À Charles Spon, le 26 octobre 1643
Note [16]
Ce traité n’allait paraître que vingt ans plus tard :
Claudii Salmasii de manna et saccharo Commentarius.[Commentaire de Claude i Saumaise sur la manne et le sucre]. {a}
- Paris, Charles Du Mesnil, 1663, in‑4o ; réédité à Utrecht en 1689 (v. note [5] de la biographie de Claude ii Saumaise, sieur de Saint-Loup) ; ouvrage posthume dédié par le libraire amplissimo, doctissimo et saluberrimo medicorum Lutetiæ Parisiorum Ordini [à la très considérable, très savante et très salutaire Compagnie des médecins de Paris].
V. notes [14], lettre latine 170, et [5], lettre latine 254, pour les contributions de Jean-Baptiste Lantin et de Guy Patin à sa parution.
Le traité De Manna occupe les 75 premières pages, et le De Saccharo, les 20 dernières, mais il est incomplet, se terminant sur Cetera deerant in MS [Le reste manquait dans le manuscrit] et on n’y trouve aucune mention du sucre de Nabeth.
Furetière :
« Drogue médicinale, la manne est un suc ou une liqueur blanche, douce, qui découle d’elle-même ou par incision des branches et des feuilles mêmes des frênes, tant ordinaires que sauvages, pendant la canicule [v. note [8], lettre 1019], et un peu auparavant. On ne la trouve que sur ces arbres, encore n’est-ce pas sur tous, mais principalement en Calabre et aux environs de Briançon. […] La manne est une médecine qui purge fort doucement et qu’on prend dans des bouillons. »
Guy Patin a plusieurs fois parlé des divers types de manne dans sa correspondance, comme dans sa leçon du Collège de France sur le sujet, mettant beaucoup de soin à bien les distinguer les uns des autres. Il s’inspirait largement, me semble-t-il, des sept premiers articles du chapitre xxiii du premier des deux livres de Caspar Hofmann de Medicamentis officinalibus [des Médicaments officinaux] (Paris, 1647, v. note [7], lettre 134). Traduits et annotés, ils permettent de ne pas se méprendre sur ce qu’était le médicament compliqué qu’on appelait la manne au xviie s.
- V. note [26], lettre latine 351, pour son autre nom de sarcocolle.
- Le mastic (v. note [73], lettre latine 351) est la « résine qui découle d’incisions faites au térébinthe lentisque » (Littré DLF).
- Ver à soie.
- Brigantine vient de Brigantinus lacus, nom latin du lac de Constance (frontalier entre l’Allemagne, la Suisse et l’Autriche), situé dans la région d’Europe qu’on appelait la Rhétie.
- Antonio Donato da Altomari (v. note [12], lettre 401) : De Mannæ differentiis ac viribus, deque eas cognoscendi via ratione [Des différentes sortes de Manne et de leurs pouvoirs, et du moyen rationnel permettant de les connaître] (Venise, 1562, in‑4o).
- De Pierre Pena, sur la manne, je n’ai rien trouvé d’autre que les quatre pages qui lui sont consacrées (dont seulement une demi-douzaine de lignes sur la manne de Briançon) dans le Stirpium adversaria nova [Nouveau répertoire des plantes] qu’il a signé avec Mathias de Lobel (Anvers, 1576, v. note [3], lettre 42).
Giovanni Costeo, le commentateur d’Avicenne en 1564 (v. note [11], lettre 11), a aussi publié De universali stirpium natura libri duo [Deux livres sur la nature complète des plantes] (Venise, 1580, in‑4o).
- Garcia de Orta (médecin, botaniste et grand voyageur portugais, 1501-1568) : Aromatum et simplicium aliquot medicamentorum apud Indos nascentium historia [Description des aromates et de quelques médicaments simples qui poussent aux Indes] (Anvers, Plantin, 1593, in‑8o, pour la 4e édition). Hofmann se référait à ce passage (page 45) du chapitre xi, De manna du livre i :
Primum genus utribus conservatum, sapore favi mellis, Xirquest, aut Xircast vocatur, id est, Lac ex arbore Quest nuncupata : nam Xir lingua Persica Lac sonat ; nos corrupto nomine Siracost nuncupamus. Est autem ros quidam in eas arbores delabens, aut gummo ex eis destillans. [Le premier des deux genres qu’on observe a le goût du miel de ruche et porte le nom de Xirquest ou Xircast, c’est-à-dire lait venant de l’arbre appelé Quest, car Xir, en langue persane, signifie lait ; nous lui donnons le nom déformé de Siracost. C’est une sorte de rosée qui coule dans ces arbres, ou de gomme qui en tombe goute à goutte].- Leonard Rauwolf (vers 1540-1596), médecin et botaniste allemand, a relaté son voyage au Levant dans un livre traduit en latin par Johann Friedrich Gronovius (mort en 1671, v. note [5], lettre 98) sous le titre de Flora Orientalis, sive recensio plantarum quas Botanicorum Coryphæus Leonhardus Rauwolfus, Medicus Augustanus, annis 1573, 1574, et 1575. in Syria, Arabia, Mesopotamia, Babylonia, Assyria, Armenia et Judæa crescentes observavit, et collegit, earumdemque ducenta Specimina, quæ in Bibliotheca publica Lugduno-Batava adservantur, nitidissime exsiccata et chartæ adglutinata in volumen retulit… [La Flore d’Orient, ou le recensement des plantes que le coryphée des botanistes, Leonhard Rauwolf, médecin d’Augsbourg, a vu pousser dans les années 1573 à 1575 en Syrie, Arabie, Mésopotamie, Babylonie, Assyrie, Arménie et Judée ; il les a cueillies et a gardé les spéciments de deux cents d’entre elles, qui sont conservées dans la Bibliothèque publique de Leyde, desséchées collées dans un très splendide herbier…] (Leyde, Wilhelm de Groot, 1755, in‑8o). Je n’ai pas eu accès à l’original en allemand dont disposait Hofmann, mais deux extraits de cette édition latine tardive (avec les savantes additions de Gronovius) me semblent en dire suffisamment à l’article 288 (page 93) sur l’hédysarum ou hédysaron :
Spinosa quædam herba Acatiæ nomine, a Mauris Agul dicta, supra quam Manna Persarum Truncsibal appellata decidens colligitur. […] Agul et Algul Mauris, in cujus fronde præcipue apud Persas Manna colligitur, quam Trunschibin, Arabes vero Thereniabil et Trungibin appellant. [C’est une herbe épineuse du nom d’Acatia, que les Maures appellent Agul, sur laquelle on recueille la manne des Perses, appelée Tuncsibal, qui s’en écoule. […] Agul et Algul pour les Maures, dans le feuillage de laquelle on recueille principalement la manne en Perse, qu’on appelle Trunschibin, mais Thereniabil et Trungibin pour les Arabes].- J’ai consciencieusement traduit ce paragraphe, mais avoue humblement peiner à en comprendre toutes les subtilités.
- V. note [2], lettre 494.
- V. notes [3], lettre 3, pour Actuarius, médecin grec du Moyen Âge, et [15], lettre latine 109, pour la manne de Galien.
Par extension du sens biblique, au xviie s., manne se disait aussi, « figurément, de toutes sortes de viandes et de fruits, principalement quand ils sont de garde, quand ils peuvent nourrir et faire subsister une maison. C’est une bonne manne, dans un logis, qu’une provision de pois, de fèves, de riz, pour le carême » (Furetière).