À Johann Daniel Horst, le 15 juin 1663, note 5.
Note [5]

« thèse de Leipzig sur la Poudre du Pérou » :

Anti-quartii Peruviani Historia, quam Divino Indultu, et Gratiosissimæ Facultatis Medicæ Præscitu, sub Præsidio Viri Excellentiss. Experientiss. Dn. Pauli Amman, Vratisl. Siles. Phil. et Med. Doct. Colleg. B. Mar. Virg. Collegiati, et p.t. Præpositi, Præceptoris et Promotoris sui ævum Venerandis, Eruditæ Philiatrorum Censuræ subjiciet Christophorus Rothmann, Lygio-Siles. in Acroaterio Medicorum, ad d. xiii. Febr. An. m. dc. lxiii.

[Description de l’Anti-quarte du Pérou {a} que, par permission divine et prévoyance de la très bienveillante Faculté de médecine, Christoph Rothmann, natif de Liegnitz en Silésie, soumettra au savant jugement des philiatres, en l’auditorium des médecins, le 13 février 1663, sous la présidence de son précepteur et promoteur, à vénérer sa vie durant, l’excellent et très expérimenté M. Paulus Ammann, {b} natif de Breslau en Silésie, docteur en médecine et philosophie, agrégé au Collège de la bienheureuse Vierge Marie, {c} qu’il dirige à présent]. {d}


  1. Le quinquina (v. note [7], lettre 309), médicament au sujet duquel Guy Patin émettait de sérieuses réserves (v. la suite de la présente lettre et la note [5] de la lettre latine 376).

  2. Paul Ammann (1634-1691).

  3. Le Collegium Beatæ Mariæ Virginis, ou Jungfrau Kollege, fondé en 1422 (avant la Réforme), était l’un des trois collèges de l’Université de Leipzig.

  4. Leipzig, Johann Wittigau, 1663, in‑4o.

V. note [9], lettre 309, pour la Pulvis febrifugus… [Poudre fébrifuge…], seul ouvrage connu de Jean-Jacques Chifflet (v. note [18], lettre 104) contre les abus thérapeutiques du quinquina, qui a été imprimé deux fois (sans lieu, 1653, et Lyon, 1654). Dans sa lettre latine du 25 janvier 1657 à Johannes Antonides Vander Linden (note [7]), Patin avait cependant déjà parlé de deux opuscules [libelli duo] de Chifflet sur le sujet.

La conclusion de Paul Amman, à la dernière page de sa thèse, tenait en cinq points :

Continet hæc pagina quinque cautelas, si rite hoc pulvere uti velis, quarum (1) ut solum adhibeatur in intermittentibus, nam in continuis non valet, propter varias rationes (2) in tertiana et quartana, quæ per multos dies confirmata, ne aliquis ab initio illo utatur, ita enim corpus prius non purgatur, nec statim post initium, ut cognoscamus prius, an sit legitima l. notha ? Prior siquidem cessat septimo circuitu, et sic hujus corticis usus est superfluus. Chifletius per hæc verba : quæ per multos dies confirmata, intelligit confirmationem febris : verum si tunc exhiberetur, quid laudis haberet hic pulvis ? (3) Corpore prius purgato et quidem bene purgato. Reperiuntur enim Medici, qui specificis utuntur neglecta methodo : sed hi, ab Empiricis nihil differunt, nec, quid medicina in hoc vel illo præstet, edisserere valent, nisi forte fortuna curatio respondeat. (4) quatriduo post nullum medicamentum assumendum, ut scil. ejusdem energia nobis fiat manifesta. Ex aliorum enim assumatione sive sint purgantia, sive alterantia, sive diaphoretica, facile febriccitantis corpus alterari, et sic dubius reddi Medicus potest, cuinam effectu (si bene cedat) assignet ? (5) absque consilio Medici non usurpando. Arrigant hic aures quotquot culpa propria, et δοκισοσοφια sanitatem suam et aliorum pessundant, inopportuna si quidem Medicinæ administratio morbi potius exercitatio interdum est, quam curatio. Ne autem quis putet Medicorum avaritia has cautelas esse excogitatas, et in hunc finem a nobis adductas, filum abrumpimus hic, et post nostra cognitione de cortice peruviano satis hac vice dictum cupimus.

