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Commentaires de la Faculté rédigés par le doyen Guy Patin (1650-1652) : 2B. Novembre 1651-novembre 1652, Décrets et assemblées de la Faculté de médecine  >

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits. Commentaires de la Faculté rédigés par le doyen Guy Patin (1650-1652) : 2B. Novembre 1651-novembre 1652, Décrets et assemblées de la Faculté de médecine

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=8187

(Consulté le 19/03/2024)

 

[BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 497 vo | LAT | IMG]

Actes, assemblées et décrets de la Faculté [1][1]

Le samedi 23e de décembre 1651, à une heure et demie de l’après-midi sonnante, sur convocation écrite, suivant la règle, tous les docteurs se sont réunis dans les salles hautes.

  1. Le doyen a avisé la Compagnie que, quelques jours auparavant, le très illustre M. Mathieu Molé, [2] premier président du Parlement de Paris et garde des sceaux, l’avait fait venir pour qu’il réunît la Faculté en vue de désigner, au nom des directeurs de l’Hôpital général, [3] deux de ses docteurs en médecine qui, par charité chrétienne, voudraient bien procurer leur aide à nos trois collègues, médecins ordinaires du dit Hôpital général, car ils sont plus que débordés et presque écrasés par la charge d’y visiter les malades, en raison [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 498 ro | LAT | IMG] de leur considérable affluence, qui est due à la cherté des vivres, [4] aux incursions des armées ennemies, et à l’extrême rigueur et misère des temps présents. Tous les docteurs ont été d’accord pour ne pas refuser ce secours aux pauvres qui souffrent en cet Hôpital :, [5] ils choisiront deux, trois ou quatre docteurs, issus des deux bancs, [2] qui assureront chaque mois cette tâche, sous condition qu’ils la quittent après l’avoir remplie pendant un mois et s’y succèdent les uns les autres suivant leur rang d’ancienneté. Tous ont tenu cet arrangement pour parfaitement juste et décidé qu’il serait ainsi mis en usage. Étant donné pourtant qu’il n’y aura besoin que de deux docteurs, mais que nombre d’entre eux, même parmi les plus occupés, désirent rendre ce service, la Faculté a décidé de n’en choisir que deux pour s’en acquitter ; et y furent désignés Maîtres Hermant de Launay [6] et Claude Le Vasseur. [7] Dans les prochains jours, tous deux iront offrir aux directeurs de l’Hôpital général de les aider, aux côtés de Maître René Moreau, docteur en médecine et professeur royal, comme étant le plus ancien des médecins du dit Hôpital. [8]

  2. A été écoutée la requête de Maître Paul Courtois, [9] censeur des Écoles, demandant, eu égard aux devoirs qui lui sont confiés, de pouvoir accompagner le très éminent recteur [10] dans ses visites des collèges de l’Université, [11] et assister à ses assemblées. La décision en a été remise au recteur et à ladite assemblée [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 498 vo | LAT | IMG] qu’il a coutume de réunir chaque mois chez lui.

  3. La Faculté a décrété que, lors des thèses qui se disputent tous les ans en nos Écoles basses, les noms des docteurs, qu’ils président à l’acte ou qu’ils y débattent, soient seulement ceux de leur famille et non ceux de leur terre ou domaine : seul doit être employé ce surnom, tel qu’il a été écrit dans leurs propres thèses, [12] quand ils y ont répondu comme bacheliers, [13] ou dans les Commentaires de la Faculté quand ils ont reçu leur bonnet doctoral ; [14] exactement comme font Messieurs les présidents et conseillers du Parlement de Paris quand on imprime chaque année leur tableau. Ce décret a été prononcé à cause de Maître Élie Béda qui à ses nom et prénom voulait aussi en ajouter un autre, à savoir des Fougerais, tout comme il avait jadis voulu modifier son nom pour être appelé de La Gourmandière[3][15] La Faculté entend que tous ses docteurs s’abstiennent de telles dénominations, comme autant d’extravagances impies, dans la mesure où le droit public interdit ce genre de changement de nom de famille, en le tenant pour corrompu et suspect.

  4. La Faculté a décidé que son décret du lundi 28e d’août contre Maître Jean Chartier [16] serait observé à la lettre : elle y ordonnait de le tenir pour inexistant, et de le [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 499 ro | LAT | IMG] dépouiller de tous les profits, émoluments et privilèges de l’École tant qu’il n’aurait pas retrouvé plus de sagesse et ne se serait pas soumis à nos règlements. [4] Qui plus est, on lui interdira de franchir le seuil de la Faculté et on l’en chassera ce prochain jeudi, 11 e de janvier 1652, pour la seconde quodlibétaire de Maître Daniel Arbinet, [17] sous la présidence de Maître Germain Hureau, [18] docteur en médecine nouvellement reçu. [19] On aurait en effet pu, pour ce jour-là, imprimer son nom sur cette thèse, parmi les examinateurs, [20] s’il n’avait été rayé, cinq mois plus tôt, du tableau des docteurs régents, en raison de son obstination et de son opiniâtreté à porter plainte devant le Parlement pour défendre sont petit livre en français de l’Antimoine[21] agité qu’il était par la crainte de notre censure. [5]

  5. Sur la demande instante du très distingué Maître Jean Merlet [22] d’une nouvelle édition du Codex medicamentarius[23] à condition qu’elle ait d’abord dû être corrigée et purgée de la quantité d’erreurs qui s’y répand, et qu’on en ait surtout extirpé et éradiqué le vin émétique, [24] ou plutôt poison hermétique, [25][26] que nos décrets ont maintes fois condamné, [27] la Faculté a décidé de convoquer une assemblée générale extraordinaire de la Compagnie où seront choisis quelques docteurs à qui cette tâche sera déléguée et confiée, et qui ensuite lui en feront leur rapport. [6]

    Ainsi le doyen en a-t-il conclu sur tous ces sujets.

Le vendredi 29e de décembre 1651, à une heure et demie sonnante, sur convocation écrite, conformément à la règle, tous les docteurs se sont réunis pour délibérer [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 499 vo | LAT | IMG] une seconde fois sur la requête du très distingué Maître Jean Merlet concernant la publication d’une nouvelle édition du Codex medicamentarius, après qu’il aura été revu et purgé des multiples erreurs qui y fourmillent. Ayant écouté le rapport du doyen sur la nécessité de nommer douze docteurs choisis parmi la Compagnie tout entière, huit du grand banc et quatre du petit banc, à qui on confiera cette tâche, qui l’accompliront, puis qui en rendront compte à l’assemblée, la Faculté a décidé de nommer des personnages éminents et parfaitement expérimentés qui seront chargés d’examiner, corriger et purger ledit Codex, puis qui lui en feront leur rapport une fois leur travail achevé. À cette fin ont été désignés les Maîtres Jean Riolan, [28] ancien de l’École, [29] Jacques Perreau, [30] Jean Merlet, René Moreau, François Boujonnier, [31] Antoine Charpentier, [32] Charles Guillemeau, [33] Gilbert Puilon, [34] Jacques Mentel, [35] François Blondel, [36] Jean Piètre, [37] Toussaint Fontaine, [38] Claude Perrault, [39] auxquels se joindront le doyen et le censeur. [7] Et ainsi le doyen en a-t-il conclu.

Le même jour, une fois l’assemblée levée, comme le doyen quittait l’École, un huissier à la chaîne [8][40] lui signifia, au nom de Jean Chartier, que cette réunion n’aurait pas dû avoir lieu, dans la mesure où elle avait pour dessein d’exclure le vin émétique du Codex medicamentarius, sujet sur lequel, [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 500 ro | LAT | IMG] disait-il, il n’était permis à la Faculté de prononcer aucun avis, en vertu d’un arrêt du Parlement prononcé le 16e de septembre passé ; quant à ce qui avait été projeté (à savoir que l’affaire de Faculté contre ledit Chartier serait repoussée à la Saint-Martin prochaine), tout doit rester en l’état jusqu’à ce que le procès qu’elle a engagé contre lui soit jugé et conclu. Le doyen s’est immédiatement rendu chez l’avocat de notre École, Maître Simon Piètre, [41] qui, ayant vu cette assignation, l’a estimée ridicule et tenue pour telle, pensant qu’il ne fallait pas y donner de suite. Le même jour, vendredi 29e de décembre, le doyen est allé voir le très illustre président de Bailleul [42] (qui faisait alors fonction de premier président du Parlement à la place de M. Mathieu Molé, alors absent, ayant été appelé par la reine à Poitiers, [43] voilà quelques jours) et lui a recommandé la cause de la Faculté contre cet {extravagant} [9] Jean Chartier qui, sans aucun droit et même très iniquement, avait voulu empêcher nos assemblées, qu’il tient pour moins que rien, afin de ne pouvoir prendre aucune décision sur la révision et la réédition du Codex medicamentarius ; comme si toute l’affaire ne regardait que le vin émétique, qui a la nature d’un poison, bien que ce Codex contienne quantité d’autres choses parfaitement dignes d’être corrigées et supprimées. Le doyen s’est donc présenté devant la Grand’Chambre le samedi suivant, 30e de décembre, accompagné de Maître Simon Piètre, avocat [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 500 vo | LAT | IMG] de la Faculté, où notre affaire a été brièvement débattue. L’avocat de Maître Jean Chartier, notre adversaire, n’a pu obtenir des juges ce qu’il demandait, à savoir des défenses d’exécuter le décret de la Faculté donné du jour d’hier, 29e de décembre[10] sur la révision du Codex medicamentarius.

Le vendredi 4e de janvier 1652, passé cinq heures du soir, Maître Jean Chartier m’a fait signifier par un huissier à la chaîne que ce jour même, 4e de janvier 1652, il avait obtenu une interdiction à notre encontre, des défenses d’exécuter le décret de la Faculté donné le 29e de décembre pour la révision du Codex medicamentarius. Cela s’appelle arrêt sur requête [44] nous empêchant de poursuivre notre dessein, qui est excellent, même s’il n’est pas toujours de grande conséquence. C’est ainsi que Chartier a obtenu d’un greffier de la Grand’Chambre dénommé Boileau, [11][45] moyennant argent comptant, un arrêt du Parlement qui n’avait pu l’être auparavant de juges absolument impartiaux.

Le lundi 8e de janvier 1652, à la tombée du jour, Maître Jean Chartier m’a fait signifier par un huissier à la chaîne sa requête devant le Parlement demandant que jeudi prochain, 11e de janvier 1652, lors de la thèse que va disputer hors tour Maître Germain Hureau, [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 501 ro | LAT | IMG] natif de Paris, à laquelle répondra Maître Daniel Arbinet, bachelier de médecine natif de Beaune, [5] ledit Chartier sera reconnu comme étant docteur en médecine et replacé sur le banc des examinateurs au rang qu’il occupe dans l’École, contrairement à ce qui est écrit dans ladite thèse imprimée voici deux jours. Il imputait cette anomalie à l’aversion que le doyen nourrissait contre lui, haïssant ledit Maître Jean Chartier pour le petit livre sur l’Antimoine qu’il avait écrit et publié six mois auparavant, en raison et à cause duquel la très salubre Faculté avait engagé un procès contre lui devant le Parlement de Paris.

Le lendemain, de grand matin, je suis allé voir notre avocat, Maître Simon Piètre, ainsi que Charles Baudot, avocat plaidant, [12][46] pour leur montrer cette requête de Jean Chartier ; tous deux l’ont jugée digne de mépris et bonne à mépriser, étant donné qu’ils ne voulaient pas favoriser les intérêts de notre adversaire ni compromettre en aucune façon la justesse de notre cause.

