L. française reçue 41.  >
De Charles Spon,
le 10 juillet 1657

De Lyon, ce mardi 10e de juillet 1657.

Monsieur, [a][1][2]

Quoiqu’il ne se présente guère rien qui mérite de vous être mandé de ces quartiers, je ne lairrai pas de vous tracer quelques lignes en reconnaissance de vos deux belles et amples missives, l’une du 8e, l’autre du 19e de juin, pour lesquelles je vous rends grâces infinies, ne pouvant assez admirer tant de bontés que vous avez pour moi, tout chétif et indigne que j’en suis. Je serais bien aise de savoir de vous que vous a fait ce sieur Chesneau [3] de Marseille, [4] parce que vous m’en parlez avec quelques termes de ressentiment, < ce > qui me fait croire qu’il vous a désobligé en quelque chose. Je n’ai point grande habitude avec lui, mais il m’avait recommandé ce Suffren, [5] que je vous adressai dernièrement et qui a été quelque temps son domestique. [1] Il est vrai qu’en général, ceux de cette nation-là sont des humeurs dangereuses et matoises, aussi ne sont-ils guère en bon prédicament dans Lyon, et les marchands ne veulent leur vendre qu’à beaux deniers comptants quand ils viennent ici aux emplettes.

Je vous ai très grande obligation d’avoir daigné aller rendre visite [6] à M. Marion, [7] mon beau-frère, et de lui avoir départi vos bons avis sur son indisposition. Je souhaiterais bien qu’il vous crût et se rangeât à vivre plus réglément par ci-après qu’il n’a fait jusqu’à présent, peut-être sortirait-il encore du labyrinthe où il se voit aujourd’hui. M. Sorbière, [8] qui me vint voir céans le 16e du passé, allant en Avignon, [9] m’assura qu’il avait laissé mondit beau-frère en fort mauvais état, atrophié et en chartre. [2][10] J’en suis fort en peine, pour n’en point mentir, et plains non seulement lui, mais aussi sa famille, qu’il eût peut-être mieux fait de laisser ici que non pas de la faire transmarcher à Paris. Je ne sais si vous trouveriez bon qu’il usât des eaux de Forges [11] pendant quelques jours devant que de prendre du lait d’ânesse, [12] afin que cetui-ci trouvât les passages plus libres et se distribuât facilement, sans hésiter autour des hypocondres [13] et y former des nouvelles obstructions. Je ne doute point que cette 18e lettre du Port-Royal [14][15] dont vous me parlez ne soit excellente puisqu’elle a pour sujet l’infaillibilité [16] d’un homme mortel comme nous, qui ne doit pas être malaisée à combattre par plusieurs raisons invincibles. Je m’attends à voir cette pièce avec plaisir, dont vous m’avez fait venir l’eau à la bouche par l’approbation que vous lui donnez. Quant à l’impression des œuvres de Cardan, [17] dont vous me demandez des nouvelles, il ne s’en parle point encore et ai peine à croire qu’elle s’entreprenne de longtemps, [3] vu les fléaux qui affligent le monde et troublent le commerce : je dis la peste d’Italie, [18] les guerres d’entre les couronnes et le mépris des lettres, plus général que jamais. Mais en tout cas, si elle a à se faire, ce ne sera qu’après le retour du vénérable M. Ravaud, [19] lequel on dit être à présent en Portugal. J’ai fait récit au sieur Fourmy [20] de tout ce que vous me mandez touchant son privilège du Varandæus[21] dont il vous remercie, et m’a dit que puisque M. Béchet [22] était maintenant syndic de la librairie, duquel il avait l’honneur d’être connu assez particulièrement, il voulait lui écrire un mot pour savoir de lui s’il voulait qu’il lui envoyât l’original de son privilège pour l’enregistrer ; et que s’il lui mandait que oui, il le lui enverrait et vous enverrait aussi un exemplaire des Mémoires de Tavannes, [23] quoiqu’il n’en ait pas encore obtenu le privilège, ne doutant point que vous ne ménagiez ses intérêts, ne les faisant voir qu’à personnes non suspectes, de peur qu’on ne lui fasse pièce. [4]

