Pages 153 [sic pour : 151]‑201 [a][1]
Monsieur Démocrite n’aurait guère reçu de visites en ce pays, on aurait trop appréhendé l’indiscrétion de son art.
Sed vitate viros cultum formamque professos,
Quique suas ponunt in statione comas,
Quæ vobis dicunt, dixerunt mille puellis.
Ovid. de Art. am. li. 3. [15]
Les femmes ne laissent pas d’être toujours la dupe < sic > de ces jeunes étourdis, qui viennent redire dans une ruelle ce qu’ils ont dit dans une autre, et qui se répètent eux-mêmes cent fois le jour auprès de cent femmes différentes. J’entre dans un âge où il ne me sied plus de parler de tout cela ; mais j’ai fait comme les autres étant jeune, et je ne savais rien si bien par cœur que quelques compliments auxquels il n’avait point de part. Maintenant, j’ai renoncé à ces mensonges bas et communs, et je voudrais que mon exemple pût servir à ceux qui n’ont pas quitté la flatteuse coutume de dire à toutes les femmes qu’ils les aiment, dans le temps qu’ils n’apportent auprès d’elles qu’un esprit de coquetteries et des manières affectées. [4]
Si fuit ille tibi, Lucretia, gratus adulter,
Immerito ex merita præmia cœde < sic pour : morte > petis.
Sin potius casto vis est allata pudori,
Quis furor est hostis < sic pour : alterius > crimine velle mori ?
Frustra igitur laudem captas, Lucretia, namque
Vel furiosa ruis, vel scelerata cadis. [19]
Cette épigramme a été anciennement traduite en cette manière :
« Si le paillard t’a plu, c’est grand tort, Lucrèce,
Que par ta mort tu veux, coupable, être louée ;
Mais si ta chasteté par force est violée,
Pour le forfait d’autrui mourir, est-ce sagesse ?
Pour néant donc, tu crois ta mémoire heureuse,
Car ou tu meurs méchante, ou tu meurs furieuse. » [5]
Ces vers ont apparemment été faits sur ce qu’a dit saint Augustin : [20] Si adultera, cur laudata ? Si pudica, cur occisa ? Comme il s’est trouvé des gens qui ont blâmé cette femme, il y a lieu de croire qu’elle n’aura point de copie. [6]
Tertullien [21] et saint Jérôme [22] se servent souvent de l’exemple de Lucrèce pour persuader la pureté aux femmes chrétiennes ; saint Augustin, comme on le voit, a pris un parti contraire, car il improuve sa fureur ; [23] mais il est très facile de concilier ces opinions en disant que si une païenne a mieux aimé perdre la vie que l’honneur, les femmes chrétiennes ne doivent pas avoir des sentiments moins nobles : il ne faut pas craindre qu’elles soient homicides d’elles-mêmes ; le désespoir a pu immoler quelques femmes, mais ce sacrifice n’a jamais été fait pour la pudeur. [7]
Sectantem levia, nervi
Deficiunt, animique. [9]
Vermibus hic ponor, qui sic ostendere conor
Quod velut hic ponor, ponitur omnis honor
Quisquis ades, qui morte cades tu, respice plora
Sum quod eris, modicum cineris, pro me miser ora. [10][27]
Fatalis series nobis invidit Erasmum
Sed desiderium nobis tollere non potuit. [15]
Ce grand homme méritait bien assurément d’être appelé Desiderius Erasmus, le désir que tous les savants ont de posséder ses ouvrages en est une preuve.
Dic an dives ero, si carmina scripsero ? Sero.
Semicaper faunus cur ista clamat ? Amat.
Vere novo sponsum me fore reris ? Eris.
Quæ res difficiles sunt in amore ? Moræ. [16]
« Vous ne connaissez pas, mon fils, les manières de la cour et des grands. Mon maître, pour vous parler sincèrement, avec toute sa puissance et toutes ses richesses, ne sait ce qu’il fait. La raison n’est point sa règle, il ne se laisse conduire que par la prévention, c’est pourquoi je ne compte point sur ses caresses ni sur ses bienfaits. Je lui ai donné un remède purgatif [43] qui, malheureusement, l’a fort tourmenté, parce que je ne connaissais pas assez son tempérament ni la constitution de son corps pour faire mieux. Le remède a agi avec tant de violence qu’il l’a purgé jusqu’au sang. Cependant, comme il a été assez heureux pour se tirer d’affaire, bien loin de s’en prendre au médecin, ni à la médecine, des accidents qui l’ont mis dans un si grand danger, il s’est imaginé qu’il doit sa guérison à ce remède : de là sont venues les grâces dont il m’a comblé. Ainsi, mon fils, je dois craindre que, comme il m’a fait du bien par caprice et sans que je m’en sois rendu digne, il ne me fasse aussi du mal quand je ne l’aurai pas mérité. » [17][44]
“ En notre religion chrétienne, je crois, comme nous devons croire, beaucoup de choses que nous ne voyons point, quæque sub sensum non cadunt ; mais c’est par le moyen de la foi qui nous y oblige, et quæ est rerum non apparentium ; mais en fait de médecine, je ne crois que ce que je vois, et ut ait ille Plautinus, [58] Manus nostræ sunt oculatæ, credunt quod vident. Fernel était un grand homme, mais les arguments pour telles qualités ne sont point des démonstrations mathématiques. Je l’estime le plus savant et le plus poli des modernes ; mais comme il n’a pas tout dit, aussi n’a-t-il pas dit vrai en tout ce qu’il a écrit. Si le bonhomme, qui est mort trop tôt, à notre grand regret, eût vécu davantage, il eût changé bien des choses à ses œuvres, principalement en ce point-là. Je n’avance pas cela de moi-même, je l’ai lu dans sa propre Vie, que j’ai manuscrite, elle m’apprend beaucoup de particularités de cet excellent homme, qui et in altis non leviter lapsus est. ” [19]
Saviez-vous ou auriez-vous jamais pu vous imaginer qu’un médecin fût devenu amoureux ? C’est une chose qui se voit assez communément, mais il me semble que l’amour ne convienne pas à des gens de notre profession. Notre gravité, soit naturelle ou affectée, notre air toujours mélancolique, nos manières féroces et peu polies, notre humeur sauvage et capricieuse, le temps que nous sommes obligés de donner à l’étude et aux visites sont un mauvais ragoût pour une jeune femme. Il leur faut de la galanterie, ce talent nous manque ; je ne m’étonne pas si le médecin, plutôt qu’un autre homme, est animal cornutum. [25] Je vous dirai même ici la plaisanterie d’un bouffon à qui les gens de notre métier ne plaisent pas non plus que nous plaisons à nos femmes : il disait, à propos des cornes de cerfs et de licornes que quelques empiriques font entrer dans la composition des remèdes, qu’il s’étonnait comment ils n’y faisaient pas entrer les leurs propres, et que la Faculté en ayant bonne provision, il y aurait de quoi guérir bien des malades, si tant est que les cornes qui font mal à la tête pussent faire du bien au corps. Je ne pus m’empêcher de rire de ce trait de bouffonnerie. M. …, quiqui uxorem suspicatur, [26] prit la chose plus sérieusement et lâcha à mot plaisant un « vous êtes un sot », aussi bien appliqué que s’il avait été l’unique sujet de la raillerie, mais on ne pensait point à lui ; cependant, on est forcé d’y penser à l’avenir. Au reste, ce n’est pas sa faute, il est honnête homme et bon mari ; plût à Dieu qu’on pût dire bonne sa femme, c’est un diable à la maison et une coquette au dehors. Mais je m’aperçois que je vous parle trop des affaires de mes voisins : encore, si elles étaient bonnes et agréables, je n’y aurais pas de regret.
Est deus in nobis, et sunt commercia cœli :
Sedibus æthereis spiritus ille venit.
De Art. li. 3. [29]
Je n’ai jamais pu croire qu’il y eût de véritables athées. [68] L’idée d’un Dieu est dans tous les hommes, Dieu même s’y trouve, on sent son existence, notre âme la démontre nécessairement et clairement. Ceux qui la combattent parlent au gré de leur cœur corrompu, mais ils ne suivent pas les lumières de leur esprit. Ils voudraient qu’il n’y eût point de Dieu qui punît leurs désordres : voilà où se terminent leurs sentiments, mais il connaissent malgré eux que ce Dieu subsiste. Est Deus in nobis : cette réflexion est de saison, nous entrons dans le carême ; [69] bien des gens m’ont voulu extorquer un certificat d’indisposition pour obtenir la permission de manger de la viande, mais je suis trop ami de la vérité pour la trahir dans une occasion où il y va même de l’intérêt de la religion.
Hic sita Sigæa est, satis hoc : qui cætera nescit
Rusticus est, artes nec colit ille bonas. [30][73]
Cette illustre Muse était originaire de la ville de Tolède. [74]
Languebam, sed tu comitatus protinus ad me
Venisti centum, Symmache, discipulis.
Centum me tetigere manus aquilone gelatæ :
Non habui febrem, Symmache, nunc habeo.
Ce Symmachus était médecin de l’empereur Claude, [92] et habile homme autant que médecin, peut-être. Je ne parle point ainsi, comme l’on peut juger, pour relever ma profession au-dessus des autres. Notre art ne consiste que dans les conjectures, et non dans une certitude physique. Je ne sais pourquoi Martial a pris la peine de railler ce médecin d’un empereur. Les poètes satiriques sont dangereux. Les plus habiles gens doivent les ménager, mais les poètes eux-mêmes doivent ménager et respecter les médecins. J’aurais désiré une chose, < c’est > d’être le médecin d’un vieux empereur, < car > il n’y a point de fortune à faire pour la médecine sous un jeune prince : il se passe de remèdes, il a raison ; dans un âge avancé, il les croit nécessaires, et je profiterais de son erreur. [40]
La prière est capable d’arracher des mains du Vengeur éternel les foudres qu’il est prêt à lancer sur les têtes coupables : grand motif de la confiance pour ces pauvres créatures que l’on appelle hommes.
Le pauvre Monsieur D…, notre ancien confrère, savait beaucoup, mais son esprit était l’image du chaos : quelle confusion ! nous l’appelions entre nous « la Bibliothèque renversée ». Comme l’on connaît le génie des hommes à l’extérieur et aux manières, rien n’était plus mal ordonné que son cabinet : tout y était hors de sa place, tout s’y trouvait confondu ; de manière que qui n’aurait pas su qu’il n’avait pas absolument perdu la raison, aurait conclu qu’il fallait l’interdire au seul aspect de son cabinet et de sa bibliothèque. ” [43][99]
À propos de Cicéron, je trouve dans mes remarques qu’il y avait en Italie, aux bains de Cicéron, [109] sur le frontispice, une inscription qui contenait tous les noms de toutes les maladies que ces bains guérissaient, et que quelques médecins, voyant que ces mêmes bains empêcheraient bien des malades d’avoir recours à eux, effacèrent l’inscription, disant que ce n’étaient que des caractères magiques : tradition populaire à laquelle on peut se dispenser d’ajouter foi sans craindre de passer pour un homme qui porte l’incrédulité trop loin. [48]
Non est certa meos quæ forma irritet amores ;
Centum sunt causæ, cur ego semper amem.
Qui aime tant de personnes n’en aime pas véritablement une seule, le grand amour ne se partage point, l’amitié s’étend davantage. On peut avoir plus d’un ami, on ne peut avoir qu’une maîtresse : celle-ci échappe bientôt, les amis demeurent. Je ne veux que des derniers, et il y a longtemps que j’ai renoncé à la première, pour la sûreté de ma conscience et pour la santé de mon corps. [49]
Il est constant que l’on peut connaître par les songes quelque disposition corporelle. Je suis là-dessus du sentiment de saint Thomas [117] quand il dit, 2.2. qu. 95 a. 6 : Medici dicunt esse intendendum somniis ad cognoscendum interiores dispositiones. En effet, les malades songent d’ordinaire autrement que ceux qui se portent bien, les mélancoliques, [118] autrement que les sanguins, [119] les bilieux, [120] autrement que les pituiteux ; [121] mais je m’en tiens là, sans tirer d’autres conjectures sur les choses libres et de pur hasard, jusqu’à ce que je croie qu’il y ait du surnaturel dans ce qu’on a songé. Alors je rappelle dans ma mémoire l’histoire de Joseph, [122] de Daniel, [123] etc., pour m’y soumettre comme à des moyens dont l’Éternel se sert pour faire connaître aux hommes ses volontés. [53][124]
Malo pater tibi sit Thersites, dummodo tu sis
Æacidæ similis, Vulcaniaque arma capessas, [132]
Quam te Thersitæ similem producat Achilles. [55]
Je n’ai pas encore bien deviné pourquoi les fils des grands hommes sont quelquefois si éloignés de le devenir eux-mêmes ; cependant, un sang illustre, pur et noble coule dans leurs veines, ils ont des exemples domestiques de courage et de vertu, à tous moments, de parfaits modèles devant les yeux. Le père est un héros, le fils n’a pas même les moindres qualités d’un homme du commun. Il faut assurément qu’il y ait une portion de mérite assignée à chaque famille ; ce qui est donné aux aïeux, c’est autant de rabattu sur la postérité. D’un autre côté, l’on voit non seulement des enfants qui égalent, mais qui surpassent le nom et la réputation de leurs pères.
Fœlix Eois lex funeris una maritis,
Quos Aurora suis rubra colorat equis !
Namque ubi mortifero iacta est fax ultima lecto,
Uxorum fusis stat pia turba comis,
Et <cer>tamen habe<n>t leti, quæ viva sequatur
Coniugium : pudor est non licuisse mori.
Ardent victrices et flammæ pectora præbent,
Imponuntque suis ora perusta viris.
Si Monsieur L.M. donne le Properce traduit en vers français, comme l’on m’a assuré qu’il en avait le dessein, il mettra peut-être en goût de traduire tous les poètes de la sorte. Cette entreprise serait bonne, mais elle serait bien difficile à soutenir pour l’honneur des traducteurs. [56][134]
Laudas, Gaure, nihil, reprehendis cuncta : videto
Ne placeas nulli, dum tibi nemo placet. [57][135]
Hic placuit cunctis, quod sibi non placuit. [59]
Il était d’Andely sur Seine [142] et d’une maison noble. Son livre qui porte pour titre Adversaria lui a acquis une réputation qui durera autant que les siècles. J’écris à un de mes amis pour le prier de m’envoyer six ouvrages de cet auteur, que je souhaite depuis si longtemps. Ces six livres sont : Poematum silva, Commentarius in librum Ciceronis de Fato, [143] Præfatio in Caii Plinii Historiam naturalem, Libellus de Methodo, De Calore a vino, Academicarum quæstionum lib. i, Convivium septem sapientium ; celui-ci est une traduction de Plutarque. [60][144]
Épitaphe du P. de C.Ci-gît qui fuyait le repos,
Qui fut nourri, dès la mamelle,
De tributs, tailles, [149] impôts,
De subsides et de gabelles ; [150]
Qui mêlait dans ses aliments
Du jus de dédommagement,
De l’essence du sol pour livre. [151]
Passant, songe à te mieux nourrir,
Car si la taille l’a fait vivre,
La taille aussi l’a fait mourir. ” [61]
Cum Janum [154] veterem clausum tenuere Quirites,
Florentis signum pacis ubique fuit :
Nulla salus bello, pax toto poscitur orbe ;
Nos Janum viridem clausimus, ecquid erit ? [62][155]
Je prie Dieu qu’il nous donne une bonne paix. ” [156] Nous autres médecins, qui ne courons ni ne battons la campagne, nous sommes fort embarrassés dans les temps de guerre. Il faut laisser le soin d’y aller aux jeunes disciples d’Esculape ; [157] et encore, la médecine n’a pas là grande fonction : il y a plus de bras et de jambes à couper que de fièvres à guérir, et autres accidents semblables à prévenir.
