L. 291.  >
À Charles Spon,
le 5 juillet 1652

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 5 juillet 1652

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(Consulté le 19/03/2024)

 

Monsieur, [a][1]

Je vous écrivis ma dernière du 18e de juin, laquelle je délivrai à M. Caze [2] qui me promit de la vous faire rendre en main propre ; elle était de deux pages et demie, je crois que l’avez reçue. Depuis ce temps-là, je vous dirai que la reine, [3] qui est encore à Melun, [4] a pris grande réjouissance de l’accord qu’elle a fait avec le duc de Lorraine, [5] qui lui a réussi, et qu’elle a renvoyé au même lieu d’où il était venu, unde malum pedem attulerat[1][6] avec de bons passeports du roi. [7] On dit qu’elle en est si fort aise qu’elle en a dansé de réjouissance et qu’elle a appelé ou fait venir de Paris à la cour des maîtres à danser tout exprès, afin de répéter avec eux ses vieilles leçons. Elle a raison de tirer de deçà les violons et danseurs vu qu’ils n’ont plus que faire ici, s’ils n’y veulent mourir de faim. Il y a déjà dans Paris 80 000 pauvres, [8] sans ceux qui s’y feront ou y viendront des provinces voisines qui sont ruinées, Dieu merci, ladite dame et le Mazarin. [9] Elle a trois hommes près de soi pires que le diable, savoir le vieux Senneterre, [10] le duc de Bouillon [11] et notre premier président[12] qui lui apprennent encore plus de mal que n’a jamais fait ce fourbe italien. Enfin, si vous voulez que je vous le dise en peu de mots, la bonne dame superat et crescit malis, iraque nostra fruitur[2] comme il est quelque part dans Sénèque, [13] in Hercule furente. Les princes, après avoir été trompés par le duc de Lorraine, se trouvent bien étonnés et ne sais point à quel saint ils se voueront ; vu que je pense qu’en ce cas, les saints et Dieu même sont neutres, ne se mêlant pas plus de favoriser un parti que l’autre, qui ne valent rien tous deux et au moins, où les chefs sont si horriblement méchants et dépravés. On dit qu’ils attendent encore 3 500 hommes d’un autre secours, ex quo adiuncto [3] ils seraient plus forts que les mazarins. Fiat, fiat[4] mais peut-être que cela n’arrivera point. Le vendredi 21e de juin, le Parlement étant assemblé, il y eut grand bruit au Palais ; quelques conseillers pensèrent y être assommés, entre autres le jeune de Barillon, [5][14] accusé d’être du parti du coadjuteur, [15] le président de Thoré, [16] comme fils de M. d’Émery ; [17] et même M. le président de Bailleul, [18] qui fait la fonction de premier président, pensa être étouffé par d’autres coquins et l’eût été infailliblement si M. le duc de Beaufort [19] ne fût venu à son secours. [6] Cela est cause que le lendemain, samedi, Messieurs de la Cour n’ont point voulu s’assembler de peur de sédition. Plusieurs conseillers y vinrent bien, mais le nombre n’étant point suffisant, ils ne s’assemblèrent point. La plupart des autres n’y étaient point venus sur l’avis qu’ils reçurent de n’y point aller, de la part des présidents au mortier qui s’y étaient exprès assemblés pour cela, sur la peur qu’ils avaient d’y être assommés le lendemain comme des mazarins s’ils y fussent retournés. [7] Ce même jour, on fit courir le bruit que la paix était faite, ce fut une invention des mazarins pour attiédir l’esprit des peuples qui étaient fort échauffés et qui semblaient tendre à sédition.