Depuis avoir écrit ceci, le sieur Fourmy étant venu me voir, m’a appris qu’il vous avait envoyé il y a huit jours par le messager de Lyon l’original de son privilège et les Mémoires de Tavannes, qu’il vous prie de faire retirer et en payer le port, dont vous lui tiendrez compte, et prendrez soin de faire enregistrer sondit privilège par M. Béchet. [5]

J’ai eu lettre la semaine passée de M. Melchior Sebizius, [24] professeur de Strasbourg, qui me recommande un de ses compatriotes écolier en médecine venant de Padoue. [6][25][26] C’est un brave jeune homme qui a demeuré quelque temps à Vérone chez le sieur Petrus à Castro, [27] praticien renommé de ladite ville. [7][28] Il m’a dit que les sieurs Silvaticus, [29] Fortun. Licetus [30] et Joan. Rhodius [31] sont toujours vivants ; qu’un nommé Marquetus [32] et un autre, nommé Molinettus, [33] étaient en grande réputation dans Padoue ; [8] que la circulation du sang [34] passait en ce pays-là pour article de foi et qu’un médecin de Vérone ayant fait un livre pour la réfuter, s’était fait moquer de lui, quoiqu’en ayant fait la dédicace au duc de Mantoue ; [35] ce prince, en reconnaissance de cet honneur, l’avait anobli, lui et sa race, et honoré du titre de comte palatin. [9] Les grands en France ne sont point si généreux à récompenser les gens de lettre, les Mæcenas [36] y sont des oiseaux très rares au temps où nous sommes plus que jamais. J’ai fait réponse au dit sieur Sebizius et lui ai donné avis de la mort de MM. Moreau [37] et Riolan, [38] si peut-être il ne l’a déjà sue d’ailleurs. Je pense que ce M. Sebizius est aujourd’hui le plus vieux professeur en médecine qui soit en Allemagne. Il avait un collègue aussi fort vieux qui s’appelait M. Saltzmannus, [39] mort seulement depuis peu de mois en çà[10] J’ai aussi eu lettres de Montpellier, du sieur Mazuray, [40] lequel me mande qu’il n’a pu encore faire aucun acte public pour prendre ses degrés, mais que M. Courtaud [41] lui faisait espérer que devant les vacations, [11] il ferait son acte de baccalauréat ; [42] de quoi je doute fort, ayant appris de bonne part que les professeurs de Montpellier désertent fort les Écoles, le sieur de Soliniac [43] étant encore à Paris, le sieur de Belleval [44] à Uzès, proche M. le duc d’Uzès [45] malade, [12] et le sieur Sanche [46] quelque autre part ; si bien que M. Courtaud demeure solus in præsepi equus, pour parler avec le docteur Zacutus. [13][47] Je suis bien aise de ce que le sieur Brusius [48] vous a vu et vous a remis mon paquet. Je ne vous ai pas encore renvoyé le reste de vos manuscrits de Hofmannus [49] ni votre Sennertus[14][50] parce que M. Devenet [51] m’avait fait espérer de faire quelque balle dans laquelle il les pourrait mettre, ce qui n’est pas encore arrivé. Si je ne puis rien faire de ce côté-là, hasard de le bailler au coche de Paris. J’ai aussi encore céans les deux livres que vous m’avez envoyés pour faire tenir à M. Volckamer, [52] afin qu’il les fasse aller plus loin vers M. Rolfinckius, [53] nos marchands n’ayant fait de longtemps aucune balle pour Allemagne. L’on me fait espérer que dans la foire [54] prochaine d’août, il partira quelques balles pour Nuremberg [55] dans lesquelles je prétends de les mettre et de les bien recommander, ayant au reste beaucoup de regret de ce retardement auquel je n’ai pu trouver du remède. Ce que vous me mandez de la peste [56] de Gênes n’est que trop véritable, elle y est furieuse et l’on m’a dit qu’ils manquaient de gens de service dans cette extrémité, et qu’ils demandaient à Messieurs de Marseille [57] des médecins et des chirurgiens ; ce qui met en peine jusqu’à notre ville à cause de la foire de Beaucaire [58] prochaine où l’on voulait empêcher que nos marchands n’allassent, de peur de s’infecter parmi le grand abord d’Italiens et marchandises d’Italie qui s’y amènent ; mais ceux de Marseille ayant promis d’empêcher qu’aucune marchandise de ce pays-là ne fût déchargée sur leurs côtes, l’on souffrira que ladite foire soit fréquentée à l’ordinaire par nos marchands et négociants.