Je ne reproche point à certaines gens les vœux qu’ils s’avisent quelquefois de faire pour la guerre : il est certain que si c’est un temps de trouble, il sert souvent à remettre les choses dans leur premier et véritable état.
Sunt apud inferos tot millia formosarum.
À Dieu ne plaise que je juge mal de mon prochain, mais la prédestination [158] n’est pas pour beaucoup de femmes : elles damnent trop d’hommes pour ne pas courir elles-mêmes un semblable risque. Ce qui rend l’état des femmes plus dangereux est qu’elles ne se repentent point d’avoir été et de demeurer coquettes, au lieu que nous maudissons bientôt la faiblesse que nous avons eue pour elles. Le repentir peut expier nos crimes, et les crimes du sexe augmentent par leur cœur impénitent. [63]
« Enfin, il vous faudra quitter un jour votre patrie, votre maison et votre femme, que vous aimez tant. De tous les arbres que vous cultivez avec tant de soin, il ne vous restera que le funeste cyprès pour mettre sur votre tombeau. Un héritier, bien plus libéral que vous n’êtes, prodiguera ce vin de cécube que vous tenez enfermé sous cent clés, il en inondera vos chambres, il le fera nager sur ces riches parquets ; enfin, il se servira sans discrétion de ce vin qui devait être réservé pour les festins des pontifes, et non pas pour des usages si profanes. »Linquenda tellus, et domus, et placens
Uxor ; neque harum, quas colis arborum
Te, præter invisas cupressos
Ulla brevem dominum sequetur.
Absumat hæres Cæcuba [160] dignior
Servata centum clavibus : et mero
Tinget pavimentum superbo,
Pontificum potiore cœnis. [64]
Il y a bien des choses que nous gardons avec un soin avare et qui deviendront subitement la proie de l’avidité d’un héritier prodigue. Qui serait bien sage jouirait modestement de sa fortune et de ses possessions, et après lui, serait avare qui voudrait.
On a estimé beaucoup ses Regrets et ses sonnets sur les antiquités de Rome. Il fit aussi des sonnets pour la reine de Navarre, [163] et elle en fit pour lui. Les uns et les autres passaient dans ce temps-là pour d’excellents ouvrages. Il fit lui-même son épitaphe, la voici :
Clara progenie, et domo vetusta
(Quod nomen tibi sat meum indicari)
Notus contegor, hac, viator, urna.
Sum Bellaius, et poëta, jam me
Sat nosti ; puta, non bonus poeta,
Hoc versus tibi sat mei indicarint.
Hoc solum tibi, sed queam viator,
De me dicere : me pium fuisse,
Nec læsisse pios, pius si ipse es,
Manes lædere tu meos caveto. [66]
Il était désigné pour être archevêque de Bordeaux, quand il mourut.
En vérité, je n’approuve pas les gens critiques, qui se plaisent à flétrir la mémoire des morts et qui répandent sur les tombeaux toute l’amertume et le fiel de la satire. Quand un homme n’est plus en état de faire du bien, il ne faut point en dire du mal ; quand il ne peut plus réparer le mal qui lui est échappé, il faut tâcher de rappeler avantageusement le bien qu’il a fait. C’est être lâche de dénigrer les défunts, de même que c’est être trop complaisant que de flatter aveuglément et sans interruption les vivants.
Sur le mot Fas : Fides, Amor, Spes.Spe cælos et amore fideque ascendere fas est :
Absque tribus cælos his penetrare ne‑fas
Spes lævæ, dextraque fides assistit amori
Virtus in medio maxima constat amor. [67]
Nos livres ne sont pas si défectueux, [165] mais aussi nous n’avons point d’impressions fort correctes. La preuve en est au commencement ou à la fin des ouvrages : l’on y voit un errata, qui avertit de quelques fautes que l’auteur a corrigées, mais non pas de toutes celles qu’il aurait fallu retrancher. Si jamais j’ai la passion de me faire imprimer, comme je n’y succomberai que par gloire, j’envisagerai celle d’être un auteur correct.
A.N., qui a perdu toutes ses pratiques et qui fait mourir le peu de malades qui lui restait, est désormais occupé à revoir ses livres. Il se promet de faire un sommaire de sa bibliothèque ; après quoi il doit la vendre, et il se flatte qu’il pourra tirer de l’argent de l’ouvrage qu’il médite. Je doute qu’il y ait des hommes assez dupes pour lui en vouloir donner. Serait, je crois, bien à plaindre qui retomberait dans les mains d’un tel personnage. [69]
Unde superbit homo, cujus conceptio culpa,
Nasci pœna, labor, vita, necesse mori ? [70][166][167]
On est heureux de faire ainsi de certaines réflexions ; si elles étaient trop fréquentes, elles ne laisseraient pas d’inquiéter. Quoiqu’il soit < le propre > de l’homme de raisonner, sa propre raison l’afflige quelquefois. La mienne, Dieu merci, ne m’est pas d’un secours inutile ; quand elle veut m’importuner, je lui donne d’autres objets, et je fais succéder une lecture divertissante à une méditation sérieuse.
Tros Rutulusve fiat, nullo discrimine habetur. [171]
Joint que ce petit point d’honneur est si léger que ce n’est point la peine d’en parler. ” [71] Ce n’est pas l’université qui fait l’habile homme parmi nous, mais la connaissance des simples, des tempéraments et des maladies : tout cela s’apprend aussi bien ailleurs qu’à Paris. Ici, à la vérité, l’expérience se fortifie davantage et on a un plus fréquent commerce avec les savants. Quand le deviendrai-je ? Il me paraît que ma réputation me fait un peu d’honneur, mais je ne suis pas assez vain pour en être flatté, elle me sert seulement à désirer de mériter.
Papa Pius quintus moritur, res mira ! tot inter
Re sanctos, tantum nomine quinque pios. ” [72]
Jamais on n’a mieux fait que d’appeler Saints Pères ceux qui sont préposés pour être l’exemple et le modèle des saints. C’est donc les avertir de ce qu’ils sont, et de ce qu’ils doivent rendre les autres.
Commetrunt multi eadem diverso crimina fato
Ille crucem pretium sceleris tulit, hic diadema.
Juven. Sat. 13. [175]
Vous voyez que la justice ne se rendait pas mieux autrefois qu’aujourd’hui : de tout temps, il y a eu des magistrats corruptibles et corrompus, malheur à ceux qui ont affaire à eux ! J’ai été plusieurs fois menacé de procès, mais j’ai si bien pris mes mesures que j’ai rompu en visière à Madame Chicane. Il nous convient mieux d’aller voir un malade qu’un procureur : celui-ci demande de l’argent avec hardiesse, nous en recevons modestement de l’autre, sans faire semblant d’en vouloir. C’est pourquoi, en dérision de notre feint désintéressement, on dit que nous tendons la main par derrière. Je vous jure qu’il y a longtemps que je ne suis plus de ces hypocrites. Quand j’étais jeune, je rougissais de ce qu’on m’offrait de l’argent ; aujourd’hui, je rougis quand on ne m’en présente pas. [73][176]
Ipse enim, inquit, aversissimus sum ab istis prodigiis : si quando fatuo delectari volo, non est mihi longe quærendus, video me, et rideo. ” [76]
Sénèque n’était pas de ces sages et de ces doctes suffisants qui ne trouvent que les autres ridicules : il trouvait dans lui-même les faiblesses de l’homme, et il s’accoutumait à se servir de spectacle à lui-même. C’est là le vrai moyen de se corriger et de parvenir à la perfection. Je ne suis pas toujours si austère que Sénèque, les folies d’autrui me réjouissent fort souvent, et je n’ai pas assez mauvaise opinion de moi-même pour me croire capable de toutes celles que je vois.
Diogène Laërce (v. note [3], lettre 147), Vies des philosophes illustres (livre ix, § 42), sur Démocrite (v. note [9], lettre 455) :
« Athénodore, dans le livre viii de ses Promenades, {a} dit qu’Hippocrate étant venu le trouver, Démocrite demanda qu’on apportât du lait. Ayant observé ce lait, il dit qu’il était celui d’une chèvre primipare et noire ; du coup, Hippocrate s’émerveilla de sa perspicacité. On raconte aussi l’histoire d’une jeune servante qui accompagnait Hippocrate : le premier jour, il la salua ainsi, “ Bonjour, Mademoiselle ” ; le jour suivant, “ Bonjour Madame ” ; la fille avait été déflorée pendant la nuit. » {b}
- Les Péripatoï d’Athénodore le Cananite, ou de Tarse, philosophe stoïcien grec du ier s. av. J.‑C., sont aujourd’hui perdus.
- Le récit ne dit pas si c’était le fruit des assiduités d’Hippocrate.
Cette anecdote se lit dans le Dictionnaire historique et critique de Pierre Bayle (tome premier, seconde partie, Rotterdam, 1697, note C sur Démocrite, pages 946‑947). Le commentaire qui la suit est dans la veine des rédacteurs de L’Esprit de Guy Patin. Ils ont sans doute préféré éluder celui de Bayle, qui est autrement plus spirituel et distrayant :
« Je ne serais pas aussi innocent de mensonge que je suis, si je me hasardais de rapporter cette historiette avec quelques additions que je ne trouverais pas dans les vieilles sources ; et c’est pourquoi j’accuse ici de mensonge et de falsification ceux qui ont dit que Démocrite connut aux yeux de la fille qui accompagnait Hippocrate qu’elle avait passé la nuit avec un homme. Ce qu’ils ajoutent, que cette sagacité est odieuse à la moitié du genre humain, pourrait passer, s’ils ne le tiraient d’une fausse supposition ; car il est vrai que ce serait une chose très importune que d’avoir à redouter des gens qui connaîtraient aux yeux d’une fille si elle a perdu sa virginité. Ceux qui aiment les fraudes pieuses devraient travailler à faire accroire qu’il y a quantité de gens qui le connaissent ; {a} mais il serait à craindre que cette erreur ne fût plus fortement et plus efficacement combattue qu’aucune superstition. Une infinité de gens seraient esprits forts {b} et dogmatiseraient en esprits forts contre cette fraude pieuse. Il y en a qui disent que ce fut à la voix de cette fille que Démocrite reconnut la défloraison. Il remarqua, disent-ils, qu’elle n’avait pas le ton de voix du jour précédent ; et sur cela, ils nous content qu’Albert le Grand, {c} sans sortir de son cabinet, reconnut la faute d’une servante : on l’avait envoyée chercher du vin dans un cabaret ; elle revint en chantant ; Albert, appliqué à son étude, ne laissa pas de remarquer que la voix de cette fille était devenue moins claire qu’elle n’était, et il conclut qu’on avait dépucelé cette servante durant ce petit voyage. » {d}
- Pour dire : qui ont ce pouvoir de deviner dans le regard d’une femme si elle est ou non vierge.
- Bayle en était un et sous sa plume, ce mot n’avait pas le sens péjoratif que lui a donné le dictionnaire jésuite de Trévoux : « esprit fort se prend quelquefois pour un homme guéri des opinions populaires, ou fondées sur la préoccupation ; mais on le dit plus souvent en mauvaise part d’un libertin, qui traite de chimères les articles de foi. Les esprits forts savent-ils qu’on les appelle ainsi par ironie ? Quelle plus grande faiblesse que d’être incertain, quel est le principe de son être, de sa vie, de ses sens, de ses connaissances, et quelle en doit être la fin ? (La Bruyère). On les appelle aussi quelquefois non pas esprits forts, afin de ne point faire d’équivoque, mais prétendus esprits forts. Tous ces prétendus esprits forts, qui, quand ils parlent des choses divines, disent plutôt ce qu’ils désirent que ce qu’ils connaissent, ne veulent rien reconnaître de surhumain dans les oracles, de peur de reconnaître quelque chose au-dessus de l’homme. »
- V. note [8], lettre 133.
- Et voilà les conteurs de fariboles habillés pour l’hiver.
« Cette loi n’est pas avinée, mais fort violente. »
Ce curieux latin, qui joue sur les adjectifs vinolentus [aviné] et violentus [violent], n’a pas de source que j’aie su identifier.
Le propos qui précède se lit dans l’opuscule de François i de La Mothe Le Vayer intitulé De la Santé et de la Maladie {a} (tome second, pages 103‑104) :
« Quant à cette prétendue royauté qui s’est trouvée conjointe à la médecine, nous voyons à la vérité qu’encore à présent il n’y a si petit galéniste qui ne commande au plus grand monarque lorsqu’il est alité. Les médecins étaient si absolus, et avaient un pouvoir si despotique dans Locres des Épizéphyriens que, par une des lois de leur législateur, Zaleucus, {b} le malade qui avait bu du vin pur sans l’ordonnance de son médecin était coupable de mort, encore qu’il eût recouvré la santé {c}. Et l’histoire du dernier siècle nous apprend que Fracastor obligea les pères assemblés à Trente, par la crainte d’une contagion future dont il les menaçait, de transférer le concile à Bologne. » {d}
- Œuvres, Paris, 1662, v. note [26], lettre 557.
- Zaleucus, ou Zaleucos, est le législateur grec, de réalité historique incertaine, qui aurait établi les lois des habitants de Locres Épizéphyrienne (aujourd’hui Locri en Calabre) au viie s. av. J.‑C.
- Dans la marge, Le Vayer cite sa source, Æl. L. 2. var. hist. c. 37, c’est-à-dire Élien (v. note [2], lettre 618), Histoires diverses, livre ii, chapitre 37 :
« Entre plusieurs lois sages et utiles que Zaleucus donna aux Locriens, celle-ci ne doit pas tenir le dernier rang : si quelque malade, chez les Épizéphyriens, buvait du vin pur sans que les médecins l’eussent ordonné, et s’il recouvrait la santé, il encourait la peine de mort, pour avoir pris une boisson qui ne lui avait pas été prescrite. »- Écrivant cette note le 13 juin 2020, pendant la timide levée du confinement général lié à la pandémie du coronavirus 19, je n’ai pas résisté au plaisir de transcrire ce bref supplément, que Le Vayer a emprunté à L’Histoire universelle de Jacques-Auguste i de Thou (livre i, règne de Henri ii, année 1547, Thou fr, volume 1, page 284).
V. notes [2], lettre 6, pour Fracastor, le premier à avoir conçu la notion de contagion au début du xvie s., et [4], lettre 430, pour le concile de Trente (1545-1563).
Il faut comprendre « ceux que nous appelons » comme voulant dire « ceux [les médecins] dont nous disons que » :
« de nombreux [malades] lui font confiance car il en guérit beaucoup ».