Le nombre des pauvres est ici si grand que l’on croit qu’il passe 80 000. Le Parlement, la Chambre des comptes, la Cour des aides[20] les curés et autres bénéficiers, les dames des paroisses, les six corps des marchands, [21] l’Hôtel de Ville et autres communautés ont été assemblés pour y pourvoir. Cela a fait trouver grande somme d’argent pour les sustenter et leur aider à vivre. Il y en a près de la moitié qui s’en retourneraient dès demain en leurs maisons, d’où la guerre les a chassés, si la paix se faisait ; sed nobis non licet esse tam beatis[8][22] nos princes vont trop lentement en besogne, et la reine trop passionnée et trop enragée pour son rouge pendard. Le maréchal de Turenne [23] a changé de poste et a fait passer son armée à Lagny [24] en Brie, ce qui fait croire qu’ils s’en vont devers Meaux. [9][25] Leur changement ne fait bien à personne, ils ne quittent un pays que lorsqu’il est tout ruiné et ne vont en un autre que dans le dessein d’en faire de même. On croit pourtant que le roi sortira bientôt de Melun où ils sont fort incommodés, avec une cherté effroyable de toutes les denrées (la livre de beurre [26] y valant un écu), et qu’ils s’en iront à Compiègne [27] en continuant de tout ruiner partout, comme ils ont fait jusqu’à présent depuis le temps qu’ils sont sortis de Paris. [10]

Le mardi matin 25e de juin, toutes les compagnies ont été en armes par ordre du prévôt des marchands[28] les chaînes tendues et le Palais gardé de tous côtés, tandis que les pères conscrits [11] délibéraient en la Grand’Chambre où ils ont ordonné que les mêmes députés retourneront vers le roi lui dire de la part de la Cour et des princes que, pourvu que le Mazarin soit envoyé hors du royaume, lesdits princes sont prêts de mettre bas les armes, d’exécuter très fidèlement et de point en point tous les articles qui sont dans la dernière réponse du roi ; bref, de signer tout ce qui plaira à Sa Majesté à la charge que lesdits députés partiront au plus tôt pour aller à Melun où est encore le roi. [12] Tandis que tout Paris était ainsi en armes, il y eut diverses querelles en plusieurs endroits de Paris où quelques-uns furent tués, les autres blessés ; [13] et cela ne se peut guère faire autrement tandis que les fous ont les armes en main. En ce cas-là, il faut que les sages soient cachés, si omnes fatui ad arma properabunt, vix habebit sapientia defensores[14][29]

Je vous prie de dire à M. Ravaud [30] que je me recommande à ses bonnes grâces, que j’ai reçu sa dernière du 18e de juin et que j’exécuterai très volontiers tout ce qu’il y désire de moi. J’attendrai pareillement que le Lexicon etymologicum Martinii soit achevé d’imprimer à Francfort pour la seconde fois [31] comme il me l’a mandé. [15]

Mais à propos de libraires, M. Rigaud [32] ne commencera-t-il pas bientôt l’édition du manuscrit de feu notre bon ami M. Hofmann ? [33] Avez-vous pris la peine de retrancher les injures que ce bonhomme avait mises contre Fernel, [34] dans son livre de Calido innato ? Puisque vous en avez le manuscrit entre vos mains, je vous prie de ne le point oublier et de m’envoyer une copie de l’article ou période de ces injures, [16] je pense que cela n’est pas si long ; au moins le bonhomme sanglait bien ses ennemis en peu de mots quand il était en sa mauvaise humeur. Faites-moi la faveur d’en dire un mot à M. Rigaud de ma part, et que je lui baise les mains. Quand le livre sera sur la presse, je serai bien aise pareillement d’en avoir la première feuille bien correcte afin de la montrer céans à tant de monde qui me rend visite, pour leur faire connaître cet ouvrage qui vient d’un maître ouvrier. Votre nouvelle édition de Sennertus [35] avance-t-elle, [17] dans quel temps espérez-vous qu’elle pourra être achevée ? Je vous prie aussi de demander à M. Rigaud s’il n’a point eu de nouvelles de l’Anatomie de M. Riolan, [36] in‑fo[18] que je lui commis l’an passé et qu’il me promit de faire tenir en assurance à M. Alcide Musnier, [37] médecin de Gênes [38] qui est fort votre serviteur comme il est mon ami. Ledit Musnier en est fort en peine, vu qu’il y a tantôt un an que ledit livre est sorti de Paris. Il est vrai que nous ne recevons rien de deçà, de Lyon ni d’ailleurs, à cause du commerce que la guerre empêche de toutes parts. J’attends tous les jours ce qu’avez délivré à MM. Ravaud et Rigaud, qui me doit être rendu par M. Jost ; [39] mais néanmoins, plût à Dieu que la guerre ne produisît point plus grand malheur que celui-là, il n’y aurait point tant de pauvres gens ruinés en France pour ce malheureux Mazarin. Les libraires n’impriment plus rien ici, tant pour la misère du temps que pour ce qu’ils manquent de papier, dont il y en a eu beaucoup de brûlé et de perdu devers Montargis [40] et Gien [41] tandis que les deux armées y étaient devers Pâques. [19] Je sais plusieurs livres qui sont sur la presse, qui ne peuvent être achevés pour cet empêchement.

