Je vous écrivis une grande lettre de quatre pages le mardi dernier jour de décembre de l’an passé. À ce nouvel an, je vous souhaite longue et heureuse vie avec toute sorte de prospérité et de contentement, pour vous et mademoiselle votre femme, à la charge qu’elle me fera la faveur de m’aimer en continuant, comme M. Du Prat [2] m’a autrefois assuré qu’elle m’en faisait la grâce. C’est l’unique chose que je lui demande et dont je lui aurai très grande obligation. Et afin de commencer cet an, comme les autres, à vous donner de la peine en continuant de vous importuner, je vous supplie de m’acheter à Lyon un livre intitulé Vita Clementis 4 Pontificis maximi, etc. [1][3][4] imprimé chez M. Julliéron [5][6] in‑12, 1623, [2] et tout ce que vous trouverez de ce même auteur latin ou français, hormis celui qu’il a intitulé Musæi, sive Bibliotheca instructio, etc., que j’ai céans in‑4o. [3]
On dit ici que le mal est fort grand à Bordeaux ; [7] que le prince de Conti [8] n’en est plus tantôt le maître ; qu’ils ont, au lieu du parlement, établi un certain ordre de juges, lesquels auront droit d’apaiser, composer et juger toute sorte de procès qui naîtront tant à Bordeaux qu’en tout le reste de la province, mais sur-le-champ et sans ces longues formalités usitées aux parlements et aux présidiaux de France. [4]
Ce 12e de janvier. Aujourd’hui j’ai eu un rencontre dont il faut que je vous fasse part : M. Caze [9] a désiré que j’allasse voir un de ses amis nommé M. Pourfour, [10] en la même maison en laquelle il est logé ; [11] après avoir vu cet honnête homme, M. Caze m’a demandé si je désirais voir et saluer un homme qui avait été autrefois premier médecin de la reine de Suède, [12] nommé M. Du Rietz, [13] duquel il m’avait déjà parlé par deux fois ; je le pris au mot et le trouvâmes dans sa chambre qui était immédiatement au-dessous de M. Pourfour. Ce M. Du Rietz est homme fort civil, lequel a fort voyagé, qui a une admirable mémoire, qui sait de tout. Il m’a dit qu’il s’en retourne en Hollande où il verra et entretiendra M. de Saumaise [14] qui est son bon ami ; que delà il ira à Hambourg [15] revoir sa femme et qu’il pourra bien aller encore un coup à Stockholm [16] y faire un voyage pour y revoir la reine de Suède ; qu’après cela il reviendra en France. Je ne voulus point trop curieusement lui demander quel dessein il avait de tous ces voyages, je pense qu’il me l’eût dit s’il eût voulu que je l’eusse su. Inter tot sermones [5] (car nous fûmes assez longtemps ensemble), je vous nommai par deux fois différentes sans qu’il fît semblant de vous connaître ni de vous avoir jamais vu ; sur quoi je me retins et dissimulai ce que j’en savais du contraire, tout exprès. Il connaît merveilleusement du monde et m’a semblé glorieux en plusieurs choses, parlant de la plupart des hommes avec mépris ; il m’a dit qu’il était docteur de Salamanque en Espagne ; [6][17] il connaît fort bien notre maître Bourdelot [18] et ne sais point en quelle école il a tant appris de vérités de cet homme. Voilà ce que je sais de cette aventure et ce que je vous en puis dire.
Le roi [19] a exilé d’ici quatre conseillers de la deuxième des Enquêtes nommés MM. Voisin, [7][20] de Villemontée, [8][21] Pontcarré [22] et Le Clerc de Courcelles, [23] pour avoir empêché qu’un conseiller de leur Chambre ne rapportât un procès, nommé M. Tambonneau, [9][24] qui est entre eux mal voulu pour avoir été un de ceux qui ont composé le parlement de Pontoise, [25] comme le sont généralement tous ceux des autres chambres qui y ont été. [10]
Entre autres articles du testament de M. Vautier, [26] cet homme, qui était fils d’un juif, [27] boulanger dans Arles en Provence, [28] et que ceux de la cour n’ont jamais vu à la messe, a ordonné une somme de 12 000 francs pour être employée au bâtiment d’une chapelle dans Arles. Ladite somme a été mise entre les mains du P. Labbé, [29] jésuite de votre ville de Lyon qui est à présent ici. Ce jésuite a été si aise d’avoir cet argent entre les mains et à sa dévotion qu’il en a fait un éloge au dit Vautier, lequel est plein de mensonges, de faussetés et de flatteries. Ne misere tamen : τουτο γαρ εστι λοιολοτικον. [11] On en a fait reproche à ce jésuite, qui en a eu telle honte qu’il a fait ce qu’il a pu pour en retirer ce peu qu’il en avait débité d’exemplaires ; ce qu’ayant été su et découvert, pour lui en faire plus grand dépit, sur une copie qui était en bonnes mains, on l’a réimprimé : en voilà une que je vous envoie. M. Riolan [30] le méprise fort et dit que dès que sa femme et son fils seront guéris, qu’il veut y faire une réponse. Ce bonhomme M. Riolan est fort affligé : son fils second [31] s’est marié sans sa permission, dont il a un gros procès sur les bras depuis deux ans pour faire casser ce mariage ; son aîné est abbé en Bourgogne [32] près de Flavigny [33] et d’Alise, [34] qui est l’Alexia de Jules César [35] et la Sainte-Reine des vérolés d’aujourd’hui ; [12][36] il a 9 000 livres de rente en bénéfice, mais il est fort débauché ; il est de présent au lit malade d’une inflammation de poumon, [37] laquelle s’est épandue jusqu’à la gorge, de telle façon qu’il étouffait si par bon conseil n’y eût été pourvu ; [13] il a fallu lui ouvrir la gorge et lui faire la bronchotomie ; [14][38] il est un petit mieux et en espérance de guérison. Mais Mme Riolan, [39] la bonne femme, est extrêmement malade : comme elle s’en allait il y a quelque temps à vêpres, il lui prit un éblouissement par lequel elle tomba dans le ruisseau ; en même temps une charrette passa qui la blessa à la cuisse et aux côtes si rudement qu’elle en est au lit bien malade. Voilà des accidents qui étonnent si fort ce bonhomme que j’ai peur qu’il n’en meure, outre qu’il est déjà bien vieux et bien cassé ; et néanmoins, ce sera dommage toutes et quantes fois que cela arrivera car il a encore bien envie de travailler et a de fort beaux desseins bien encommencés ; mais surtout, plût à Dieu qu’il pût entièrement achever le beau traité qu’il a bien avancé de usu et abusu emeticorum. [15] S’il se fait quelque chose sur l’épitaphe de Vautier, vous en serez des premiers avertis.