Scipione Mercurius a attribué cet adage à Galien dans ses De gli Errori popolari d’Italia, libri sette [Sept livres sur les Erreurs populaires d’Italie], {a} en déplorant qu’il fût écrit en italien. La citation figure en haut de la page 108 du 2e livre : {b}
Ille Medicus plures sanat, cui plurimi confidunt. E pero Galeno nel predetto luogo dice.[Le médecin qui guérit le plus grand nombre de malades est celui en qui le plus grand nombre a confiance, dit Galien sur le passage susdit]. {d}
- Venise, 1603, pour la première de plusieurs éditions : ouvrage et auteur dont Guy Patin a parlé dans sa lettre à Charles Spon du 24 mai 1658 (v. sa note [17]).
- Chapitre iii, Dell’habito del Medico [L’habitude du médecin] : comme la référence à Galien n’a été ajoutée que dans les éditions plus tardives, j’ai recouru à la première partie (sept premiers livres) de celle de Vérone, Francesco Bolzetta, 1645, in‑8o de 592 pages.
- Il s’agit du commentaire ii de Galien, portant sur le chapitre i (2e phrase) du Pronostic d’Hippocrate (Littré Hip, volume 2, page 111) :
« [Le médecin me paraît être celui qui sait connaître d’avance.] Pénétrant et exposant, au préalable, près des malades, le présent, le passé et l’avenir de leurs maladies, expliquant ce qu’ils omettent, il gagnera leur confiance ; et convaincus de la supériorité de ses lumières, ils n’hésiteront pas à se remettre à ses soins. »Dans son commentaire, Galien énonce ce précepte (Kühn, volume 18B, page 3) :
Ο τους καμνοντας ευπειθεστερους εχων μαλλον ιαται τας νοσους [Les malades se confient le plus à celui qui guérit le plus aisément les maladies].Mes recherches sur cette citation m’ont ramené aux procédures engagées entre Théophraste Renaudot et la Faculté de médecine de Paris en 1643-1644. {i} Un factum non daté de Renaudot Contre les doyen et docteurs de l’École de médecine de Paris… {ii} contient ce passage (page 5) :
« Mais si cette persécution faite aux docteurs en médecine de Montpellier en la personne du demandeur {ii} paraît bien injuste et désavantageuse au public et à tous les particuliers, auxquels on ôte par ce moyen leur ancienne liberté de commettre le soin de leur santé à ceux auxquels ils se confient avec d’autant plus de succès que plures ille sanat cui plures confidunt, cette vexation se trouvera encore bien plus étrange quand on considérera qu’elle n’est faite sinon en haine de la charité que ledit demandeur exerce chez lui. » {iv}
- V. notes [52] et [56], lettre 101.
- Sans lieu ni nom ni date in‑fo de 7 pages, signé Bataille, avocat de Renaudot (v. note [65], de la lettre susdite).
- Renaudot, contre qui la Faculté avait obtenu le 9 décembre un arrêt du Parlement lui interdisant d’exercer la médecine à Paris.
- Les consultations charitables de Renaudot.
Étant donné le début de cet article (v. supra note [2]), j’hésite à tenir son commentaire hippocrato-galénique (dont les rédacteurs de L’Esprit de Guy Patin taisaient ou plus probablement ignoraient la source) pour une pure émanation des conversations de Patin. Dans la dernière phrase, « prévenant » est à prendre dans le sens de « devançant ».
Ovide, L’Art d’aimer, livre iii, vers 433‑435 :
« Mais évitez ces hommes qui étalent leurs atours et leur beauté, et qui réarrangent leur coiffure : ce qu’ils vous disent, ils l’ont dit à mille jeunes filles. »
Les confidences que cet article contient sur la jeunesse amoureuse de Guy Patin sont inédites sous sa plume, hormis une allusion furtive à la folle passion qu’une jeune fille aurait nourrie à son endroit, dont il fit le sujet dans la thèse sur la métromanie qu’il rédigea et présida en 1627 (v. note [10], lettre 3).
Je peine fort à m’imaginer Patin en « jeune étourdi » fréquentant les ruelles, c’est-à-dire « des alcôves et des lieux parés où les dames reçoivent leurs visites, soit dans le lit, soit sur des sièges ; les galants se piquent d’être gens de ruelles, d’aller faire de belles visites ; les poètes vont lire leurs ouvrages dans les ruelles pour briguer l’approbation des dames » (Furetière) ; soit ce qu’on a bien plus tard appelé « salons » (v. notule {a}, note [4], lettre 23). Je préfère penser qu’il s’agit d’une facétie des rédacteurs de L’Esprit de Guy Patin : son esprit fleure plus celui du second que du premier xviie s.
L’infortune de Lucrèce (Lucretia), qui se donna la mort après avoir été violée par Sextus Tarquinus, fils de Tarquin le Superbe, roi de Rome, à la fin du vie s. av. J.‑C. (v. note [11] du Naudæana 2), est une célèbre affaire que, parmi bien d’autres, Tite-Live a racontée, et que saint Augustin a commentée (v. infra note [6]). L’infamie de ce double crime est réputée avoir fait basculer la royauté de Rome dans la république.
René Laurens de La Barre (mort en 1628), président de l’élection de Mortain, en Normandie, a publié quelques ouvrages d’érudition sur les monnaies et sur les devoirs des officiers royaux élus (principalement chargés de percevoir la taille, v. note [50], lettre 152).
Les vers que citait L’Esprit de Guy Patin ne sont pas de lui, mais de Théodore de Bèze : {a} c’est d’une épigramme intitulée Lucretia, qui figure à la page 116 vo de ses Poemata varia [Poèmes divers]. {b} Outre les deux variantes que j’ai insérées dans ma transcription du Faux Patiniana (marquées par des sic), les deux membres du dernier vers y sont inversés : Vel furiosa ruis, vel scelerata cadis pour Vel scelerata cadi, vels furiosa ruis. En voici une traduction plus prosaïque :
« Si, Lucrèce, tu pris plaisir à l’adultère, tu as tort d’en réclamer le meurtre {c} pour juste récompense. S’il s’agit plutôt, au contraire, d’une violence portée contre ta chaste pudeur, quelle est alors cette folie qui te fait vouloir mourir pour le crime d’un agresseur ? {d} Tu recherches donc vainement la louange, car soit tu t’égares, comme insensée, soit tu succombes, comme criminelle. » {e}
- Mort en 1605, v. note [28], lettre 176.
- Genève, 1614, v. note [34] du Borboniana 7 manuscrit.
- Sic pour « la mort », le meurtre de toi-même, le « suicide ».
- Sic pour « d’un autre ».
- Propositions inversées dans Bèze qui, en fervent calviniste, ne voyait aucun moyen de justifier chrétiennement le suicide de Lucrèce.
Exhumer un auteur aussi peu renommé que Laurens pour commettre une telle erreur d’attribution sur un poème de Bèze surprendrait venant de Guy Patin. Cet article de son imaginatif Esprit vient de deux sources qui ont curieusement fait cette même faute :
Pour « elle ne sera pas imitée. »
V. notule {m}, note [52] du Borboniana 7 manuscrit, pour le jugement de saint Augustin sur Lucretia, dans La Cité de Dieu :
« Pourquoi la louer si elle fut adultère ? Pourquoi s’être tuée si elle fut chaste ? »
Cette conclusion désenchantée sur la moralité féminine est précédée du renvoi à deux auteurs chrétiens de l’Antiquité qu’on lit à l’identique dans Moréri (v. supra note [5]) :
« Tertullien et saint Jérôme se servent souvent de l’exemple de Lucrèce pour persuader la pureté aux femmes chrétiennes. »
Erunt nobis in testimonium et feminæ quædam sæculares ob univiratus obstinationem famam consecutæ ; aliqua Dido, quæ profuga in alieno solo, ubi nuptias regis ultro optasse debuerat, ne tamen secundas experiretur, maluit e contrario uri quam nubere ; vel illa Lucretia, quæ etsi semel per vim et invita alium virum passa est, sanguine suo maculatam carnem abluit, ne viveret iam non sibi univira. Plura exempla curiosius de nostris invenias, et quidem alteris potiora, quanto maius est vivere in castitate quam pro ea mori. Facilius animam ponas quia bonum amiseris, quam vivendo serves ob quod emori malis. Quanti igitur et quantæ in ecclesiasticis ordinibus de continentia censentur, qui Deo nubere maluerunt, qui carnis suæ honorem restituere, quique se iam illius ævi filios dicaverunt, occidentes in se concupiscentiam libidinis, et totum illud quod intra paradisum non potuit admitti ! Vnde præsumendum est hos qui intra paradisum recipi volent tandem debere cessare ab ea re a qua paradisus intactus est.« Au dernier jour, les femmes idolâtres qui ont acquis la gloire pour avoir persisté dans le veuvage s’élèveront contre nous : une Didon, reine fugitive sur un sol étranger, qui aurait dû aspirer à épouser un monarque, mais qui, pour ne pas connaître deux hymens, aima mieux se brûler que de se marier ; {b} une Lucrèce, qui, ayant subi une seule fois, malgré elle et par violence, les embrassements d’un étranger, lava dans son sang les souillures de la chair, ne voulant plus vivre du moment qu’elle n’appartenait plus à un seul homme. Je trouverais chez les nôtres un plus grand nombre d’exemples, et même d’autant plus louables qu’il est plus facile de vivre dans la chasteté que de mourir pour elle, c’est-à-dire de vivre avec ce bien plutôt que de s’en séparer par la mort. Que de saints personnages, que de vierges dans les ordres ecclésiastiques qui sont voués à la continence, qui ont préféré épouser Dieu seul, qui ont réhabilité l’honneur de leur chair, et qui se sont montrés d’avance les fils du siècle à venir, en retranchant au fond d’eux-mêmes la convoitise de la passion et tout ce qui ne peut entrer dans le paradis ! Il faut conclure de là que tous ceux qui veulent entrer dans le paradis doivent enfin s’abstenir de tout ce qui n’y entre pas. » {c}
- V. note [9], lettre 119.
- V. note [23], lettre 551, pour le suicide de Didon, chanté par Virgile.
- Traduction d’Antoine-Eugène de Genoude, 1852.
Ad Romanas feminas transeam, et primam ponam Lucretiam, quæ violatæ pudicitæ nolens supervivere, maculam corporis cruore delevit. […] Sentio in catalogo feminarum multo me plura dixisse, quam exemplorum patitur consuetudo, et a lectore erudito juste posse reprehendi. Sed quid faciam, quum mihi mulieres nostri temporis Apostoli ingerant auctoritatem, et necdum elato funere prioris viri, memoriter digamiæ præcepta decantent ? Ut quæ Christianæ pudicitiæ despiciunt fidem, discant saltem ab Ethnicis castitatem.« Je passe aux femmes romaines, et je placerai en première ligne Lucretia qui, ne voulant pas survivre à sa pudeur violée, effaça dans le sang la tache de son corps. (…) Je m’aperçois que, dans le catalogue des femmes, j’ai dit beaucoup plus de choses que n’en souffre la coutume des exemples, et que je puis être blâmé à bon droit par un lecteur instruit. Mais que faire lorsque les femmes de notre temps m’apportent l’autorité de l’Apôtre, {b} et que les funérailles de leur premier mari n’étant point encore achevées, elles me chantent par cœur les préceptes sur la bigamie ? Que celles qui dédaignent la foi de la pudicité chrétienne apprennent du moins des gentils {c} la chasteté ! » {d}
- V. note [16], lettre 81.
- Ingerant aurait pu mieux se traduire par « m’opposent à », car saint Paul écrit (Première Épître aux Corinthiens, 7:9) :
« Je dis toutefois aux célibataires et aux veuves qu’il leur est bon de demeurer comme moi ; mais s’ils ne peuvent se contenir, qu’ils se marient : mieux vaut se marier que de brûler. »- Les païens.
- Traduction de François-Zénon Collombet, 1842 (sauf pour le titre).
L’anecdote est tirée des Déipnosophistes (livre ix, chapitre ix) : {a}
« Polémon, dans le 5e livre de ses Commentaires, {b} qu’il adresse à Antigonus, dit que le porphyrion ne s’apprivoise jamais quand on le nourrit à sa maison ; {c} mais qu’au reste, il y observe avec tant de sévérité et de vigilance l’honnêteté des femmes de ceux chez qui il est élevé que, si quelqu’une vient à la violer et qu’il s’en soit aperçu, il le fait connaître à son maître autant qu’il peut, et finit sa vie avec le licol <. Cet oiseau, ajoute Polémon, ne prend aucune nourriture, qu’après s’être promené, cherchant un lieu qui lui convienne > ; {d} et après sa promenade, quand il s’est roulé dans la poussière et qu’il s’est lavé, alors il recommence à manger. Aristote écrit qu’il a les pieds fendus, que son plumage tire sur le bleu, que les jambes sont longues, que son bec est étroitement attaché à sa tête, de couleur Phinceonne, ou de tige de palme, de la grandeur d’un coq ; que ce qu’il prend entre les doigts de ses pieds, n’est que de petits morceaux de quelque chose pour manger, afin de montrer sa frugalité ; {e} qu’il boit avidement ce qu’il boit, comme quelque chose qu’il mangerait ; {f} qu’il a cinq doigts à chacun de ses pieds, et que celui du milieu est plus long que les autres. Alexandre Myndie, dans son 2e liv. de l’Histoire des oiseaux, {g} raconte que c’est un oiseau de Libye, lequel est consacré aux dieux du pays. Callimaque, dans son livre des oiseaux, {h} tient que le porphyris, qui est chez nous la passe solitaire bleue, {i} est différent du porphyrion, et de telle sorte qu’il fait mention de l’un et de l’autre séparément, et dit que le porphyrion, quand il mange, ne souffre point d’être vu par qui que ce soit, et qu’il est toujours en colère contre ceux qui s’approchent de sa pâture. »
- Pages 589‑590 des :
Quinze livres des Déipnosophistes d’Athénée, de la ville de Naucrate d’Égypte, {i} écrivain d’une érudition consommée, et presque le plus savant des Grecs. Ouvrage délicieux, agréablement diversifié et rempli de narrations savantes sur toutes sortes de matières et de sujets. Traduit pour la première fois en français, {ii} sans l’avoir jamais été en quelque langue vulgaire que ce soit, sur le grec original, après les versions latines de Natalis Comes {iii} de Padoue et de Jacques Daléchamps {iv} de Caen, médecin fameux. {v}
- V. note [17], lettre de Charles Spon, datée du 6 avril 1657.
- Par Michel de Marolles, abbé de Villeloin, v. note [72], lettre 183.
- Natale Conti (vers 1520-1582) littérateur italien, premier traducteur d’Athénée en latin.
- V. note [17], lettre de Charles Spon, datée du 6 avril 1657, pour l’édition grecque et latine d’Athénée par Jacques Daléchamps (Lyon, 1657).
- Paris, Jacques Langlois, 1680, in‑4o de 1 090 pages.
- Polémon d’Ilion, dit le Périégète, est un philosophe et géographe grec du iiie s. av. J.‑C., dont les ouvrages ne subsistent que par les citations qu’en ont données d’autres auteurs (comme ici, Athénée).
- De nombreux auteurs, antiques et modernes (comme les rédacteurs de L’Esprit de Guy Patin) ont interprété et exploité ce mythe aviaire du porphyrion, tel que l’a relaté Athénée. Il dérive son nom de la couleur pourpre de son plumage, identique à celle du porphyre.
