Note [6] | |
Auratius Poeta Regius, « Dorat, poète du roi » (ou « de Sa Majesté »), était la signature de Jean Daurat (v. note [30] du Borboniana 7 manuscrit). Aux côtés de Joseph Scaliger ou de Joachim Du Bellay (v. note [14], lettre 739), Pierre Ronsard (v. note [19], lettre 455) fut son plus célèbre élève. Son maître l’inspira et l’épaula pour fonder, vers 1550, la Brigade, ensuite devenue la Pléiade, qui revigora l’art poétique en France. Bayle a dépeint le talent littéraire de Dorat comme un sol fertile mais négligemment cultivé : « Il a fait beaucoup de vers en latin, en grec, et même en français ; et sa maladie fut enfin d’en vouloir trop faire, car il ne s’imprimait point de livre et il ne mourait aucune personne de conséquence, sans que Dorat fît quelques vers sur cette matière, comme s’il avait été le poète banal du royaume, ou comme si sa Muse avait été une pleureuse à louange. Cela fit que si sa veine ne fut pas épuisée jusqu’à la lie, elle fut du moins réduite à l’état d’un tonneau bas percé, d’où le vin, destitué de la meilleure partie de ses esprits, ne coule que faiblement. Il était si bon critique que Scaliger ne connaissait que lui et Cujas {a} qui fussent bien capables de rétablir les anciens auteurs ; mais il n’a donné au public que peu de choses de cette nature. Selon Scaliger, “ Il commençait à s’apoltronner, {b} et s’amusait à chercher toute la Bible dans Homère. ” Il mourut à Paris le 1er novembre 1588, âgé de plus de quatre-vingts ans. Le recueil qu’on fit de ses vers ne lui fut pas honorable : les libraires eurent plus d’égard à leur intérêt qu’à sa réputation ; ils y fourrèrent des poésies qu’il n’avait pas faites et quelques ouvrages qu’il n’eût point voulu avouer pour siens, quoiqu’il les eût composés. » La première épouse de Dorat se nommait Marguerite de Laval, elle mourut en 1580, après 32 années de mariage. Leur fille unique était prénommée Madeleine (1548-1636) et savante en lettres. Gilles Ménage (page 187 des Remarques sur la vie de Pierre Ayrault, Paris, 1675, v. note [10] du Borboniana 1 manuscrit) dit que : « [Dorat] eut un fils nommé Louis, qui se mêlait de poésie. Il y a des vers français de ce Louis dans ce recueil [des poèmes de son père], et le titre de ces vers porte qu’ils ont été faits par l’auteur à l’âge de dix ans. {a} Outre ce fils, il eut deux filles […]. » Madeleine Dorat épousa Nicolas Goulu (Nicolaus Gulonius, Chartres 1530-Paris 1601), à qui son beau-père céda sa chaire royale de grec en 1567. Bayle lui a consacré un court article, avec cette note C sur ce qu’Agrippa d’Aubigné a écrit du couple Goulu dans son Baron de Fæneste (v. note [26], lettre 97), livre i, chapitre viii : « Pour l’honneur de la savante Madeleine Dorat, je voudrais que Nicolas Goulu eût été marié deux fois, et que le quatrain qu’on va voir concernât son autre femme, ou que d’Aubigné ne se trompât sur la partie de celui dont il fait mention ; car cela prouverait que cette affaire ne regarde point Nicolas Goulu. Quoi qu’il en soit, c’est ainsi qu’il parle :“ Il y avait à Paris un Loudunois {a} savant homme, nommé le Goulu : il enrageait quand sa femme prenait en pension ceux qui étudiaient aux lois, il ne voulait que les petits grimauds, {b} dont il fut fait un quatrain, duquel le sens vaut bien la rime ; le voici :Du Goulu, savant, ne prend guère V. notes :
En 1581, après la mort de sa première épouse, Marguerite de Laval, Jean Dorat, âgé de 73 ans, se remaria avec Marie Langloix ; ce dont Gille Ménage (op. cit. supra) a écrit : Il épousa en secondes noces, à l’âge de 78 ans, une jeune fille de 18 ans, de laquelle il eut un fils, nommé Polycarpe. Et il disait à ceux qui le blâmaient d’avoir épousé une fille si jeune, que c’était une licence poétique et qu’il fallait mourir d’une belle épée. Et la veille de ses noces, ayant fait part de la nouvelle de ce mariage à un de ses amis, qui lui témoignait de l’étonnement de cette nouvelle à cause de l’extrême jeunesse de la fille, il lui dit : Elle sera demain ma femme, qui est un mot de Cicéron. {a} […] Et il mourut comme il avait vécu, c’est-à-dire dans une extrême pauvreté. » {b} |
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Correspondance complète et autres écrits de Guy Patin, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. –
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