Je vous envoie aussi quelques vers qui ont été faits sur la mort de feu M. Talon, [40] du P. Petau [41] et autres pères de la Société. [16]
Ce 16e de janvier. La dépense du cardinal de Retz fut hier réglée et réduite à 110 livres pour chaque jour. On dit que le pape [42] est fort en colère contre la France pour l’emprisonnement de ce cardinal et qu’il s’en va faire tout ce qu’il pourra pour tâcher de le faire mettre en liberté. [17] Le Mazarin n’a su reprendre Rethel [43] à cause que notre armée est presque toute dissipée : [18] elle a été par ci-devant de 16 000 hommes, à peine l’est-elle aujourd’hui de 6 000 ; la froidure, la faim, les maladies et les eaux ont causé tous ensemble ce désordre. [19]
Il y a ici un libraire de Genève nommé Chouët [44] duquel j’ai acheté quelques livres, et entre autres la Logique de Scheiblerus [45] in‑4o que M. Rigaud [46] m’avait promise. [20] Je vous prie de l’avertir qu’il ne s’en mette pas en peine davantage puisque j’en ai une. J’y ai encore acheté un autre livre d’un auteur que j’estime chèrement, qui est Vendelinus : [47] j’ai ici trouvé sa Morale, qui est un gros in‑8o de 110 feuilles que je fais relier en deux volumes ; j’ai de ce même auteur trois tomes Contemplationum physicarum, qui est une bonne marchandise ; [21] avec un traité de purpura, sive de febris purpuratæ curandæ methodo, [22] d’un médecin de Rostock, [48] in‑4o, etc. [49]
Ce 20e de janvier. Il y a plus d’un mois entier que l’on dit ici que le Mazarin reviendra de trois en trois jours ; mais ses partisans prétendaient qu’il reviendrait victorieux et tout triomphant après avoir repris toutes les villes frontières que le prince de Condé [50] avait occupées, ce qu’il n’a pu faire ni peut-être osé entreprendre : le prince était là auprès avec de bonnes troupes et en état d’avoir encore d’autre secours d’Espagne s’il eût été de besoin ; les villes étaient fort pleines de bonnes garnisons ; notre armée, exposée à toutes les injures du temps, s’est tellement dissipée que l’on ne saurait dire où elle est, principalement de l’infanterie ; ceux qui ne sont pas morts s’en sont fuis. Le prince de Condé s’est retiré sur la frontière vers Laon [51] et Vervins [52] pour tâcher d’y faire hiverner son armée et n’être point fort éloigné de Rethel ; [23] là-dessus hæret Mazarinus. [24] On dit ici que la reine l’a plusieurs fois mandé, que le roi lui a fait commandement, toutes affaires cessantes, de revenir ; si bien qu’il ne tient qu’à lui, mais le coyon n’ose revenir ni rentrer à Paris ex excitatis singulis magnæ Urbis ordinibus : [25] le Clergé y est tout ému à cause de la détention du cardinal de Retz ; le Parlement, à cause des nouveaux édits depuis peu publiés et vérifiés ; le peuple, à cause de la cherté universelle ; les rentiers, à cause des rentes [53] de l’Hôtel de Ville qui ne se paient point. Bref, luctus ingens in magna civitate ; [26][54] et nonobstant tout cela, on dit toujours que ce beau ministre reviendra la semaine qui vient, laquelle n’est point encore passée.
Nous avons ici perdu le 21e de janvier un de nos anciens, lequel ne faisait plus rien depuis plusieurs années. Il avait près de 80 ans et buvait encore son vin tout pur, c’était un vieux garçon nommé M. Hénault. [27][55] Nous en avons encore deux fort malades, savoir MM. Merlet [56] et de Poix, [57] desquels on peut dire un proverbe qui est quelque part dans Cicéron, [58] Sardi vænales, alter altero nequior, [28][59] ou deux chapons de rente, l’un plus gros que l’autre. [29] M. Merlet, comme un excellent homme, nous est fort utile ; pour l’autre, nulli vixit, nequidem sibi, [30] il est si gueux de vanité qu’il en crèvera. On dit que l’on a mandé au duc d’Orléans, [60] qu’il vienne à la cour et que s’il n’y vient, que l’on le poussera à bout. Sa femme [61] est encore ici ; on parle bien qu’elle ira trouver son mari à Blois ; [62] mais néanmoins, on dit qu’elle ne partira que le même jour que le Mazarin arrivera. D’autres disent qu’il ne rentrera point dans Paris, mais que le roi et la reine iront à Fontainebleau [63] où il se rendra. Un des intimes amis de M. Naudé [64] me vient d’assurer qu’il sera ici l’été prochain, que Bourdelot y est fort mal content de ce que depuis qu’il y est il n’y a point encore reçu d’argent, et que les libéralités de la reine [65] sont tout à fait épuisées par l’ordre du Conseil de Suède.
Le 24e de janvier, le feu prit à neuf heures au soir dans un des pavillons du Louvre, [66][67] où il dura cinq heures et y fit grand désordre. Le 26e, il a pris près l’horloge du Palais, [68] où il a causé grande perte, d’autant que c’est chez un vendeur de poudre à canon, laquelle a cassé toutes les vitres du quartier, même jusqu’à celles de Saint-Barthélemy [69] qui est là auprès. [31]
[Les nièces du Mazarin [70] sont arrivées ici depuis quatre jours, à ce que l’on me vient d’apprendre, et sont dans le Louvre.] [32] On dit que l’oncle arrivera cette semaine qui vient, mais plusieurs disent que ce ne sera pas la prochaine et qu’il est trop empêché à ramasser les troupes du roi pour les envoyer vers Laon et Vervins que le prince de Condé tient, et qu’il veut tâcher de rassiéger et de reprendre.
Ce 27e de janvier. Je vous laisse à penser si je n’ai pas été fort réjoui de recevoir aujourd’hui en dînant votre belle et agréable lettre, de laquelle je vous remercie très humblement. Je suis ravi d’y apprendre de bonnes nouvelles de votre santé, quæ utinam perseveret in multos annos. [33] Je suis bien aise pour ce que vous m’apprenez du livre de bonis et malis libris du P. Th. Raynaud. [34][71] Il est vrai que j’ai bien envie de le voir, aussi bien que celui que M. Duhan [72] vous a donné pour moi ; il les faut mettre ensemble dans la première balle que vous découvrirez que l’on enverra à Paris. Je vous remercie de la feuille de bicipiti Ecclesia et vous ai grande obligation de tant de soin que vous avez pour moi. [35] J’ai céans le Scheibleri Opus Logicum et n’ai point besoin que M. Rigaud m’en fasse venir de Genève. [20]
Si M. Barbier [73] imprime quelque chose de la reine de Suède, je vous prie de me l’acheter. On m’a dit aujourd’hui que si M. Naudé revient de Suède l’été prochain, ce ne sera point par mécontentement, mais plutôt à cause que le Mazarin ne lui a donné que pour un an de congé. [36] M. Ravaud [74] m’a fait l’honneur de m’écrire et de me mander que bientôt il m’enverra quelques livres de ceux que le lui ai demandés. Vous pourrez vous servir de la commodité du même paquet pour les vôtres. Obligez-moi de lui faire mes recommandations, et de tirer de lui un mémoire de ceux qu’il m’enverra bientôt et de le mettre dans votre première ; et pour cause, je ne sais rien touchant l’ancien auteur de votre Momus. [37][75] [Vous trouverez dans cette lettre un jeton d’argent, [76][77] lequel je vous prie de présenter de ma part à notre bon ami M. Gras, avec mes très humbles recommandations, une autre fois, j’en enverrai à d’autres, et d’envoyer pareillement celui-ci à M. Falconet]. [38] La Vie de M. Dupuy [78][79] n’est point encore achevée, mais je ne sais à quoi il tient, j’attends après pour faire votre paquet où j’ai ajouté les opuscules de M. Ménage. [39][80]
Je vous baise mille fois les mains et à Mlle Spon, et vous conjure de croire que je serai cordialement toute ma vie, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.
Guy Patin.
De Paris, ce mardi 28e de janvier 1653.
Notre ambassadeur qui est à Rome a écrit au secrétaire d’État qui a les affaires étrangères, savoir à M. le comte de Brienne, [81] qu’il veut qu’on remette en liberté le cardinal de Retz [82] et qu’il ne s’en prend qu’au cardinal Mazarin, [83] ce qu’il a répété par huit diverses fois ; [40] cette répétition a fort déplu à la reine [84] quand M. de Brienne lui a lu cette lettre.