[Si vous voulez employer cette poudre selon les règles, voici cinq précautions à respecter : (1) ne la prescrire que dans les fièvres intermittentes car, pour diverses raisons, elle n’est bonne à rien dans les continues ; (2) ne l’employer que dans la tierce et la quarte, que de nombreux jours d’évolution ont confirmées, mais non dès leur commencement, et non sans avoir préalablement purgé le corps et attendu de savoir si la fièvre est légitime ou bâtarde ; {a} avant la fin du septième cycle fébrile, {b} l’emploi de cette écorce est superflu. En disant que la fièvre a été confirmée pendant de nombreux jours, Chifflet insiste sur la confirmation de son diagnostic : sans cela, pourquoi louer les vertus de ce médicament ? (3) Il faut que le corps ait été préalablement purgé, et certes bien purgé : on trouve des médecins qui, au mépris de la méthode, recourent à des spécifiques ; {c} mais ces gens-là ne diffèrent en rien des empiriques, sans qu’il soit utile de disserter sur celle de ces deux pratiques qui prévaut sur l’autre, sauf à répondre que la guérison peut être le fait du hasard. (4) Aucun médicament ne doit être pris pendant quatre jours {d} de manière, bien sûr, que son puissant effet ne nous échappe pas : l’absorption d’autres remèdes, qu’il s’agisse de purgatifs, d’altérants ou de diaphorétiques, {e} modifie en effet aisément le corps d’un fébricitant, et pourquoi le faire si cela plonge le médecin dans le doute sur le médicament à qui attribuer l’effet (s’il s’avère favorable) ? (5) Il ne faut pas l’utiliser sans la prescription du médecin : se dressent ici les oreilles, tant l’erreur personnelle et la δοκισοσοφια {f} ruinent la santé de celui qui en est coupable et celle des autres, puisque l’exercice mal avisé de la médecine aboutit parfois plutôt à attiser qu’à guérir la maladie. Afin pourtant que nul n’aille penser que nous avons conçu ces mises en garde, et les avons présentées en conclusion, pour satisfaire la cupidité des médecins, nous rompons là le fil, estimant en avoir ainsi dit suffisamment sur ce que nous savons de l’écorce du Pérou].


  1. Au mot fièvre, notre glossaire en définit les principaux types alors reconnus. On disait la fièvre « légitime » si elle suivait une périodicité précise, et de « bâtarde » dans le cas contraire.

  2. Le cycle (ou période) de la tierce était de deux jours (survenue tous les troisièmes jours), et de trois jours pour la quarte de (survenue tous les quatrièmes jours).

  3. Sous-entendu, « en première intention » ; v. note [11], lettre 181, pour la distinction entre remèdes spécifiques (comme ici le quinquina) et symptomatiques (comme ici les purgatifs).

  4. Sous-entendu : « après la prise du quinquina ».

  5. V. notes [23], lettre 156, pour les altérants (ou altératifs), et [32], lettre 101, pour les diaphorétiques.

  6. Sic (dokisosophia) pour δοκησισοφια (dokêsisophia) : « fausse opinion qu’on a de sa sagesse ou de son habileté » (Bailly).

  7. Patin adhérait probablement à ces conclusions prudentes car elles restreignaient l’emploi du quinquina à des indications soigneusement définies, sans en faire une panacée capable de remédier à toutes les fièvres. Elles incluaient les accès de paludisme (malaria) où les dérivés de la quinine sont encore largement employés de nos jours.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Johann Daniel Horst, le 15 juin 1663, note 5.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=1280&cln=5

(Consulté le 27/04/2024)

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