Le mercredi 10e de janvier 1652, passé sept heures du soir, ledit Jean Chartier m’a fait signifier, à moi son doyen, un arrêt de même nature, c’est-à-dire un arrêt sur requête, stipulant que la thèse de médecine qui devait être disputée aux Écoles de médecine par Maître Daniel Arbinet, sous la présidence de Maître Germain Hureau, le lendemain, savoir le jeudi 11e de janvier 1652, [5] serait obligatoirement amendée et modifiée pour y apposer le nom de Jean Chartier, de manière qu’il y dispute, comme veut la règle et comme les autres docteurs en ont l’habitude. J’ai répondu [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 501 vo | LAT | IMG] que je satisferais et obéirais strictement aux arrêts et décrets de la plus haute juridiction ; et sur ce, cet huissier, dénommé Nicolas Doucin, [47] s’est retiré.

Le lendemain, savoir le jeudi 11e de janvier 1652, de grand matin, avant sept heures, Maître Jean Chartier est entré en nos Écoles pour disputer ; et, comme abusé et trompé par la réponse ambiguë qu’avait faite le doyen, il s’est assis, vêtu de sa toge, sur le banc des examinateurs, en attendant la venue du doyen ; cet huissier, Nicolas Doucin, était lui aussi présent. Un quart d’heure plus tard, pareillement attendu par quelques docteurs, par ledit président et par cinq bacheliers, le doyen est arrivé et a aussitôt ordonné que cette soutenance commence. Ayant porté ses regards sur Chartier, assis sur le banc des examinateurs et vêtu de sa toge pourpre, le doyen lui a enjoint de sortir pour les motifs que voici : son nom ne figurant pas parmi les examinateurs, il n’avait nul droit ni lieu de disputer aux Écoles car, par décret solennel, il avait été privé de tous les droits, privilèges, honneurs et émoluments de la Faculté le lundi 28e d’août 1651 quand le doyen l’y avait convoqué pour répondre de son petit livre de l’Antimoine ; aucune clémence n’étant à attendre de sa mère, la très salubre Faculté, il l’avait poursuivie devant le Parlement ; et jamais il ne serait [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 502 ro | LAT | IMG] admis à disputer tant qu’il ne se serait pas repenti, n’aurait pas retiré son assignation et ne serait pas revenu en grâce auprès de la Compagnie. Jean Chartier, étonné et surpris par ces mots très durs du doyen, fit alors sortir son huissier, nommé Nicolas Doucin, du coin obscur où il se tenait caché et l’a mené auprès du doyen ; l’ayant entendu parler ainsi et refuser à Chartier la faveur de disputer, il a demandé au doyen les motifs de cette interdiction pour en dresser son procès-verbal du refus du doyen. Le doyen lui a alors répondu qu’il ne pouvait ni devait souffrir que Maître Jean Chartier prenne ce jour rang parmi les examinateurs et qu’il ne disputerait jamais s’il n’avait d’abord suspendu l’assignation qu’il a portée contre sa mère, la très salubre Faculté, pour ce misérable et infâme petit livre de l’Antimoine, parfaitement futile et ridicule, qu’il avait publié six mois plus tôt ; à cause duquel il a été exclu de l’École par décret de la Faculté et privé de tous les honneurs, émoluments et privilèges tant qu’il ne serait pas revenu dans son bon sens. Que ledit Chartier regagne donc la faveur de la Faculté ; et pour obtenir cela, elle lui demande qu’il se dispose à reconnaître sa faute ; et s’étant de lui-même assujetti aux lois et décrets de l’École, principalement celui qu’elle a prononcé le lundi 12e de juin 1651, qu’il soumette son livre de l’Antimoine à la censure de la très salubre Faculté. S’il s’y refuse, qu’il soit banni et chassé d’entre nous et tenu pour indésirable, et ne soit jamais réadmis dans notre très intègre Compagnie. Cependant, notre soutenance publique doit être commencée au mépris de quelque arrêt du Parlement que ce soit, mais par la force, puissance et autorité de notre règlement qui s’appuie sur le plein pouvoir de nos statuts [48] qui sont autant d’arrêts [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 502 vo | LAT | IMG] ayant valeur de lois éternelles et inviolables, imposées à nous par le Parlement de Paris, et d’une nature bien plus éminente et souveraine que ceux qu’on obtient partout par des lettres de doléances qu’on appelle en français arrêts sur requête. Le doyen ayant prononcé toutes ces paroles, l’huissier Nicolas Doucin les ayant transcrites et le doyen les ayant lui-même contresignées, car elles étaient conformes, Chartier est sorti et s’en est allé avec son huissier ; et sans autre incident, la soutenance publique s’est tenue jusqu’à midi. Chartier n’a pas pu y disputer, sous le grief d’avoir attenté à la dignité de nos Écoles et violé notre décret, prononcé le 12e de juin 1651, en nous assignant devant le Parlement quand il aurait dû se soumettre et conformer à nos règlements. Cette réponse du doyen au renégat παρανομον [13] de l’École, Jean Chartier, et à son huissier a été louée et approuvée, tant par les docteurs présents que, même, par un grand nombre d’autres qui les ont rejoints par la suite. De eventu Deus ipse viderit[14][49] dont le soin est remis à sa bonté.

Le mardi 16e de janvier 1652, Madame Anna Bergeret, [50] veuve de Maître Jacques Cornuti, [51] notre défunt collègue, a eu soin de me signifier par un huissier que c’est à elle, et non à Marie Germain, [52] que la Faculté doit une somme de trois milles livres tournois depuis le [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 503 ro | LAT | IMG] 13e de janvier 1649, pour laquelle, au nom de la Faculté, lui a été consentie une rente annuelle de cent cinquante livres tournois par Maître Jean Piètre, alors doyen, en présence de nos maîtres François Guénault, [53] Denis Allain, [54] François Blondel, Nicolas Richard [55] et Quentin Thévenin, [56] docteurs que notre Compagnie avait choisis pour régler cette affaire. En ma qualité de présent doyen, ledit huissier m’a remis le désaveu de ladite Marie Germain[15][57]

Le vendredi 26e de janvier 1652, à deux heures de l’après-midi, dans les hautes salles des Écoles, Guy Patin, natif du Beauvaisis, a rendu les comptes de la première année de son décanat. La très salubre Faculté les a unanimement loués et approuvés. Pour la diligente et excellente administration de nos affaires, elle a décidé de me verser un honoraire de deux cents livres tournois ; et aussi trois livres et dix sols à chacun des docteurs, argent comptant. [58] En raison du petit nombre des bacheliers reçus depuis deux ans, en lien avec l’extrême rigueur des temps présents, et à cause de notre fort excès de dépenses, qui ne pourra être supporté si on n’y trouve remède à l’avenir, tous nos comptes faits et bien vérifiés, tant des entrées que des sorties d’argent, la très salubre Faculté doit au doyen mille cent quarante-cinq livres tournois, treize sols et sept deniers, à quoi s’ajoute son honoraire de 200 ℔. [16] Au fil des ans, pour l’avantage de la Faculté, les doyens ont souvent prêté leur propre argent, sans reprocher à leurs collègues ce service qu’ils leur ont volontiers rendu. [17]

Cum labor in damno est, crescit mortalis egestas[18][59]

Guy Patin, doyen.

[BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 503 vo | LAT | IMG]

Le samedi 27e de janvier 1652, sur convocation écrite de tous les docteurs, suivant la règle, la Compagnie s’est réunie à dix heures du matin, après la messe, [60] dans les hautes salles des Écoles. Le doyen lui a proposé quatre sujets : 1. porter et distribuer les cierges pour la fête de la Purification de la bienheureuse Marie ; [61] 2. élire les examinateurs des candidats de médecine [62] pour le carême prochain ; [63] 3. Maître Hermant de Launay, docteur en médecine, a rencontré un homme qui nous propose de nouveaux bâtiments fort convenables pour nos Écoles, puis qui démolira ceux que nous occupons en échange de ceux qu’il nous offre et d’une certaine somme d’argent, et qui a demandé à être entendu sur cette transaction ; [64] 4. examiner un opuscule manuscrit en français contre la circulation du sang et son inventeur (ou qui du moins se prétend tel), l’Anglais William Harvey ; [65][66] l’auteur de ce petit livre est Maître Gabriel Bertrand, natif de Nevers, [67] chirurgien barbier de Paris ; [68][69] il l’a présenté à la très salubre Faculté pour le soumettre à ses jugement, autorité et censure, c’est-à-dire pour l’approuver ou désapprouver. [19] Sur ces [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 504 ro | LAT | IMG] quatre articles, la très salubre Faculté a pris les décisions qui suivent.

  1. Pour la fête de la Purification de la sainte mère de Dieu, toujours vierge, elle observera la tradition de porter et distribuer des cierges aux grands personnages de la Ville et du Parlement.

  2. Elle a élu les quatre examinateurs des candidats, suivant la coutume de l’École et la règle imposée par nos statuts : les billets portant les noms des docteurs présents ont été jetés dans un bonnet, en lieu d’urne, puis le doyen en a tiré cinq au hasard, à savoir trois du grand banc, Maîtres René Chartier, [70] Antoine Charpentier et François Des François, [71] et deux du petit banc, Maîtres Nicolas Cappon [72] et Léon Le Tourneurs. [73] Après que chacun d’eux eut prêté serment entre les mains du doyen, en s’engageant à ne choisir que des hommes parfaitement dignes de remplir cette charge, ils ont désigné, pour être examinateurs, Maîtres Nicolas Matthieu, [74] François Blondel et Jean Piètre, du grand banc, et Maîtres François Le Vignon, [75] Nicolas Richard et Toussaint Fontaine, du petit banc. Du chapeau où ont été jetés leurs noms, ont été tirés ceux de Maîtres Nicolas Matthieu et Jean Piètre, et de Maîtres François Le Vignon et Nicolas Richard, qui ont donc été nommés examinateurs, après avoir juré entre les mains du doyen qu’ils [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 504 vo | LAT | IMG] rempliront diligemment, fidèlement et soigneusement ce devoir d’examiner les candidats pour préserver la dignité de notre École.

  3. En compagnie de quelques docteurs choisis, le doyen et les censeurs entendront ce personnage qui demande à l’être. Ensuite, le doyen convoquera une assemblée extraordinaire pour lui faire un rapport sur sa proposition.

  4. Tous les médecins ont jugé que la circulation du sang n’est pas une controverse de chirurgiens et qu’il n’appartient pas à un barbier chirurgien d’en débattre. [76] Cet opuscule manuscrit doit dont être rejeté et rendu à son auteur, lequel en disposera à son gré ; mais la très salubre Faculté ne pense pas qu’il faille le soumettre à l’examen d’aucun docteur ni qu’il puisse en être approuvé, principalement parce que la résolution d’une question si difficile et embrouillée n’est pas de la compétence d’un chirurgien ; même si ledit auteur, Gabriel Bertrand, demande instamment et attend très humblement un avis de la Faculté, tout en convenant volontiers qu’elle est seule juge et arbitre en toute cette matière.

    Il convient de remarquer que tous les docteurs ont adhéré à cette sentence, mais ont reconnu que l’auteur du dit opuscule, Gabriel Bertrand, barbier chirurgien, jouit de quelque renom et réputation en sa corporation ; [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 505 ro | LAT | IMG] mais notre ancien, le très savant M. Jean Riolan, maître et collègue dont nous reconnaissons tous la science infinie et l’immense érudition, s’est irrité contre lui pour s’être laissé aller à écrire sur ce sujet, en soi extrêmement ardu et qui dépasse l’entendement du commun des mortels, étant donné que les philosophes les plus pointus, et les médecins les plus expérimentés et les plus rompus aux opérations du métier ont exercé leur intelligence à en discuter sans en avoir jusqu’ici tiré de profit notable.