À peine avais-je achevé d’écrire cette page qu’il m’a fallu sortir pour aller voir un malade qui pressait, et voilà une crie qui se faisait tout de nouveau, par laquelle il est défendu d’aller à ladite foire de Beaucaire sous grosses peines, de sorte que l’on n’y ira pas. [15]

Je voudrais bien savoir < ce > que fait le pauvre M. Musnier [59] dans cette désolation publique où il se trouve enveloppé. Je n’ai pu encore apprendre au vrai qu’était devenu à Naples le brave Marcus Severinus, [60] quelques-uns m’assurant qu’il était mort et d’autres disant le contraire. [16] Je n’ai point su encore trouver en cette ville d’autre Introductio ad medicinam que celle que l’auteur (c’est-à-dire, le sieur Jo. Daniel Horstius) [61] m’a envoyée, toute corrigée de sa main et pleine de petites apostilles pour la faire imprimer de nouveau s’il s’en trouvait occasion ; [17] dont je doute fort, nos libraires n’ayant jamais battu plus froid pour l’impression des livres qu’ils font à présent, si l’on ne promet de leur graisser la main et de foncer aux frais de l’impression. [18] Nous n’avons point encore vu ici les livres d’Italie dont vous me faites mention, à savoir : Comment. Phrygii in Hist. epidem. Pars posterior ; Consilia medica Silvatici ; Ochus de Febrib. cum paradox. ; Franciscus de Francisco de Venæ sect. abusu[19][62][63][64][65] Si par ci-après il en peut venir quelqu’un à ma connaissance, je ne manquerai à vous en donner avis. Raynaldus [66] ne s’imprime point chez M. Borde, [67] à ce qu’on m’a assuré. [20] Ledit sieur Borde a été derechef grièvement malade, mais on m’a dit qu’il y a de l’amendement depuis quelques jours en çà.

M. Gras [68] m’a prié de vous faire ses baisemains et vous dire qu’il vous envoie par le sieur Basset [69] (qui est cet aspirant à notre agrégation, lequel ayant été refusé, plaide contre notre Collège à Paris) [70] le livre du sieur Restaurand [71] qu’il vous avait promis, intitulé De Monarchia microcosmi, où vous verrez à foison des maturinades dignes d’entrer en parallèle avec celles des habitants des Petites Maisons. [21][72] Je fis il y a 15 jours un petit voyage de quatre jours à Mâcon [73] pour affaires de tutelle et à mon retour, je sus que notre doyen, le sieur Claude Pons, [74] était fort malade d’une fluxion sur la poitrine à laquelle il était sujet depuis fort longtemps, et de laquelle enfin il mourut le dernier du passé et fut enterré le lendemain à l’hôpital dont il avait été le médecin ordinaire l’espace de 22 ans. Nous avons maintenant en son lieu et place de doyen M. de Rhodes [75] et pour vice-doyen M. Gras. Dieu nous les conserve longuement !