Ms BnF Baluze no 148, fos 57‑58, « À Monsieur/ Monsieur Spon,/ Docteur en médecine,/ À Lyon » ; Jestaz no 83 (tome ii, pages 1017‑1025). Note de Charles Spon au revers de l’enveloppe : « 1653/ Paris 28 janv./ Lyon 2 févr./ par M. Gras le méd./ Risp./ Adi 11 ditto. »
Clemens iv. eruditione, vitæ sanctimonia, rerum gestarum gloria, et Pontificatu Maximus. Reipub. Christianæ, Galliæ suæ, et Grossorum gentis illustre ornamentum… Ex Commentariis Auctorum qui postea indicabuntur. Opera Claudii Clementis e Societate Iesu.
[Clément iv, {a} le plus grand par la sainteté de sa vie, la gloire de ses faits et gestes et son pontificat. Ornement éclatant de la République chrétienne, de sa France et de la famille des Gros… {b} Tiré des commentaires des auteurs qui sont indiqués plus loin. {d} Œuvre de Claude Clément, {e} de la Compagnie de Jésus]. {f}
- Gui de Foulques ou Foucois, natif de Saint-Gilles, près de Nîmes, mort à Viterbe en 1268, était issu du Conseil de saint Louis. D’abord jurisconsulte et père de famille, il fut ordonné prêtre en 1255, après son veuvage. Cardinal en 1261, il fut été élu pape en 1265, sous le nom de Clément iv.
- Sa stature corporelle avait valu à Clément v le sobriquet de « Gros » (Grossus), qui fut attaché à sa famille.
- Auctores ex quorum monumentis hac gestorum Clementis narratio conscripta est [Auteurs dont les ouvrages ont servi à écrire cette histoire de Clément] (3 pages).
- Claude Clément (Ornans, Franche-Comté vers 1594-Madrid 1642 ou 1643), jésuite, avait enseigné la rhétorique à Dole et à Lyon puis les antiquités grecques et latines à Madrid et s’occupa beaucoup d’archéologie.
V. notes [3] infra pour un autre de ses ouvrages, et [23], lettre 308, pour sa coopération avec le R.P. Théophile Raynaud.
- Lyon, Jean Julliéron, 1623, in‑12 de 148 pages, réédité ibid. et id. l’année suivante.
Jean Julliéron, imprimeur ordinaire du roi à Lyon, fils de Guichard, avait d’abord travaillé avec son frère aîné Nicolas (mort en novembre 1628 pendant la peste), puis avait repris sa charge. En 1650 (date probable de sa mort), Jean l’avait lui-même cédée à son fils Antoine (mort en 1701). Leur officine familiale se trouvait rue Raisin. Dans sa lettre du 25 avril 1653 à Charles Spon (note [29]), Guy Patin a dit qu’Antoine Julliéron avait été associé au libraire Rigaud.
Musæi sive Bibliothecæ tam privatæ quam publicæ Exstructio, Instructio, Cura, Usus. Libri iv. Accessit accurata descriptio Regiæ Bibliothecæ S. Laurentii Escurialis : Insuper Paranesis allegorica ad amorem literarum. Opus multiplici eruditione sacra, simul et humana : præceptis moralibus et literariis, architecturæ et picturæ subiectionibus, inscriptionibus et Emblematis, antiquitatis philologicæ monumentis, atque oratoriis schematis utiliter et amœne tesselatum. Auctore P. Claudius Clemens Ornacensis in Comitatu Burgundiæ e Societate Iesu Regius Professor Eruditionis in Collegio Imperiali Madritensi.
[Construction, disposition, soin, emploi d’un Musée ou Bibliothèque, tant privée que publique. Quatre livres. Avec une description détaillée de la Bibliothèque royale de Saint-Laurent de l’Escurial {a} et une Parénèse {b} allégorique pour l’amour des belles-lettres. Ouvrage utilement et agréablement pavé d’une mosaïque de vaste érudition sacrée et humaine, de préceptes moraux et littéraires, d’expositions de l’architecture et de la peinture, d’inscriptions, d’emblèmes et de figures oratoires. Par Claude Clément, {c} jésuite natif d’Ornans en Franche-Comté, professeur royal d’érudition au Collège impérial {d} de Madrid]. {e}
- V. note [8], lettre 1003.
- Discours moral exhortant à la vertu.
- V. supra note [1].
- V. notule {b}, note [7], lettre 279.
- Lyon, Jacques Prost, 1635, in‑4o de 552 pages.
La Fronde avait pris fin à Paris, Monsieur s’était retiré à Orléans, le cardinal de Retz était emprisonné à Vincennes, Condé avait rejoint les Espagnols qui continuaient leur guerre contre la France ; mais Bordeaux persistait seule dans la sédition intestine contre la Couronne. Les derniers princes rebelles, Conti, la duchesse de Longueville, sa sœur, la princesse de Condé, leur belle-sœur, et son fils, le duc d’Enghien, tentaient d’y surnager dans la furieuse tempête qui opposait le parlement local aux bourgeois de la ville et à l’Ormée. En décembre 1652, après avoir déjoué un complot contre sa personne, Conti s’était rallié en désespoir de cause à l’Ormée (Journal de la Fronde, volume ii, fo 188 ro, Paris, 20 décembre 1652) :
« Les lettres de Bordeaux du 12 portent que les placards qu’on avait affichés contre l’honneur de M. le prince de Conti et de Mme de Longueville y avaient été brûlés publiquement de la main du bourreau avec d’autres de même trempe que l’on y avait affichés ensuite ; que M. le prince de Conti étant allé à l’assemblée de l’Ormée, on lui présenta un rameau d’orme qu’il reçut comme un présent fort agréable, et dit à la Compagnie qu’il se déclarait ormiste de bon cœur et qu’il ferait tout ce qu’elle voudrait pourvu qu’elle voulût faire aussi tout ce qu’il désirait, ce qui fut promis et signé respectivement. »
Le P. Berthod ( Mémoires, page 600) :
« Le roi voyant le peuple de Paris soumis et son autorité rétablie dans le parlement aussi bien que parmi la bourgeoisie et le petit peuple, assembla son conseil secret pour aviser aux moyens de remettre Bordeaux dans son devoir et d’en faire sortir ceux qui maintenaient le peuple dans la rébellion, afin de donner sujet aux bourgeois de cette ville-là, qui avaient de bonnes intentions pour le service de Sa Majesté, de travailler à leur liberté et de se remettre dans l’obéissance du roi. La reine et M. Servien furent d’avis d’y envoyer secrètement le Père Berthod et M. de Bourgon parce qu’ils étaient assurés de leur affection pour le service du roi et qu’ils s’étaient parfaitement bien acquittés de leur entreprise dans l’affaire de Paris. Ils partirent donc tous deux au mois de décembre 1652 avec des ordres de Sa Majesté qui leur donnaient pouvoir d’agir ainsi qu’ils aviseraient sans leur prescrire autre chose déterminément, laissant cette négociation absolument à leur conduite. »
Ce nouvel « ordre de juges » était la Chambre des Douze (v. fin de la note [26], lettre 290) qui avait à connaître de tous les procès privés à Bordeaux et dans les villes de son ressort. Ses décisions étaient sans appel et immédiatement exécutoires. Omission importante, Guy Patin ne signalait pas l’existence d’une seconde chambre, dite la Chambre des Trente, véritable organe exécutif du gouvernement de l’Ormée (v. note [25], lettre 279). Le tribunal se composait « d’environ 40 juges de toutes sortes de condition, dont les plus remarquables, après la suite de Conti, étaient les capitaines ormistes de la ville, Dureteste, Pontellier, Masson, Tustal, Guiraud, Crozillac, des marchands de morue, des pintiers [potiers d’étain] et ainsi du reste » (Sal Alexander Westrich The Ormée of Bordeaux: A Revolution during the Fronde, Johns Hopkins University Press, 1972).