    Ainsi le doyen en a-t-il conclu sur chacune de ces questions.

Le samedi 24e de février 1652, après la messe, le doyen a proposé au grand nombre de docteurs en médecine présents de débattre en premier lieu sur la plainte qu’ont exprimée beaucoup de collègues contre trois des nôtres : en infraction avec les décrets de notre École, et tout particulièrement avec le dernier qui a été prononcé le vendredi 12e de mai 1651, [77] ils ont pris part à des consultations, en divers endroits, avec un médecin étranger venu de Reims, [78] dénommé < Antoine > Vallot. [20][79] Les noms de ces trois Messieurs ont été prononcés : François Le Vignon, Charles Le Breton [80] et Bertin Dieuxivoye. [81]

En second lieu, des docteurs ont demandé au doyen que soit remis en vigueur l’examen portant sur la vie et les mœurs des candidats au baccalauréat, lequel a été abandonné depuis quelque temps, étant donné que, cette année, l’un d’eux, quand on l’a appelé à s’y soumettre, a rencontré certains des nôtres qui ont considéré et jugé souhaitable de s’enquérir sérieusement et soigneusement de sa vie, de son lieu de naissance, de sa famille et de sa bonne réputation.

La Faculté en a décidé comme suit sur chacun de ces deux articles : [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 505 vo | LAT | IMG]

  • sur le premier point, la très juste plainte de nos collègues contre ceux qui exercent la médecine en compagnie d’empiriques [82] et d’étrangers est d’une telle gravité qu’il convient d’y consacrer une assemblée générale, en vue de l’examiner et de la trancher ; dès qu’il sera possible de la réunir, sur convocation individuelle, écrite de la propre main du doyen, et non pas imprimée, comme veut la coutume en vigueur, portée par le bedeau [83] à chacun des docteurs, les trois susnommés seront donc sommés de s’y présenter, à savoir les Maîtres François Le Vignon, Charles Le Breton et Bertin Dieuxivoye ;

  • sur le second point, il semble, non sans raison, que doive être donnée suite à la demande de restaurer maintenant l’examen portant sur la vie et les mœurs des candidats, lequel a naguère été abandonné car nul n’en voyait plus la nécessité ; mais il sera préférable et plus sûr de remettre le soin d’en débattre à une prochaine assemblée de la Faculté.

Le mardi 27e de février 1652, sur billet de convocation porté par le bedeau à chacun des docteurs, suivant la règle, la Faculté, après avoir entendu les deux demandes soumises par le doyen, s’est prononcée comme suit.

  1. On devra procéder sous huitaine à l’examen de la vie et des mœurs des candidats, après qu’ils auront présenté à la très salubre Faculté les certificats prouvant leur âge et l’obtention de leur maîtrise ès arts, ainsi que les lettres attestant de leurs études. [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 506 ro | LAT | IMG]

  2. Après avoir entendu les trois dénonciations, à savoir celle de Maître Claude Le Vasseur contre Charles Le Breton, celle de Maître André Guyet [84] contre François Le Vignon, et celle de Maître Jean [21] Bachot [85] contre Bertin Dieuxivoye, ainsi que les réponses de ces trois accusés, où ils se disculpaient de leur mieux de ce qu’on leur reprochait et sollicitaient très humblement le pardon de la très salubre Faculté, les docteurs ont fini par s’accorder sur cette sentence : pour ce premier écart, tous trois méritent le pardon de leur faute, bien qu’elle soit incontestable, notamment dans le cas de Maître Bertin Dieuxivoye ; la culpabilité de Maître François Le Vignon demeure douteuse ; pour Maître Charles Le Breton, homme honnête et de fort peu de malice, son amnistie a paru justifiée car c’était la toute première fois que, par imprudence plutôt que par malveillance, il adressait la parole à ce fameux médecin étranger dénommé < Antoine > Vallot, qu’on dit être docteur de Reims et qui jouit d’un grand renom parmi les Parisiens à cause de sa polypharmacie ; [86] cela s’est produit au chevet d’une noble dame, dénommée Mme de La Sale, parente par alliance de M. Le Vasseur, dénonciateur du dit Le Breton. [22] La Faculté leur a donc pardonné et les a de bon cœur absous de leur faute, sous condition qu’ils soient tous trois dûment et sévèrement réprimandés par le doyen en présence de toute la Compagnie.

    Et telle a été la fort bienveillante sentence de la majorité des docteurs, allant dans le sens de la clémence et de la miséricorde, et ainsi le doyen en a-t-il conclu. [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 506 vo | LAT | IMG]

    Toutefois, un très grand nombre des nôtres voulait qu’après avoir simplement admonesté les deux autres, le troisième, Maître Bertin Dieuxivoye, natif du Mans, fût puni d’un châtiment qu’il semblait avoir très amplement mérité, à savoir la privation de ses émoluments pendant une année entière. Alors, aussitôt après que le doyen eut prononcé la susdite sentence, quantité de docteurs se sont insurgés contre elle, non pas parce qu’ils étaient d’avis contraire à celui du doyen, mais parce qu’ils ne voulaient ni ne pouvaient supporter une telle clémence de la Faculté. Le censeur, l’excellent Maître Paul Courtois, a donc réclamé que cette affaire soit reportée à une assemblée ultérieure, régulièrement convoquée à cette fin, et tous ont sur-le-champ adhéré à sa proposition. Le doyen n’a pas non plus réprimandé ces trois docteurs le jour même : il a reporté toute l’affaire à cette prochaine assemblée qui sera régulièrement convoquée sous trois jours et au cours de laquelle toute cette controverse, délicate et pénible, sera de nouveau discutée, rebattue sur l’enclume et résolue, en conformité avec nos règlements. Ainsi le doyen en a-t-il conclu sur toutes ces questions.

Le jeudi 29e de février 1652, à deux heures de l’après-midi, tous les docteurs ont été invités à se réunir, sur convocation écrite que le bedeau [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 507 ro | LAT | IMG] a portée à chacun d’eux. Après avoir entendu la déclaration du doyen concernant les trois docteurs, Maîtres François Le Vignon, Charles Le Breton et Bertin Dieuxivoye, convaincus d’avoir violé le statut qu’a récemment remis en vigueur le décret du 12e de mai 1651, prohibant formellement de faire ce qu’il dénonce, c’est-à-dire d’exercer la médecine ou de consulter avec un étranger et fameux médecin de Reims, dénommé < Antoine > Vallot, la très salubre Faculté a décidé, en conformité avec ce qui avait été laissé en suspens, [23] que les trois susdits docteurs seront exclus pendant un an de la Faculté, et dépouillés de tous les honneurs et émoluments qu’elle confère ; elle doit en outre des remerciements aux trois docteurs grâce à qui la faute de ces trois collègues a été mise au jour. Et ainsi le doyen en a-t-il conclu.

Le mercredi 6e de mars 1652, à deux heures de l’après-midi, les docteurs s’étant assemblés sur convocation [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 507 vo | LAT | IMG] portée à chacun d’eux, le doyen leur a soumis trois sujets :

  1. du très dur propos de Maître Philibert Morisset [87] contre Maître Jean Piètre, que ledit Maître Philibert Morisset a qualifié d’imposteur, tandis qu’il prononçait son avis, en parlant avec colère contre ceux qui interrompaient son discours, dont l’un fut ledit Maître Jean Piètre ;

  2. de la suite à donner à la demande du très brillant Maître Claude Germain, [88] notre fort savant collègue, concernant son livre intitulé Orthodoxe, sur l’antimoine et sa nature vénéneuse[89] lequel sollicite l’approbation de la très salubre Faculté ; [24]

  3. de la décision du Parlement, qu’on appelle en français un arrêt sur requête, dernièrement obtenue par M. François Le Vignon et que, voici une heure, un huissier à la chaîne a remis au doyen, à son propre domicile ; récemment dépouillé pour un an des avantages et émoluments des Écoles parce qu’il nous a été révélé qu’il avait mené des consultations médicales avec un médecin étranger, fameux et réputé en la ville de Paris, dénommé < François > Vallot, en application de la décision que la Faculté a prononcée contre lui et deux autres collègues le jeudi vingt-neuvième de février dernier, ledit M. François Le Vignon, [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 508 ro | LAT | IMG] a fait appel de cette sanction devant le Parlement, soit devant la plus haute juridiction, en arguant qu’elle n’était n’était guère fondée sur l’authenticité et vérité des faits.

Sur ces trois sujets, la Faculté a statué comme suit.

  • Premièrement, il faut exhorter Maîtres Philibert Morisset et Jean Piètre à se départir de toute haine pour cultiver l’amitié qui doit dorénavant régner entre eux, au nom du droit à l’oubli.

  • Deuxièmement, après avoir entendu la supplique de Maître Claude Germain, ont été désignés six examinateurs, à savoir quatre du grand banc, Maîtres Jean Merlet, François Guénault, [90] Jean Bourgeois [91] et René Moreau, et deux du petit banc, Maîtres Nicolas Richard et Léon Le Tourneurs ; une fois qu’ils auront examiné son livre, ils feront part de leur avis à la Compagnie ; ce qui l’autorisera à prendre sa décision et, s’il lui paraît utile et justifié de donner son approbation au dit ouvrage, elle en fera part à son auteur.

  • Sur le troisième point, la très salubre Faculté pense qu’elle doit engager un procès contre Maître François Le Vignon qui fait appel de notre autorité et des lois de notre École devant la Cour. Dans ce dessein, nos anciens ont aussi estimé que notre doyen devra aller voir le très illustre Monsieur Fouquet, procureur général du Parlement de Paris, [92] [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 508 vo | LAT | IMG] en compagnie de plusieurs de nos docteurs, pour lui demander de bien vouloir veiller au respect de nos décrets et de nos statuts, contre les obstinés et les rebelles.

    Ainsi le doyen en a-t-il conclu sur ces trois articles.

Le samedi 9e de mars 1652, les docteurs ayant été convoqués par billet individuel, selon la règle, les cinq candidats au baccalauréat se sont présentés à la Faculté, à savoir Claude de Frades, [93] Abraham Thévart, [94] Romain Parigaut, [95] Alain Lamy [96] et Michel de Hennot. [25][97][98] Ledit Claude de Frades prononça un petit discours pour demander que lui et ses camarades soient admis à se présenter à l’examen qui doit avoir lieu avant Pâques. [26] La Faculté a décidé que le doyen les avise de venir dans les salles hautes de l’École mardi prochain, 12e de mars, à deux heures de l’après-midi, montrer les certificats procurant les preuves de leur maîtrise ès arts, de leur âge et de la durée de leurs études.

