L. latine 116.  >
À Johannes Antonides Vander Linden,
le 31 janvier 1659

[Ms BIU Santé no 2007, fo 78 ro | LAT | IMG]

Au très distingué M. Vander Linden, docteur en médecine et professeur à Leyde.

Très distingué Monsieur, [a][1]

Je reçois la vôtre avec une lettre de M. de La Fontaine, datée du 16e de janvier ; [2] je conviens qu’elles m’ont toutes deux entièrement rasséréné. C’est M. Darli, notre marchand, [3] qui me les a remises et qui nous en remettra d’autres dorénavant. Si toutefois vous vouliez m’écrire un jour < par la poste >, mettez cette adresse sur votre lettre : À Monsieur, Monsieur Guy Patin, docteur en médecine de la Faculté de Paris et professeur du roi, au carrefour du Chevalier du Guet, à Paris[1][4] Je salue de tout cœur le très distingué M. Gronovius et lui offre tout genre de services. [5] Je vous remercie et me réjouis de votre réponse sur la préface de l’Eusèbe scaligérien. [6][7] Dans la lettre qu’il m’avait écrite il y a six mois, notre ami Utenbogard [8] m’avait enflé de cette flatterie. J’ignore pourquoi il a fait cela, mais je me tourmentais fort de qui aurait bien pu avoir une telle pensée à l’esprit. Peut-être avait-on fait mention de mon nom en voulant m’être agréable et en espérant ainsi me concilier quelque gloire, etc. ; [9] mais laissons cela. Je ne veux pas avoir cette nouvelle édition de l’Eusèbe et vous en remercie : je me contenterai de mon ancien exemplaire, où se lit le nom d’un très éminent personnage à qui Joseph Scaliger avait envoyé son livre en embellissant un si considérable présent d’une dédicace manuscrite. [2][10] Vous ne me devez rien, quand moi je vous dois beaucoup et même tout, et vous offre ce que je puis. Si vous voulez que je m’exprime en vers, alors je vous dirai certainement de tout cœur ceux-ci de Virgile : Tu sceptra Iovemque concilias, Tu das epulis accumbere divum ; [3][11] je préfère vous avoir pour ami que quantité de princes et de roitelets. Amicus novus, vinum novum, veterascet, et cum sanitate bibes illud[4][12] Je loue le vœu qu’a votre Elsevier d’imprimer toutes les œuvres de Hofmann, et prendrai part à ce dessein : [13][14] j’y apporterai de tout cœur ma contribution, c’est-à-dire tous ces manuscrits que je possède et ne confierai à personne d’autre, [15] en espérant que vous me considérez désormais comme un appui de cette édition future qui enrichira la république littéraire d’un savant rejeton. Pour le présent, je pense qu’il faut rechercher quædam Sevonis illius Hofmanni Opera quæ non habeo[5] à savoir les Commentarii ejus auctiores in Galeni libros de Usu partium, et ejusdem Post-curas in Galenum[6][16] Ces deux-là me tourmentent, j’en ai pourtant entendu parler, mais ne les ai jamais vus ; il faut les chercher en Allemagne, et en particulier à Nuremberg, chez M. Volckamer. [17] Ces Opérations de François Thévenin, qui était chirurgien de notre roi, sont écrites en français courant, comme nous le parlons entre nous, mais non dans ce style précis et châtié que Balzac a naguère employé en ses lettres ; [7][18][19] vous les avez peut-être lues, ou du moins auriez-vous pu les lire puisque notre langue ne vous est pas inconnue. Je ne connais aucun médecin en Espagne dont nous pourrions obtenir ce secours que vous demandez pour vos de Scriptis medicis[20] Si aboutit cette négociation qui bouillonne dans beaucoup de bouches et qui exaucerait le vœu des honnêtes gens, à savoir si notre roi épouse la fille unique du roi des Espagnes, s’ensuivra pourtant, sans aucun doute, cette paix très désirée et fort nécessaire au monde chrétien tout entier. [8][21][22][23][24] Nous aurons alors ici quelque grand d’Espagne qui amènera avec lui quelque médecin, lequel ou bien me viendra voir, ou du moins j’irai voir. C’est ce qu’avait fait cet ambassadeur, le duc de Pastrana, qui arriva à Paris en 1612, pour organiser et conclure, à cette époque, le mariage de notre feu roi Louis xiii[9][25][26][27] Il avait avec lui un médecin savant et d’élégante intelligence ; [10][28] nos anciens, Jean Haultin, [29] Guillaume de Baillou, [30] Jean Duret, fils de Louis, [31][32] Simon Piètre, bon Dieu, quel homme remarquable ! [33] François Duport, auteur de la Decas medica[11][34] Nicolas Piètre, frère de Simon, [35] Jacques Cousinot, [36] Jean Riolan, [37] Charles, [38] André Du Chemin, [39] Charles Bouvard [40] et d’autres excellents docteurs s’étaient joints à lui pour des consultations médicales, [41] où il favorisait plutôt la nouveauté que l’ancienne doctrine. Il assistait à nos disputes publiques et y donnait parfois son avis, même sans en avoir été prié. Il saignait les veines plus hardiment et en tirait plus de sang que ne se le permettaient nos anciens les plus expérimentés, les plus exercés et les plus consommés dans les opérations de l’art. [42] Il vantait son Espagne comme étant la nourrice des bonnes pratiques, de laquelle les nôtres, disait ce semi-barbare, avaient appris leur plus pure médecine ; celle que lui ne possédait pas, et que l’Espagne n’a jamais possédée jusqu’à présent, [Ms BIU Santé no 2007, fo 78 vo | LAT | IMG] sinon peut-être pour Francisco Valles, Lemosius, Thomas Rodriguez de Vega et quelques rares autres, [12][43][44][45] qu’avaient devancés et surpassés les plus éminents des nôtres : Jean Fernel, [46] Jean de La Ruelle, [47] Jean Tagault, [48] Sylvius, [49] Jacques Houllier, [50] Louis Duret, Jacques Charpentier, [51] et une infinité d’autres qui avaient brandi le flambeau de notre médecine, la meilleure et la plus sacrée, à la face du monde tout entier qui en a été rendu savant. J’avais un ami à Gênes, savant et excellent médecin natif de Lorraine, qui se nommait Alcide Musnier ; voici deux ans, pour ma plus grande douleur, Abstulit atra dies, et funere mersit acerbo[13][52][53][54] Il me reste, à Venise, Florio Bernardi, excellent homme certes, bien qu’italien, mais peu compétent en notre métier. [55][56] Voilà pourtant ce que je pense de ces deux royaumes, l’Espagne et l’Italie. Presque aucun livre n’y est imprimé sans être aussitôt expédié à Paris ; mais sans insister là-dessus, au moins recourons-nous aux services de deux libraires lyonnais qui ont grand commerce avec ces deux pays. Je puis vous en dire beaucoup sur les vies de nos Français, en particulier les Parisiens. J’approuve tout à fait vos Meletemata et souhaite qu’ils atteignent rapidement le terme souhaité. [14][57] Vale, parure de mon existence, et ne cessez pas de m’aimer comme vous le faites.