Enfin, M. Guillemin notre collègue revint sain et sauf en cette ville, [76] le 6e du courant, de son voyage de Piémont, [77] ayant mis trois mois (moins huit jours) à ce voyage, car il était parti d’ici le 13e d’avril ; et a laissé Madame Royale en parfaite santé, [78] à ce qu’il m’a dit lui-même dans le court entretien que j’eus dernièrement avec lui en son logis où je l’étais allé complimenter comme les autres. Il me dit en passant que les médecins de Turin [79] sont d’étranges praticiens et qu’ils lui avaient fait plus de peine pour les mettre à la raison que n’avait pas fait la maladie de Son Altesse Royale ; qu’il avait été fort mal secondé par D’Aquin, [80] qui n’était pas médecin, et qui bégayait et de l’esprit, et de la langue, delirat linguaque mensque[22][81] Au reste, il paraît bien satisfait des honnêtetés reçues dans cette cour-là. Je lui ai présenté vos baisemains sur ce qu’il m’a le premier demandé de vos nouvelles. Il vous écrira sans doute amplement de toute son aventure quand il se sera un peu reposé et < aura > repris ses esprits.

Voilà bien prou d’histoires pour un coup. Je ne pensais pas, quand j’ai commencé, d’en avoir la moitié tant dans ma gibecière. Il n‘y a que d’y fouiller hardiment, il en sort toujours quelque chose, vaille qui vaille. Je vous supplie de prendre le tout en bonne part et me faire la grâce que je tienne toujours rang parmi ceux qui vous sont tout acquis, en qualité, Monsieur, de votre très humble et très obéissant serviteur.

Spon, D.M.

La date est en tête, si vous en avez faute.

J’avais oublié de vous dire que M. Sauvageon [82] vous baisait les mains et m’avait assuré qu’il n’avait point fait imprimer la Pharmacopée de Bauderon en cette ville depuis son retour. [83] M. Huguetan [84] s’est fort plaint à moi du dit sieur Sauvageon pour avoir laissé passer quantité de fautes insupportables dans le Zacutus qu’il fait réimprimer et dont il lui avait confié la correction. [23] Pour Belaître, [85] que M. Gras nommait ici Bel estron, MM. Guillemin et Garnier vous en pourront dire plus de nouvelles que moi. Merus est nebulo, omniumque ignarissimus. Vale[24]


a.

Lettre autographe de Charles Spon à Guy Patin : ms BIU Santé no 2007, fos 289 ro‑290 vo ; Pic no 10 (pages 235‑243).

1.

Chesneau (v. note [1], lettre 400) et Suffren étaient les sujets de la lettre de recommandation que Charles Spon avait écrite à Guy Patin le 1er mai précédent (v. sa note [1]).

2.

Chartre (Furetière) :

« maladie qui fait tomber en langueur et maigrir insensiblement, qu’on appelle aussi phtisie. {a} On voue à saint Mandé les enfants qui tombent en chartre ; on a été obligé de donner une nourrice à ce malade parce qu’il tombait en chartre. Ce mot apparemment vient du précédent {b} parce que la prison cause de la tristesse et de la maigreur. Du Cange dit qu’on appelait autrefois les malades chartriers, et en latin carcerarius. »


  1. V. note [3], lettre 66.

  2. « Vieux mot qui signifiait autrefois une prison. Il est encore en usage en cette phrase : “ Il est défendu de tenir une personne en chartre privée ”, c’est-à-dire, hors d’une prison publique. […] Ce mot vient du latin carcer » (ibid.).

À ce qu’on a pu comprendre des précédentes descriptions, Josias Marion souffrait de cirrhose (v. note [4], lettre de Charles Spon, le 24 avril 1657), maladie du foie dont les derniers stades s’accompagnent souvent de cachexie (chartre ou phtisie).

3.

V. notes [3], lettre 484, pour les attaques contre l’infaillibilité pontificale (v. note [2], lettre 741) dans la 18e Provinciale de Blaise Pascal, et [13], lettre 446, pour le projet d’éditer les œuvres complètes de Jérôme Cardan.

4.

« On dit jouer pièce à quelqu’un, lui faire pièce, pour dire lui faire quelque supercherie, quelque affront, lui causer quelque dommage ou raillerie » (Furetière). Pièce prend là le sens figuré de « tromperie, moquerie, petit complot, comparé à une pièce de théâtre » (Littré DLF).