Cela fait, après que les candidats se furent retirés, un de nos anciens, le très distingué Maître Jacques Perreau, a supplié la Faculté, en ces saints jours [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 509 ro | LAT | IMG] précédant Pâques, de bien vouloir accorder son pardon à Maître François Le Vignon, naguère notre collègue, et de le rétablir en ses anciens rang et dignité, étant donné qu’il semble exister un doute sur la solidité du témoignage porté contre lui, lequel l’a condamné à s’abstenir de franchir le seuil de l’École pendant une année et à être privé de ses émoluments. Ensuite, Maître Martin Akakia [99] a adressé la même supplique en faveur de Maître Charles Le Breton qui semblait n’avoir commis qu’un péché véniel ; puis Maître Philibert Morisset en fit de même pour Maître Bertin Dieuxivoye, dont il a excusé la faute et pour qui il a imploré la miséricorde de la Faculté. La Compagnie a examiné ces trois requêtes et décidé d’absoudre ces trois docteurs, en leur accordant sa grâce sous trois conditions : 1. que, par un écrit signé de leur propre main, ils reconnaissent tous trois leur manquement et en demandent pardon à la Faculté ; 2. qu’ils renoncent à tout procès, et tout particulièrement Maître François Le Vignon qui nous traduit en justice, et s’en remettent au seul arbitrage de notre École, pour se soumettre à ses lois, comme font leurs autres collègues, et adhérer à nos statuts ; 3. qu’ils sachent bien que s’ils viennent à fauter de nouveau, et cela vaut tant pour eux que pour tout autre docteur, [27] [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 509 vo | LAT | IMG] il n’y aura de place pour aucune excuse ni supplication. Ils remettront leur attestation écrite au doyen qui en référera à la Faculté mardi prochain, quand les candidats à l’examen viendront présenter leurs certificats. Ainsi le doyen en a-t-il conclu sur chacun de ces points.

Le mardi 12e de mars 1652.

  • En réunion ordinaire de la Faculté, sans convocation, dans la mesure où il est habituel d’en tenir une ce jour-là et où, le samedi précédent, chacun des docteurs avait été convié à venir inspecter les certificats des cinq candidats au baccalauréat, lesdits candidats se sont présentés et ont remis dans les mains du doyen les lettres attestant de leur âge, de la durée de leurs études médicales et de leur maîtrise ès arts. La Faculté a décidé de les remettre à Maître Paul Courtois, censeur des Écoles, qui ira voir Maître Nicolas Quintaine, greffier de l’Université, [28][100][101] lequel vérifiera l’authenticité desdites lettres dans ses registres. Pour remplir cette tâche, on lui a adjoint Maîtres Claude Liénard, [102] Hugues Chasles, [103] Denis Joncquet [104] et Claude Le Vasseur. Cela accompli, ils en référeront à la Faculté samedi prochain, 16e de mars à dix heures du matin, après la messe. Ainsi le doyen en a-t-il conclu. [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 510 ro | LAT | IMG]

  • Au même moment, Maître Jean Merlet a supplié d’appliquer les trois décisions jadis prononcées en faveur de Maître Lancelot de Frades et de son fils durant le décanat de Maître Michel de La Vigne. [105] Il les a lui-même lues devant toute la Compagnie : la Faculté y promettait que cedit fils, une fois admis à accéder aux grades de l’École, passerait gratuitement du baccalauréat au doctorat ; la raison de cela tient aux soins fidèles et diligents que ledit Maître Lancelot de Frades, père de notre candidat, prodigue régulièrement à la personne du très illustre ecclésiastique, Monsieur des Roches, [106] notre Mécène ; [107] de sorte que ledit Maître Claude de Frades, son fils, sera admis sans frais à l’examen. [29] Tous les docteurs ont acquiescé à la demande de Maître Jean Merlet et réclamé l’application de ces trois décisions prises sous le décanat de Maître Michel de La Vigne, étant donné la déférence que nous devons tous, autant que nous sommes, à ce très illustre prélat et à son immense générosité envers notre Compagnie, avec les trente mille livres tournois qu’il lui promet pour la restauration de ses Écoles. Chacun de nous éprouve néanmoins incertitude et doute quant à la date où [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 510 vo | LAT | IMG] il tiendra son engagement. Il est néanmoins à remarquer que, tandis que nous débattions de cette affaire, quelques docteurs ont émis l’avis que les fils des docteurs en médecine de Paris devraient désormais recevoir leurs grades sans bourse délier ; mais cette discussion a été reportée à une autre assemblée qui sera spécialement convoquée à cet effet. Dieu aidant, voilà bien ce que je ne ferai jamais parce qu’une telle gratuité serait inconvenante et injuste, étant donné que ces jeunes gens ne manquent ni de ressources ni d’argent. En outre, il y a sérieusement lieu de penser que cette affaire aurait de très lourdes conséquences et que la gratuité des actes ne devrait jamais être concédée sauf, peut-être, à quelque particulier dans l’indigence, mais qui serait extrêmement savant. Tel fut le cas, voici quelques années, de Maître Janus Cæcilius Frey, [108] célèbre professeur de philosophie, jouissant d’une grande réputation en l’Université de Paris : en raison de sa remarquable érudition et en dépit de son profond dénûment, il obtint le bonnet doctoral le 17e de janvier 1624, sous la présidence de Maître Simon Le Tellier, [109] sous le décanat du très distingué Maître André Du Chemin. [30][110] [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 511 ro | LAT | IMG]

  • En troisième lieu, le doyen a déclaré détenir l’écrit que les Maîtres François Le Vignon, Charles Le Breton et Bertin Dieuxivoye ont signé de leur propre main, par lequel ces trois docteurs, en conformité avec le décret de la très salubre Faculté prononcé voici trois jours, le 9e de mars 1652, et selon le vœu de la Compagnie tout entière, ils reconnaissent leur faute, supplient qu’on leur accorde le pardon et renoncent à tout procès (en particulier Maître François Le Vignon qui, contre notre décret prononcé le jeudi 29e de février 1652 l’excluant pour une année du sein de la Faculté, avait présenté une requête devant le Parlement de Paris et avait obtenu un édit de même nature, vulgairement appelé arrêt sur requête, à la suite duquel notre Faculté avait décidé d’engager un procès contre lui) ; ils promettent en outre de ne jamais rien faire dorénavant qui soit contraire aux lois et statuts de la très salubre Faculté, ne voulant plus faire cas que de ses seules règles, ni refuser sa punition quand elle aura constaté qu’ils ont failli à ses statuts et décrets. Après que le doyen eut entièrement lu ledit écrit autographe, la très salubre Faculté a décidé qu’il devrait être transcrit dans nos Commentaires, et que ceux qui furent naguère nos trois collègues, ayant reconnu leur manquement et imploré le pardon, seront graciés et réintégrés en leurs anciens rang et dignité. Ils ont donc été mandés dans les hautes salles des Écoles et [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 511 vo | LAT | IMG] le doyen les y a entièrement rétablis, à condition de ne plus commettre dorénavant le moindre écart de conduite ; dans le cas contraire, qu’eux et tous les autres tiennent pour certain qu’il n’y aura plus de place pour le pardon ni pour les supplications. Sur ces paroles du doyen, ils ont remercié la très salubre Faculté pour leur réhabilitation.

    Suit le texte du dit écrit des trois docteurs, et qu’ils ont signé :

    « Nous soussignés docteurs en la très salubre Faculté de médecine de Paris, déclarons déférer au décret prononcé dans les Écoles le samedi 9e de mars, à dix heures du matin, après la messe, et nous en satisfaire : nous demandons à l’ensemble de la Compagnie la rémission de tout péché que nous avons commis contre ses statuts, renonçons à tout procès, tout particulièrement moi, François Le Vignon, et promettons de ne jamais plus rien faire qui soit contraire aux lois et statuts de la Faculté, ne voulant plus faire cas que de ses seules règles, ni refuser sa punition quand elle aura constaté que nous avons failli à ses règlements. Fait à Paris, au domicile de Maître Jacques Perreau, le dimanche dixième de mars de l’an mil six cent cinquante-deux.

    Le Vignon        Le Breton        Dieuxivoye. »

[BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 512 ro | LAT | IMG]

Le samedi 16e de mars 1652, en l’assemblée qui s’est tenue à dix heures du matin, après la messe, a été entendu le rapport des quatre docteurs que la Faculté avait députés, avec Monsieur Paul Courtois, censeur. Ils ont déclaré que, d’après les registres de l’Université, une année entière manquait aux attestations de Maître Abraham Thévart et que celles des autres candidats étaient excellentes et parfaitement probantes, dans la mesure où elles ne laissaient rien à désirer. La très salubre Faculté a décidé que le premier doit être refusé et son examen reporté de deux années, mais que les quatre autres sont admis à la session qui débutera lundi prochain, 18e de mars à neuf heures du matin sonnantes.

À la suite de cette déclaration du doyen, Maître Jean de Bourges, le père, [111] a supplié la Faculté d’accorder son indulgence au dit Abraham Thévart, dont le certificat de maîtrise ès arts présente un défaut d’une année, pour qu’il puisse se présenter avec les autres à l’examen lundi prochain, 18e de mars, en invoquant notamment le petit nombre des candidats. [31] Le doyen a refusé toute délibération sur ce sujet, étant donné qu’elle irait à l’encontre des statuts, et qu’il serait parfaitement criminel de décider quoi que ce fût qui pût atténuer ou briser leur force. Durant son décanat, il ne souffrira donc pas que nos lois soient attaquées de la sorte, car elles ne doivent être violées en aucune façon. On a aussi [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 512 vo | LAT | IMG] entendu l’intervention de Maître Paul Courtois, censeur des Écoles, mettant en avant que rien ne soit décidé sur ce sujet qui irait franchement contre nos statuts, afin de ne pas souiller notre très sainte Compagnie et de ne pas relâcher la rigueur de nos règlements. La séance a alors été levée après avoir avisé les candidats de se présenter à l’examen lundi prochain, 18e de mars, à neuf heures précises, sans oublier d’avoir payé au doyen leurs droits d’inscription.

Le lundi 18e de mars 1652 a commencé l’examen des quatre candidats de médecine. Il s’est poursuivi dans les règles les mardi, mercredi et vendredi suivants. [32]

Le samedi 23e de mars, après la messe, à huit heures du matin,

  • la très salubre Faculté, spécialement convoquée à cet effet, a entendu et approuvé la proclamation des résultats par les quatre examinateurs et a admis trois candidats au premier grade, ou baccalauréat :

    Maître Romain Parigaut, natif de Meaux,
    Maître Michel de Hennot, natif de Normandie,
    Maître Claude de Frades, natif de Paris.

    À la condition pourtant que Maître Lancelot de Frades, notre collègue, [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 513 ro | LAT | IMG] soit prévenu de veiller soigneusement à la bonne instruction de son fils, de manière à assurer la dignité de notre École, tout particulièrement lors des disputations qui s’y feront régulièrement tout au long des deux prochaines années dans les salles basses. Il veillera aussi sur ses mœurs, qui seront pures et sans tache, de sorte que nul n’ait lieu de s’en plaindre.

  • Le même jour, au cours de la même assemblée, la très salubre Faculté a entendu la supplique des bacheliers vétérans [112] et les a tous admis à l’examen particulier, [113] qui se déroulera suivant la coutume et conformément aux règles de nos statuts. [33]

Le jeudi 28e de mars 1652, les docteurs se sont réunis, sur convocation écrite, suivant la règle ordinaire.

  • Ils ont entendu les six des nôtres à qui avait été confiée la charge d’examiner le livre sur l’Antimoine rédigé en français par notre collègue Maître Claude Germain. [24] La Faculté a décidé que l’audition de ces docteurs devait être reportée à plus tard car ils ne se sont pas encore entendus entre eux sur la teneur du rapport qu’ils lui feront de cet ouvrage.