Ce 28e de juin. Enfin le roi a quitté Melun et est allé à Lagny. [20] Son armée, conduite par le maréchal de Turenne, est devers Dammartin, [42] Senlis [43] et Roissy jusqu’à Gonesse. [44] On dit que le roi viendra à Saint-Denis, [45] où après y avoir séjourné quelques jours (c’est-à-dire fait manger tout le pays comme ils ont fait jusqu’ici partout ailleurs où ils ont été), ils s’en iront à Pontoise ; [46] et je crois que delà ils s’en iront rendre, circulo facto[21] à Saint-Germain. [47] On dit qu’ils veulent aller attaquer les troupes des princes qui sont à Poissy, [48] mais ils ne les y attendront point puisqu’ils sont les plus faibles. [22] Sans doute que les troupes des princes reculeront pour éviter ce fâcheux rencontre, ou devers Étampes, [49] ou devers Chartres, [50] ou dans le Perche ; voire même plutôt, elles se dissiperont entièrement, principalement s’il est vrai ce que l’on dit, que la paix soit faite, ou au moins qu’elle ne tienne plus qu’à un filet ; savoir que M. le Prince [51] voyant ses forces trop petites, a fait sa paix, qu’il a signée et que depuis, tous les présidents au mortier ont signée pareillement. Il n’y a que le duc d’Orléans [52] qui ne la veut point signer à cause que le Mazarin demeure ; et dit qu’il demeurera plutôt en sa maison toute l’année que d’en sortir pour aller à la cour, afin de ne point voir ce cardinal rappelé. [23]

Ce 1erde juillet. Enfin, voilà que je reçois votre lettre du 25e de juin par laquelle j’apprends qu’avez reçu toutes les miennes et que vous êtes en bonne santé, dont Dieu soit loué. Je suis bien marri de l’infortune du pauvre Barbier, [53] hæc est civilium bellorum calamitas[24] beaucoup de gens s’y trouvent malheureusement enveloppés. Les imprimeurs, [54] qui en peu d’heures en font et distribuent plusieurs exemplaires, sont plus à craindre que tous ; néanmoins, je tâcherai d’observer à l’avenir, touchant cette affaire, ce qu’en désirerez de moi.

J’apprends que M. Naudé [55] a été derechef appelé en Suède par cette grande reine, [56] qu’elle lui a écrit elle-même, qu’elle l’a invité d’y aller par toute sorte de belles offres, qu’elle le fait son suprême bibliothécaire avec de bons appointements, et qu’il est résolu d’y aller avec tant de belles et bonnes conditions que cette reine lui présente. [25] Il est venu céans depuis deux jours pour me voir, mais de malheur, j’étais en ville ; il m’en eût sans doute révélé le secret car je suis un de ses plus intimes. M. de Saumaise [57] est pareillement tout prêt de s’en retourner en Suède, y retourner voir derechef cette savante reine qui l’a de nouveau invité à ce grand voyage. [26] Elle a aussi disgracié M. Vossius, [58] qui avait eu par ci-devant grand crédit envers elle, sur quelque plainte que M. de Saumaise a faite contre lui à cause de quelques paroles que ledit Vossius avait lâchées adversus Salmasium[27] Pour moi, je ne bougerai, Dieu aidant, de Paris. Je ne me saurais résoudre à un si grand, si pénible et si dangereux voyage ; [59] j’aime mieux gagner moins et avoir moins de peine. Je n’ai souhaité de l’argent, depuis que je suis né, qu’à mesure que j’en ai eu besoin ; pour de l’ambition, c’est une herbe qui n’a point encore pris aucun fil de racine en mon jardin. L’air froid de cette région septentrionale n’a garde de m’attraper. Tant s’en faut qu’il puisse m’attirer à soi, il me fait peur et me fait reculer. Je me résoudrais plutôt à une région chaude, combien qu’il y ait grande apparence que tous mes voyages sont faits ; au moins n’en ai-je aucune envie ni veine qui y tende. Je me contenterai de ma petite fortune et de vos bonnes grâces s’il vous plaît de me les conserver, et comme disait le Crémonin [60] à Padoue, [61] sic contentus vivam usque ad extremam dissolutionem[28][62]