De Paris, le 31e de janvier 1659.

Guy Patin, docteur en médecine et professeur royal.


a.

Brouillon autographe d’une lettre que Guy Patin a écrite à Johannes Antonides Vander Linden, ms BIU Santé no 2007, fo 78 ro et vo.

1.

Guy Patin habitait place du Chevalier du Guet depuis le début de 1651 ; la première lettre qu’on ait de lui à Johannes Antonides Vander Linden est datée du 12 décembre 1653. En lui donnant ici son adresse (avec un dédoublement courtois de « Monsieur », v. note [a], lettre 1), Patin nous apprend qu’il avait correspondu pendant cinq ans avec son ami de Leyde sans recourir à la poste régulière, mais à des personnes de leur connaissance.

Cela corrobore ce que disait Patin à Linden au début de sa lettre latine 111 (v. sa note [1]) : les messageries payantes étaient à la fois fort onéreuses (pour le destinataire) et peu sûres (perte du courrier ou indiscrétions de la censure policière).

2.

Sans pouvoir cacher son dépit, Guy Patin se dégrisait ici du faux espoir, que Christiaen Utenbogard lui avait fait miroiter, de voir son nom cité avec honneur dans la préface qu’Alexandre More avait écrite pour la nouvelle édition de l’Eusèbe de Joseph Scaliger (Amsterdam, 1658, v. notes [23], lettre 535, et [21], lettre latine 106).

Patin ne souhaitait plus en entendre parler, se contentant de la précédente édition qu’il avait dans sa bibliothèque :

Thesaurus temporum Eusebii Pamphili Cæsareæ Palestinæ episcopi, Chronicorum canonum omnimodæ historiæ libri duo, interprete Hieronymo, ex fide vetustissimorum Codicum castigati. Item auctores omnes derelictos ab Eusebio et Hieronymo continuantes. Eiusdem Eusebii utriusque partis chronicorum canonum reliquiæ Græcæ, quæ colligii potuerunt. Opera ac studio Iosephi Iusti Scaligeri, Julii Cæsaris à Burden Filii. Eiusdem Iosephi Scaligeri Isagogicorum chronologiæ canonum libri tres ad Eusebii chronica et doctrinam de temporibus admodum necessarii.