    Tous ont certes admis que ce livre était très savant, tout empli de solide érudition et parfaitement digne d’être librement lu par tout le monde, médecins comme non-médecins ; toutefois, certains des examinateurs (qui appartiennent à la bande des stibiaux et supportent difficilement qu’on ait si pleinement et solidement démontré que [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 513 vo | LAT | IMG] leur antimoine est un poison) déploraient la rudesse des mots employés contre l’opuscule de Jean Chartier sur l’antimoine, comme s’il n’était pas permis de réfuter avec quelque véhémence tant de mensonges et de calomnies. Voilà bien en effet le traitement que mérite tout vice, afin d’être rabattu et réfuté, sans se priver d’y mettre de l’âcreté ! [34][114]

  • Lors de la même assemblée, Maître Charles Le Clerc [115] a aussi supplié la Faculté de bien vouloir s’engager en faveur des parties d’un certain Monsieur Du Bois dans leur procès contre un empirique et fort impudent charlatan, anciennement pharmacien de La Rochelle, dénommé Bloire : [35][116] les plaignants contestent le prix des nombreux remèdes que ce vaurien avait prescrits au dit Monsieur Du Bois, lequel s’en était trouvé beaucoup plus mal, jusqu’à succomber à sa maladie. La Faculté a approuvé cette requête, sous condition que ce litige se règle entièrement aux frais desdites parties.

    Et ainsi le doyen en a-t-il conclu sur chacun de ces points.

Le mercredi 8e de mai 1652, sur convocation écrite de tous les docteurs, suivant la règle,

  • la Faculté a décidé que chacun de nos cinq licentiandes serait admis à l’acte de licence après s’être soumis à l’examen particulier, [33] y avoir entièrement satisfait et en avoir acquitté les droits d’inscription, [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 514 ro | LAT | IMG] comme on a fait au cours des précédentes années. Tous se sont cependant accordés, sans la moindre réclamation, sur le point que, lors du dit examen particulier, tous les docteurs régents devront avoir été satisfaits par les réponses que lesdits cinq licentiandes leur auront données sur la méthode de remédier[117]

    Pour la distribution aux défunts docteurs de la somme provenant de ces licences, il a été convenu qu’une moitié en sera payée aux veuves des Maîtres Thomas Gamare [118] et Jacques Cornuti, qui moururent durant la première année de mon décanat ; que rien ne sera versé aux héritiers de Maître Durand François Yon car il n’a pas laissé d’enfants, étant demeuré célibataire ; [119] mais que la veuve de Maître Jacques Gamare, [120] qui est mort tout récemment, le 4e de mai 1652, recevra l’intégralité de la somme, étant donné qu’il a régenté pendant presque deux années entières. [36]

  • Lors de la même assemblée, la Faculté a en outre décrété que l’examen de botanique [121] qui devrait avoir prochainement lieu, suivant la règle de nos statuts, ne pourra pas être tenu durant ces mois d’été en raison du petit nombre des bacheliers et de leur absence. Il doit donc être repoussé à la Saint-Rémy, et après le jubilé qui permettra de recevoir de nouveaux candidats. [37][122]

    Et ainsi le doyen en a-t-il conclu sur tous ces points. [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 514 vo | LAT | IMG]

Le samedi 22e de juin 1652, en assemblée restreinte, après la messe, à dix heures du matin, le très distingué Maître Jacques Perreau s’est vivement plaint d’un empirique, dénommé Du Fresne, [123] qu’il a surpris chez une femme en couches, auprès du cimetière de Saint-Jean, [124] et a demandé à la très salubre Faculté de bien vouloir s’associer à lui dans le procès qu’il engage contre ce fripon. [38] La Faculté a approuvé sa requête, mais seulement dans la mesure où cette affaire se réglera aux frais du dit Jacques Perreau. Et ainsi le doyen en a-t-il conclu.

Le dimanche 21e de juillet 1652, Maître Guy Patin, doyen de la Faculté, en présence d’un très grand nombre de ses docteurs, a prononcé un discours dans le palais de l’illustrissime archevêque de Paris, [125][126] pour présenter à maître Pierre Loisel, compagnon et professeur de Sorbonne, curé de Saint-Jean-en-Grève et chancelier de l’Université de Paris, [127][128] les cinq licentiandes de médecine, Maîtres Charles Barralis, [129] François Landrieu, [130] Daniel Arbinet, Antoine de Sarte [131] et François Lopès, [132] implorant sa bénédiction apostolique afin qu’ils exercent dorénavant l’art de bien remédier. [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 515 ro | LAT | IMG]

Ledit chancelier a répondu au doyen par un long et savant discours, qui n’en fut pas moins élégant, où il a promis de nous envoyer sous peu un très éloquent éloge qui, suivant la coutume, louera publiquement lesdits cinq licentiandes de notre Faculté. [39]

Le dimanche 28e de juillet 1652, Maître Guillaume Marcel, originaire du Bessin, professeur de rhétorique au Collège des Grassins, [133][134] a prononcé dans les Écoles de médecine un très éloquent discours célébrant ceux qu’on appelle les paranymphes, [135] auquel nos cinq susdits licenciés ont répondu avec élégance et érudition. [40]

Le lundi suivant, 29e de juillet 1652.

  • Dans le palais de l’archevêque de Paris, sur convocation écrite portée à chacun des docteurs, après qu’ils eurent prêté serment, selon la coutume ordinaire, ont été déclarés licenciés dans l’ordre suivant de classement :

    Maître Charles Barralis, natif de Paris,
    Maître François Lopès, natif de Bordeaux,
    Maître Daniel Arbinet, natif de Beaune,
    Maître Antoine de Sarte, natif de Paris,
    et Maître François Landrieu, natif de Laon.

    Ensuite le susdit Maître Pierre Loisel, compagnon et docteur de Sorbonne, chancelier de l’Université de Paris, etc., leur a donné sa bénédiction apostolique. [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 515 vo | LAT | IMG]

  • Le même jour, Maître Charles Barralis, qui a légitimement obtenu le premier lieu de la licence, [136] a humblement prié la Faculté d’être admis à disputer ses actes de vespérie [137] et de doctorat. La très salubre Faculté a consenti à sa requête, une fois ses droits acquittés, mais à condition que dans les remerciements qu’il fera le jour où il recevra le bonnet, il s’abstienne de tout outrage et de tout affront à l’encontre d’aucun des docteurs, comme de toute autre personne, n’ayant de reconnaissance à témoigner qu’envers Dieu tout-puissant, la Sainte Vierge sa mère, les anciens de notre École, les trois chefs qui l’ont jadis dirigée et les autres docteurs. [41]

Le samedi 17e d’août 1652, le très éminent recteur de l’Université, Maître Claude de La Place, [138] a rendu visite à Son Altesse Royale, Gaston duc d’Orléans, [139] à qui il a fait un discours de condoléances pour la cruelle mort de son fils unique, le duc de Valois, [140] récemment trépassé.

Le lundi 19e d’août 1652, lors de la vespérie de Maître Charles Barralis, Maître François Lopès a humblement prié d’être admis aux épreuves de vespérie et de doctorat. La Faculté a consenti à sa requête, une fois ses droits acquittés, mais à condition que dans ses remerciements, etc. [41] [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 516 ro | LAT | IMG]

Le lundi 26e d’août 1652, en présence d’un grand nombre de docteurs, sur convocation écrite que les bedeaux avaient portée à chacun d’eux, le doyen a avisé l’assemblée de la très salubre Faculté de médecine de Paris que le privilège lui revenait de conférer le bénéfice pastoral ou cure de Saint-Germain-le-Vieux, [141] dans l’île de la Cité, rendue vacante par le récent décès de Maître Henri Pignié. [142] Ce droit de désignation s’applique en conformité avec ce qui a été décidé et confirmé lors des assemblées de l’Université aux mois de mai et juin derniers, quand Maître Philippe Buisine, [143] doyen de la très avisée Faculté de droit canonique, a attribué à un prêtre et professeur de l’Université, dénommé Geffrier, [144] une chapellenie académique rendue vacante par la mort d’un certain Habit ; ce dont attestent les registres qui sont entre les mains de Maître Nicolas Quintaine, greffier de l’Université de Paris. [42]

Après que cela fut présenté et approuvé, le Doyen a annoncé quatre concurrents ou compétiteurs qui supplient la Faculté d’obtenir ce bénéfice.

  • Le premier compétiteur est soutenu par Monsieur des Roches, très illustre et révérend prêtre, envers qui nous reconnaissons être très grandement redevables pour l’affection et la bienveillance qu’il nous porte, et pour sa générosité à l’égard de notre École. [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 516 vo | LAT | IMG] Il a adressé deux lettres, l’une à la très salubre Faculté et l’autre à son doyen, pour être lues en présence de toute la Compagnie. Cela fait, absolument aucun des docteurs présents (et presque tous étaient venus) n’a paru favorable à celui dont Monsieur des Roches appuyait la demande : il s’agit de Maître Jacques Gaudin, [145] natif de Touraine, docteur et compagnon de Sorbonne, principal du Collège parisien de Tours, professeur royal au Collège de Cambrai[146] chanoine de Notre-Dame de Paris et très célèbre prédicateur. [43]

  • Pour deuxième concurrent, le très distingué Maître Jean Merlet, ancien doyen et le plus méritant docteur de toute notre Compagnie, demande que ladite soit accordée à son fils, Maître André Merlet, [147] abbé de Saint-Lô, [148] en Normandie, dans l’évêché de Coutances. [44][149]

  • Maître Jean Piètre, homme très savant qui a pareillement et tout dernièrement été doyen, plaide pour le troisième compétiteur, Maître Simon Piètre, son très aimé frère, avocat de notre Faculté devant le Parlement de Paris. Au nom de très brillants et éminents hommes, Maître Simon Piètre, natif de Meaux, son grand-père, [150] Maître Simon Piètre, natif de Paris, [151] [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 517 ro | LAT | IMG] son oncle, qui fut un homme incomparable, l’admirable ornement et le grand pilier de notre École de Paris, Monsieur Nicolas Piètre, son père, qui fut un homme très sage et de grand poids, le très docte Maître Jean Piètre a très légitimement et instamment demandé à notre Compagnie d’attribuer ce bénéfice à son frère. Ce nom des Piètre est auguste et insigne en notre art, et en la Faculté de médecine de Paris, pour tant de bienfaits que tant de maîtres si remarquables ont dispensés pendant un siècle entier aux fins de nous nourrir et éduquer. Une si grande famille, bien plus savante que le commun des médecins, qu’on doit universellement louer et qui est parfaitement digne de toute gratification, s’est très amplement mérité une faveur bien supérieure à celle-là. Le destin en décidera, mais l’injustice des temps ne peut permettre qu’elle soit refusée à de si doctes et éminents personnages, qui ont si bien mérité en toutes choses de notre École, ni qu’on leur refuse toute forme, même gratuite, de récompense et d’avantage. [45][152]

  • Notre collègue Maître Nicolas Richard ambitionne ce bénéfice pour le quatrième concurrent, qui est son frère, [153] bachelier de théologie, [154] dont j’entends dire qu’il est fort savant, défenseur fort énergique de la doctrine de saint Augustin [155] sur la grâce efficace [156] et très célèbre héraut du verbe divin. [46][157]

Le doyen a conclu cette présentation en convainquant la Compagnie tout entière que chacun des docteurs [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 517 vo | LAT | IMG] exprime à tour de rôle son suffrage pour désigner le curé ; et ce sans tumulte ni vacarme, et sans permettre à aucun de couper ou perturber la parole de son collègue ; si quelqu’un ne s’y tient pas, on le punira en le privant de voter et on lui ordonnera de quitter immédiatement la salle.