Il est à peu près certain que le prince de Conti fut présent lors des assemblées. Cette nouvelle chambre, parfois surnommée le Sénat de l’Ormée, rédigea la charte du mouvement, décida des nouvelles expulsions visant les parlementaires, contrôla l’élection des nouveaux jurats et poursuivit les ennemis du régime. Elle décida encore la continuation de la guerre et la levée des hommes qui en résultait, fit construire des fortifications et députer en Angleterre auprès de Cromwell. Elle agit enfin comme un conseil militaire dans la punition des conspirateurs qui se découvrirent dans Bordeaux les mois suivants. Sa sphère de compétence, considérable, se limitait cependant aux affaires publiques (Jestaz).
« Au milieu de force discours ». V. note [20], lettre 209, pour Grégoire-François Du Rietz, premier médecin de la reine Christine.
Salamanque, en Castille, était le siège de la plus grande université d’Espagne, fondée au xiie s.
Charles Voisin, seigneur de La Bressetière, était le quatrième fils de Daniel i Voisin (v. note [17], lettre 604), greffier en chef criminel du Parlement de Paris, et de Marguerite de Verthamon. En 1647, Charles avait été reçu conseiller en la deuxième des Enquêtes. Il mourut à 35 ans dans le mois suivant cet exil, en février 1653 (v. note [21], lettre 307) (Popoff, no 2498).
Ce François de Villemontée, qu’il ne faut pas confondre avec son homonyme, futur évêque de Saint-Malo (à qui Tallemant des Réaux a consacré une historiette, tome ii, pages 165‑166), était fils de Jean de Villemontée, correcteur à la Chambre des comptes ; il avait été reçu conseiller au Parlement en 1636 et mourut en 1662 (Popoff, no 2473).
En 1636, Nicolas Camus, seigneur de Pontcarré, avait été reçu conseiller en la deuxième des Enquêtes, alors de nouvelle création ; il mourut en 1660 (Popoff, no 823).
Charles Le Clerc, seigneur de Courcelles et de Boisrideau, était petit-neveu de saint François de Paule par sa grand-mère, Michèle Alesso. Conseiller en la deuxième des Enquêtes en 1639, il monta à la Grand’Chambre en août 1667 (Popoff, no 969). V. note [11], lettre 165, pour François-Jérôme Tambonneau.
La réunion des parlements frondeur (Paris) et légitime (Pontoise), décidée le 22 octobre précédent par le roi au Louvre (v. note [34], lettre 294), n’avait pas mis fin aux mésententes qui divisaient le Parlement depuis le début de la Fronde. L’arrêt du 13 août 1652, quoique cassé par la décision royale, restait toujours bien présent dans les mentalités. Les présidents et conseillers partis pour Pontoise avaient alors été « traités de déserteurs, de faux frères, de perfides, de lâches, de traîtres, d’infâmes, de perturbateurs du repos public, de criminels de lèse-majesté, et d’indignes de jamais posséder aucun office dans le royaume, ni leur postérité même » (Vallier, Journal, tome iv, pages 12).
En janvier 1653, cet état d’esprit demeurait. Les quatre députés qui s’étaient opposés à Tambonneau furent mandés au Louvre le 13 janvier pour rendre compte de leur geste méprisant. Ils s’inclinèrent d’emblée devant la volonté royale et leurs excuses furent agréées par Louis xiv ; dès le 24 janvier, les exilés furent de retour à Paris (Jestaz).
Journal de la Fronde (volume ii, fo 192 ro, 10 janvier 1653) :
« Le 9, M. de Tambonneau ayant voulu rapporter quelque procès dans la seconde des Enquêtes, la plupart des conseillers de cette Chambre se levèrent en même temps, sans lui donner les moyens de continuer ; ce que l’ayant irrité, il protesta de s’en plaindre au roi ; mais un de la Compagnie ayant pris la parole, lui remontra qu’on ne lui faisait aucune injure puisque, conformément aux règlements de la Cour, on ne pouvait pas rapporter dans les autres chambres lorsque l’on était allé dans la Tournelle et l’Édit ; ce qui n’empêche pas que l’on ne croie que la véritable cause de ce refus n’est autre que celle d’avoir été du nombre de ceux qui avaient été tenir le Parlement de Pontoise. »
« Il n’y a là rien de fâcheux ; en cela, il est en effet tout loyolitique. »
Je n’ai trouvé dans aucun catalogue bibliographique (incluant Sommervogel) l’édition de cet éloge paru en 1652 ; mais il a été réimprimé dans les Petri Labbé e Societate Iesu, Elogia Sacra, Theologica et Philosophica, Regia, Eminentia, Illustria, Historica, Poetica, Miscellanea [Éloges sacrés, théologiques et philosophiques, royaux, éminents, illustres, historiques,poétiques, mélangés de Pierre Labbé (v. note [20], lettre 75), de la Compagnie de Jésus] (Grenoble, Philippe Charvys, 1664, in‑4o, pages 249‑250). Puisque, dans sa phrase suivante, Guy Patin nous en met l’eau à la bouche, le voici :
Elogium funebre
D. Francisci Vautier,
Primarii Medici Regii.
sta aviator ubi stetit illustris medicus. Irata mors quod illustres sibi prædas eriperet,
Perculit hominem ignoto morbo ne medicina sanaret :
Fuit diu primus Medicus antequam esset primarius ; Repræsentavit Aulæ antiquam medicinam et addidit novam :
Creditus est cum eo redire Hippocrates, et Galenus,
Utriusque discipulus, utriusque Magister,
Invenit aliquid quod Græciam latuit, et quod Roma nescivit : Addidit politicam Medicinæ, ut bis Medicus esset ;
Sanaverat Reginam Matrem si Medico credidisset,
Erupit sæpe in has voces, Cur tibi Vauteri non credidi ? Timuere hunc Reginæ Medicum qui Reginam timebant :
Inclusus est carcere Regio, non quia nocuerat,
Sed ne noceret,
Et reus sine crimine,
Luit pœnas culpæ futuræ, et nondum suæ ; In eo secessu meditatus novam artem medicinæ ;
Et stellas et gemmas, et pene omnem naturam Medicam fecit,
Et debuit esse naturæ Medicus ut esset Regius. Postulatus extra Galliam a Regina matre,
Exivit ut iret, atque ideo non ivit quia exiverat ;
Mysterium fuit carcer, et libertas ænigma. Expetitus a Ludovico Iusto moribundo,
Sanaverat morbum, si curare cœpisset : Electus in Medicum primarium qui primus iam erat ;
Brevi ostendit in filio quid in Patre fecisset ;
Servavit utrique vitam privatam, et publicam,
Facturus immortales si arti natura respondisset : Irita mors homini immortalitem cogitanti,
Dum Regem balneo admovet nec reformidat solem,
Perculit obvium caput tot telis quot radiis,
Et ne ardor sanabilis esset, venenum febri admiscuit : Sensit insidias vir sagax et curare neglexit ;
Arbitratus ardorem pretiosum quem pro Rege conciperet ;
Passus est Solem etiam lædentem ne Regem desereret : Nec impune mors vicit, nec sine certamine,
Superaverat illam nisi intra Mesenterium latuisset : Ne imparatus æternum iter susciperet,
Sacramentis Christianis, et divino Viatico auctus,
Decem dierum itinere ad æternitatem pervenit : Abi viator. Et disce nullum Aphorismum veriorem esse :
Morimur tempori, et nascimur æternitati.[Éloge funèbre de M. François Vautier, premier médecin du roi.
