il faisait la première à Bordeaux, il disait souvent en classe : « Qu’on me rende mes 8 000 lt, je m’en irai ; je les quitte pour 2 000 écus. » Garasse ne croyait alors guère fort à leur Père Ignace, [199] et n’y a guère cru depuis, quelque mine qu’il en ait fait en ses œuvres. Depuis, il régenta à Poitiers, où Balzac [200] lui fut écolier. Garasse était athée, [201] et parce qu’il était reconnu pour tel, il s’alla sacrifier à la peste de Poitiers, [202] afin d’en ôter l’opinion du monde : pestilentiæ periculum subeundo voluit Garassus litare invidiæ[47]

  • Il est défendu de parler du rétablissement des jésuites à Venise nisi post centum annos[48][203] Ce terme est encore bien long : il faut auparavant que l’on compte l’an 1706 ; à peine les enfants de nos enfants verront-ils ce temps-là. Le Père Cotton [204] se présenta un jour à un ambassadeur de Venise, pensant l’entretenir ; mais l’ambassadeur ne laissa de passer outre, lui disant en italien : « Je sais que vous êtes le P. Cotton, mais sachez aussi que je suis l’ambassadeur de Venise. » Le roi défunt, qui vit cela, n’en fit que rire.

  • Un vrai carme déchaussé [205] est un pauvre poète : c’est pourquoi on a tort de dire que ces gens-là n’ont point de religion. Baudius les appelait hominum genus innocentissimum ; [206] mais Horace disait gens irritabile vatum[49][207][208][209]

  • Audomarus Talæus[210] grand ami de Ramus, [211] était grand-oncle de MM. les Talon, avocats du roi[212][213] Il fut fait curé de Saint-Nicolas-du-Chardonnet [214] sur la fin de ses jours, et mourut de la vérole, ce que Turnèbe lui reprocha de ces mots : Valetudo non constat fama, si quis intus æger sit, etc. Eamus M. Ramus, allons M. Talon. Vide Operum Adri. Turnebi tom. i. pag. 262[50][215]

  • Andreas Nangerius[216] Serenissimæ Reipublicæ Venetæ [217] Orator ad Franciscum i. Galliarum Regem, obiit Blesis, oppido ad Ligerim, viii. Idus Maii 1529. anno ætat. 46[51]

  • Le Massacre des petits Innocents était une chose fort cruelle : je m’étonne comment Hérode [218] se laissa emporter à une telle colère ; mais je m’étonne bien plus de ce que, entre les Évangélistes, il n’y a que saint Matthieu qui en ait parlé ; encore n’en a-t-il dit que trois mots, chapitre 2. [219] Josèphe [220] n’en a pas parlé du tout ; dans tout le Philon le Juif, [221] il n’y a pas un petit mot qui touche ni qui serve au christianisme. [52] Nul auteur profane n’en a parlé, hormis Macrobe, [222] lib. 2o Saturn. cap. 4, ubi de Augusto : [223] Cum audisset inter pueros, quos in Syria Herodes Rex Iudæorum intra bimatum jussit interfici, filium quoque ejus occisum, ait Melius est Herodis porcum esse quam filium, pag. 270 ; et Joseph Scaliger, en son livre de Emendatione temporum, dit que c’est un trait de la providence de Dieu que Macrobe, tout [page 19] païen qu’il était, ait remarqué cet infanticide, c’est en la page 550. [53] Vide Casaubonum in Baronium, [224][225] pag. 145, Salianum tomo 6. Annalium, pag. 793, [226] et in Epitome eorumdem, p. 1081. Vide quoque Spondanum [227] in Epitome Baronii tom. i, pag. 16, Abra. Bucholcere [228] Chronologiam, in‑fo, pag. 627. Vide Montacutium, [229] in Vita Christi, parte i, pag. 257[54]


Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr
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