V. notes [10], lettre 485, pour les Opera omnia [Œuvres complètes] de Jean Varanda, en cours d’impression chez le libraire Christophe Fourmy, et [5], lettre 467, pour les Mémoires du maréchal de Tavannes.

5.

Paragraphe ajouté dans la marge avec un renvoi au passage précédent.

6.

La lettre de Charles Spon à Guy Patin, datée du 28 août suivant, désigne cet étudiant comme étant Johann Rudolf Dinckel, futur correspondant de Guy Patin.

7.

Vérone (Vénétie) faisait partie de la République de Venise depuis 1405. De 1262 à 1385, la ville avait été sous la domination de la famille della Scala (ou Scaligeri), dont les deux vaniteux Scaliger (Jules-César et son fils Joseph) prétendaient être issus (v. note [10], lettre 104).

8.

Pietro de Marchetti, Marquetus en latin, était titulaire de la chaire d’anatomie de Padoue depuis 1652, à laquelle s’ajouta celle de chirurgie en 1661. Il quitta ses fonctions académiques à l’âge de 80 ans et mourut en 1673 (Éloy). Marchetti avait alors publié, avec l’aide de son fils :

Dominici de Marchetis Patavini. Petri Equitis Professoris Filij, Anatomia. Cui responsiones ad Riolanum anatomicum Parisiensem in ipsius animadversionibus contra Veslingium additæ sunt.

[Anatomie de Dominicus de Marchetis, natif de Padoue, fils de Petrus, chevalier et professeur. Les réponses à Jean Riolan, anatomiste de Paris, sur ses remarques contre Johann Vesling, {a} y ont été ajoutées]. {b}


  1. V. note [19], lettre 192, pour Johann Vesling, anatomiste de Padoue mort en 1649, sa défense de la circulation du sang et les attaques de Jean ii Riolan qu’il avait endurées, sans pouvoir y répondre lui-même.

  2. Padoue, Matthæus Cadorinus, 1654, in‑4o de 179 pages, avec frontispice gravé, montrant une séance de dissection dans un amphithéâtre anatomique, et un portrait de l’auteur, Petrus de Marchettis Patav. D. Marci Eques, Anatom et Chirurg. in Lyceo Patav. Prof. Publ. An. mdcxlvii Æt lx [Pietro de Marchetti natif de Padoue, chevalier de Saint-Marc, professeur public d’anatomie et chirurgie en la Faculté de Padoue, l’an 1667, en sa 60e année d’âge], avec cette légende :

    Consulit iste viris, dum consulit exta virorum.
    Consilijs par est dexteritate manus
    .

    [Il porte conseil aux hommes quand il examine leurs viscères. Ses conseils sont égaux à la dextérité de sa main].


V. note [7], lettre latine 392, pour l’Observationum medico-chirurgicarum rariorum Sylloge [Recueil d’observations médico-chirurgicales plus que rares] de Marchetti (Padoue, 1664).

Antonio Molinetti (Venise début du xviie s.-ibid. 1675), docteur en médecine de Padoue, avait obtenu en 1649 la première chaire d’anatomie, laissée vacante par Johann Vesling. En 1661, il fut aussi investi de la chaire de médecine théorique, vacante depuis quatre ans par la mort de Fortunio Liceti (G.D.U. xixe s. et J. in Panckoucke). Ses ouvrages principaux sont :

9.

V. note [8], lettre 414, pour Charles ii de Gonzague, duc de Mantoue. Je n’ai identifié ni le médecin de Vérone qu’il avait anobli, ni son ouvrage contre la circulation du sang.

10.

Johann Rolf Saltzmann (Strasbourg 1573-ibid. 11 décembre 1656) premier professeur à la Faculté de médecine de Strasbourg, doyen du chapitre de Saint-Thomas et médecin ordinaire de la ville, a laissé une dizaine d’ouvrages médicaux (Éloy). Saltzmann était grand-père maternel de Johann Rudolf Dinckel, correspondant de Guy Patin.

11.

Avant les vacances de la Faculté.

12.