- Pour rendre le propos compréhensible, j’ai emprunté ce passage entre chevrons à d’autres traductions. Celle de 1680, sans changer de phrase, laisse en effet entendre qu’après s’être pendu, le porphyrion reste « quelque temps sans vouloir prendre de pâture, qu’il n’ait trouvé quelque lieu commode pour se promener », ce qui est absurde.
Il me semble qu’en écrivant « il se pend ou se laisse mourir de faim », L’Esprit de Guy Patin trahit sa source, dont il a mal interprété la lacune.
- Explication que les autres traductions, plus littérales, remplacent par « parce qu’il a l’œsophage étroit ».
- Autres traductions : « quant à l’eau, il la saisit comme en mordant, et l’avale ».
- Alexandre de Mynde n’est apparemment connu que par les citations qu’en a données Athénée.
- Ouvrage perdu de Callimaque de Cyrène, poète grec d’Alexandrie au iiie s. av. J.‑C.
- Cette incise n’est pas dans le texte d’Athénée. La « passe solitaire bleue » correspond à l’oiseau réel que Trévoux a décrit sous le nom de porphyrion :
« Le porphyrion a le champ de son pennage de couleur bleue ; la moitié de sa queue jusqu’à son extrémité est d’un cendré blanchâtre ; ses yeux sont noirs ; son bec et ses jambes sont de couleur de pourpre très éclatante ; il a quatre doigts disposés comme ceux des pies. Cet oiseau est rare ; on en voit aux environs de Narbonne, ville d’Espagne [?], où on lui donne le nom de calamon. Pline parlant de cet oiseau, dit qu’il vient des îles Baléares, qu’il est d’une très grande beauté, et qu’il est de la grandeur d’un coq. L’on observe qu’il boit l’eau en mordant, et qu’il trempe sa mangeaille dans l’eau, la portant à son bec avec le pied pour la manger. Il était défendu aux juifs d’en manger par leur Loi. Élien rapporte que les Grecs et les Romains s’abstenaient aussi d’en manger dans leurs festins. »Ce portrait correspond à l’oiseau qui porte plus communément le nom de talève sultane (Porphyrio porphyrio), qui n’a de pourpre que le bec, la crête et les pattes.
Guy Patin aurait pu lire cette fable dans une édition latine des Déipnosophistes, mais serait-il tombé dans le piège de la lacune (notule {d} supra) ? Les rédacteurs de L’Esprit de Guy Patin l’ont beaucoup plus probablement prélevée dans leur première traduction française de 1680.
Op. cit. vers 25‑27 :
Brevis esse laboro,
obscurus fio ; sectantem levia nervi
deficiunt animique.[À m’efforcer d’être bref, je deviens obscur ; le nerf et le souffle font défaut à qui poursuit l’élégance].
La paternité de cet article est impossible à établir. La seule chose certaine, je pense, est que les rédacteurs de L’Esprit de Guy Patin n’ont guère passé trop de temps à polir et limer leur ouvrage.
Transcription corrompue et devenue incompréhensible d’une épitaphe qui se lit dans les :
Ancient Funeral Monuments within the united Monarchy of Great Britain, Ireland, and the islands adjacent, with the dissolved Monasteries therein contained : their Founders, and what eminent Persons have been in the same interred. As also the Death and burial of certain of the Blood Royal, the Nobility and Gentry of these Kingdoms entombed in foreign Nations. A work reviving the dead memory of the Royal progeny, the Nobility, Gentry and Communalty, of these his Majesties Dominions. Intermixed and illustrated with variety of Historical observations, annotations, anf brief notes, extracted out of approved Authors, infallible Records, Ledger Books, Charters, Rolls, old Manuscripts, and the Collections of judicious Antiquaries. Whereupon is prefixed a Discourse of Funeral Monuments. Of the Foundation and fall of Religious Houses. Of Religious Orders. Of the Ecclesiastical estate of England. And of other occurrences touched upon by the way, in the whole passage of these intended labors. Composed by the Study and Travels of John Weever. Spe labor levis.[Anciens Monuments funéraires du Royaume-Uni de Grande-Bretagne, d’Irlande et des îles adjacentes, avec les monastères désaffectés qui s’y trouvent, leurs fondateurs et quels éminents personnages y sont enterrés. Ainsi que la mort et la sépulture de certains seigneurs du sang royal, de la grande et petite noblesse de ces royaumes, qui ont été inhumés dans les nations étrangères. Un travail qui fait revivre la défunte mémoire de la famille royale, des haute et petite noblesse, et de la communauté de ces domaines de Leurs Majestés. Entremêlé et illustré d’une variété d’observations historiques, de courtes notes et de commentaires, tirés d’auteurs éprouvés, d’archives infaillibles, de registres, de chartes, de rouleaux, de vieux manuscrits et des collections d’antiquaires avisés. On y a ajouté en préambule un discours sur les Monuments funéraires, sur la Fondation et la chute des maisons religieuses, sur les ordres religieux, sur l’Église d’Angleterre, et sur d’autres événements rencontrés ici et là dans tout le cours de ces recherches. Composé par le zèle et les voyages de John Weever. {a} L’espoir allège le labeur] {b}
- John Weever (Preston, Lancashire 1576-Londres 1632) poète et antiquaire, dont le macabre portrait, en sa 55e année d’âge, figure en tête de l’ouvrage, illustré de ce quatrain :
Lancashire gave him breath,
And Cambridge education.
His studies are of Death,
of Heaven his meditation.[Le Lancashire lui a donné la vie, et Cambridge l’éducation. Il a étudié la mort, et médité sur le Ciel].
- Londres, Thomas Harper, 1631, in‑fo illustré de 871 pages, dédié au roi Charles ier, avec splendide et pieux frontispice.
Ladite épitaphe est aux pages 529‑530, pour la tombe de William Jacob, mort en 1478 et inhumé en la chapelle de Hownslow (Hounslow, dans la banlieue ouest de Londres), dont il avait été un des bienfaiteurs. La voici débarrassée des coquilles dont L’Esprit de Guy Patin l’a défigurée :
Vermibus hic donor et sic ostendere conor
Qualiter hic ponor, ponitur omnis honor.
Quisquis ades, tu morte cades, sta, respice, plora
Sum quod eris, quod es ipse fui, pro me precor ora.[Me voici livré aux vers et j’entends ainsi montrer dans quel état je repose ici, maintenant que toute gloire est retombée. Toi qui viens me voir, tu succomberas, arrête-toi, désole-toi ! Je suis ce que tu seras, j’ai moi-même été ce que tu es, prie pour moi, je t’en supplie].
Si Guy Patin a pu avoir accès au livre de Weever, il ne lisait pas l’anglais et n’a jamais mentionné cet auteur dans ses écrits. Toutefois, ses lettres contiennent plusieurs allusions à deux recueils d’épitaphes :
Vermibus hic donor, et sic descendere conor.
Qualiter hic ponor, ponitur omnis honor.
Tout cela me laisse perplexe sur l’origine de cet article, sans me convaincre qu’on puisse sûrement l’attribuer à Patin plutôt qu’à un nouveau larcin inavoué des interprètes de son Esprit.
L’anecdote vient du Dictionnaire de Moréri : v. la note [87] du Faux Patiniana II‑7, qui l’a reprise. Le Furetieriana, ou les bons mots et les remarques, histoires de morale, de critique, de plaisanterie et d’érudition de M. Furetière, abbé de Chalivoy, {a} de l’Académie française, {b} l’a aussi exploitée, sans résister à la tentation de la rendre plus gaillarde (pages 129) :
« Calphurnie fut cause qu’on a interdit le barreau aux femmes, parce qu’ayant plaidé une cause qu’elle perdit, elle en fut si irritée contre les juges qu’elle se découvrit impudemment le derrière, et le leur montra par mépris. On ordonna en même temps que jamais femme ne plaiderait. » {b}
- Antoine Furetière (Paris 1619-ibid. 1688) auteur de l’admirable Dictionnaire universel, qui lui valut d’être exclu de l’Académie française en 1685, mais a fort opulemment alimenté les notes de notre édition pour du sens à son vocabulaire, et de quelques ouvrages en prose et en vers.
Chalivoy-Milon est une petite localité de Touraine (Cher) qui fut jadis dotée d’un prieuré, dont Furetière fut abbé.
- Bruxelles, François Foppens, 1696, in‑12 de 267 pages.
- La quérulente et hardie Calpurnia, ou Calphurnie, ne fut sans doute aucune des trois Romaines de ce nom qui ont laissé une trace dans les annales antiques : une épouse de Jules César, celle de Pline le Jeune et, dans Tacite, une belle femme aimée de l’empereur Claude, dont la jalouse Agrippine obtint l’exil.
Étant donné leurs préférences bibliographiques, les rédacteurs de L’Esprit de Guy Patin ont plus probablement emprunté leur article au Moréri qu’à Furetière. Ma seule certitude est que Guy Patin ne connaissait pas cette historiette, qui est probablement fictive car je ne l’ai trouvée dans aucune des deux sources que le Moréri cite en référence : ni dans le chapitre 20 des Parallèles d’histoires grecques et romaines de Plutarque, ni dans le Liber de legibus et senatusconsultis [Livre des lois et arrêts] d’Antonius Augustinus (Antonio Agustin, archevêque de Tarragone au xvie s.), dont l’édition de Rome, 1583 (pages 64‑65), cite trois lois Calpurnia, dont aucune ne mentionne la quérulente Romaine.
V. note [15] du Faux Patiniana II‑7 pour Hortensia qui plaida avec succès la cause des nobles dames romaines injustement taxées par le Sénat au ier s. av. J.‑C.
Tout ce qui est connu de Petronas ou Petron, médecin grec posthippocratique (vraisemblablement actif au ive s. av. J.‑C.), provient de Celse, {a} au chapitre ix, Curatio semitertianæ febris, quæ ημιτριταιοι dicitur [Traitement de la fièvre demi-tierce, qu’on appelle hémitritée] (livre iii de Medicina [de la Médecine], pages 137‑138) : {b}
Neque hercule ista curatio nova est, qua nunc quidam traditos sibi ægros, qui sub cautioribus medicis trahebantur, interdum contrariis remediis sanant. Siquidem apud antiquos quoque ante Herophilum et Erasistratum, maximeque post Hippocratem fuit Petron quidam, qui febricitantem hominem, ubi accepterat, multis vestimentis operiebat, ut simul calorem ingentem, sitimque excitaret. Deinde, ubi paulum remitti cœperat febris, aquam frigidam potui dabat ; ac, si moverat sudorem, explicuisse se ægrum judicabat : si non moverat, plus etiam aquæ frigidæ ingerebat, et tum vomere cogebat. Si alterutro modo febre liberaverat, protinus suillam assam, et vinum homini dabat. Si non liberaverat, decoquebat aquam sale adjecto, eamque bibere cogebat, ut vomendo ventrem purgaret.Et intra hæc omnis ejus medicina erat. Eaque non minus grata fuit his, quos Hippocratis successores non refecerant ; quam nunc est his, quos Herophili vel Erasistrati æmuli diu tractos non expedierunt. Neque ideo tamen non est temeraria ista medicina ; quia plures, si protinus a principiis excepit, interemit. Sed, cum eadem omnibus convenire non possint, fere, quos ratio non restituit, temeritas adjuvat. Ideoque ejusmodi medici melius alienos ægros, quam suos nutriunt. Sed est circumspecti quoque hominis, et novare interdum, et augere morbum, et febres accendere ; quia curationem, ubi id, quod est, non recipit, potest recipere id, quod futurum est.
[Grands dieux ! il n’y a rien de moins nouveau que la méthode que certains appliquent aujourd’hui à leurs malades, et qui guérit parfois, à l’aide de remèdes contraires, ceux dont des médecins trop circonspects faisaient traîner les maux. Ainsi trouve-t-on chez les Anciens, avant Hérophile et Érasistrate, et bien après Hippocrate, un dénommé Petron {c} qui, de prime abord, emmitouflait le patient fiévreux, pour provoquer chaleur intense et soif. Ensuite, quand la fièvre commençait un peu à régresser, il lui faisait boire de l’eau froide ; et si la sudation venait, il disait au malade qu’il l’avait tiré d’affaire ; sinon, il lui faisait ingérer plus encore d’eau froide, et le faisait vomir. Quand aucun de ces deux procédés ne venait à bout de la fièvre, il poursuivait en lui faisant prendre du porc rôti et du vin ; et en cas de nouvel échec, il faisait bouillir de l’eau salée, et prescrivait de la boire afin de purger le ventre par le vomissement.
Voilà en quoi consistait toute sa médecine ; et elle ne fut pas moins secourable à ceux que les successeurs d’Hippocrate n’avaient pas rétablis qu’elle ne l’est maintenant {d} aux malades longtemps traités sans succès par les disciples d’Hérophile ou d’Érasistrate. Pour autant, cette méthode est téméraire, car elle tue bien des malades auxquels on l’applique en première intention. Les mêmes moyens ne pouvant toutefois convenir à tous, il arrive que la témérité vienne en aide à ceux qu’un traitement rationnel n’a pas secourus. Aussi les médecins de cette espèce soignent-ils mieux ceux des autres, que les leurs. Le propre du médecin prudent est donc aussi parfois d’innover, en aggravant la maladie et en excitant la fièvre, parce que, si ce traitement ne convient pas à la circonstance présente, il pourra être ultérieurement utile].
- V. note [13], lettre 99.
- Édition de Leyde, 1657, par Johannes Antonides Vander Linden, v. note [20], lettre de Charles Spon, datée du 28 août 1657.
- Cela situe Petronas entre le ve (Hippocrate) et le iiie s. av. J.‑C. (Érasistrate, v. note [23], lettre 324, disciple de Hiérophile).
- Le peu qu’on sache de la vie de Celse le donne pour contemporain de l’empereur Auguste, soit au tout début de l’ère chrétienne.
En dépit de son contenu tout à fait compatible avec les lectures et les idées de Guy Patin, cet article ne vient pas de lui : les rédacteurs de son Esprit l’ont emprunté au chapitre iv, page 63 des Essais de médecine de Jean Bernier (Paris, 1683, v. note [53] du Faux Patiniana II‑2), et l’ont assorti d’un commentaire de leur cru (ou issu d’une source que je ne me suis pas acharné à trouver) sur le rôle du heureux hasard dans la guérison des maladies. Comme le Faux Patiniana, Bernier appelle « révolutions dans le corps » les méthodes curatives de Petronas.
Cet article abrège le dernier du Borboniana 9 manuscrit (v. sa note [60]) et a été repris dans le Borboniana imprimé (article lxxxvi, page 326), mais cet ouvrage n’a paru qu’en 1751 (v. note [17] de l’Introduction aux ana).
Les rédacteurs de L’Esprit de Guy Patin ont néanmoins emprunté tout leur propos à Antoine Teissier, compilateur et annotateur des Éloges de Jacques-Auguste i de Thou. {a} Son addition (tome premier, pages 158‑159) fait croître de 12 à 30 le nombre des productions d’André Tiraqueau {b} (enfants et livres) et ajoute la mention latine disant qu’il a été « un second Varron de notre siècle » :
« Théodore de Bèze, en ses Épigrammes, l’appelle alterum nostri sæculi Varronem. »
Ce poème est intitulé Ad Andream Tiraquellum Senatorem Parisiensem, alterum nostri sæculi Varronem [À André Tiraqueau, conseiller au Parlement de Paris, second Varron {c} de notre siècle] (page 84 vo des Poemata varia [Poèmes divers] de Bèze) : {d}
Est tibi natorum quæ computat agmina coniux,
Est tibi quæ natos bibliotheca parit.