Après que le doyen eut proféré ces paroles et que la Compagnie les eut unanimement approuvées, au moment ou les anciens allaient prononcer leur sentence, le très honorable Maître Jean Merlet est intervenu pour dire que nul ne se prononce sur la présente affaire avant que les quatre compétiteurs aient exposé à la Faculté leurs titres, qu’ils avaient remis entre les mains du doyen à cette fin, justifiant leur capacité à être jugés par la très salubre Faculté dignes et capables d’obtenir ce bénéfice. Quelques-uns ont estimé cette interruption inutile, affirmant que Maître Jean Merlet avait imaginé cet obstacle pour retarder la décision, mais qu’il fallait malgré tout en venir à voter ; de nombreux docteurs ont pourtant approuvé la demande de Monsieur Merlet. Aussi le doyen s’est-il rangé à cette opinion majoritaire et a-t-il remis [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 518 ro | LAT | IMG] à une autre réunion le débat pour désigner le curé de Saint-Germain-le-Vieux en l’île de la Cité.

Le mercredi 4e de septembre 1652, à deux heures de l’après-midi, la Compagnie s’est assemblée suivant les règles coutumières, sur convocation spéciale portée par le bedeau.

  • Le doyen a déclaré avoir en mains les attestations que trois des compétiteurs lui avaient remises et les a montrées à la très salubre Faculté. Maître André Merlet présentait les lettres de son baptême, de sa maîtrise ès arts et de son ordination sacerdotale ; Maître Simon Piètre, son certificat d’écolier juré en l’Université de Paris, et ses lettres de tonsure, de confirmation, et de baccalauréat et licence en droit civil de l’Université d’Orléans, [158] ainsi que du doctorat en droit canonique qu’il a obtenu à Paris ; Maître Jean Richard a fourni celles de sa confirmation, de sa tonsure, de son ordination et de son baccalauréat en théologie de Sorbonne, ainsi que les attestations de l’archevêque de Paris l’autorisant à entendre les confessions, [159] à prononcer des oraisons sacrées et à disputer contre la perfidie des hérétiques et des sectaires.

    Un nouveau concurrent s’est récemment déclaré : Maître Jean Vacherot, notre collègue, m’a aussi remis ses actes de tonsure et confirmation ; tous connaissent son érudition, sa probité, sa piété et autres vertus chrétiennes, [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 518 vo | LAT | IMG] l’éminente candeur de ses mœurs, tout comme son adresse et son zèle à remédier. [47][160]

  • Une fois tous les docteurs satisfaits par cet examen des lettres, le doyen a représenté à la très salubre Faculté le petit nombre des bacheliers : des trois qui ont été admis aux Pâques dernières, il n’en reste qu’un à nous laisser espérer qu’il poursuivra ici le cours de ses études ; vers la prochaine Saint-Rémy il faut donc procéder à un nouvel examen, ou jubilé, en vue de corriger ce défaut et de préserver le prestige de nos Écoles ; tous les docteurs, sans aucune protestation, ont approuvé la décision de procéder à un jubilé. [48]

  • On en est enfin venu au vote pour la cure de Saint-Germain-le-Vieux : la majorité des suffrages a paisiblement et tranquillement désigné Maître Simon Piètre, natif de Paris, très compétent avocat au Parlement de Paris, fils du très brillant Maître Nicolas Piètre, notre défunt collègue, qui a surpassé toutes louanges et tous honneurs ; au grand dam et pour la profonde infortune de la médecine, il mourut en l’an de grâce 1649, étant alors l’ancien de notre École ; puisse cet homme incomparable reposer en paix, lui dont seul un autre Cicéron serait capable de chanter les louanges. [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 519 ro | LAT | IMG]

Le samedi 21e de septembre 1652, à dix heures du matin, tous les docteurs ayant été convoqués par écrit, suivant la règle ordinaire, le doyen leur a proposé d’examiner cinq articles :

  1. décider, et ce pour la deuxième fois, de faire un examen à la Saint-Rémy prochaine, en raison du petit nombre des bacheliers, nos statuts imposant que cela ne soit pas arrêté à la légère et sans avoir convoqué trois assemblées consécutives ; [49]

  2. procéder à l’audition des quelques candidats qui demandent à la Faculté la grâce d’un jubilé ;

  3. résoudre et éteindre le différend qui s’est élevé entre deux licenciés, Maîtres Daniel Arbinet et Antoine de Sarte, dont le premier demande qu’en stricte application du statut le second devra se soumettre au doctorat sous quinzaine ; [50]

  4. statuer sur la demande des pharmaciens, dont trois jurés, Tartarin, [161] Héron [162] et Sanson, [163] ont rencontré le doyen et lui ont demandé de bien vouloir participer, avec les deux professeurs de pharmacie, [164] ses collègues, et avec lesdits apothicaires jurés, à l’inspection des officines qui doit commencer lundi prochain, 23e de septembre ; ce que le doyen leur a refusé parce que ces précédentes années, dans [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 519 vo | LAT | IMG] les assemblées de la Compagnie, il a paru inconvenant et indigne à presque tous les docteurs que le doyen, qui est le chef de la Faculté, se rende avec ces pharmaciens en leur propre maison, qu’on appelle en français le Bureau des épiciers et des apothicaires, [165] près de Sainte-Opportune, vis-à-vis la rue des Lombards[166] d’où ils partiraient, plutôt que du domicile de l’un de ses deux collègues, professeurs de pharmacie, pour entreprendre leur inspection ; [51][167]

  5. sur la demande insistante du doyen, remettre en vigueur le décret prononcé le 24e de janvier 1643, sous le décanat du très estimé Maître Michel de La Vigne, statuant de ne plus élire ni nommer aucun doyen contre qui nos Commentaires contiendraient une sanction quelconque, afin que d’aventure nous ne nous en trouvions déchirés et corrompus, comme l’ont précédemment provoqué certains nuisibles et malhonnêtes vauriens. [52][168]

La Faculté a décidé :

  1. et ce pour la deuxième fois, qu’en raison du petit nombre de bacheliers, qui étaient seulement trois, [48] aura lieu un nouvel examen à la Saint-Rémy prochaine ; [49] [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 520 ro | LAT | IMG]

  2. qu’on procédera à l’audition des candidats après que le doyen les aura avisés de se présenter mardi prochain, 24e de septembre, dans les salles hautes des Écoles, en apportant les lettres attestant de leur âge, de leur maîtrise ès arts et de leurs quatre années révolues d’études médicales, de façon qu’une fois vues, ils puissent être admis à subir l’examen ;

  3. qu’en raison de la rigueur des temps, un délai supplémentaire de quinze jours et même d’un mois entier sera accordé à Maître Daniel Arbinet, licencié de médecine qui n’a pas l’argent requis pour se présenter aux actes de vespérie et de doctorat ; mais qu’une fois ce délai écoulé, s’il n’a pas satisfait à l’exigence du doyen, le licencié suivant, Maître Antoine de Sarte, qui a été classé quatrième, sera autorisé à prendre sa place et à se présenter au doctorat, et ce dans l’exact respect du statut ; [53]

  4. que le doyen ne donne pas suite à la requête des pharmaciens ; il ne participera donc pas à la visite des officines dans les conditions où ils le demandent, à moins qu’ils ne la commencent en partant du domicile du doyen, des Écoles de médecine, de la maison d’un des deux professeurs de pharmacie, ou de n’importe quel autre lieu commode et qui ne déplaise à aucune des deux parties ; mais non pas en partant de leur propre Bureau, puisqu’il en a jadis été décidé autrement, etc. ; [51] [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 520 vo | LAT | IMG]

  5. qu’il convient de restaurer le décret jadis prononcé, le 24 e de janvier 1643, interdisant de nommer doyen de l’École un docteur contre qui un arrêt avait été soit prononcé, soit consigné dans les Commentaires de la très salubre Faculté ; qui plus est, sur ordre du présent doyen, avant qu’il ne quitte sa charge, les cinq électeurs devront dorénavant s’engager, par un nouveau serment, à ne choisir pour le décanat aucun des docteurs contre qui nos Commentaires contiennent quelque sanction que ce soit, afin que les manigances de certains ne puissent nous corrompre et déchirer. [52]

    Et ainsi le doyen en a-t-il conclu.

Le mardi 24e de septembre 1652, le doyen a soumis quatre affaires à la très salubre Faculté réunie sur convocation spéciale :

  1. débattre, pour la troisième fois, sur l’examen à mettre sur pied, cette Saint-Rémy prochaine, en raison du nombre aujourd’hui très faible de nos bacheliers ;

  2. examiner les attestations soumises par les candidats qui veulent s’y présenter ;

  3. arrêter le jour de la semaine prochaine où l’examen aura lieu dans les hautes salles des Écoles ; [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 521 ro | LAT | IMG]

  4. prononcer un avis sur les deux questions que Daniel Arbinet, licencié, a soumises au doyen et qu’a acceptées Maître François Le Vignon, docteur en médecine qui présidera à la vespérie et au doctorat du dit Arbinet ; et ce par subdélégation de Maître Nicolas Richard, agissant lui-même au nom de Maître Quentin Thévenin, qui a dû se retirer à Châlons-en-Champagne, [169] son pays natal, en raison de sa piètre santé ; ces questions étaient, pour la vespérie, An ad Medici famam, Collegarum maledicentia ? et pour le doctorat, An curandis morbis Antimonium ? Sena ? [54][170]

La Faculté a statué comme suit sur chacun de ces sujets.

  1. Pour la troisième fois consécutive, elle a décidé que l’examen doit avoir lieu à la Saint-Rémy prochaine dans les salles hautes des Écoles, comme d’habitude, et qu’ainsi, suivant la règle du statut, nous remédiions au manque de bacheliers. [49]

  2. On recevra les lettres des candidats, que le doyen et le censeur vérifieront auprès de l’excellent Maître Nicolas Quintaine, greffier de l’Université de Paris. Ils en référeront à la Faculté samedi prochain, 28e de septembre, et ceux dont les lettres auront été approuvées seront admis à subir l’examen. [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 521 vo | LAT | IMG]

  3. Cet examen devra commencer lundi prochain, 30e de septembre, à neuf heures du matin sonnantes.

  4. Quant aux deux questions que Maître François Le Vignon, docteur en médecine, a soumises au doyen pour obtenir son approbation et pour ensuite pouvoir en disputer lors des vespérie et doctorat de Maître Daniel Arbinet, elles ont déplu à la très salubre Faculté qui les a tenues pour vicieuses et peu convenables : [54] la première est ridicule, et offense la bienséance et les bonnes mœurs ; la seconde ne peut en vérité être posée puisqu’on ne doit pas révoquer en doute le fait que l’antimoine est un poison, étant donné que plusieurs décrets de la très salubre Faculté l’ont condamné comme tel, en particulier l’an 1566, durant le décanat du très éminent Maître Simon Piètre, natif de Meaux, mais aussi l’an 1615, [171] durant le décanat de Maître Quirin Le Vignon, [172] arrêts que le Parlement a confirmés ; [55] et tout cela n’est que justice car en attestent et le démontrent les morts si fréquentes de maints malades que médicastres et chimistes ont leurrés et séduits en profitant de leur excessive crédulité, et qui, sous ombre [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 522 ro | LAT | IMG] de recevoir un remède salutaire, ont souffert d’être égorgés par eux. Ajoutez-y la vie écourtée de ceux dont l’antimoine, s’il ne les a pas tués, a rendu les jours misérables en raison de l’insigne châtiment et du déplorable délabrement qu’un tel poison inflige aux viscères et aux principales parties du corps. Aussi, ceux qui prescrivent l’antimoine aux patients ou qui le recommandent, pour s’acquérir la faveur populaire, comme étant un remède nouveau et très secourable, ne l’emploient-ils jamais pour eux-mêmes ou pour les leurs, mais n’utilisent-ils alors que des médicaments communs ; autrement, ils meurent misérablement d’en avoir pris, comme il arriva récemment à Paris, le jeudi 4e de juillet de cette année, 1652, pour François Vautier, [173] l’un des principaux porte-drapeaux de cette troupe stibiale : après avoir administré si souvent et importunément de l’antimoine à d’autres, il s’est enfin lui-même expédié dans l’au-delà pour en avoir pris trois fois dans une fièvre continue ; [174] {neque enim lex iustior ulla est, quam necis artifices arte perire sua} ; [56][175] mais Dieu fasse qu’il ait été le seul à périr de ce venin.