Arrête-toi voyageur là où s’est arrêté un illustre médecin.Courroucée, la mort qui arrache à elle des proies illustres, a terrassé un homme d’un mal inconnu que la médecine ne savait guérir. {a} Il fut le premier des médecins avant d’être premier médecin ; {b} il a exercé l’ancienne médecine à la cour et y a ajouté la nouvelle ; avec lui, on a cru voir revenir Hippocrate et Galien ; il a été leur disciple, il a été leur maître, il a trouvé ce que la Grèce n’a pas connu et ce que Rome a ignoré. Il a ajouté la politique à la médecine, de sorte qu’il fut deux fois médecin. Il aurait guéri la reine mère {c} si elle avait eu confiance dans le médecin ; souvent elle s’écria. : « Pourquoi, Vautier, n’ai-je pas cru en vous ? »
Ceux qui avaient craint la reine ont craint ce médecin de la reine. On l’a embastillé : non parce qu’il avait causé du tort, mais pour n’en pas causer ; et accusé sans crime, il a subi le châtiment d’une faute future, mais qui n’était pas encore sienne. Dans cette réclusion, il a médité sur le nouvel art de médecine ; il a engendré et des étoiles et des gemmes, et presque toute la nature médicale ; et il a dû être le médecin de la nature pour devenir celui du roi. La reine mère l’ayant appelé hors de France, il se serait exilé pour y aller, mais n’y est pas allé parce qu’on l’avait exilé ; sa prison fut un mystère et sa liberté une énigme. {d} Appelé au chevet au chevet de Louis le Juste {e} moribond, il eût guéri son mal s’il avait entrepris de le soigner. Nommé premier médecin, lui qui était déjà le premier d’entre eux, il a rapidement procuré au fils {f} ce qu’il avait fait au père ; de tous deux, il a préservé la vie privée et publique, il les eût rendu immortels si la nature avait répondu à son art. L’homme qui songe à l’immortalité met la mort en colère : tandis qu’elle amène le roi au bain, il n’appréhende pas le soleil ; il a frappé sa tête exposée tant à ses traits qu’à ses rayons ; {g} et pour que l’ardeur soit incurable, il a mêlé un poison à la fièvre. Le sagace Vautier comprit le piège et se garda bien d’y remédier, ayant jugé qu’il devait comprendre la fièvre comme étant d’un grand prix pour le roi ; il a admis que le soleil avait meurtri le roi pour ne plus l’abandonner. Mais la mort n’a pas gagné impunément, ni sans combat ; il l’eût dominée si elle ne s’était pas tapie dans le mésentère. {h} Pour que le roi n’entreprît pas le voyage éternel sans y être préparé, c’est muni des sacrements chrétiens et du divin viatique {i} que, dix jours plus tard, il s’est engagé sur le chemin de l’éternité.
Passe ton chemin, voyageur. Apprends que nul aphorisme n’est plus vrai que celui-ci : « Au moment où nous mourons, nous naissons pour l’éternité »].
- François Vautier, né en 1580 (v. note [26], lettre 117), mourut le 4 juillet 1652 « dans son lit, d’une fièvre continue maligne » (lettre de Guy Patin à Charles Spon, datée du lendemain).
- Vautier fut nommé premier médecin de Louis xiv en mai 1646.
- Marie de Médicis.
- Emprisonnement de Vautier à la Bastille, sur ordre de Richelieu, de 1630 à 1642 (v. note [35], lettre 117). « Le roi souhaitait que la reine, sa mère, qu’il avait laissée à Compiègne, se rendît à Moulins pour y rester ; et dans ce cas, il était résolu de lui renvoyer Vautier qu’elle demandait avec empressement. Mais quand il s’aperçut qu’elle s’obstinait à demeurer à Compiègne et qu’elle semblait même décidée à y prolonger son séjour, il donna ordre de transférer Vautier à la Bastille, pour couper plus sûrement tout ce qu’on supposait de communication entre ce médecin et la reine. Celle-ci sortit ensuite du royaume et se retira en Flandre, où elle demanda souvent qu’on lui renvoyât Vautier ; mais avec plus d’instance en 1633, pendant le cours d’une fièvre continue qui dura quarante jours et qui la mit en danger. Le roi, qui en fut informé, dit le P. Griffet dans son Histoire de Louis xiii, “ fit partir les sieurs [Nicolas] Piètre et [Jean ii] Riolan, fameux médecins de Paris, pour l’assister dans cette maladie ; mais elle fit mander qu’elle avait besoin des conseils de Vautier, qui était toujours à la Bastille. On lui permit de le consulter par écrit, et on refusa de le lui envoyer. Vautier fut ainsi consulté ; mais il ne voulut pas donner son avis, disant qu’il fallait absolument qu’il vît la reine mère pour pouvoir juger de son mal et des remèdes capables de la soulager. Peut-être espérait-il qu’on serait obligé à la fin de le tirer de la Bastille ; mais on aima mieux que la reine se passât de ses avis, par rapport à sa santé, que la mettre à portée de suivre aveuglément les conseils pernicieux qu’il aurait pu lui donner pour sa conduite < politique > ” [v. note [4], lettre 61]. Le procédé de la cour fait voir ce qu’on y pensait sur le compte de Vautier, et combien on se méfiait de son caractère intriguant ; car malgré que la reine eût réitéré plusieurs fois les mêmes demandes, elles ne furent pas mieux écoutées ; et son médecin resta à la Bastille près de douze ans, c’est-à-dire jusqu’à la mort du cardinal de Richelieu en < décembre > 1642. Il reparut alors à la cour, et il y reparut avec une considération qui lui procura, au bout de peu d’années, la place de premier médecin de Louis xiv » (Éloy, tome 4, pages 486‑487).
- Louis xiii.
- Louis xiv.
- Les Mémoires (1676) de Bénédict-Louis Pontis (1593-1670), cité par Niderst (page 95), expliquent ce passage : « S’étant mis un jour au soleil qui entrait par une fenêtre de sa chambre pour s’échauffer, comme je vins le saluer sans prendre garde à cela, j’allai justement me placer ensuite devant la fenêtre , sur quoi le roi me dit assez agréablement : “ Hé, Pontis, ne m’ôte pas ce que tu ne saurais donner. ” Je ne compris point ce que Sa Majesté me voulait dire, et en étant fort en peine, je demeurais toujours à la même place. Alors M. le comte de Termes me dit que c’était le soleil que j’ôtais au roi, et je me retirai à l’heure même. »
- V. l’autopsie de Louis xiii, note [5], lettre 86.
- V. note [15], lettre 251.
Le legs de François Vautier contribua à la construction de la chapelle du collège des jésuites en Arles, dédiée à saint Joseph, dont la première pierre fut posée le 4 août 1654. François Adhémar de Monteil de Grignan, archevêque d’Arles, la bénit et y dit une première messe le 19 février 1661.
Le site exact de la bataille d’Alésia en Bourgogne reste un inépuisable sujet de controverses entre historiens. Alise-Sainte-Reine, proche de Flavigny-sur-Ozerain (actuel département de la Côte-d’Or), est depuis le Second Empire le lieu officiel (mais encore contesté) de la mémorable défaite de Vercingétorix devant Jules César en 52 av. J.‑C. Alise doit son surnom à sainte Reine, vierge et martyre du iiie s., qui y était née. Fille d’un païen nommé Clément, elle fut baptisée par sa nourrice et habituée de bonne heure aux pratiques religieuses. Reine avait 15 ans lorsque, au dire des hagiographes, Olybrius, lieutenant de l’empereur, se rendit à Alise pour informer contre les chrétiens. Il fut vivement frappé de la beauté de Reine et essaya d’abord par la douceur de lui faire abjurer le christianisme ; puis voyant son opiniâtre résistance, il lui fit subir toutes sortes de tortures et enfin trancher la tête en l’an 275. D’après une naïve légende « son âme, à la vue de tout le monde, fut honorablement portée au ciel par les anges dont elle partageait la pureté virginale, et son corps fut enterré par les chrétiens à Alise ». L’Église honore sainte Reine le 7 septembre (G.D.U. xixe s.).