Fortunate senex, te nulla oblivia mortis,
Te nunquam totum tollet avara dies.
Namque alia ex illis mox est ventura propago,
Ex his est pridem gloria nata tibi,
Ut vero pereant illi, illorumque nepotes,
Hæc tamen incolumis cum patre neptis erit.[Tu as pour épouse celle qui égrène les bataillons de tes enfants, {e} et pour bibliothèque celle qui engendre tes autres fils. Fortuné vieillard ! Sans du tout oublier la mort, jamais un vilain jour ne t’emportera tout entier : de tes enfants te viendra bientôt une seconde lignée, et de tes livres t’est déjà née la gloire. À vrai dire, les premiers et leurs descendants périront, mais cette fille demeurera saine et sauve, tout comme son géniteur]. {f}
- Genève, 1683, v. note [12] du Faux Patiniana II‑2.
- Mort en 1558, v. note [2], lettre 597.
- V. note [1], lettre 14, pour Varron, littérateur latin du ier s. av. J.‑C., fondateur des premières bibliothèques romaines.
- Genève, 1614, v. supra note [5].
- Dans sa note A sur Tiraqueau, Bayle a recensé les sources qui ont glosé sur la progéniture de Tiraqueau, lui attribuant jusqu’à 45 enfants…
- Le Trésor historique et chronologique de Pierre de Saint-Romuald {i} a célébré la mémoire de Tiraqueau en termes assez semblables (troisième partie, année 1558, page 606) :
« Il n’était pas moins fécond à produire des enfants de l’esprit que du corps car, durant trente ans, il ne s’en passa point qu’il ne donnât un livre et un fils au monde ; et ainsi, si d’un côté il étendit son nom et sa lignée par un grand nombre d’enfants, tous excellents personnages, qu’il eut d’une femme vertueuse, il consacra bien autant sa gloire par une infinité de beaux livres qu’il composa […]. Voyez le poème que Michel de L’Hospital, son confrère et son ami, a fait en la louange de ses admirables compositions. » {ii}
- Paris, 1647, v. note [7], lettre 23.
- Dans les six livres des Epistolarum seu sermonum [Épîtres ou Discours] de Michel de L’Hospital (Paris, 1585, v. note [8], lettre 102), l’ode Ad Andream Tiraquellum Senatorem Parisiensem doctissimum [À André Tiraqueau, très docte conseiller au Parlement de Paris] (livre ii, pages 127‑128) ne loue que l’excellence et l’abondance de ses ouvrages.
Tiraqueau ne se maria qu’une fois : selon les généalogies, il avait épousé en 1512 Marie Cailler (ou Caillé), réputée née en 1501, extrême jeunesse qui lui permettait théoriquement une progéniture de 30 enfants (mais tout de même pas de 45).
Pline le Jeune, Lettres, livre vii, début de l’épître xx, avec mise en exergue du passage cité :
Librum tuum legi et quam diligentissime potui, adnotavi quæ commutanda, quæ eximenda arbitrarer. Nam et ego verum dicere assuevi, et tu libenter audire. Neque enim ulli patientius reprehenduntur, quam qui maxime laudari merentur.[J’ai lu ton livre en notant avec tout le soin possible ce que je croirais nécessaire d’y changer ou d’en retrancher ; car j’ai autant l’habitude de dire la vérité que toi, d’aimer à l’entendre ; et il n’y a pas d’auteurs plus dociles à être censurés, que ceux qui méritent le plus d’être loués].
Avec plus de clarté et d’esprit, Pierre Bayle a recouru à cette citation dans la dédicace (fo **4 ro‑ vo) de son Projet et fragments d’un Dictionnaire critique, {a} adressée à « M. Du Rondel, professeur aux belles-lettres à Mastricht » :
« Ceux que j’épargnerai auront quelque sujet de s’en plaindre, parce que ce sera un signe que je ne les crois pas capables d’entendre raison, ou en état de soutenir la moindre perte. Ce dernier motif n’est pas toujours entièrement à rejeter car, s’il y a des auteurs dont il faille couvrir les fautes, ce sont principalement les pauvres auteurs, qu’on aurait bientôt dépouillés jusqu’à la chemise, pour peu qu’on se jetât sur leur friperie ; et s’il y a des auteurs dont il faille découvrir les fautes, ce sont principalement les plus grands et les plus célèbres, puisqu’outre que leurs erreurs sont infiniment plus contagieuses que celles d’un écrivain ordinaire, ils ont de grandes ressources de réputation, et des trésors de gloire si abondants que cent naufrages ne sauraient les incommoder. C’est ce qui fait qu’il n’y a guère de gens qui se rétractent avec moins de peine, ou qui supportent de meilleure grâce la censure que ceux qui ont le plus justement acquis le titre de grand auteur. » {b}
- Rotterdam, Reinier Leers, 1692, in‑8o de 400 pages.
- La note marginale 3 cite ici la lettre de Pline, en y remplaçant (comme a fait L’Esprit de Guy Patin) Neque enim ulli… par Nulli…
Au risque de paraître fort entêté, ce détail me pousse à croire que Bayle est la source où L’Esprit de Guy Patin a puisé son article.
« L’enchaînement fatal nous a jalousé Érasme, mais il n’a pu nous en ôter le désir » : où « l’enchaînement fatal » est la mort à laquelle nul n’échappe ; et desiderium, à la fois « le désir » immortel de lire Érasme, et Desiderius, son nom latin (v. note [3], lettre 44).
Dans son Grand Dictionnaire historique… (Lyon, 1674, page 468), Louis Moréri semble avoir été le premier à citer cette épitaphe d’Érasme en l’attribuant à Louis Masius : cet auteur est autrement inconnu ; il s’agit probablement d’une méprise sur le prénom de l’érudit flamand Andreas Masius, {a} qui fut contemporain et admirateur d’Érasme.
Balthazar de Monconys a cité plus longuement ces vers et donné leur histoire dans ses Voyages, {b} seconde partie, page 130, Voyage des Pays-Bas, juillet 1663, sur le souvenir d’Érasme à Rotterdam :
« L’on voit la petite maison où il est né, au devant de laquelle sont ces inscriptions sur du bois, simplement :En esta casa es nacido, Erasmo theologo celebrado.
Por dotrina señalado, La pura fée nos a mostrado.
Ædibus his ortus mundum decoravit Erasmus,
Artibus ingenuis, religione, fide.
Fatalis series nobis invidit Erasmum :
At desiderium tollere non potuit. » {c}
- André Maes, v. note [3], lettre 659.
- Lyon, 1666, v. note [6], lettre 825.
- Pour les deux premiers vers espagnols :
« Le célèbre théologien Érasme est né dans cette maison.
Par son insigne doctrine, il nous a montré la pure foi. »Pour la suite, en latin :
« Né en cette maison, Érasme a honoré le monde,
Par ses nobles talents, par sa religion, par sa foi.
etc. »
Guy Patin aurait pu prélever l’épitaphe d’Érasme dans le récit de Monconys, mais, connaissant Andreas Masius, il ne l’aurait pas attribuée à l’improbable Louis Masius, dont seul a parlé Moréri en 1674.
La note [38] du Naudæana 4 donne en exemple le poème acrostiche (dont les premières lettres de chaque vers forment un ou plusieurs mots) composé par Alcide Musnier à la mémoire de Gabriel Naudé.
L’échantillon ici transcrit par L’Esprit de Guy Patin est un pot-pourri d’échos : « certaine sorte de poésie, dont les derniers mots ou syllabes ont un sens qui répond à la demande qui est contenue dans les vers, et qui semble être faite par un écho. » Les quatre vers cités sont tirés de sources mêlées, avec des variantes. Le jeu y prime sur le sens, et il est impossible de les traduire en conservant les échos qu’ils contiennent :
« Serai-je riche, dis-moi, quand j’aurai écrit des poèmes ? Tard.
Le faune est à moitié chèvre, pourquoi celle-ci l’appelle-t-elle à grands cris ? Elle l’aime.
Penses-tu que je serai fiancé au printemps prochain ? Tu le seras.
Qu’y a-t-il de difficile en amour ? Les atermoiements. »
En toute bonne foi, le compilateur de cet assemblage pourrait être Guy Patin, car je ne l’ai pas vu imprimé ailleurs.
La substance de cet article est empruntée à la :
Suite de l’Espion dans les cours des princes chrétiens, ou Lettres et mémoires d’un envoyé secret de la Porte dans les cours d’Europe, où l’on voit les découvertes qu’il a faites dans toutes les cours où il s’est trouvé, avec une Dissertation curieuse de leurs forces, politique et religion. Par ***. {a} Tome quatrième {b}
Il résume un passage de la lettre xvi, à Cara Halli, médecin du Grand Seigneur (1655), Histoire de Helal, médecin arabe. D’Avicenne, et de Thabet Eben Abrahim (pages 70‑71) :
« J’ai lu dans un certain manuscrit, écrit par Ibrahim, fils d’Helal, célèbre médecin à Radgat, {c} ce mémoire de son père. “ Un jour, dit-il, mon père avait donné une médecine à l’empereur Tuzun, {d} pour laquelle on lui fit présent d’une veste royale et de cinq mille piastres ; et par ordre de l’empereur, il fut porté dans les rues avec magnificence. Je remarquai qu’il fut pensif au milieu de tous ces honneurs et que son esprit ne fut pas en bonne assiette, dans un temps où je croyais qu’il avait tous les sujets du monde d’être joyeux. Cela m’obligea de lui dire : ‘ D’où vient, mon père, que vous êtes triste dans un temps où tout le monde vous croit joyeux ? ’ Il répondit : ‘ Mon fils, celui qui m’a fait ces honneurs est un fou, qui fait les choses sans raison et à contretemps. Ainsi je ne puis avoir de joie des faveurs qu’il m’a faites mal à propos, sachant que j’en suis redevable à mon ignorance, et nullement à son jugement. Je lui ai donné une potion cathartique {e} qui a fait en lui un effet si violent qu’elle lui a écorché les boyaux et fait sortir le sang ; de sorte que j’ai été contraint de prendre une autre route pour guérir ce mal et pour arrêter la violence de ce flux de sang. Cependant, comme il est ignorant, il a cru qu’une si grande évacuation de sang l’avait guéri, et c’est pour cela qu’il m’a fait faire tous ces honneurs. Mais ce qui m’afflige est que je crains que la même ignorance ne lui fasse faire à quelque heure une faute toute contraire, et qu’il ne vienne à s’imaginer sans fondement que je lui ai fait un outrage, et que dans cette ridicule prévention, il ne me fasse mourir. ’ ” »
- Giovanni Paolo (Jean-Paul) Marana (1642-1693), noble aventurier génois mêlé à de multiples intrigues politiques européennes, est l’auteur de L’Espion du Grand Seigneur…, volumineux roman épistolaire, dont la première édition en français a paru en 1686 (Paris, Claude Barbin, 3 volumes in‑12o), où son auteur s’en déclarait seulement traducteur de l’arabe en italien. Elle a été suivie de plusieurs rééditions avec variantes du titre et prolongations du récit. Ce roman connut un beau succès et inspira les Lettres persanes de Montesquieu (1721). Guy Patin n’a pas pu connaître le récit de Marana.
- Cologne, Erasmus Kenkus, 1697, in‑12 de 349 pages.
- Radgat est une variante orthographique de Bagdad. Cette anecdote est tout ce que j’ai trouvé à lire sur Helal, médecin de cette ville qui servait le califat au xe s.
- Abul Wafa Tuzun (déformé en Tusau par L’Esprit de Guy Patin) est un militaire turc de la fin du xe s. qui devint le général en chef et « l’émir des émirs » du califat abbasside de Bagdad.
- V. note [13], lettre 386.
« parce que ces remèdes fictifs, avec leurs qualités occultes qui sont réellement nulles, n’auraient de plus grande vertu que vider les cassettes des malades pour enrichir les apothicaires. »
Le début de cet article vient de la lettre 5 (18 octobre 1630, v. sa note [10]), qui déclencha une chaude querelle entre Guy Patin et Claude ii Belin sur les qualités occultes des médicaments (v. note [7], lettre 3), dont Jean Fernel avait défendu l’existence dans ses deux livres de abditis rerum causis [sur les causes cachées des choses] (Paris, 1548, v. note [48], lettre 97). La suite, contre les apothicaires, n’est pas dans la lettre, mais parfaitement conforme à l’esprit de Patin.
Les deux paragraphes de cet article viennent de la lettre du 28 octobre 1631, qui développe la querelle entre Guy Patin et Claude ii Belin sur les qualités occultes (v. supra note [18]), avec ses cinq passages latins :
« si par hasard je parle trop hardiment contre des imposteurs qui abusent de la dignité et de l’authenticité de notre métier, je demande que cette permission soit concédée à la liberté philosophique et à un esprit épris de vérité. »
Cette citation vient aussi (v. supra note [19]) de la lettre du 28 octobre 1631 (v. sa note [17]). Le commentaire grandiloquent qui la suit est dans l’esprit de Guy Patin, mais non de sa plume épistolaire.
« Nul ne regarde le Soleil, sauf quand il s’éclipse » : Sénèque, Les Questions naturelles, livre vii, chapitre i. Je n’ai ni identifié « l’illustre D.L. » ni trouvé de source au commentaire qui suit.
Succession de deux citations latines :
« l’un des nôtres », c’est-à-dire reçu docteur régent : l’amoureux jeune homme n’était encore que candidat (philiatre), préparant son baccalauréat de la Faculté de médecine de Paris.
« le joug du mariage ».
« est un animal à cornes » (un cocu).
« il soupçonne en quelque façon son épouse », mais la locution serait plus intelligible avec quisque : « chacun soupçonne son épouse » (d’être infidèle).
Les lettres de Guy Patin ne permettent ni d’identifier le philiatre amoureux ni le médecin cocu, ni de trouver un passage qui approche du commentaire que son Esprit faisait ici sur l’amour chez les médecins. Il a qualifié deux praticiens parisiens de cocus :
Laurent Bordelon (Bourges 1653-Paris 1730), docteur de Sorbonne, prêtre, journaliste et polygraphe, a été l’un des rédacteurs de L’Esprit de Guy Patin. Cette anecdote sur les loups se lit mot pour mot à la page 452 de ses :
Diversités curieuses pour servir de récréation à l’esprit. Dixième partie. Suivant la copie de Paris. {a}
- Amsterdam, André de Hoogenhuysen, 1699, in‑12 de 456 pages.
Son commentaire est d’une effronterie digne de remarque.
Nouvel emprunt à la lettre du 28 octobre 1631 : v. ses notes [22]‑[25] pour les explications détaillées de cet extrait et la traduction de son latin :
« à cause de la très fréquente saignée que nous pratiquons ici, qui leur procure estime et profit ».
