Van Horne, Sagemolen. Comment ça va les écorchés? Ça va bien!

Rappelons qu’en juin 2016 à la BIU Santé, quatre grands volumes de myologie ont été attribués à l’anatomiste Johannes Van Horne (1621-1670) et au peintre Marten Sagemolen (c.1620-1669). Avec les dessins de Gérard de Lairesse pour l’anatomie de Bidloo (qui sont également à la BIU Santé), ils constituent à notre connaissance le plus vaste ensemble de dessins d’anatomie du XVIIe siècle hollandais, et l’un des plus grands fonds de dessins d’anatomie humaine pour l’époque moderne.

Après un travail de documentation qui a permis de confirmer l’identité des dessins et de retracer une partie de l’histoire de leur provenance, il fallait améliorer leur état physique et les conditions de leur conservation.

Les atlas ont été jugés suffisamment intéressants pour que soit mise en place une coopération entre la Bibliothèque nationale de France, le Centre de recherche et de restauration des musées de France et la BIU Santé. La générosité de plusieurs mécènes a permis que les bonnes intentions se transforment en une opération concrète.

Grâce à Isabelle Bonnard (experte en restauration, BnF) et Natalie Coural (responsable de la filière Arts graphiques – Photographies, C2RMF) en particulier, les opérations ont été organisées en plusieurs temps en y associant deux restauratrices indépendantes spécialisées en arts graphiques, Nadège Dauga et Nathalie Silvie, missionnées pour étudier la matérialité du corpus (techniques graphiques et papiers) et assurer la conservation curative du corps d’ouvrage des volumes :

  • Démontage des documents hors de leur reliure, en raison des contraintes exercées par les reliures sur les dessins et de l’état de conservation médiocre de la structure des reliures (coutures altérées ou trop serrées, cuir des couvertures très fragilisé). Ces états ont décidé d’un démontage justifié de l’ensemble du corpus, de façon à permettre un travail de restauration des dessins aussi efficace que possible.
  • Constat d’état très détaillé avec établissement d’une base de données informatique, prélèvements, campagne photographique, analyse des techniques graphiques, dépoussiérage approfondi, consolidations des parties en péril, rapport d’étude final. Les restauratrices indépendantes travaillent sur cette première phase dans un atelier mis à leur disposition par le C2RMF – juste en face du château de Versailles. Ce travail, long, délicat et virtuose, atteint une étape décisive : le 2 avril, trois des quatre volumes quitteront Versailles, embellis, dans un état grandement amélioré et avec une documentation très précieuse sur chacun des dessins qui les constituent. Ils seront suivis à la mi-mai par le quatrième volume. On peut espérer d’intéressants renseignements lors de la synthèse des données à propos des techniques mises en œuvre (papiers, techniques graphiques), mais aussi peut-être de l’organisation d’un atelier de dessinateur au XVIIe siècle et sur les usages ultérieurs des dessins.
  • Les quatre volumes dûment conditionnés rejoindront le Centre technique de conservation Joël-le-Theule de la Bibliothèque nationale de France, au château de Sablé-sur-Sarthe. Ils y seront d’abord numérisés : cette opération sera en effet plus facile et moins risquée à réaliser sur des dessins en feuilles séparées que sur des albums reliés.
  • Ensuite ils seront remontés dans leurs reliures originales restaurées à cette occasion par des restaurateurs de la BnF. Le parti a été pris de les remonter dans leur reliure d’origine, à l’exception toutefois des plus grands des dessins. Ceux qui portent la cote Ms 30 étaient conditionnés dans une reliure de toile noire du début du XXe siècle, fort laide, et dont
    Nathalie Silvie présente les grandes planches mises à plat et restaurées issues du Ms 27. (A droite, Isabelle Bonnard.)

    la composition chimique était un danger pour les documents : elle ne sera pas conservée. Ceux qui se trouvaient pliés en accordéon à la fin du Ms 27, et qui ont beaucoup souffert de ce conditionnement, ont été démontés, mis à plat, et consolidés : nous avons trouvé que les plier à nouveau n’aurait plus été du respect pour un objet historique, mais un fétichisme de l’ancien. Comme les dessins du Ms 30, ils seront donc conditionnés dans des portefeuilles spécialement conçus, qui permettront à la fois leur bonne conservation, une éventuelle exposition sans démontage préalable, et une manipulation à des fins d’étude facilitée.

  • Enfin, après un peu plus de deux ans de travaux, ils viendront reprendre leur place à la BIU Santé, dans un meuble conçu pour mieux les stocker qui sera construit d’ici là.

Dans la seconde partie de 2020, nous espérons qu’un colloque pourra se tenir autour de ses ouvrages qui sont loin de nous avoir donné tout le savoir qu’ils peuvent nous apporter.

Nous remercions les  mécènes qui nous ont permis de mener à bien ce projet. Retrouvez-les sur notre page dédiée.

Jean-François Vincent

 

Un projet mené par la BIU Santé dans le cadre de ses missions nationales CollEx.