[Trésor des calendriers d’Eusèbe Pamphile, évêque de Césarée en Palestine, deux livres de chroniques canoniques de tous les genres d’histoire, d’après la traduction de Jérôme, corrigés sur la foi des recueils les plus anciens. De même que tous les auteurs oubliés qui ont suivi Eusèbe et Jérôme. Du même Eusèbe, tous les fragments en grec de l’une et l’autre partie des chroniques canoniques qu’on a pu colliger. Par les soins et l’étude de Joseph-Juste Scaliger, fils de Jules-César de Burden. Du même Joseph Scaliger, trois livres tout à fait nécessaires de canons introductifs à la chronologie, sur les chroniques et la doctrine d’Eusèbe à propos des temps]. {a}


  1. Leyde, Thomas Basson, 1606, in‑fo de 272 pages, avec une prestigieuse préface datée de Leyde le 1er juin 1606 :

    Iosephi Iusti Scaligeri Iulii Cæsaris a Burden Filii in Chronica Eusebii Pamphili Prolegomena, ad Nobilis. et Ampliss. virum Iacobum Augustum Thuanum Regium in Sanctiore Consistorio Consiliarium, et in Amplissima Curia Parisiensi Præsidem.

    [Prolégomènes de Joseph-Juste Scaliger, fils de Jules-César de Burden, des Chroniques d’Eusèbe Pamphile, adressés au très noble et éminent Jacques-Auguste de Thou, {i} conseiller du roi en son très sacré Conseil et président en l’amplissime Parlement de Paris].

    1. V. note [4], lettre 13 pour le président Jacques-Auguste i de Thou, qui était ami et correspondant de Scaliger.

    Patin disait ici posséder un exemplaire de ce livre que son auteur avait embelli d’une dédicace manuscrite à « quelque très éminent personnage » (clarissimo quodam viro), qu’il ne nommait pas.


3.

« C’est toi qui me concilies le sceptre et la faveur de Jupiter, c’est toi qui m’obtiens une place aux festins des dieux » (Énéide, v. note [2], lettre 431).

4.

« Vin nouveau, ami nouveau, laisse-le vieillir, tu le boiras avec délices » (L’Ecclésiastique, v. note [8], lettre 206).

5.

« certaines œuvres que je n’ai pas de cet Hofmann bavarois » : de 1607 à sa mort, en 1648, Caspar Hofmann avait été titulaire de la chaire de médecine théorique en l’Université d’Altdorf (près de Nuremberg) en Franconie (actuelle Bavière), où se situe le massif montagneux que les Romains appelaient Sevo ou Sævo.

Le projet que les Elsevier eurent alors de publier les œuvres complètes d’Hofmann n’a pas abouti ; elles n’ont jamais été rassemblées. Guy Patin a dit tout le ressentiment qu’il en éprouvait encore, à l’encontre de Jean Elsevier, dans sa lettre du 28 février 1669 à Jacobus Pankratius Bruno, ancien disciple d’Hofmann.

6.

« ses “ Commentaires augmentés ” des livres de Galien sur l’utilité des parties [v. notes [11], lettre de Caspar Hofmann datée de 1646, et [10], lettre latine 69] et ses “ Révisions ” sur Galien [v. notes [21], lettre 317]. »

7.

V. notes :

8.

Outre les Indes Occidentales (ou Amériques), trois Espagnes composaient alors le royaume espagnol : l’Espagne proprement dite (péninsule ibérique), les Pays-Bas espagnols et les possessions espagnoles d’Italie (royaumes de Sicile, Naples et Milan).

En 1660, après la conclusion de la paix de Pyrénées (7 novembre 1659, v. note [17], lettre 573), Louis xiv allait épouser l’infante Marie-Thérèse (v. note [27], lettre 287), sa cousine et la fille unique du roi d’Espagne, Philippe iv (v. note [4], lettre 47).

9.

Un livre de Jean Baudoin (v. note [33], lettre 469) a célébré l’événement : L’Entrée de Monseigneur le duc de Pastrana, ambassadeur extraordinaire de Sa Majesté catholique. Faite à Paris, le 13e d’août, pour l’accomplissement de l’heureux mariage de Madame Élisabeth de France, sœur du roi, et de Philippe Dominique Victor, fils aîné d’Espagne. Avec l’ordre que tenaient les seigneurs qui accompagnaient son Excellence, ensemble leurs devises, armoiries et titres, avec les noms, tant des princes et seigneurs de France que d’Espagne (Lyon, Claude Cayne, 1612, in‑8o).