Ovide, L’Art d’aimer, livre iii, vers 549‑550 :
« Un dieu vit en nous, et nous commerçons avec le ciel : ce souffle vient des demeures éthérées. »
Guy Patin n’a pas cité ces vers dans ses écrits. Dans le commentaire qui les suit ici :
« Ci-gît Sigæa. Cela suffit : qui ignore le reste est un rustre, car il ne cultive pas les belles-lettres. »
« Au reste, il n’est pas nécessaire de s’arrêter à faire voir que Louise Sigoia {b} n’a pas composé un livre abominable qui a paru en ce siècle sous son nom, car il est constant qu’elle n’a donné au public aucun ouvrage, et celui qu’on lui veut attribuer est entièrement indigne de cette illustre femme, qui ne fut pas moins recommandable par sa chasteté et par sa vertu, que par son érudition. »
Aloisiæ Sigeæ Toletanæ Satyra sotadica, de arcanis amoris et veneris. Aloisia Hispanice scripsit : latinitate donavit J. Meursius.[La Satire sotadique {c} d’Aloysia Sigæa de Tolède, sur les arcanes de l’amour et de la luxure. Aloisa l’a écrite en espagnol, et J. Meursius {d} l’a traduite en latin]. {c}
- Genève, 1683, v. supra note [13].
- Sic pour Sigeia.
- Dans le genre de Sotadès, poète grec obscène du iiie s. av. J.‑C.
- Johannes Meursius (Jan Van Meurs, v. note [9], lettre 443) a depuis été innocenté dans la production de ce livre.
- V.C., sans nom ni date, in‑12 de 171 pages.
Il s’agit d’un recueil de dialogues, de lettres et de poèmes érotiques extrêmement crus, que certains critiques qualifient de premier texte entièrement pornographique jamais publié. Les curieux pourront s’en faire une idée en feuilletant l’édition française anonyme attribuée à Nicolas Chorier (v. note [9], lettre 625), sous le titre de L’Académie des dames, ou les sept entretiens galants d’Alosia (Cologne, Ignace Le Bas, 1691, in‑12 de 324 pages, Gallica, sans les illustrations).
Cet article est directement emprunté à celui du Grand Dictionnaire historique… de Louis Moréri sur le philosophe Amyclas d’Héraclée (Lyon, 1674, page 110) :
« Pline fait mention d’une ville < de ce nom > qui était bâtie entre Cajete et Ansur, ou Terracina, en Italie, {a} et qui devint déserte par la folie des habitants qui, s’étant trop ridiculement attachés à la doctrine de Pythagore qui défend de faire mourir aucun animal, {b} aimaient mieux se laisser mordre par les serpents qui y naissaient de toutes parts, ou fuir, que de les tuer (liv. 3, ch. 5, et 10, ch. 29). {c} Quelques autres ajoutent qu’ils furent tués par leurs ennemis, car on dit qu’après une fausse alarme qu’on leur avait donnée de leur arrivée, ils défendirent, sur peine de la vie, de ne publier jamais de tels bruits ; de sorte qu’ils les surprirent sans peine (Servius sur le 10e liv. de L’Énéide). C’est de là qu’on a tiré le proverbe ancien : “ Amyclas a perdu le silence ” (Érasme, aux Proverbes, au mot Taciturnitas illaudata). » {d}
- Ainsi située sur le littoral du Latium (province de Latina), entre Terracina (v. troisième notule {a}, note [22] du Naudæana 3) et Gaeta (Gaète), Amyclæ (féminin pluriel latin), Amycles ou Amyclées, cité italienne de la Grande Grèce (v. note [67] du Patiniana I‑2), porte aujourd’hui le nom de Sperlonga.
Dans son adage sur le sujet, {i} Érasme écrit :
Accipiendæ sunt autem hoc loco Amyclæ non ut sit una e centum illis urbibus Laconiæ, quam Lacedæmonis filius condidit, sed oppidum quoddam situm inter Caietam et Tarracinam, conditum ab iis Laconibus qui comites Castotis et Pollucis fuerunt eique nomen indidere, quo Laconicas illas Amyclas referret.[Amyclées ne doit pas être tenue ici pour l’une des cent villes de Laconie que fonda le fils de Lacédémon, {ii} mais comme une place forte bâtie entre Gaète et Terracina par les Lacédémoniens qui accompagnèrent Castor et Pollux, {iii] et qui nommèrent ce lieu par référence aux Amyclées de Laconie].
- V. notule {d} infra.
- V. note [2], lettre latine 265, pour Sparte (Lacédémone, fondée par Lacédémon), principale cité antique de Laconie (Péloponnèse), avec les Amyclées grecques.
- V. note [2] de la Consultation 5 pour les mythiques Dioscures, Castor et Pollux.
- En vertu de la métempsycose qui faisait partie de la doctrine pythagoricienne (v. note [27], lettre 405).
- Pline, Histoire naturelle (sans mention de Pythagore) : livre iii, chapitre ix, § 6, Littré Pli, volume 1, page 163 ; et livre viii, chapitre xliii, ibid. page 335.
- Taciturnitas illaudata [Se taire n’est pas louable] est le titre d’une section du recueil intitulé :
Adagiorum D. Erasmi Roterodami Epitome. Ex novissima Chiliadum ceu ipsorum fontium recognitione excerpta, et multis in locis jam longe accuratius, quam ante, emendata. Cum indice Rerum ac Verborum locupletissimo, cumque præcipuorum Auctorum,e quibus hoc opusculum concinnatum est, nomenclatura.[Abrégé des Adages de D. Érasme de Rotterdam. Tiré d’une toute nouvelle revue des Chiliades, {i} qui sont leur source première, et corrigée en maints endroits, bien plus soigneusement qu’il ne l’a jamais été. Avec un très riche index des matières et des mots et une liste des principaux auteurs qui ont servi à composer ce petit livre]. {ii}
L’adage no 801, Amyclas perdidit silentium [Le silence a perdu Amyclas], y est résumé pages 506‑507 : {iii}
Τας Αμυκλας απω λεσεν η σιγη. {iv}Servius interpretes enarrat hunc in modum, Æneidos 10. Cum apud Amycleos subinde nunciaretur hostium adventus, idque falso, lata lege cautum est, ne quis unquam hostis nunciaret adventum. Atqui post evenit, ut vere jam advenirent hostes. Quod cum nemo nunciaret, propter legis interdictum, civitas de improviso capta est. Qui casus populari joco dedit occasionem, ut dicerent, Amyclas silentio periisse, si cui sua taciturnitas fuisset incommodo.
[Servius l’explique ainsi dans son commentaire sur le chant x de L’Énéide : {v} comme une fausse rumeur avait annoncé aux Amycléens l’arrivée des ennemis et que cela s’était trouvé faux, une loi décréta que nul ne devrait plus jamais annoncer une telle nouvelle ; {vi} mais il advint qu’un jour les ennemis attaquèrent véritablement la ville ; et elle fut prise à l’improviste, puisque nul ne l’avait annoncé, à cause de la loi qui interdisait de le faire. Cet accident a donné occasion au peuple de plaisanter en disant « Le silence a perdu Amyclas », quand quelqu’un pâtit d’être resté silencieux : « Le silence a perdu Amyclas. »]
- « Milliers », sous-titre des Adages, v. notule {b}, note [13], lettre 6.
- Amsterdam, Joan. Janssonius, 1649,, 1663, in‑12 de 547 pages, pour la première de nombreuses éditions ; les adages y sont extrêmement abrégés et rangés par thèmes, classés dans l’ordre alphabétique.
- La traduction de Moréri, « Amyclas a perdu le silence » est un contresens car elle a pris Amyclas pour un nominatif singulier, sujet du verbe perdidit, alors que c’est le cas accusatif pluriel féminin d’Amyclæ, employé comme complément d’objet direct de ce verbe, dont le sujet est silentium.
Dans son édition de 1707 (tome 1, page 218), sur Amycles, le Grand Dictionnaire a corrigé son erreur : v. note [49] du Faux Patiniana II‑7.
- Version originale grecque de l’adage
- Le commentaire de Servius, rédigé au ive s. (repris dans le Virgile publié à Leeuwarden, 1717, v. note [49] du Borboniana 6 manuscrit), tome ii, page 1055, première colonne, porte sur les vers 562‑564 du chant x :
[…] Fulvumque Camertem,
Magnanimo Volscente satum, ditissimus agri Qui fuit Ausonidum, et tacitis regnavit Amyclis.[(…) et le blond Camers, le fils du magnanime Volcens, qui fut le plus riche propriétaire d’Ausonie et qui régna sur la silencieuse Amyclas].
- Servius évoque aussi les interprétations moins plausibles qui lient le silence des habitants à leur respect de la règle pythagoricienne selon laquelle les disciples devaient l’observer strictement durant les cinq années suivant leur initiation.
Ni Diogène Laërce {a} ni La Vie de Pythagore, ses symboles, ses vers dorés, et la Vie d’Hieroclès. Par M. Dacier, garde des livres du Cabinet du roi. Tome premier {b} ne font état d’un séjour du philosophe à Amyclæ : il serait mort à Métaponte (Basilicate) vers 495 av. J.‑C. En brodant sur Moréri, les rédacteurs de L’Esprit de Guy Patin paraissent avoir confondu Pythagore et le pythagorisme des Amycléens. Cet article leur plaisait fort car ils l’ont repris plus loin. {c}
- Dans les Vies des philosophes illustres, v. note [3], lettre 147.
- Paris, Rigaud, 1706, in‑12 de 273 pages, premier de deux tomes.
- V. sa note [49] du Faux Patiniana II‑7.
La matière de cet article est empruntée à :
La Vie du pape Sixte cinquième. {a} Traduit de l’italien de Gregorio Leti. {b}. Tome premier. {c}
« Ils eurent trois enfants […]. L’aîné naquit le treizième de décembre 1521 {d} et fut nommé Félix sur les fonds du baptême : nom convenable à celui qui devait un jour remplir la première place du monde ; et ce qui est assez singulier, c’est que son parrain et le curé qui le baptisa avaient aussi le même nom ; d’où vient qu’étant encore moine, {e} il disait en raillant avec ses meilleurs amis qu’il s’était fait dans son baptême un concours de félicité. »
« Il obtint comme une faveur de s’en aller, après le chapitre, demeurer à Ascoli, et parut docteur dans cette maison où il avait appris à lire. Il fit venir quelques-uns de ses parents et, bien loin de rougir de leur pauvreté, il s’en faisait honneur. Un jour même, depuis qu’il fut souverain pontife,{f} entendant parler de quelques maisons illustres d’Italie, il dit qu’il n’y avait aucun religieux qui fût d’une maison aussi illustre que la sienne ; et il le prouvait ainsi, en riant : “ Ma maison, disait-il, étant à demi découverte, et les murailles n’étant que de vieilles nattes demi-rompues, le soleil y entrant de tous côtés, ne puis-je pas me vanter qu’elle est une des plus éclatantes de l’Europe ? ” »
- Sixte Quint (1585-1590, Felice Peretti, v. note [45] du Naudæana 1).
- Historien protestant italien, v. note [1], lettre 943.
- Paris, André Pralard, 1685, in‑12 de 360 pages traduit par « L.A.P. ».
- D’origine sociale très modeste, Sixte Quint était né à Grottamare, dans la province d’Ascoli (dans les Marches).
- Franciscain.
- En 1585.
Dans le langage dogmatique, le dictamen rationis est « le commandement de [ce que dicte] la raison » ou de la conscience (dont les cas difficiles étaient soumis à l’arbitrage des casuistes).
Si Guy Patin est la source de cet article de son Esprit, il a pu lui être inspiré par ce passage de La Démonomanie des sorciers… de Jean Bodin, {a} livre quatrième, chapitre v, page 246 ro :
« Quand vous verrez porter des images sur les épaules pour les faire révérer, vous direz en vos cœurs : “ C’est à toi, ô Dieu éternel, à qui l’honneur appartient. ” Ainsi faisaient plusieurs en la primitive Église, qui assistaient, ou par force ou par crainte, aux sacrifices des païens où, pour éviter {a} au scandale qu’on ne les estimât athéistes, ores qu’ils {b} fussent à genoux devant les images, ils priaient Dieu néanmoins à ce qu’il lui plût les garder de toute pollution et idolâtrie, et qu’il prît en gré la conscience bonne, tant d’eux que des pauvres ignorants. Je conclus donc que la volonté et intention, d’une part et d’autre, est le fondement de toute action, bonne ou mauvaise ; en sorte que si la volonté contrevient à ce que la raison juge et croit être bon, encore que {c} la raison soit abusée, on offense Dieu. C’est la décision de Thomas d’Aquin au traité qu’il a fait de Bonitate actus interioris voluntatis, où il dit ainsi : Quando ratio errans ponit aliquid ut preceptum Dei, tunc idem est contemnere dictamen rationis et Dei preceptum : suivant de saint Augustin. » {d}
- Paris, 1580, v. note [25], lettre 97.
- Échapper.
- Quoiqu’ils.
- Bien que.
- Somme théologique (v. note [24], lettre 345), première partie de la seconde partie, question 19, article 5, « sur la Bonté d’un acte de la volonté intérieure » :
Præterea, secundum Augustinum, inferioris potestatis præceptum non obligat, si contrarietur præcepto potestatis superioris, sicut si proconsul iubeat aliquid quod imperator prohibet. Sed ratio errans quandoque proponit aliquid quod est contra præceptum superioris, scilicet Dei, cuius est summa potestas. Ergo dictamen rationis errantis non obligat. Non est ergo voluntas mala, si discordet a ratione errante.[D’après saint Augustin, {i} le précepte d’un pouvoir inférieur n’oblige pas s’il est contraire au précepte d’un pouvoir supérieur : lorsque, par exemple, un proconsul ordonne ce que défend l’empereur. Or la raison qui se trompe propose une action interdite par le précepte d’un supérieur, qui est Dieu, le Maître suprême. Donc le commandement de la raison n’oblige pas lorsqu’elle se trompe. La volonté n’est donc pas mauvaise lorsqu’elle refuse de suivre la raison erronée].
- Peu clair « suivant de saint Augustin » dans le texte de Bodin.
Héroïdes, épître 17, vers 41 :
« La crédulité a coutume de porter malheur aux jeunes filles ».
Ce commentaire galant est fort éloigné des préoccupations ordinaires de Guy Patin.
Cet article prouve qu’on disait que « les beaux esprits se rencontrent » avant Voltaire, à qui on attribue généralement la primeur de cette expression. {a} C’est son seul intérêt car, autrement, je peine à imaginer Guy Patin se comparant sans vergogne à Plutarque, tout en se gardant « d’être humble par orgueil ».
- L’expression figure dans le Nouveau Dictionnaire français de Pierre Richelet (Amsterdam, Jean Elsevier, 1709), tome second, première colonne de la page 58, lettre R :
« Se rencontrer. Concourir dans un même sentiment. [Concurrere.] (Les beaux esprits se rencontrent. Le P. Mallebranche s’est rencontré avec Spinosa, sur les causes occasionnelles.) »
L’effronterie de cet article sur le plagiat est proprement sidérante, car L’Esprit de Guy Patin y copie lui-même (en l’avouant du bout des lèvres) et attribue à Patin un passage de l’article iii de Pierre Bayle, paru dans ses Nouvelles de la république des lettres {a} (pages 121‑122), où il critique un ouvrage de François Charpentier {b} intitulé De l’Excellence de la langue française (Paris, Claude Barbin, 1683, 2 tomes in‑8o), avec ces remarques :
« Il ne fait point grâce à la liberté que l’on se donne dans les tragédies de falsifier la vérité, et d’introduire la galanterie de la cour de France dans celle des princes d’Asie. Cela lui donne occasion de parler des fictions des anciens Grecs, de leurs romans, de leurs larcins, de leurs hyperboles. Mais il n’oublie pas de remarquer qu’il y a une manière louable de se servir des livres que l’on a lus. Il ajoute que les auteurs se rencontrent bien souvent sans se suivre, et que nous en pourrions apporter plusieurs exemples célèbres, si nous avions le livre composé par Aretades περι συνεμπτωσεως, {c} c’est-à-dire de la rencontre des pensées. Il remarque, après Porphyre, {d} qu’on rencontrait quelquefois dans les ouvrages d’Ephorus {e} jusqu’à trois mille lignes de suites copiées mot pour mot. Ces larcins étaient si fréquents parmi les Grecs que quelques gens de lettres se firent une occupation sérieuse de les remarquer. » {f}
- Numéro de septembre 1684, Amsterdam, Henri Desbordes, 1684, in‑4o.