    La très salubre Faculté a donc décidé d’exhorter Maître François Le Vignon à rejeter ces deux questions et à en choisir d’autres que le doyen approuvera, car il a le pouvoir, en tant que chef de la Compagnie, d’empêcher que les convocations aux vespéries et aux doctorats soient portées chez les docteurs. C’en en effet à lui qu’il incombe de veiller, en s’y appliquant soigneusement, à ce que nos intérêts, qui sont publics, ne subissent aucun dommage, et aussi que les lois, statuts et décrets de notre très salubre [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 522 vo | LAT | IMG] institution ne soient violés en quelque manière que ce soit, et que notre ordre très sacré ne s’en trouve corrompu.

    Et ainsi le doyen en a-t-il conclu sur tous ces sujets.

Le samedi 28e de septembre 1652, réunie sur convocation spéciale, comme veut la règle, la Faculté a écouté le rapport de Maître Paul Courtois, censeur, qui a vérifié les lettres des trois candidats auprès de Maître Nicolas Quintaine, greffier de l’Université. Elle a décidé qu’elles leur soient rendues et qu’ils soient avisés de se présenter lundi prochain, à huit heures et demie sonnantes, à l’examen de physiologie, puis mardi à celui d’hygiène, [176] mercredi à celui de pathologie, et vendredi matin à l’explication d’un aphorisme d’Hippocrate ; [177] en sorte que le samedi suivant, 5e d’octobre, ils puissent être nommés bacheliers si la Compagnie a approuvé leurs réponses sur le compte qu’en rendront les quatre examinateurs. Et ainsi le doyen en a-t-il conclu.

Le lundi 30e de septembre 1652, à neuf heures du matin sonnantes, a commencé l’examen des quatre candidats sur les choses [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 523 ro | LAT | IMG] naturelles ; ont suivi les choses non naturelles, le mardi, les choses contre nature, le mercredi, et le vendredi, l’explication de l’aphorisme d’Hippocrate qu’on leur a assigné la veille. [32]

Le samedi 5e d’octobre 1652, spécialement convoquée par écrit, suivant la règle, la Faculté a entendu le rapport des quatre examinateurs, puis décidé d’admettre au premier grade, ou baccalauréat, une fois leurs droits acquittés, les quatre candidats qui viennent d’être soumis, la semaine passée, aux rudes épreuves de l’examen. Leurs noms sont :

Maître Nicolas Le Lettier, [178] natif de Paris,
Maître Jean Brier, [179] natif de Troyes,
Maître Claude Quartier, [180][181] natif de Paris,
Maître Alain Lamy, natif de Bayeux. [57]

Le même jour, Maître Jacques Mentel a émis une plainte contre notre collègue Maître Jean Garbe. [182] La Faculté a jugé que le doyen, Maître Guy Patin, devra les exhorter à rétablir la paix entre eux et à entretenir dorénavant des relations amicales. [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 523 vo | LAT | IMG]

Le vendredi 18e d’octobre 1652, jour de la Saint-Luc, très honoré patron des médecins de Paris, [183] la messe rituelle a été célébrée en notre chapelle, sans aucune musique ni autres chanteurs que quatre prêtres et le curé de Saint-Étienne-du-Mont. [184]

Une fois la messe terminée, un très grand nombre de docteurs se sont réunis dans la salle haute où, suivant la coutume ordinaire, notre grand bedeau, Maître Louis de La Roche, [185] a récité certains antiques statuts de la Faculté. Comme d’habitude, aussi, les nouveaux bacheliers ont prêté serment ; [186] après quoi le doyen leur a rappelé leurs devoirs, qui consistent à honorer la dignité de l’École. Avec l’accord de tous les docteurs présents, les masses d’argent ont été rendues aux deux appariteurs, sous condition expresse qu’ils remplissent consciencieusement et fidèlement les obligations de leur charge.

Le samedi 19e d’octobre 1652, après la messe qu’on célèbre rituellement tous les ans pour la paix de l’âme des docteurs [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 524 ro | LAT | IMG] défunts, en présence de la plus grande partie de la Compagnie, les chirurgiens barbiers jurés [187] et les apothicaires du roi ont été reçus puis ont prêté leur serment de fidélité entre les mains du doyen. Ledit doyen a ensuite proposé trois sujets de débat à la très salubre Faculté :

  1. renouveler la location de notre maison qui est contiguë aux salles hautes de nos Écoles et qu’occupe M. Masuer, avocat plaidant au Parlement, [188] lequel demande à reconduire son bail, mais avec quelque diminution du loyer annuel, comme plusieurs l’ont obtenue, au nom de la difficulté des temps exécrables que nous traversons ; [58]

  2. examiner la supplique de Maître Daniel Arbinet pour que lui soient accordés quelques jours en sus du délai d’un mois qui lui a été précédemment autorisé ;

  3. statuer sur le fait que Maître Lancelot de Frades n’a pas encore remis au doyen la somme d’argent dont son fils, bachelier de médecine, a besoin pour se présenter à l’examen de botanique qui aura lieu très prochainement.

Sur chacun de ces points, la Compagnie a statué comme suit.

  1. Il appartient au doyen de négocier le loyer de notre plus grande maison : lui incombent le devoir et la charge de mener cela à terme selon les habitudes en cours, mais sans accepter la moindre diminution de notre revenu annuel. [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 524 vo | LAT | IMG]

  2. La Faculté a ordonné que Maître Daniel Arbinet aille voir Maître Jean Riolan, docteur en médecine et ancien de notre École, car, d’après nos statuts, c’est à lui qu’incombe le devoir de conférer le prochain bonnet doctoral ; et ce en raison, primo, de la toute récente mort de notre collègue Quentin Thévenin, le 3e d’octobre dernier à Châlons, sa ville natale, où il s’était retiré voilà deux ans dans l’espoir d’y recouvrer la santé, et secundo, des quelques mois qui manquent à Maître Pierre Bourdelot [189] et aux docteurs qui le suivent sur le catalogue pour atteindre les dix années pleines d’ancienneté ; ce qui mène la Faculté à décider qu’il faut repartir du haut du tableau. Le postulant devra donc accepter du dit Maître Jean Riolan, son futur président, les question à traiter lors de sa vespérie et de son doctorat, et d’être reçu docteur aussitôt que possible. [59]
  3. Dans son décret prononcé le 24e de mars 1643, sous le décanat de Maître Michel de La Vigne, en faveur du très illustre Monsieur des Roches et de Maître Lancelot de Frades, notre collègue qui l’avait soigné, [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 525 ro | LAT | IMG] la très salubre Faculté a promis au dit Maître de Frades que son fils serait admis gratuitement aux grades de notre École, étant donné la générosité du susdit Monsieur des Roches dans sa promesse d’aider à la restauration de nos bâtiments. [29] Après avoir avancé, examiné et discuté divers inconvénients engendrés par ce décret, on en est venu à la manière de l’interpréter que voici : la Faculté s’engage certes à recevoir gratuitement le fils de Maître Lancelot de Frades, pour ce qui touche à l’argent qui arrive dans le trésor de la Faculté, soit les bourses qui sont versées à notre communauté sans être destinées à l’un de nous en particulier, et ce tant pour le baccalauréat que pour les trois thèses et pour le doctorat ; toutefois, aucune exemption ne lui a été promise pour l’argent spécifiquement remis à des docteurs privés et qui concerne un individu précis ; or aujourd’hui, comme de tout temps, la Faculté n’a jamais pu concéder une telle gratuité ni frustrer aucun docteur de son dû, car elle ne prétend détenir aucun droit sur les revenus directs de ses maîtres, comme elle en convient pleinement ; en outre, une injustice intolérable résulterait d’une telle gratuité car elle pâtirait aux autres bacheliers à qui, dans bien des cas, on demanderait de régler la part due par le fils du dit Maître Lancelot de Frades, dont ils ne lui sont redevables en aucune façon. [60][190]

    Ainsi le doyen en a-t-il conclu sur ces trois points. [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 525 vo | LAT | IMG]

Le lundi 21e d’octobre 1652, notre roi très-chrétien, Louis xiv[191] a fait son entrée dans Paris en très grande pompe et avec incroyable joie des habitants. [61] Il en était parti voilà treize mois pour aller combattre la rébellion du prince de Condé [192] en Aquitaine. [193]

Le mardi 22e d’octobre 1652, Monsieur des Roches, très illustre prélat, a pris soin de me faire remettre, par un huissier à la chaîne, un acte public, rédigé par des notaires, concernant l’affaire de Maître Claude de Frades, bachelier de médecine, qui demande à être exempté de tous les frais de l’École en vertu du décret prononcé le 24e de mars 1643. [29] En conséquence de quoi, j’ai convoqué tous les docteurs pour en délibérer vendredi prochain, 25e d’octobre 1652.