Le lundi 1er de juillet, le roi étant dans Saint-Denis, entouré son armée, fit faire un pont de bateaux sur la Seine pour y faire passer une partie de ses gens, qui iraient attaquer ceux des princes qui étaient logés devers Saint-Cloud [63] et Suresnes ; [64] mais ceux-ci décampèrent et n’attendirent point les mazarins, se retirèrent dans le faubourg de Saint-Germain [65] et de grand matin, passant par escouades au travers de Paris par divers endroits, gagnèrent la porte de Saint-Antoine [66] et prirent le chemin de Charenton, [67] traînant quant et eux du canon. Les mazarins ayant découvert le dessein de leurs ennemis, vinrent aussitôt pour s’y opposer et se campèrent à Belleville, [68] à Charonne, [69] jusqu’à Charenton. [29] De sorte que ces troupes ennemies s’étant rencontrées, l’escarmouche fut rude jusque dans le faubourg de Saint-Antoine. [30][70] Il y eut du côté des princes plus de 200 hommes de tués, et plus de 800 des mazarins. [31] Le roi même vint en personne jusqu’à Charonne et la plus grande tuerie fut sur le régiment des gardes. [32] On dit aussi que le comte de Palluau, [71] les marquis de Nantouillet [72] et de Saint-Mesgrin [73] y ont été tués ; le jeune de La Meilleraye [74][75][76] et Mancini, [77] neveu du Mazarin, blessés. [33] M. le Prince y a eu deux chevaux de tués entre ses jambes, M. de Nemours [78] blessé en trois endroits, le duc de La Rochefoucauld [79] et Clinchant [80] tous deux fort blessés. [34] Dès le matin, le duc d’Orléans voulut aller au Parlement, mais comme il fut prêt d’y entrer, les présidents au mortier se levèrent et rien n’y fut fait. Il envoya Mademoiselle, sa fille, [81] à l’Hôtel de Ville où, tant par prières que par menaces qu’elle fit au prévôt des marchands et au maréchal de L’Hospital, [82] gouverneur de Paris, elle obtint que toutes ces troupes qui étaient entre Paris et Charenton auraient pouvoir de rentrer dans Paris selon leur besoin ; [35] ce qui fut exécuté, vu qu’il en revint plus de 5 000 sur les cinq et six heures du soir ; et entre autres je vis revenir le prince même, fort bien accompagné. [36]