Ce mariage espagnol d’Élisabeth de France (v. note [8], lettre 114) avait permis aux Espagnols d’arranger, par réciprocité, l’union (en 1615) de Louis xiii avec Anne d’Autriche, sœur de Philippe iv (« fils aîné d’Espagne » et son roi, sous le nom de Philippe iv, en 1621).

Le nom complet de l’ambassadeur espagnol était Rui Gómez de Silva, 3e duc de Pastrana (1586-1626).

10.

Selon la relation de Jean Baudoin (page 5, v. supra note [9]), ce médecin était Juan Gutierrez de Godoy (Jaen 1579-1656), docteur de l’Université d’Alcala de Henares (Madrid), médecin de Philippe iv, roi d’Espagne. Il a publié quelques thèses en latin et des livres en espagnol.

Les Espagnols désiraient sans doute qu’un œil médical vérifiât la bonne santé de celui (Louis xiii) qu’en 1612 ils projetaient de marier à leur infante (Anne d’Autriche) ; tous deux n’étaient alors âgés que de 11 ans.

11.

V. note [2], lettre 359, pour la « Décade médicale » de François Duport (Paris, 1613).

12.

Ludovicus Lemosius (Luiz de Lemos), médecin du xvie s. natif de Fronteira (Portugal), avait enseigné la philosophie à Salamanque, puis exercé son art à Campillo de Llerena (Estrémadure). Il a laissé des commentaires d’Hippocrate et Galien ; tout comme son compatriote Tomás Rodrigues da Veiga (Thomas Rodericus a Vega ; Évora 1513-1579), qui enseigna la médecine à l’Université de Coimbra (v. note [61] du Borboniana 2 manuscrit).

V. note [23], lettre 242, pour l’Espagnol Vallesius (Francisco Valles), autre commentateur d’Hippocrate au xvie s.

13.

« Un jour sombre l’a emporté et l’a plongé dans le sein de la cruelle mort » (Virgile, Énéide, chant vi, vers 429).

14.

V. note [16], lettre 557, pour les Meletemata [Exercices pratiques (de médecine hippocratique)] de Johannes Antonides Vander Linden (Leyde, 1660).

s.

Ms BIU Santé no 2007, fo 78 ro.

Clarissimo viro D.D. Vander Linden, Medicinæ Doctoris et Prof. Leidam.