Alise était alors réputée pour ses trois sources thermales (cordeliers, grande fontaine et porte d’Alyze), qui donnaient une eau alcaline, claire, limpide et agréable au goût : « elle est diurétique et laxative ; on la boit avec avantage dans les maladies des reins et de la vessie, et surtout dans les affections graveleuses [lithiase]. On s’en sert aussi dans les blennorrhées [gonorrhées infectieuses ou chaudes-pisses] » (M.P. in Panckoucke). Dans une lettre ultérieure à Hugues ii de Salins (12 juin 1656), Guy Patin les a dites riches en mercure, remède souverain de la vérole. V. note [11], lettre 437, pour le livre que Jean Guiot de Garambé a consacré à leurs vertus thérapeutiques.
V. note [16], lettre 1020, pour Philippe Riolan, abbé de Saint-Pierre de Flavigny.
Pourvu : secouru.
Élisabeth Simon, épouse de Jean ii Riolan, n’allait guère se remettre de son accident : Guy Patin l’a dite atteintee de démence sénile dans sa lettre du 8 juin 1657 (v. sa note [8]).
Philippe, leur fils aîné, alors âgé de 38 ans (v. note [16], lettre 1020), avait dû subir une bronchotomie (Jourdan in Panckoucke, 1812, tome 3, page 311) :
« opération de chirurgie qui consiste à pratiquer une incision à la partie antérieure du cou pour ouvrir ensuite les voies aériennes, et qu’on appelle aussi laryngotomie ou trachéotomie selon que la section se fait au larynx ou dans l’étendue de la trachée-artère. La bronchotomie, qu’on doit regarder comme une des preuves les plus convaincantes de l’efficacité de la chirurgie, lorsqu’on réclame à temps les secours de cet art salutaire, est indiquée toutes les fois que par une cause quelconque l’air ne peut plus s’introduire dans le poumon et qu’en conséquence, le malade est menacé de périr suffoqué. L’esquinancie inflammatoire {a} portée à un haut degré est un des cas qui obligent le plus fréquemment d’y avoir recours, et les anciens eux-mêmes avaient déjà reconnu la nécessité d’employer des moyens capables de rétablir l’acte respiratoire que la tuméfaction de l’arrière-bouche est sur le point d’intercepter. Le procédé d’Hippocrate qui consistait à introduire un tuyau dans la gorge fut longtemps le seul mis en pratique, malgré son insuffisance ; et c’est, au rapport de Galien, Asclépiade {b} qui le premier conseilla d’inciser la partie antérieure du larynx pour ouvrir une route artificielle à l’air. »
La trachéotomie est toujours en usage. Hormis l’atteinte du poumon, la maladie de Philippe Riolan évoque une diphtérie.
« sur l’us et l’abus des émétiques », incluant bien sûr l’antimoine.
Sommervogel n’a pas répertorié ce recueil dans sa bibliographie du P. Denis Petau.
Le fo 112 du Ms BnF no 9357 est un poème latin sur la mort d’Omer ii Talon, signé « M.G.P.B.D.M.P. », sans doute pour « Maître Guy Patin, natif de Beauvaisis, docteur en médecine de Paris » :
In obitum Audomari Talæi, Advocati Regii.
[Sur la mort d’Omer Talon, avocat du roi.
Qui medio Reges inter legesque senatu,
facundo toties ius dedit eloquio,
qua potuit moderans quidquid vesana libido
prædandi invexit, quod populusque luat,
dum dolet a Siculo calcari fœdera legum,
Galliæ, et a puero libera vota patrum,
præsagitque deum ultorem, legumque patrumque,
moliri certum Regibus exitium,
ne foret aut Regno, aut legi, vel utriq. superstes,
Talæus voluit lege obeunte mori.
Au sein du Parlement, parmi les rois et les lois, il a tant de fois rendu la justice avec une grande éloquence. Elle lui a permis de modérer tout ce que le désir furieux de piller y a fait entrer et que le peuple expierait, tandis qu’il endure les lois promulguées en France par l’éperon sicilien et les promesses des pères dévoyées par un enfant. Il annonce le dieu vengeur et des lois et des pères, qui ménagera une ruine certaine aux rois. Pour que ne perce celui qui tiendra tête ou à l’autorité royale, ou à la loi, ou aux deux ensemble, Talon a voulu que la loi vienne devant la coutume].Obiit sabbathi, 28 Dec. 1652.
[Il mourut le samedi 28 décembre 1652].
L’écriture du transcripteur ressemble à la jolie cursive de Charles Spon.
Innocent x assembla en effet un consistoire à cet effet pour décider de la conduite à tenir ; il chargea le nonce Bagni d’aller exiger du roi la mise en liberté de Retz, puis députa l’archevêque d’Avignon, Domenico Marini, comme nonce extraordinaire auprès de la cour (Jestaz) ; v. infra note [40].
Journal de la Fronde (volume ii, fos 190 vo et 191 ro, 3 janvier 1653) :
« Les dernières lettres de Champagne portent que le comte de Grandpré {a} avait défait une bonne partie de la garnison de Rethel, ce qui a obligé de l’aller assiéger au lieu de Sainte-Menehould. L’on prépare au Louvre un appartement pour les trois nièces du cardinal Mazarin, lequel on attend ici dans peu de jours ; ce que plusieurs ne croient pas. » {b}
M. Poinsignon (Histoire de la Champagne et de la Brie, 1898, page 59) :
« Le seul jour où l’armée arriva de Contrisson {a} à Somme-Yèvre {b} (28 décembre 1652), 30 ou 40 soldats périrent de l’excès du froid. »
- Meuse, une vingtaine de kilomètres à l’ouest de Bar-le-Duc.
- Marne, 30 kilomètres au nord de Contrisson.
Dans une lettre à Fabert, datée de Coulommes (probablement Coulommes-Marquenay, aujourd’hui village du département des Ardennes, au nord-ouest de Vouziers), le 1er janvier 1653, Mazarin (volume v, page 521) expliquait les raisons qui le contraignirent à n’entreprendre aucun siège :
« Après nous être avancés avec toute l’armée à quatre lieues de Sainte-Menehould, on a jugé que l’attaque en était impossible quant à présent, à cause que M. le Prince avait fait brûler tous les lieux d’alentour, les faubourgs de la place et presque toute la ville de Clermont, {a} en sorte qu’il ne restait plus ni couvert, ni fourrage à quatre lieues aux environs ; et j’ai reconnu moi-même qu’infailliblement l’armée y aurait péri en deux jours si l’on se fût opiniâtré à y aller, puisqu’en un seul jour et une nuit, il est mort de froid près de cinquante soldats. C’est pourquoi l’on a pris résolution de marcher vers M. le Prince, pour voir si l’on pourrait prendre quelque avantage sur lui. On a dessein de se rabattre ensuite sur Château-Porcien et sur Rethel ; mais M. le Prince a pris les devants, comme vous saurez mieux que moi, pour s’approcher de la frontière de Flandres, et nous avons trouvé qu’il avait jeté du monde dans Rethel et dans Château-Porcien. Nous avons au delà de ce qu’il nous faut pour un grand siège, mais j’ai grand’peur que la rigueur de la saison n’empêche l’armée d’agir, particulièrement si les ennemis prenaient quelque poste auprès de nous, d’où ils nous puissent incommoder. Néanmoins, je ferai tout ce qui sera humainement possible et vous avez bonne opinion de moi pour croire que je ne m’endormirai pas. »
- Clermont-en-Argonne (Meuse).