Emmanuel i de Crussol, duc d’Uzès, (1570-19 juillet 1657) avait une réputation de sottise aussi fortement établie que celle du duc de Monbazon.

Menagiana (tome quatrième, page 22‑23) :

« M. d’Uzès était chevalier d’honneur de la reine. Cette princesse lui demanda un jour quelle heure il était. Il répondit : “ Madame, l’heure qu’il plaira à Votre Majesté. ” Cela paraît badin d’abord, néanmoins il y a matière à de belles réflexions. […] Le duc d’Uzès, à qui […] on attribue des naïvetés sans nombre, n’entendait pas sans doute tant de finesse dans la réponse qu’il fit à la reine. On dit même, pour rendre la chose plus ridicule, que la reine lui avait demandé quand Mme d’Uzès accoucherait. À quoi le duc avait répondu : “ Quand il plaira à Votre Majesté, Madame. ” »

13.

« le seul cheval dans l’écurie » ; disant cela de son ami Siméon Courtaud, {a} Charles Spon disait vouloir « parler avec [comme] le docteur Zacutus », et renvoyait évasivement Guy Patin à un commentaire figurant dans les :

Zacuti Lusitani Medici, et Philosophi præstantissimi, Operum Tomus secundus, in quo Praxis Historiarum. Ubi morborum omnium internorum curatio, ad Principum Medicorum mentem explicatur : graviora dubia ventilantur, ac resolvuntur : Practicæ denique Observationes permultæ suis locis insperguntur. Præmittitur Introitus Medici ad Praxin : necnon Pharmacopœa elegantissima. Accessit Praxis Medica Admiranda, ab ipsomet Auctora non parum de novo locupletata : in qua Exempla mirabilia, monstrosa, circa abditas morborum causas, signa, eventus, atque curationes proponuntur.

[Second tome des œuvres de Zacutus Luzitanus, {b} très éminent madecin et philosophe, dans lequel se trouve la Pratique par les observations : le traitement de toutes les maladies internes y est expliqué en conformité avec l’esprit des meilleurs médecins ; les doutes les plus sérieux sont dissipés et résolus ; le tout est saupoudré, aux endroits requis, de très nombreuses observations. Au début se trouvent : une Initiation du médecin à la pratique et une très élégante Pharmacopée. On y a ajouté la Pratique médicale admirable que ledit auteur a lui-même de nouveau fort enrichie, où sont présentés de merveilleux et surprenants exemples touchant aux causes cachées de maladies, à leurs signes et à leurs traitements]. {c}


  1. V. note [19], lettre 128.

  2. V. note [7], lettre 68.

  3. Lyon, Jean-Antoine Huguetan, le fils, et Marc-Antoine Ravaud, 1649, in‑fo en deux parties de 655 et 146 pages.

Ce volume contient 80 Præcepta generalia, ad veram medendi methodum summe necessaria [Préceptes généraux éminemment nécessaires à la véritable méthode de remédier]. Le précepte xx (page 11), intitulé Medicus amet consultationes [Que le médecin affectionne les consultations] disserte sur ce passage du 8e Précepte d’Hippocrate (Littré Hip, volume 9, page 263‑265) :

« Il n’y a aucune disgrâce, si un médecin, embarrassé dans quelque occasion auprès d’un malade, et ne voyant pas clair à cause de son inexpérience, réclame la venue d’autres médecins avec qui il consultera sur le cas actuel et qui s’associeront à lui pour trouver le secours. Dans une affection qui demeure, le mal devenant plus intense, l’embarras fait qu’au moment beaucoup de choses échappent. »

Le « seul cheval dans l’écurie » de Spon prend son sens enfoui dans ce propos de Zacutus :

Hoc oraculo monet Divinus auctor, ut Medicus gaudeat, in curatione morbi gravissimi, sæpe secum habere colloquutorem, miti enim et diserta concertatione elicitur veritas. Qui enim alios non vult convocare ad consilium, is vult solus esse in præsepe equus, quare a domo, et a curatione explodendus : quoniam cognitio, et curatio morborum res sunt difficiles ; quare oportet ut earum veritas ex multorum voto elucescat. Deinde plus vident oculi, quam oculus, […] et doctissimus quisque sæpe obliviscitur, et unusquisque maiorem adhibet diligentiam, circumspiciens testes ignorantiæ suæ.