Le vendredi 25e d’octobre 1652, à deux heures de l’après-midi, tous les docteurs ont été convoqués dans les salles supérieures des Écoles de médecine pour délibérer sur l’assignation qui a été remise à Maître Guy Patin, doyen de la Faculté, [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 526 ro | LAT | IMG] par un appariteur à chaîne, de la part de Monsieur Michel Le Masle, seigneur des Roches, etc. Le doyen dit que, quand il avait lu ce que contient cet acte, il s’était rendu compte de ce qu’il signifiait, sans en croire ses yeux : Monsieur des Roches en veut tant à la très salubre Faculté qu’il songe à engager sans tarder un procès, c’est-à-dire entreprendre une action en justice contre la Compagnie. Accompagné de trois docteurs, Maîtres Jean Piètre, Nicolas Richard et Paul Courtois, notre censeur, le doyen est donc allé voir ledit Monsieur des Roches pour être certain qu’il avait bien pris garde à ce que voulait dire cet acte. L’abbé leur a répondu que oui et que c’était une affaire dont il s’occuperait plus tard. Le doyen a alors vivement protesté, disant se considérer comme l’auteur et principal instigateur de la dernière décision qu’avait prise la Faculté ; et ce, après que Maître Jacques Thévart, [194] docteur en médecine, se fut plaint du fait que Maître Claude de Frades, bachelier, avait abusé une de ses parentes en commandant de sa part, mais pour son propre usage, plusieurs gâteaux chez un boulanger de son voisinage ; en outre, qu’il avait fait le galant [62] avec des fillettes et avait furtivement vendu des objets qu’il avait empruntés. Maître Jean de Montigny, [195] docteur en médecine, a même raconté à la Faculté que ledit bachelier avait vendu à la dérobée le Breviarum Galeni a Lacuna confectum [63][196][197] qu’il lui avait prêté. [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 526 vo | LAT | IMG] La Faculté s’est indignée de la turpitude et des mœurs perverses de ce jeune homme, tolérant fort mal qu’à cause de lui et sans le mériter, Monsieur des Roches la moleste et l’accable au point de vouloir opposer la loi aux privilèges de la Compagnie. Étant donné que quand Maître Claude de Frades, bachelier, fut admis à passer l’examen, son père, Maître Lancelot de Frades, docteur en médecine, avait été exhorté à apporter tout le soin nécessaire à sa bonne instruction, la Faculté a décidé, en premier lieu, que si, lors du prochain acte quodlibétaire, ce garçon ne se montre pas digne de son grade de bachelier, la grâce de Monsieur des Roches ne l’affranchira pas de son ignorance, et qu’il faudra souffler de nouveau à l’oreille du père qu’il incite son fils à mener une vie plus honorable, et à s’affranchir de toute mauvaise réputation de turpitudes et de péchés, car il est bien certain qu’une éducation si négligée fait injure à son cousin, Monsieur des Roches, tout comme à notre métier. En second lieu, la Compagnie s’est étonnée de voir comment Monsieur des Roches, lui qui a si souvent proclamé publiquement devoir tout à la Faculté, et tout particulièrement d’être encore en vie, désavoue aujourd’hui ses protestations de reconnaissance et en veuille tant à ladite Faculté [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 527 ro | LAT | IMG] qu’il envoie un huissier à la chaîne lui signifier ce qu’il cherche à obtenir d’elle ; alors que, s’il avait voulu lui demander quelque chose, il n’eût pas été indigne de lui de venir en personne voir la Compagnie ou le doyen, comme l’ont déjà fait princes et autres grands personnages ; il aurait aussi dû se sentir tenu, dans un esprit de profonde reconnaissance, de raccompagner la délégation de la Faculté jusqu’en ses Écoles. Delà, il aurait aussi dû se considérer comme obligé d’engager ses propres deniers dans la promesse faite au fils de son cousin, Maître Lancelot de Frades, dès son inscription à la Faculté, sans lui confier le soin de quémander des faveurs qu’il réclamait pour son propre avantage. Il aurait même dû augmenter le montant de la somme qu’il a promise puisque la Faculté a admis son protégé au baccalauréat en fermant les yeux sur sa profonde ignorance. [64] En outre, la Faculté a si bonne et si sincère opinion de Monsieur des Roches qu’elle s’estime être sa maison, ce qui est à la fois honorable pour lui et utile à la Compagnie. S’il croyait, avec sa donation, s’être acheté la liberté et la dignité de la Faculté, alors elle romprait aussitôt ce contrat, quel qu’en soit le montant, car jamais elle ne permettra à quiconque de lui faire perdre sa liberté et sa dignité, ni même d’y porter atteinte. Qu’il veuille bien, enfin, avoir l’honnêteté de convenir [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 527 vo | LAT | IMG] que la Faculté n’a toujours pas joui du fruit auquel il destine son argent ; nous consulterons d’ailleurs des avocats sur ce sujet. En attendant, notre grand appariteur lui signifiera tout ce que la Faculté a décidé et pensé de toute cette affaire, et confié au doyen le soin d’y veiller scrupuleusement.

Fait en les hautes salles des Écoles de médecine,
le 25e d’octobre 1652.

Guy Patin, doyen. [65]

Le mercredi 23e d’octobre 1652, le doyen de la très avisée Faculté de droit canonique, Maître Philippe de Buisine, et moi, comme représentant la très salubre Faculté de médecine de Paris, avons obtenu un arrêt de la Chambre dite des vacations [198] contre la Compagnie des théologiens [199] qui avait engagé une action pour empêcher Maître Samuel Dacolle, [200] questeur de l’Université, [201] de nous verser la somme de huit cents livres tournois que nous a concédée la Faculté des arts, à l’intention de nos quatre professeurs de médecine. [66][202]

Le mardi 29e d’octobre 1652, en nos Écoles, les quatre bacheliers, Nicolas Le Lettier, Jean Brier, Claude Quartier et Alain Lamy, ont passé l’examen de botanique [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 528 ro | LAT | IMG] qui n’avait pu avoir lieu l’été dernier, comme veulent nos statuts et coutumes, eu égard au petit nombre des bacheliers et à leur absence de Paris, ainsi qu’au tumulte des combats qui faisaient alors rage en toute la France. [67]

Ce même mardi 29e d’octobre 1652, escorté par deux de nos collègues, Maîtres Jean de Montigny et Robert Patin, [203] je me suis joint à Monsieur le très éminent recteur de l’Université de Paris, Maître Claude de La Place, qui allait voir le roi très-chrétien, Louis xiv, en son palais du Louvre, [204] pour le complimenter sur son heureux retour à Paris. J’eusse fort souhaité que cela arrivât six mois plus tôt, en évitant à tant de milliers de paysans et de pauvres gens de mourir par faim et par guerre, à Paris et en Île-de-France, sans avoir commis aucun péché ni rien mérité de tel. [68]

Le samedi 2e de novembre 1652, conformément à la règle, tous les docteur ont été convoqués par écrit pour élire le doyen, les quatre professeurs et le censeur des Écoles. Ils ont d’abord entendu les remerciements de Maître Guy Patin qui quitte sa charge après avoir été doyen pendant deux années pleines, et ceux des quatre professeurs et de Maître Paul Courtois, censeur. Cela fait, Maître Hermant de Launay, [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 528 vo | LAT | IMG] qui avait été précédemment élu professeur de chirurgie pour la présente année, [69] a supplié la Faculté de lui permettre de prodiguer cet enseignement pendant deux ans, parce que, disait-il, il ne savait comment couvrir toute cette matière en une seule année. À l’appui de sa requête, il arguait du fait que, depuis la création et fondation de cette chaire de chirurgie, trois de ses titulaires avaient professé pendant deux années entières ; mais, avec ruse et habileté, il omettait de dire que, pour toutes les années qui ont suivi, un décret de la Faculté a réduit cette charge à une seule année, et c’est ainsi que plusieurs docteurs l’ont exercée depuis. Maître Guy Patin fut même l’un d’eux en l’an 1646, [205]  et ce pour une seule année car la très salubre Faculté avait pris la précaution de le dire dans son premier décret qui a créé et fondé cette chaire en 1635, sous le décanat de Charles Guillemeau. [70]

Les faits prouvent le contraire : lors de la première année du décanat de M. Charles Guillemeau, le 4e de novembre 1634, M. Antoine Charpentier fut nommé par acclamation au professorat de chirurgie, puis continué le 3e de novembre 1635, pour la seconde année du dit décanat (page 425 < des Commentaires >) ; [71][206] En 1636, pendant la première année du décanat de Philippe Hardouin de Saint-Jacques, [207] M. Jean-Baptiste Ferrand [208] a occupé ladite chaire (page 5 des présents Commentaires), et de nouveau pendant la seconde année du même décanat (fos 38 vo et 63 vo) ; [72] en la première année du décanat de Simon Bazin, [209] Jean Chartier a été renouvelé professeur de chirurgie pour un an (fo 70), et de même pour Philippe Hardouin de Saint-Jacques pendant la seconde année de ce décanat (fo 87). Dans les commentaires des première et seconde années du décanat de Guillaume Du Val, [210] il est écrit que Jean Chartier est professeur de chirurgie (fos 108, 119, 148). [73] Il en va aussi clairement de même pour une charge de deux ans sur le fo 158 vo ; et au fo 203, Maître Jean Piètre a été nommé professeur de chirurgie pour la première année du décanat de Maître Jean Merlet, mais ensuite, pour la seconde, il a refusé d’enseigner pendant une nouvelle année, comme on peut voir sur le fo 286 vo[74]

Blondel, doyen.

Après avoir entendu la requête de Maître Hermant de Launay, puis l’avis du doyen sur cette controverse, la très salubre Faculté a décrété que la charge de professer la chirurgie ne doit avoir qu’une durée d’un an, [75] [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 529 ro | LAT | IMG] étant donné qu’une année complète suffit bien amplement à enseigner et démontrer les opérations chirurgicales comme on l’attend de ce professeur, et que la Faculté l’a ainsi souhaité et voulu dans le décret qui a établi cette chaire. En demandant qu’on lui permette d’être prolongé pour une seconde année, Maître Hermant de Launay a sûrement été guidé par l’appât d’un gain supérieur à ce qu’il était auparavant, convaincu en cela par les deux cents livres, venues des fonds de l’Université, que la Faculté des arts a promises et accordées à chacun de nos professeurs, bien que la Compagnie des théologiens soit intervenue pour que nous ne les recevions pas. [76] Et ainsi le doyen en a-t-il conclu.

Ensuite, on a procédé à l’élection du nouveau doyen et des quatre professeurs : les noms des docteurs présents ont été déposés dans une urne d’où ont été tirés ceux des électeurs du futur doyen, à savoir trois du grand banc, Maîtres Jean Riolan, Barthélemy Barralis, [211] et Sébastien Rainssant, [212] et deux du petit banc, Martin Akakia et Jean Forestier ; [213] après avoir juré entre les mains du doyen de ne proposer au décanat personne qui ne soit estimé pour sa vaste expérience ni contre qui existe un décret [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 529 vo | LAT | IMG] dans les Commentaires de la Faculté, ils se sont retirés dans la chapelle ; ils en sont enfin sortis après une demi-heure en ayant choisi trois docteurs pour le décanat, à savoir deux du grand banc, Maîtres Jean de Bourges et François Blondel, et un du petit banc, Maître Paul Courtois ; leurs trois noms ont été écrits sur des billets qu’on a aussitôt jeté l’un après l’autre dans un chapeau et, par un très favorable et heureux sort, en a été tiré celui du très savant, aguerri et éminent Maître Paul Courtois, [214] natif de Meaux ; [77] après m’avoir prêté le serment coutumier de fidélité, il a été reconnu et admis au décanat, avec immense joie, pour les deux prochaines années.

Le même jour et au cours de la même assemblée ont eu lieu les élections des professeurs : Maître Jean-Baptiste Moreau [215] en physiologie, [216] Maître Jean Garbe en chirurgie et Maître Jacques Perreau en pharmacie. [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 530 ro | LAT | IMG] Maître Jean Piètre a été élu censeur des Écoles. Par mégarde, on a oublié le professeur de botanique, mais Monsieur le doyen prendra soin de son élection lors de la prochaine assemblée.

Maître Guy Patin, doyen sortant, s’est empressé de remettre à son successeur, Maître Paul Courtois, les insignes du doyen que la Faculté a récemment élu, accepté et approuvé : les clés des coffres, les deux sceaux d’argents attachés l’un à l’autre par une petite chaîne du même métal, l’épitoge ou épomide pourpre, [217] et l’antique recueil des statuts de la Faculté de médecine de Paris. [78]

Fasse le Très-Haut que Maître Paul Courtois, devenu mon successeur par quelque divin coup du sort, surpasse les autres doyens en fidélité, en assiduité, en diligence et, par-dessus tout, en bonheur à diriger la très salubre Faculté de Paris pour qu’elle en tire profit et avantage. Pour ma part, j’ai certainement fait tout mon possible pour promouvoir et favoriser les affaires et les intérêts de la Compagnie, j’y ai dignement consacré toutes mes forces et dirai, pour conclure comme César [218] dans Suétone, [219] Omnia facienda feci, sed eventus fuit in manu Fortunæ[79][220] dans la mesure où les dérèglements de notre époque, tout agitée par les tumultes guerriers, me l’ont permis. J’ai pourtant l’espoir [BIU Santé Comm. F.M.P., vol. xiii, fo 530 vo | LAT | IMG] que les efforts que j’ai faits me vaudront la reconnaissance de la bienveillante postérité puisque, comme dit Apulée [221] en ses Florides, Omnibus bonis in rebus, conatus sit in laude, eventus in casu[80][222] Que gloire et louange aillent donc à Dieu pour tout ce que j’ai accompli !

Fin des décrets et assemblées de la très salubre Faculté de médecine de Paris pendant la seconde année du décanat de Maître Guy Patin, natif du Beauvaisis.


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