Ecce tuas accipio, Vir Cl. cum Epistola D. Fontani, datas xvi. Ianu. quib.
planè me recreatum agnovi : eas mihi reddidit Mercator noster D. Darli, alias
etiam in posterum redditurus. Si tamen aliquando volueris ad me scribere, tuis
sequentem impone epigraphem. A Monsieur Monsieur Guy Patin, Docteur en
Médecine de la Faculté de Paris, et Professeur du Roy, au Carrefour du
Chevalier du Guet, à Paris
. Dominum Clariss. virum D. Gronovium ex animo saluto, et officiorum
omne genus illi offero. De responso tuo, super Præfatione Eusebij Scaligeriani,
gaudeo et gratias ago : palpum istum mihi obtursebat Utenbogardus noster
in Epistola sua ad me scripta ante sex menses : quod quare fecerit, nescio : sed valde
angebar, undabam cuiquam talequid venisset in mentem : forsan dum mihi favere
vellet, et inde gloriam aliquam mihi conciliare speraret hac via, nominis mei mentionem
aliquam fecerat, etc. sed sinamus ista. Novam istam Eusebij editionem habere
nolo, ideóq. Tibi gratias ago : veteri contentus, ubi prostat Clarissimi cujusdam
viri nomen ad quem miserat Ios. Scaliger, et sua propria manu tantum munus
cohonestavebat. Tu nihil mihi debes, ego multa Tibi, imò omnia debeo, et quæ
possum offero. Vis tecum poeticè loquar, dicam certè ex animo, quod ille apud Virg.
tu sceptra Iovemq. concilias, tu das epulis accumbere Divûm : Malo mihi habere
amicum Tibi similem, quàm multos Principes sive Regulos. Amicus novus, vinum
novum, veterascet, et cum sanitate bibes illud
. Vestri Elzevirij votum laudo de excu-
dendis omnibus Operib. Hofmanni : et in hujus voti partem venio ; symbolámq. meam
conferam ex animo, id est MS. illa omnia quæ hîc habeo, nec cuiquam alij tradam,
ea spe fretus quam mihi facis in posterum venturæ illius editionis, quæ
Rempublicam Medicam eruditiso libris fœtu locupletabit. Interea v. puto inquirenda
esse Sevonis illius Hofmanni Opera quædam quæ non habeo : nempe Commenta-
rios ejus auctiores in Gal. libros de usu partium
 : et ejusdem Post. Curas in Gal.
De ijs duobus angor, de ijs enim quib. nempe audivi tamen, nec unquam vidi: sunt quærendi in
Germania, et præsertim Noribergæ, ^ apud D. Volcamerum. Operationes illæ Franc. Tevenin,
regij apud nos Chirurgi, vulgari stylo Gallico sunt conscriptæ, ac ut inter nos loquimur, sed non
accurato illo et eleganti, quo suas Epistolas antehac scripsit Balzacius,
quas forsan legisti, aut saltem legere potuisti, quandoquidem Tibi non
est ignotum idioma nostrum. Nullum habeo in Hispania Medicum, à quo
possimus illud quod postulas auxilium pro tuis Scriptis Medicis obtinere :
si tamen nobis succedat negotium quod in ore multorum et ex voto bonorum
fervet : si nempe Rex noster in uxorem ducat Hispaniarum Regis filiam
illam unicam, haud dubiè succedet Pax illa optatissima, et toti Christiano
Orbi admodum necessaria : eóq. nomine hîc habebimus Magnatem aliquem Hispanum,
qui Medicum aliquem secum adducet, qui vel me videbit, aut saltem ego eum videbo.
Hoc ipsum fecerat Legatus ille dux de Pastrana, qui anno 1612. Parisios
accessit, pro conjugio tunc temporis tractando et confirmando Regis nostri piæ
memoriæ Ludovici 13. Secum habebat Medicum eruditum ac elegantis ingenij, quem
secum in consilium Medicum ad Medica consilia potiùs novitatis quàm majoris doctrinæ gratia secum adhibebant
Seniores nostri Altinus, Ballonius, Ellinus, Ioan. Duretus, Lud. filius, Simon Pietreus, bone
Deus, quantus vir ! Fran. Portus, Decadis Medicæ author, Nicol. Pietreus, Sim. frater,
Iac. Cusinotus
, ^ Riolanus, Carolus, Andr./ du Chemin, C. Buvardus, alijq. viri optimi. Aderat ille Disputationib. nostris publicis, et inter-
dum etiam non rogatus sententiam suam proferebat : nostris Senioribus licet peritissi-
mis et in artis operibus exercitatissimis atque consummatissimis, audacius venam
secabat, et majore copia sanguinem detrahebat : et Hispaniam suam laudabat
tanquam altricem bonarum artium, à qua nostri, inquiebat ille semibarbarus, puriorem suam
Medicinam didicissent : quam nec ille habebat nec unquam hactenus habuit Hispania,

t.

Ms BIU Santé no 2007, fo 78 vo.

nisi forsan in Fr. Valesio, Lemosio, Thoma à Vega, paucisq. alijs, quibus
præivebant atque præluxebant præstantissimi è nostris, Fernelius,
Ruellius, Tagautius, Sylvius, Hollerius, Lud. Duretus, Carpentarius
, et alij infiniti,
qui primi melioris et sanctioris nostræ Medicinæ facem prætulerant toti Orbi
qui postea literatus factus est. Habebam Genuæ amicum literatum Medicum eruditum,
et optimum, Alcidium Musnier, patria Lotharingum, quem ante biennium, summo
meo dolore Abstulit atra dies, et funere mersit acerbo : superest mihi Venetijs,

Bern. Florius, vir quidem optimus, quamvis Italus, sed minùs idoneus ad rem
nostram : sic tamen censeo de illis duob. regnis, Hispaniam dico et Italiam ; vix
ullus liber Medicus in ijs excuditur, qui statim Lutetiam non transfertur.
Sed isthæc obiter : saltem utemur auxilio duorum Bibliopolarum Lugdunensium,
qui magnum habent in Italia et Hispania commercium. De vitis nostrorum
Gallorum, præsertim Parisiensium, multa Tibi possum præstare. Meletemata
tua valde probo, et utinam citò optatum finem attingant. Vale meum
decus, et me quod facis amare non desine. Parisijs, 31. Ianu. 1659.

Guido Patin, Med. D. et Prof. R.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Johannes Antonides Vander Linden, le 31 janvier 1659

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(Consulté le 27/04/2024)

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