Les Chouët étaient une famille de libraires-imprimeurs de Genève. Jacques (vers 1583-1661) avait succédé à son père, de même prénom que lui, en association avec son frère Pierre (1580-1648). À la mort de Pierre, son fils Samuel lui avait succédé dans l’association.
V. note [12], lettre 279, pour la Logique de Christoph Scheibler.
Markus Friedrich Wendelin (Marcus Fridericus Wendelinus, Sandhausen près d’Heidelberg 1584-Zerbst en Saxe-Anhalt 1652), théologien réformé allemand :
[Philosophie morale méthodiquement présentée en préceptes succincts ; pleinement illustrée de commentaires théoriques et pratiques tirés des anciens théologiens, philosophes, orateurs, historiens et poètes ; et en outre logiquement et librement augmentée et complétée par sept centuries de questions morales. Par Markus Friedrich Wendelin, natif du Haut-Palatinat, {a} professeur de théologie et d’histoire naturelle au Collège d’Anhalt, et son recteur. Précédée par un plan logique de l’ouvrage et suivie de deux index : l’un des auteurs qui y sont cités, expliqués, défendus et attaqués ; l’autre des chapitres et des questions morales soudeuses et controversées] ; {b}
[Contemplations naturelles : Section i. Physiologie générale, sur les principes et affections du corps naturel… ii. Cosmologie… iii. Les Corps célestes, incluant l’uranologie et l’astrologie… {c}
[Pieux sacrifice de Paulus Neucrantzus, philosophe et médecin natif de Rostock, {b} à Dieu tout-puissant : Livre unique sur le Purpura, {c} où sont exposés la nature et le traitement des fièvres malignes]. {d}
- Deo Optimo Maximo Sacrum.
- Paul Neucrantz (1605-1671), médecin qui exerça à Rostock, puis à Lübeck, à partir de 1655.
- Fièvre pourprée, v. note [56], lettre 229.
- Leyde, Jacobus Lauwicius, 1652, in‑4o de 552 pages ; premières édition à Lübeck, 1647 et 1648, réédition à Francfort, 1660.
V. note [4], lettre 634, pour de nouvelles louanges de Guy Patin sur cet ouvrage.
Vervins fut prise par les hispano-condéens le 19 janvier, mais ils n’y laissèrent que « trente hommes de garnison », soit « un régiment d’infanterie et un de cavalerie ». Arrivant aux abords de la ville, Turenne décida d’en tenter aussitôt le siège ; « la place se rendit en douze heures » le 28 janvier suivant (Turenne, Mémoires, tome premier, page 231).
À l’issue de cette victoire, Mazarin décida de se rendre à Paris où le roi l’appelait avec insistance. Turenne se rendit à Laon établir ses quartiers d’hiver. Condé, de son côté, gagna Stenay le 5 février, d’où il partit pour Namur. Sa défaite devant Turenne à Vervins marqua la fin de la campagne de Champagne, longue de 16 mois (Jestaz).
« Mazarin est figé sur place. »
« pour l’animosité de chacun des ordres de la capitale contre lui ».
« il règne une immense désolation dans la grande cité » ; Tite-Live, Histoire de Rome (livre xxvii, chapitre ii) :
et Romæ quidem cum luctus ingens ex præterito, tum timor in futurum erat.[à Rome régnaient de fait et une immense désolation pour ce qui s’était passé, et de la crainte pour ce qui allait arriver].
Nicolas Hénault (ou Hénaut), natif de Langres, avait été reçu docteur régent de la Faculté de médecine de Paris en 1611 (Baron).
Habes “ Sardos venales, alium alio nequiorem ” [Tu as « des Sardes à vendre, l’un pire que l’autre »] (Cicéron, Lettres familières, livre vii, lettre 24).
Sardi venales [Sardes à vendre !] est un adage qu’Érasme a commenté (no 505) avec plusieurs explications tirées des auteurs antiques, dont la plus plausible vient du De Viris illustribus [Les Hommes illustres] (chapitre 57) attribué à Aurelius Victor (v. note [20], lettre 104) :
Tiberius Sempronius Gracchus nobilissima familia ortus Scipionem Asiaticum quamvis inimicum duci in carcerem non est passus. Prætor Galliam domuit, consul Hispaniam, altero consulatu Sardiniam ; tantumque captivorum adduxit, ut longa venditione res in proverbium veniret “ Sardi uenales ”.
[Tiberius Sempronius Gracchus, {a} issu d’une très illustre famille, ne souffrit pas que Scipion l’Asiatique, {b} son ennemi personnel, fût conduit en prison. Étant préteur, Tiberius assujettit la Gaule ; consul pour la première fois, il soumit l’Espagne ; consul une deuxième, il conquit la Sardaigne. Cette dernière campagne lui procura un si grand nombre de prisonniers que la vente, qui en dura fort longtemps, donna naissance à ce cri populaire lorsqu’on vendait des choses communes et de peu de valeur : Sardi venales].
- V. note [6], lettre 959.
- Général et consul romain du iie s. av. J.‑C. accusé de détournement d’argent, frère de Scipion l’Africain le Jeune (v. note [32] du Borboniana 3 manuscrit).
Pompeius Festus a repris et augmenté cette explication dans le livre xvii de La Signification des mots (v. note [13], lettre 460) :
“ Sardi venales alius alio nequior ” : ex hoc natum proverbium videtur, quod ludis Capitolinis, qui fiunt a vicinis prætextatis, auctio Velentium fieri solet, in qua novissimus idemque deterrimus producitur a præcone senex cum toga prætexta, bullaque aurea, quo cultu reges soliti sunt esse Etruscorum, qui sardi appellantur, quia Etrusca gens orta est Sardinibus ex Lydia. Tyrrhenus enim unde profectus cum magna manu eorum, occupavit eam partem Italiæ, quæ nunc vocatur Etruria. At Sinnius Capito ait Ti. Gracchum consulem collegam P. Valerii Faltonis, Sardiniam, Corsicamque subegisse, nec prædæ quicquam aliud quam manicpia captum, quorum vilissima multitudo fuerit.« “ Sardes à vendre, l’un pire que l’autre ” : ce proverbe semble venu de ce que, dans les jeux capitolins, célébrés par les campagnards revêtus de la robe prétexte, on fait d’habitude une vente à l’encan de Véiens, {a} dans laquelle le crieur public amène pour le mettre en vente le dernier (et c’est aussi le plus pitoyable), un vieillard revêtu de la robe prétexte et portant une bulle d’or. C’étaient là les ornements habituels des rois des Étrusques, que l’on appelait Sardi {b} parce que la nation étrusque est originaire de Sardes en Lydie. {c} Car Tyrrhenus, parti de cette ville avec un grand nombre de ses habitants, s’établit dans cette partie de l’Italie qui porte aujourd’hui le nom d’Étrurie. Mais Sinnius Capiton dit que le consul Tib. Gracchus, collègue de P. Valerius Falto, soumit la Sardaigne et la Corse, et que de tout le butin l’on ne prit que les captifs, dont il y eut une multitude de très peu de valeur. » {d}
- Étrusques.
- Sardiens.
- En Asie Mineure, v. note [91] du Faux Patiniana II‑7.
- Traduction d’Auguste Savagner, 1846.