- François Charpentier (Paris 1620-ibid. 1702), membre de l’Académie française élu en 1650, préfacier de son Dictionnaire (1693) et l’un des membres fondateurs de l’Académie des Inscriptions.
- Grec dont la translittération est péri synemptôséôs, à quoi ressemble vaguement le Perisinemptosias des rédacteurs de L’Esprit de Guy Patin.
Aretades de Cnide (Arêtadês Knidos) est un historien grec dont toutes les œuvres ont été perdues. On ne connaît pas le siècle où il a vécu. Plutarque (Parallèles d’histoires grecques et romaines) a mentionné ses Νησιωτικως [Insulaires] et ses Μακεδονικως [Macédoniennes].
- Porphyre de Tyr est un philosophe néoplatonicien du iiie s.
- Éphore de Cumes, orateur et historien grec du ive s. av. J.‑C., a lui-même été plagié par plusieurs auteurs, ce qui a permis à quelques fragments de subsister.
- Bayle est mort en 1706, ce qui laissait à L’Esprit de Guy Patin (1709) quelque liberté de le piller. Quant aux multiples larcins de ses rédacteurs, je me suis fait « une occupation sérieuse de les remarquer »
« le malheureux n’a rien récolté d’autre que la faim pour renommée (que cet homme très méritant avait cherché à obtenir d’une patrie et d’une postérité ingrate, par des travaux presque herculéens). »
Le début de cet article recopie un fragment de la lettre du 12 janvier 1632 à Claude ii Belin (v. ses notes [11]‑[13]).
« par don de l’auteur. »
Tout ce mordant commentaire sur les publications à compte d’auteur ne provient pas des lettres de Guy Patin.
Avant-dernière phrase de la lettre que Guy Patin a écrite à Claude ii Belin le 20 mai 1632 (v. sa note [11]).
L’épigramme citée de Martial est intitulée « Contre Symmachus » :
« J’étais indisposé, mais tu vins chez moi, Symmachus, accompagné de cent élèves. Cent mains glacées par l’Aquilon m’ont touché : je n’avais pas la fièvre, Symmachus, je l’ai maintenant. »
Jean Bernier a été l’un des auteurs les plus diserts sur ce médecin romain dénommé Symmachus, à la page 93 de ses Essais de médecine… (Paris, 1689, v. supra note [12]) :
« Symmachus, autre médecin de l’empereur Claude, est marqué dans Suétone pour avoir donné un avis à ce prince, qui l’obligea à donner une déclaration en faveur de ceux qui étaient pressés de quelques infirmités naturelles. {a}Pedere namque dixit non inutile
Symmachus. {b}C’était, raillerie à part, non seulement un bon médecin, mais encore un brave soldat, quoique Martial semble s’être diverti à ses dépens. » {c}
- Tout cela est pure invention de Bernier, reprise par les rédacteurs de L’Esprit de Guy Patin : Suétone n’a nulle part parlé de Symmachus dans ses Vies des douze Césars, et je n’ai rien trouvé attestant qu’il a été médecin de l’empereur Claude (v. note [6], lettre 215), mort en l’an 54, quand Martial (v. note [17], lettre 75) n’avait que 14 ans.
- « Et Symmachus dit alors qu’il n’est pas inutile de péter », autre fragment de Martial, livre vii, épigramme 18, à une dénommée Galla, à qui le poète faisait de lubriques reproches (vers 4‑10) :
Vitium est non leve, Galla, tibi.
Accessi quotiens ad opus mixtisque mouemur
inguinibus, cunnus non tacet, ipsa taces.
Di facerent ut tu loquereris et ille taceret :
offendor cunni garrulitate tui.
Pedere te mallem : namque hoc nec inutile dicit
Symmachus et risum res movet ista simul.[Tu as, Galla, un défaut qui n’est pas mince. Chaque fois que je t’entreprends et que nous remuons nos aines soudées, tu ne parles pas, mais ton vagin, lui, ne se tait pas. Les dieux fassent que tu parles et que lui se taise donc ! Le caquetage de ton con m’indispose. Je préférerais que tu pétasses, car Symmachus dit que cet acte n’est pas inutile, et déclenche en même temps le rire].
- Suivent les autres vers de Martial cités au début de la présente note.
Les noms y sont écorchés, mais le fond de cet article est exact, car il y a bien eu deux frères Folengo, tous deux moines bénédictins à Mantoue, qui ont inventé la poésie macaronique de Merlin Coccaye.
Leurs noms sont réunis dans le titre d’un ouvrage :
Ioan. Bapt. Chrysogoni Folengii Mantuani Anachoritae Dialogi, quos Pomiliones vocat. Theophili Folengii Mantuani Anachoritæ varium poema, et Ianus.[Dialogues de Joannes Baptista Chrysogonus {a} Folengius, moine de Mantoue, qu’il appelle les Nains. Le Poème varié et le Janus de Theophilus Folengius]. {b}
- De naissance dorée.
- In Promontorio Minervæ, ardente Sirio [Au Promontoire de Minerve (v. seconde notule {b‑i}note [23] du Naudæana 3 ), à l’Armoise ardente] (probablement pour Venise, Aurelio Pincio), 1533, in‑8o de 222 pages, dont Ann E. Mullaney a mis en ligne une transcription et une traduction en anglais.
Le Grand Dictionnaire de Moréri (Lyon, 1693, tome premier, page 1306) a consacré deux articles distincts aux frères Folengo, mais sans mentionner leur lien de parenté.
Vers 442, livre i de L’Art d’aimer : « Dieu irrité fléchit devant une prière suppliante. »
Le commentaire qui suit ne peut pas être certainement attribué à Guy Patin.
Le jugement que Guy Patin a porté sur le chanoine Nicolas Belin dans sa lettre du 4 janvier 1633 à son frère Claude ii forme le début de cet article (transcrit entre guillemets anglais) ; v. ses notes [1]‑[3] pour les sources de ses deux citations latines :
Le « V.F. » de L’Esprit de Guy Patin prouve ici qu’il est absolument vain de vouloir déchiffrer les initiales employées par ses rédacteurs. La suite de leur propos ne vient pas des lettres de Patin, mais de la satire de Jean-Louis Guez de Balzac {a} intitulée Le Barbon {b} (pages 7‑9), décrivant son personnage éponyme, dont le nom est à prendre dans le sens défini par notre glossaire :
« Quelle confusion, bon Dieu, et quelles ténèbres ! Vous avez ouï parler de cet amas rude et indigeste qui précéda la disposition et la beauté des choses que nous voyons : voilà l’image de l’esprit et de la doctrine du Barbon. Il y a moins de différence entre le Chaos et le Monde qu’entre la manière dont il sait et celle dont il faut savoir. Il a de quoi alléguer mal à propos cinquante ans durant. Madame Des Loges {c} disait de lui que c’était une bête qu’on avait chargée de tout le bagage de l’Antiquité. Pour moi, qui ne lui veux pas dire des injures, si j’avais à faire sa définition, je dirais que c’est une bibliothèque renversée, et beaucoup plus en désordre que celle d’un homme qui déménage. » {d}
- V. note [7], lettre 25.
- Paris, Augustin Courbé, 1648, in‑8o) de 167 pages.
- V. note [57] du Patiniana I‑3.
- Les italiques sont fidèles à ceux de la source imprimée. Le portrait du Barbon dessiné en tête de l’ouvrage complète la description.
Autre emprunt à la lettre du 4 janvier 1633 : v. ses notes [19] et [20] pour Epiphanius Fernandus et son livre « sur la longueur de la vie » (Naples, 1612).
Précepte de Sénèque, Lettres à Lucilius (épître xlv, § 1), précédé de sa traduction entre guillemets français, où une lecture « uniforme » est à prendre pour studieuse et de bout en bout.
« l’utile à l’agréable ».
Tous les auteurs cités, médicaux (où, à mon avis, Riolan désigne le père, Jean i, plutôt que le fils, Jean ii) puis classiques latins, faisaient partie des favoris de Guy Patin, mais cet article n’est pas tiré d’une de ses lettres.Les avis sont partagés sur l’origine de Cicéron.
« On a sur la condition de son père des opinions très opposées : les uns prétendent qu’il naquit et fut élevé dans la boutique d’un foulon ; {a} les autres font remonter sa maison à ce Tullus Attius qui régna sur les Volsques {b} avec tant de gloire. »
- Artisan qui comprime (foule) les étoffes à l’aide d’une presse mue par un moulin.
- Anciens habitants du Latium.
Les bains de Cicéron, {a} près de Pouzzoles (à côté de Naples), ont été décrits par Balthazar Grangier de Liverdis, comte-évêque de Tréguier mort en 1679, aux pages 583‑584 de son Journal d’un voyage de France et d’Italie, fait par un gentilhomme français. Commencé le quatorzième septembre 1660, et achevé le trente-unième mai 1661… : {b}
« Ce lieu autrefois appelé les bains de Frutole et de Tritole, deux mots italiens corrompus, est celui où sont les thermes de Cicéron. […] J’y vis encore à plate terre les petits réservoirs, qui sont secs présentement mais qui étaient autrefois remplis d’eaux, qui avaient toutes une vertu particulière pour la guérison des maux. Proche de là, il y avait des statues qui, en mettant la main sur leurs corps, faisaient connaître la propriété de l’eau de chaque réservoir ; et au bas de ces statues, il y avait pareillement une inscription qui faisait mention de la différente vertu de ces bains, qui eurent un tel crédit que les médecins de l’École de Salerne {a} tombèrent en jalousie, croyant qu’ils leur faisaient perdre toute leur pratique, et ils vinrent faire ravage dans ce lieu, où ils rompirent les statues, enlevèrent les inscriptions et firent d’autres désordres ; mais en s’en retournant, leur vaisseau fut submergé entre le cap de Minerve et l’île de Care. » {b}
- Déjà mentionnés dans la deuxième notule {a}, note [22] du Naudæana 3.
- Paris, Michel Vaugon, 1667, in‑8o illustré de 885 pages.
- V. note [4], lettre 12.
- Entre la péninsule de Sorrente et l’île de Capri, aux limites méridionales de la baie de Naples.
Guy Patin aurait fort bien pu lire cette description et la noter dans ses cahiers, mais il n’en a jamais rien écrit ailleurs.
Les deux vers d’Ovide sont tirés des Amours (livre ii, élégie iv, vers 9‑10) :
« Ce n’est pas une beauté précise qui excite mes amours : elles sont toujours cent à provoquer ma passion. »
Je n’ai pas identifié « l’amoureux Bonnal, L. M.D. » et je peine à croire Guy Patin capable de telles confidences sur sa vie amoureuse.
Camille (Marcus Furius Camillus) est un vaillant général et dictateur romain du ive s. av. J.‑C., qui contribua à fonder la puissance militaire et dominatrice de la République. Cet article abrège et traduit bizarrement (entre guillemets français) le discours que Camille tint à ses soldats avant une grande bataille contre une coalition ennemie en l’an 389 (Tite-Live, Ab Urbe condita [Histoire de Rome], livre vi, chapitre vii) :
Quæ tristitia, milites, hæc, quæ insolita cunctatio est ? Hostem an me an vos ignoratis ? Hostis est quid aliud quam perpetua materia virtutis gloriæque vestræ ? Vos contra me duce […], modo trigeminæ victoriæ triplicem triumphum ex his ipsis Volscis et Æquis et ex Etruria egistis. An me, quod non dictator vobis sed tribunus signum dedi, non agnoscitis ducem ? Neque ego maxima imperia in vos desidero, et vos in me nihil præter me ipsum intueri decet ; neque enim dictatura mihi unquam animos fecit, ut ne exsilium quidem ademit. Iidem igitur omnes sumus, et cum eadem omnia in hoc bellum adferamus quæ in priora attulimus, eundem eventum belli exspectemus. Simul concurreritis, quod quisque didicit ac consuevit faciet : vos vincetis, illi fugient.[Soldats ! quel est cet abattement, quelle est cette étrange hésitation ? Oubliez-vous qui est l’ennemi, qui je suis, qui vous êtes ? L’ennemi n’est-il pour vous autre chose qu’une perpétuelle occasion de courage et de gloire ? Sous mon commandement, (…), n’avez-vous pas naguère, par une triple victoire, triomphé trois fois contre ces mêmes combattants volsques, èques, et venus d’Étrurie ? {a} Ne me reconnaissez-vous plus pour votre chef parce que je vous ai donné l’ordre, non plus comme dictateur, mais comme tribun ? Je n’aspire pas à avoir sur vous une autorité absolue, il ne vous faut voir en moi que qui je suis. Jamais je n’ai dû mon courage à la dictature, et l’exil ne me l’a pas ôté. Nous sommes donc tous les mêmes ; et puisque nous apportons dans cette guerre tout ce que nous avons apporté aux autres, espérons-y la même issue. Une fois engagés dans le combat, chacun exécutera ce qu’il a appris et ce qu’il a coutume de faire : vous vaincrez, ils fuiront].
- Peuples du Latium et de l’Étrurie qui refusaient de se soumettre à Rome.
Cet article traduit (entre guillemets français) un passage du Satyricon de Pétrone (chapitre xvii) : ce sont les paroles de Quartila, prêtresse de Priape (v. note [5], lettre 859), morigénant les jeunes impies qui ont surpris son cérémonial et s’en sont moqués. Le commentaire de L’Esprit de Guy Patin me paraît toutefois manquer singulièrement de pertinence.
