L. latine 227.  >
À Johann Garmers,
janvier 1663

[Ms BIU Santé no 2007, fo 122 vo | LAT | IMG]

Au très distingué M. Johann Garmers, docteur en médecine à Hambourg. [a][1]

Enfin, après bien des recherches et bien des semaines, enfin, dis-je, nous avons trouvé l’homme qui vous convient, c’est-à-dire un chirurgien de bonnes mœurs, savant, habile en son art et qui parle latin. [2] Il a été fait maître en chirurgie. [3] il y a 12 ans, en ma présence et sous mon décanat ; [4] et j’ai signé en premier, comme c’est la règle, de ma propre main, en tant que doyen de la Faculté de médecine, approuvant sa compétence et son admission à la maîtrise de l’art. Il vous appartiendra donc de présenter cette mienne attestation aux édiles de votre ville, à votre juge ou à votre maire, pour qu’ils décident entre eux s’ils ont besoin d’un tel homme. Il porte chez nous le nom de Claude Jacquemin, [5] il est Parisien de naissance, âgé de 35 ans. Si un tel praticien vous est nécessaire, écrivez quand vous voudrez, je vous prie, à quel prix et pour quel salaire vous désirez l’engager. [1] Nous n’avons ici ni livre nouveau ni nouvelle annonce d’aucun libraire : nous attendons pour le mois qui vient le Cardan complet en 10 tomes in‑fo, que nous promettent les libraires de Lyon ; [6] mais ceux de Londres nous enverront au printemps prochain le Diogène Laërce de Vitis philosophorum, grec et latin, avec les commentaires de divers auteurs, [7] ainsi que le Samuel Bochart de Animantibus sacræ Scripturæ[2][8] Je salue le très noble M. Moller. [9] Nicolas Fouquet, [10] naguère notre surintendant des finances, est encore enfermé dans la prison royale. La Chambre de justice continue de faire le procès aux partisans : on dit que s’ils ne sont tous pendus, au moins on leur coupera la bourse, et qu’ils n’en sortiront que par la porte dorée[3][11] Pour nos affaires étrangères, je n’ai presque rien à vous annoncer : ce Jupiter capitolin [12][13] n’est pas encore rentré en grâce auprès de notre Zeus français, [4][14] ce qui fait que beaucoup de gens prédisent une guerre en Italie au printemps prochain. Dieu puisse-t-il empêcher cela, à moins que ce soit pour l’avantage du monde chrétien. Vale et aimez-moi.

De Paris, le […e de] janvier 1663. [5]

Votre Guy Patin de tout cœur.


a.

Brouillon autographe d’une lettre que Guy Patin a écrite à Johann Garmers, ms BIU Santé no 2007, fo 122 vo.

1.

Pour cette requête, v. le haut de la 3e page de la lettre que Guy Patin avait écrite à Johann Garmers le 17 novembre 1662.

Claude Jacquemin n’a laissé de trace ni dans l’Index funereus chirurgicorum Parisiensium. Il ne figure pas non plus parmi les chirurgiens barbiers que Guy Patin a nommés dans ses Commentaires sur les Actes de la Faculté et sur ses Décrets et assemblées en 1650-1651 (aucun ne figure en tant que représentant de sa corporation dans les Commentaires de l’année suivante).

V. note [1], lettre 6, pour le serment que les chirurgiens barbiers jurés prêtaient chaque année devant le doyen, au moment de la Saint-Luc (18 octobre).

2.

V. notes :

3.

Pour dire : en payant une amende ruineuse.

Toute cette phrase en italique est écrite en français dans le manuscrit.

4.

Diespiter (ou Dispater) est un autre nom latin de Jupiter (Zeus des Grecs) que Guy Patin a employé ici afin d’éviter la répétition du même mot pour désigner le pape, Alexandre vii, et le roi de France, Louis xiv, alors en conflit ouvert après l’affaire des gardes corses (v. note [1], lettre 735).

5.

Date incomplète en raison d’un effacement presque complet de l’encre : seuls l’année et le mois sont lisibles.

s.

Ms BIU Santé no 2007, fo 122 vo.

Cl. viro D. Io. Garmers, Medicæ Doctori, Hamburgum.

Tandem post multas inquisitiones et bene multas hebdomadas, tandem
inquam invenimus hominem vobis idoneum, i. Chirurgum bene moratum, eruditum,
in arte sua peritum, et qui Latinè loquitur. Ille est Magister factus in arte
Chirurgica, ante annos 12. me præsente, et in meo Decanatu : et ego primus,
ut moris est, subsignavi, propriáq. manu, tanquam Decanus Medicæ facultatis,
ejus eruditionem et ad magisterium Artis admissionem probavi. Tuum jam erit
meum istud testimonium ad Urbis vestræ Magnates, ad Magistratum vestrum,
aut ad Prætorem Urbanum defere, ut videant apud se an tali homine indigeant.
Vocatur apud nos Claudius Iacquemin, est patria Lutetianus, annorum 35.
Si tali homine vobis opus sit, scribe quæso quando volueris, quo pretio et quibus
stipendijs talem hominem velitis ad vos allicere. Nihil hîc habemus novi librorum,
ut neq. in tota re literaria ; totum Cardanum mense proximo expectamus, x.
tomis in folio : Nobis istud pollicentur Bibliopolæ Lugdunenses : Londinenses
v. proximo vere ad nos transmittent Diogenem Laertium, de vitis Philosophorum
Græco-Latinum, cum Commentarijs variorum, ut et Sam. Bochartum, de
Animantib. sacræ Scripturæ
. Nobilissimum virum D. Mollerum saluto.
Gazophylax olim noster Nic. Fouquet adhuc in regio carcere detinetur.
La Chambre de Iustice continuë de faire le procés aux Partisans : on dit
que s’ils ne sont tous pendus, au moins on leur coupera la bourse ; et qu’ils n’en
sortiront que par la porte dorée
. De rebus externis vix habeo quod Tibi renun-
tiem : [Die]spiter ille Capitolinus nondum redijt in gratiam cum Iove nostro
Gallico, [unde] fit ut multi proximo vere bellum augurentur in Italia. Quod
utinam non contingat nisi in Orbis Christiani commodum. Vale, et me am[a.]
Parisijs, […] Ianu. 1663.

Tuus ex animo Guido Patin.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Johann Garmers, janvier 1663

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(Consulté le 28/03/2024)

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