[Par cet oracle, le divin auteur exhorte le médecin à être heureux, quand il traite une très grave maladie, de pouvoir discuter avec quelqu’un, car une concertation calme et bien menée fait jaillir la vérité. Celui qui ne veut pas appeler les autres en consultation veut donc être le seul cheval dans l’écurie. Il faut chasser celui-là de la maison et du soin, parce que le diagnostic et le traitement des maladies sont choses difficiles, et qu’aux vœux de tous, il faut que se dévoile leur vérité. Et puis enfin, deux paires d’yeux en voient plus qu’une seule, il arrive souvent au plus savant d’oublier, et chacun doit mettre une très grande diligence à chercher les preuves de sa propre ignorance].

Les autres professeurs de Montpellier (Louis Soliniac, Martin Richer de Belleval, Pierre i Sanche) étant absents, Courtaud se retrouvait seul pour présider au baccalauréat médical du fils Mazuray (v. note [1], lettre 474).

14.

V. note [4], lettre de Charles Spon, le 15 mai 1657.

15.

Paragraphe ajouté dans la marge, avec un renvoi au passage précédent.

Crie est un vieux mot pour dire une déclaration proclamée par un crieur public (v. notule {b}, note [2], lettre 471).

16.

V. note [31], lettre 150, pour Marco Aurelio Severino, mort à Naples le 15 juillet 1656.

17.

Apostille : « annotation ou renvoi qu’on fait à la marge d’un écrit pour y ajouter quelque chose qui manque dans le texte, ou pour l’éclaircir et l’interpréter » (Furetière).

V. note [32], lettre 458, pour l’« Introduction à la médecine » de Johann Daniel Horst (3e édition, Marbourg, 1657), avec ici Introductio à la place Manuductio [Guide].

18.

Foncer : « débourser de l’argent » (Furetière).

19.

V. notes :

20.

Aucun des ouvrages du RP. Théophile Raynaud publiés à Lyon en 1657 ne l’a été chez Borde, mais ce libraire avait participé à l’impression de son traité De prima Missa… [De la première Messe…] en 1653 (v. note [36], lettre 335), réédité en 1658.

21.

V. note [15], lettre de Charles Spon, le 21 novembre 1656, pour la « Monarchie du microcosme » (sans lieu, 1657) de Raymond Restaurand, médecin de Pont-Saint-Esprit.

Une maturinade est une « extravagance, par allusion au mot italien matto, qui signifie fou ; on a dit que saint Mathurin guérissait de la folie, et de là vient le mot de maturinade » (Trévoux). Les habitants des Petites Maisons étaient les fous (v. note [29], lettre 97). Cette phrase de Charles Spon nous donne surtout un premier indice du parti que son collègue Henri Gras, l’amateur de Provinciales, avait pris en faveur de Bonaventure Basset au sein du Collège des médecins de Lyon (v. note [1] de la lettre d’André Falconet, datée du 14 août 1657).

22.

« la langue divague, comme l’esprit. » ; Lucrèce (La Nature des choses, livre iii, vers 453‑454) :

claudicat ingenium, delirat lingua mens,
omnia deficiunt atque uno tempore desunt
.

[l’intelligence se met à boiter, la langue divague, comme l’esprit, tout défaille, tout manque à la fois].

23.

V. notes [37], lettre 485, pour les éditions de la Pharmacopée de Brice Bauderon données par Guillaume Sauvageon, et [7], lettre 68, pour les Opera omnia d’Abraham Zacutus dont une nouvelle édition était en préparation à Lyon (Jean-Antoine ii Huguetan, 1657, 2 volumes in‑fo).

24.

« C’est un pur vaurien, et le plus ignorant de tous. Vale. »


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – De Charles Spon, le 10 juillet 1657

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(Consulté le 26/04/2024)

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