« On appelle deux chapons de rente deux choses ou deux personnes d’inégale valeur, de taille différente, parce que de ces chapons il y en a d’ordinaire un gras et l’autre maigre » (Furetière).
Détruite en 1800, l’église Saint-Barthélemy se trouvait dans l’île de la Cité, presque en face de l’horloge du Palais, proche de l’angle actuellement formé par la rue de Lutèce et le boulevard du Palais.
Guy Patin a écrit falsum [c’est faux] dans la marge et a rayé le passage entre crochets.
« dont Dieu fasse qu’elle se conserve de nombreuses années. »
V. notes [36] et [37], lettre 285, pour l’ouvrage du P. Théophile Raynaud « sur l’Église à deux têtes », dont Guy Patin avait reçu une copie défectueuse.
La réalité était quelque peu différente. Selon René Pintard (Pintard b, pages 401‑402), les relations entre Christine de Suède et Gabriel Naudé s’étaient fortement dégradées en raison de l’influence toute-puissante de l’abbé Bourdelot. Non content de bouleverser les coutumes de la cour suédoise, il s’était fait fort d’obtenir la disgrâce du comte Magnus (comite de la garde royale) auprès de la souveraine puis, se faisant le champion de la Fronde contre Mazarin, la détourna de Naudé :
« Christine n’est-elle donc plus cette princesse toute divine dont il avait loué de si bon cœur la vivacité d’esprit, ou qu’il avait tant admirée cette nuit où il l’avait vue, à deux heures du matin, monter à cheval en casaquin de velours noir, avec un chapeau sur ses cheveux épars, pour aller diriger la lutte contre un incendie ? Hélas ! Ce qu’il se rappelle de ses mérites rend plus vive encore l’amertume d’être méprisé d’elle. Or, confesse-t-il, “ nos discours ne sont que des choses plaisantes et souvent légères auxquelles Sa Majesté correspond suivant l’humeur qu’elle est. Autrefois elle nous envoyait quérir d’elle-même ; maintenant les musiciens venus d’Italie ont leur tour et contribuent beaucoup plus que nous au divertissement de Sa Majesté.
[…] Il n’y a plus que moi qui ne l’aie point encore particulièrement entretenue de ses livres, auxquels je ne laisse pas de travailler tous les jours trois ou quatre heures. ” Naturellement, il a moins de succès encore dans ses interventions politiques, et ce n’est pas seulement la reine qui le rebute, ce sont les collaborateurs de son ancien maître {a} qui le désavouent : à Chanut, qui a demandé s’il le pouvait prendre pour confident, “ Usez, répond Brienne, de votre prudence et discrétion ordinaires dans le commerce que vous entretiendrez avec M. Naudé. Ni défiance, ni trop grande ouverture ” ; demandez-lui conseil, “ mais seulement pour les choses dont la connaissance que la reine et le Sr Bourdelot en auront pourra porter avantage au service du roi ”… Ainsi, l’ombre du favori {b} est partout : qu’il s’agisse de servir Christine ou de servir Mazarin, elle surgit, arrête le geste commencé ou la confidence entamée. Un beau jour l’érudit {c} n’en peut plus ; contre l’ami d’autrefois, devenu odieux persécuteur, il rassemble son courage et il va lui déclarer en face, “ assez hautement ”, qu’il ne se soucie plus de lui. C’est la disgrâce. Les clefs de la bibliothèque sont ôtées à Naudé. Celui-ci cependant, sans tarder, mais sans avouer la cause de sa hâte, essaie d’obtenir de son ancien patron {d} un mot de rappel ; et en même temps, sans s’occuper de sa récompense, bien décidé à ne presser “ que sur le passeport ”, il sollicite son congé. Le lui refusera-t-on sous le prétexte du “ triste état ” de sa bibliothèque ? Dès le milieu de mai 1653, il a du moins obtenu ses gratifications. Bien malin qui le retiendra ! Le 1er juin, il s’enfuit dans le bateau de Chanut avec Samuel Bochart {e} et Courtin. »
- Mazarin.
- Bourdelot.
- Naudé.
- Mazarin.
- V. note [16], lettre 287, pour le séjour de Samuel Bochart à Stockholm.
Christine songea un temps à offrir la place de Naudé à Isaac Vossius, qu’elle avait disgracié en 1652, mais ce fut Raphaël Trichet du Fresne (v. note [8] du Faux Patiniana II‑1) qui obtint cette charge (Laure Jestaz).
Dans la mythologie, Momus (Momos en grec), fils du Sommeil et de la Nuit, était le dieu de la raillerie, du sarcasme et de la folie (Fr. Noël) :
« Satirique jusqu’à l’excès, rien ne trouvait grâce à ses yeux et les dieux mêmes étaient l’objet de ses plus sanglantes railleries. Choisi par Neptune, par Vulcain et par Minerve pour juger de l’excellence de leurs ouvrages, il les citiqua tous trois : Neptune aurait dû mettre au taureau les cornes devant les yeux pour frapper plus sûrement, ou du moins aux épaules, pour donner des coups plus forts ; la maison de Minerve lui sembla trop massive pour être transportée lorsqu’on avait un mauvais voisin ; quant à l’homme de Vulcain, il eût voulu qu’on lui eût fait une petite fenêtre au cœur pour qu’on pût connaître ses plus secrètes pensées. Vénus même ne put être à l’abri de ses traits malins ; mais, comme elle était trop parfaite pour donner prise à sa censure, Momus trouva à redire à sa chaussure. {a} On le représente levant son masque et tenant à la main une marotte, {b} symbole de la folie. »
- V. seconde notule {c}, note [57], lettre 348.
- Marotte : « ce que les fous portent à la main pour les faire reconnaître. C’est un bâton au bout duquel il y a une petite figure ridicule en forme de marionnette coiffée d’un bonnet de différentes couleurs » (Furetière).
Sans doute Guy Patin faisait-il ici allusion à un ouvrage satirique sur lequel Charles Spon lui demandait des éclaircissements, mais je n’ai pas su l’identifier.
Cette phrase entre crochets est rayée sur le manuscrit, apparemment par la plume de Guy Patin lui-même.
V. note [42], lettre 288, pour le jeton décanal que Guy Patin avait fait frapper à son effigie et qu’il envoyait à tous ses amis.
V. notes [7], lettre 307, pour la Vie de M. Dupuy par Nicolas Rigault et [2], lettre 280, pour les Miscellanea de Gilles Ménage.
Retz (Mémoires, pages 1104‑1105) :
« Je n’étais pas si attaché aux moyens de me tirer de moi-même de la tour de Vincennes que je ne pensasse aussi à ceux qui pouvaient obliger mes ennemis à m’en tirer. L’abbé Charrier, qui partit pour Rome dès le lendemain que je fus arrêté, y trouva le pape Innocent irrité jusqu’à la fureur et sur le point de lancer les foudres sur les auteurs d’une action sur laquelle les exemples des cardinaux de Guise, Martinusius et Clesel marquaient ses devoirs. Il s’en expliqua avec un très grand ressentiment à l’ambassadeur de France. Il envoya monsignor Marini, archevêque d’Avignon, en qualité de nonce extraordinaire pour ma liberté. Le roi prit de son côté l’affaire avec hauteur ; il défendit à monsignor Marini de ne point passer Lyon. Le pape craignit d’exposer son autorité et celle de l’Église à la fureur d’un insensé ; il usa de ce mot en parlant à l’abbé Charrier et en lui ajoutant : “ Donnez-moi une armée, et je vous donnerai un légat. ” Il était difficile de lui donner cette armée, mais il n’eût pas été impossible si ceux qui étaient obligés d’être mes amis en cette occasion ne m’eussent point manqué »