Le jeudi 4e de juillet est ici mort dans son lit, d’une fièvre continue [83] maligne, le sieur Vautier [84] qui était le premier médecin du roi, et le dernier du royaume ; et afin que sachiez qu’il n’est pas mort sans raison, il a pris de l’antimoine [85] par trois fois afin de mourir dans sa méthode, par le consentement et le conseil de Guénault. [86] Si cet homme fût mort il y a sept ans, il aurait épargné la vie à plusieurs honnêtes gens qui sont morts par son antimoine. Enfin il est mort lui-même, âgé d’environ 63 ans, et a accompli en sa personne le dire du poète : Neque enim lex iustior ulla est, Quam necis artifices arte perire sua[37][87] Comme il était réputé fort ignorant de tout le monde, et même à la cour, il voulait avoir la réputation d’avoir des secrets de chimie [88] et d’exceller dans la préparation de l’antimoine. Quelques courtisans lui applaudissaient ou en faisaient semblant, l’autorité de sa charge l’entretenait en ce crédit. Il disait entre autres que les médecins de Paris avaient raison de dire que l’antimoine [89] était un poison, mais qu’après sa préparation, il ne l’était plus ; mais néanmoins, cette bonne préparation lui a manqué. Voilà une place vacante pour laquelle le cardinal Mazarin cherche 3 000 pistoles. Voilà un de mes compagnons qui dit qu’on l’a offerte à Guénault à ce prix-là, qui l’a refusée, et qu’il croit que Vallot [90] les donnera ; ainsi tout est à vendre, jusqu’à la santé du roi : Romæ venalia cuncta, Templa, Sacerdotes, etc. [38][91][92]

Hier après-midi, il y eut une grande assemblée à l’Hôtel de Ville de quantité d’honnêtes gens en qualité de bourgeois[39] Comme ils étaient pris ex omni tribu[40] douze de chaque quartier, sans les ecclésiastiques qui ont fonds, les curés de Paris, les compagnies souveraines [93] et six corps de marchands, [94] cela faisait près de 500 députés. J’y avais été nommé, mais à cause de diverses occupations que j’ai, de très grand bonheur, je m’en excusai chez le quartenier ; [95] mais de très grand malheur, des coquins armés et supportés de la canaille assiégèrent l’Hôtel de Ville en divers endroits, mirent le feu à toutes ses portes, demandèrent qu’on leur livrât le maréchal de L’Hospital, gouverneur de Paris, et le prévôt des marchands. On leur fit des remontrances, on leur promit et argent comptant, et union avec les princes contre le Mazarin. Ils ne laissèrent point de tirer aux fenêtres et en blessèrent. Par le moyen du feu, ils entrèrent dedans, pillèrent, battirent, tuèrent, blessèrent ; [41] de sorte que plusieurs en sont au lit, sans ceux qui sont morts, entre lesquels est mon cher ami, bon voisin et cousin de ma femme, M. Miron, [96] le maître des comptes, âgé de 47 ans, lequel méritait pour sa vertu une immortalité. J’en suis inconsolable, je n’ai jamais connu un plus honnête homme et plus parfait en sa sorte. Il est mort cette nuit entre mes bras, accablé de ses plaies et de ses coups. Jamais homme ne fut si fort antimazarin, mais dans ces tumultes, les bons pâtissent pour les mauvais. M. Ferrand le jeune, [97] conseiller de la Cour, M. Yon, qui a été échevin, [98] frère de nos deux confrères, [99][100] qui moururent l’an passé, un autre, marchand de fer, nommé Fressant [101] sont morts aussi ; [42] sans ceux qui sont fort blessés et que l’on dit qui en mourront, comme M. Le Gras, [102] maître des requêtes, et autres. [43] Le prince de Condé, le duc de Beaufort, Mademoiselle et autres y vinrent et amenèrent des forces qui éloignèrent cette canaille armée, mais il était trop tard pour nous ; assez tôt pour beaucoup d’autres qui se sont heureusement sauvés. Tous ces coquins de bateliers et autres sont dissipés, on parle d’en faire recherche et justice. Interea patitur iustus[44] je tremble de regret en vous écrivant et n’en puis plus. Plura scribere me vetat dolor et triste amicissimi viri infortunium[45] Je vous baise les mains et suis, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.

Guy Patin.

De Paris, ce vendredi 5e de juillet, à six heures du soir, 1652.

Le roi est à Saint-Denis avec l’armée de 10 000 hommes commandée par le maréchal de Turenne. On dit qu’une partie de cette armée s’en va devers notre pays de Beauvais, [103] où ils ruineront tout, pour aller au-devant des troupes que les princes font venir de Flandres, [104] que l’Archiduc [105] leur envoie. Voilà tout perdu, unius ob noxam et furias[46][106] Adieu, mon cher ami.

M. Caze m’a promis de vous faire rendre celle-ci sûrement.


Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr
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