En y leurrant curieusement le lecteur avec Empédocle, {a} cet article paraphrase le chapitre lxv, livre ii du traité de Cicéron de Divinatione [sur la Divination] :
Defert ad conjectorem quidam somniasse se ovum pendere ex fascea lecti sui cubicularis (est hoc in Chrysippi libro somnium) ; respondit conjector thesaurum defossum esse sub lecto. Fodit, invenit auri aliquantum, idque circumdatum argento ; misit conjectori quantulum visum est de argento. Tum ille “ Nihilne ” inquit “ de vitello ? ” Id enim ei ex ovo videbatur aurum declarasse, reliquum argentum. Nemone igitur umquam alius ovum somniavit ? Cur ergo hic nescio qui thesaurum solus invenit ? Quam multi inopes digni præsidio deorum nullo somnio ad thesaurum reperiendum admonentur ! Quam autem ob causam tam est obscure admonitus, ut ex ovo nasceretur thesauri similitudo, potius quam aperte thesaurum quærere juberetur, sicut aperte Simonides vetitus est navigare ? Ergo obscura somnia minime consentanea majestati deorum.[Un quidam rapporte à un interprète {b} qu’il a vu en rêve un œuf pendu aux sangles de son lit (ce rêve est raconté dans le livre de Chrysippe). {c} L’interprète répond qu’il y a un trésor caché sous ce lit. Le songeur creuse et trouve une certaine quantité d’or avec de l’argent tout autour. Après quoi, il envoie au devin une partie de l’argent, tout juste assez pour ne pas avoir l’air de vouloir tout garder. « N’aurai-je donc rien du jaune ? », dit alors l’interprète pour qui cette partie de l’œuf apparu en rêve représentait l’or et le reste l’argent. Aucun autre homme n’a-t-il donc fait ce rêve d’un œuf ? Pourquoi cet inconnu est-il le seul qui ait trouvé un trésor ? Combien d’indigents méritant d’être secourus par les dieux n’ont jamais fait un songe pouvant les conduire à la découverte d’un trésor ? Et pourquoi un avis si obscur : cet œuf qui devient un trésor ? Pourquoi l’homme ainsi favorisé n’a-t-il pas été clairement invité à chercher le trésor, tout de même qu’il fut clairement enjoint à Simonide de ne pas s’embarquer ? {d} Ces songes obscurs me paraissent très peu compatibles avec la majesté des dieux]. {e}
- V. première notule {b}, note [32] du Faux Patiniana II‑3.
- C’est cet interprète des rêves que L’Esprit de Guy Patin a qualifié de « prophète onirocisique », sic pour onirocritique, « titre qu’on a donné à ceux qui ont jugé des événements par les songes » (Furetière).
- Chrysippe de Soles ou de Tarse, philosophe stoïcien grec du iiie s. av. J.‑C. Dans la liste de ses ouvrages, Diogène Laërce ne mentionne pas de liber somnium [livre des songes], mais Cicéron a plus longuement commenté cet ouvrage dans le chapitre xx du de Divinatione.
- Cicéron parle ailleurs (livre i, chapitre xxvii) du rêve que fit le poète Simonides : ayant trouvé un homme mort sur le bord d’un chemin, il l’avait dignement enseveli ; cet inconnu lui réapparut en rêve pour lui défendre de s’embarquer sur un navire qui, de fait, fit naufrage pendant sa traversée.
- Traduction de Charles Appuhn, 1936.
Je peine à croire Guy Patin capable d’un aussi piètre plagiat masqué de Cicéron.
L’Esprit de Guy Patin a cité saint Thomas d’Aquin d’après ce qu’en a écrit Jean-Baptiste Thiers dans son Traité des Superstitions, {a} livre troisième, page 223, chapitre v : {b}
« C’est pour cela, dit saint Thomas, que “ les médecins assurent qu’il faut prendre garde aux songes des malades afin de connaître leurs dispositions intérieures ”, Medici dicunt esse intendendum somniis ad cognoscendum interiores dispositiones. » {c}
- Tome premier, Paris, 1697, v. note [27] du Faux Patiniana II‑2.
- Intitulé : De la divination qui se fait par les songes. Qu’il y a de quatre sortes de songes. Que la divination des songes est superstitieuse. Qu’elle est ocndamnée par l’Écriture, par les ocnciles et par les écrivains ecclésiastiques. Exemples de cette divination.
- Dans une note de bas de page, Thiers donne la référence exacte de sa citation (scrupuleusement recopiée par le Faux Patiniana) : Somme théologique, section ii de la iie partie, question 95, La divination, article 6, La divination par les songes.
La suite de l’article est une réflexion des rédacteurs de L’Esprit de Guy Patin, qui se souvenaient de l’Ancien Testament, où Dieu confère à Joseph, fils de Jacob (dans la Genèse), au prophète Daniel (dans le livre éponyme), etc., le don d’interpréter les songes.
Article emprunté mot pour mot à la lettre du 18 janvier 1633 (v. ses notes [18] et [19]).
Les vers 269‑271 de la Satire citée sont ici précédés de leur traduction incomplète :
« J’aime mieux que Thersite {a} soit ton père, pourvu que tu ressembles au descendant d’Éaque, {b} et brandisses les armes de Vulcain, {c} plutôt que te savoir fils d’Achille, mais semblable à Thersite. »
- Dans L’Iliade d’Homère, Thersite est un soldat grec de vile extraction, qui engage ses frères d’armes à cesser le siège de Troie et à rentrer dans leur pays ; Ulysse remet les mutins dans leur devoir et punit publiquement leur meneur.
- Dans le mythe, Éaque, fils de Zeus et de la Nymphe Égine, est le grand-père d’Achille (v. notule {b}, note [48] du Borboniana 9 manuscrit).
- V. note [5], lettre 267.
La platitude du commentaire qui suit n’est guère dans l’esprit de Guy Patin.
Properce, vers 15‑22 de l’élégie citée :
« Qu’à elle seule leur loi des funérailles est heureuse aux époux d’Orient, que l’Aurore empourpre de ses chauds rayons ! Car quand la dernière lueur de la torche s’est jetée sur la couche fatale, la pieuse troupe des épouses se tient immobile, les cheveux épars, et elles engagent le combat de la mort : celle qui survivra à l’époux aura la honte de n’avoir pas été autorisée à trépasser ; les victorieuses, resplendissantes, présentent leurs poitrines à la flamme et posent leurs lèvres consumées sur celles de leur mari. »
Ma traduction prosaïque montre la justesse du propos que tenait ici L’Esprit de Guy Patin, voire de Guy Patin, sur « l’honneur des traductions ». D’après les catalogues que j’ai consultés, le président Claude Nicole (v. note [3], lettre 511) est le premier à avoir publié 13 des Élégies amoureuses de Properce, traduites en vers (Paris, Charles de Sercy, 1668, in‑8o de 68 pages), mais celle-là ne fait pas partie de son anthologie.
Distique de John Owen intitulé In Gaurum [Contre Gaurus] : {a}
« Tu ne loues rien, Gaurus, tu critiques tout : vois que si tu ne plais à personne, c’est que personne ne te plaît. »
- Épigramme 91, livre troisième, page 202 des Epigrammatum (Amsterdam, 1647, v. note [41] du Borboniana 10 manuscrit).
La référence à Owen disqualifie Guy Patin comme auteur de cet article de L’Esprit de Guy Patin.
Le passage mis entre guillemets anglais vient de la lettre du 18 janvier 1637 (v. ses notes [2] et [3]). La comédie jouée à l’hôtel de Richelieu était Le Cid de Pierre Corneille et le latin signifie « ce qui doit être remarqué dans la rigueur des temps où nous vivons » ; mais le commentaire de Guy Patin est bien plus spirituel que celui des rédacteurs de son Esprit.
Sous le masque d’un livre que Guy Patin aurait reçu en cadeau, cet article plagie l’addition d’Antoine Teissier sur Adrien Turnèbe {a} dans ses Éloges des hommes illustres tirés de l’Histoire de M. de Thou {b} (tome premier, pages 286‑288). Il y cite le dernier vers de l’épitaphe d’Henri Estienne {c} intitulée In Adr. Turnebi tumulum [Sur le tombeau d’Adrien Turnèbe], qui conclut cette anaphore :
Cur placuit cunctis Turnebus ? cur tot amici
Illi, vix hostes unus et alter erant ?
Cur placuit cunctis ? tot linguis lingua diserta
Totne illi potuit conciliare viros ?
Cur placuit cunctis ? an quod certare videbant
Iudicii dotes dotibus ingenii ?
Cur placuit cunctis ? cunctas placuitne quod artes
Excoluit Graias, excoluit Latias ?
Cur placuit cunctis ? an quod totusque lepores
Spiraret, totus quod lepidosque sales ?
Causæ equidem sunt hæ : sed et hæc est maxima causa,
Hic placuit cunctis quod sibi non placuit.[Pourquoi Turnèbe a-t-il plu à tout le monde ? Pourquoi a-t-il eu tant d’amis, et à peine un ou deux ennemis ?
Pourquoi a-t-il plu à tout le monde ? Est-ce par son aisance en tant de langues qu’il s’est concilié tant d’hommes ?
Pourquoi a-t-il plu à tout le monde ? Est-ce par la pertinence de son jugement, qui semblait rivaliser avec la pénétration de son intelligence ?
Pourquoi a-t-il plu à tout le monde ? N’est-ce pas parce qu’il a cultivé toutes les lettres, grecques comme latines ?
Pourquoi a-t-il plu à tout le monde ? Est-ce parce que sa personne tout entière exhalait toutes les grâces et les rendait piquantes ?
Voilà bien des raisons, mais la première de toutes est qu’il a plu à tout le monde parce qu’il ne s’est pas complu à lui-même]. {d}
- V. note [20], lettre 392.
- Genève, 1683, v. supra note [13].
- V. note [31], lettre 406.
- Cette épitaphe est imprimée dans l’épître dédicatoire, Henricus Stephanus Ioach. Camerario suo S.D. [Henri Estienne salue son ami Joachim Camerarius], {i} à la page **.iii vo des :
Herodoti Halicarnassei historiæ lib. ix, et de vita Homeri libellus. Illi ex interpretatione Laur. Vallæ adscripta, hic ex interpret. Conradi Heresbachii : utraque ab Henrico Stephano recognita. Et Ctesia excerptæ historiæ. Icones quarundam memorabilium structurarum. Apologia Henr. Stephani pro Herodoto.[Neuf livres de l’Histoire d’Hérodote d’Halicarnasse, {ii} et le petit livre sur la Vie d’Homère : les uns dans la traduction de Lorenzo Valla, et l’autre, dans celle de Konrad Heresbach ; toutes deux revues par Henri Estienne. Avec les fragments de l’Histoire de Ctesias, {iii} les images de quelques monuments mémorables, l’Apologie pour Hérodote d’Henri Estienne]. {iv}
- Joachim Camermeister, v. note [22], lettre 352.
- V. note [31], lettre 406.
- Historien grec de la Perse et de l’Inde au ve s. av. J.‑C.
- Sans lieu [Genève], Henri Estienne, 1566, in‑fo de 256 pages, pour la première d’une dizaine d’éditions ; le sous-titre vante la primeur de cette traduction latine du texte grec :
Eiusdem H. Steph. de hac sua editione distichon,Herodoti Latium possederat hactenus umbram,
Nunc Latium corpus possidet Herodoti.[Distique du dit H. Estienne sur l’édition qu’il a donnée,
Jusqu’ici la latinité n’avait possédé que l’ombre d’Hérodote, désormais elle possédera le corps d’Hérodote].
Turnèbe a publié quatre traités d’histoire naturelle de Théophraste d’Érèse (v. note [7], lettre 115), je ne les ai trouvés réunis que dans ses Opera (Strasbourg, 1600, v. note [50] du Borboniana 3 manuscrit). Le tome ii, Versiones selectorum quorundam librorum [Traductions de quelques livres choisis], partie ii, contient quatre traités de Théophraste :
Dans son second paragraphe sur Adrien Turnèbe, L’Esprit de Guy Patin continuait à copier Antoine Teissier (v. supra note [59]), commentant l’éloge que Jacques-Auguste i de Thou lui a rendu dans son Histoire universelle.
Andely ou Andeli (Trévoux), en latin « Andelium, Andeliacum, ou plutôt Andilegum, est le nom de deux lieux de Normandie {a} qu’on nomme communément les Andelys. Le grand Andely est une petite ville située entre deux montagnes sur le Gambon, à un quart de lieue de la Seine, {b} et le petit Andely est un bourg sur la Seine à l’embouchure du Gambon. Le grand Andeli est la patrie du < sic > Poussin, de Turnèbe et des deux Corneille. {c} Il y avait dans ce lieu une abbaye célèbre de filles, fondée par sainte Clotilde et détruite vers l’an 900, à laquelle a succédé une collégiale de chanoines séculiers. »
Après de Thou, Teissier citait les trente livres des Adversaria [Cahiers (philologiques)] d’Adrien Turnèbe] (Strasbourg, 1604, v. note [2], lettre 1019).
Les six autres ouvrages d’Adrien Turnèbe que mentionnait ici L’Esprit de Guy Patin sont imprimés dans les trois tomes de ses Opera [Œuvres] (Strasbourg, 1600, v. supra note [59]) :
Tout cela est étranger à Guy Patin, bibliomane très averti qui n’aurait pu ignorer les catalogues des libraires au point de demander à un ami de lui procurer les éditions séparées d’ouvrages de Turnèbe, dont l’essentiel avait été réuni dans ses Opera (Strasbourg, 1600).
Fin de la lettre que Guy Patin a écrite à Claude ii Belin le 18 janvier 1637 : v. ses notes [10]‑[12], avec l’éclaircissement de toutes les abréviations employées par L’Esprit de Guy Patin.
« Lorsque les Sabins eurent enfermé le vieux Janus, ce fut partout le signe d’une paix florissante : il n’y a aucun salut dans la guerre, le monde entier réclame la paix. Et nous, avons-nous enfermé un vigoureux Janus ? Qu’en adviendra-t-il ? »
L’Esprit de Guy Patin a transcrit un fragment (mis entre guillemets anglais) de la lettre du 10 mars 1638 : v. ses notes [5]‑[7]. Le commentaire qui suit, sur la médecine et la guerre, émane de ses compilateurs, aussi dénués de scrupules que de sel.
Properce, vers 49 de l’élégie citée : « Il y a aux enfers des belles par milliers. »
Ces leçons galantes itératives ne sont décidément pas dans l’esprit de Guy Patin, même en les saupoudrant de prédestination (v. note [50], lettre 101) et de mépris des femmes.
Horace, vers 21‑28 de l’ode citée, précédés, entre guillemets français, de leur libre version française, que je traduis plus littéralement par :
« Tu devras abandonner et ta terre, et ta demeure, et ton épouse aimante ; et de ces arbres que tu cultives, hors d’odieux cyprès, nul ne suivra son maître éphémère. Un héritier plus digne épuisera ces vins du Cæcubus {a} que tu avais protégés derrière cent clefs, et il teindra ton pavé de ce superbe cru, plutôt fait pour les festins des pontifes. » {b}
- Le Cæcubus ager était une plaine du Latium (Campanie) réputée pour ses vins, cécube en français (Littré DLF).
- Grands prêtres de la Rome antique.
Cette citation n’est pas vraiment un vers de Joachim Du Bellay {a} et n’était guère sa manière ordinaire de jurer. C’est l’adaptation d’un extrait de son Épître au lecteur, écrite en prose et placée en tête de L’Olive et autres œuvres poétiques de Joachim Du Bellay, gentilhomme angevin, {b} pages 5 ro‑vo :
« Quelques-uns, voyant que je finissais ou m’efforçais de finir mes sonnets par cette grâce {c} qu’entre les autres langues, s’est fait propre l’épigramme français, {d} diligence qu’on peut facilement reconnaître aux œuvres de Cassola, Italien, {e} disent, pour cette raison, que je l’ai imité ; bien que de ce temps-là, il ne me fût connu seulement de nom, ou Apollon jamais ne me soit en aide. {f} Je ne me suis beaucoup travaillé en mes écrits de ressembler autre que moi-même. »
- V. note [14], lettre 739.
- Paris, Fédéric Morel, 1568, in‑8o de 143 pages.
- Ce que L’Esprit de Guy Patin appelait « une pointe ».
- Emploi, alors courant, du mot épigramme au masculin, v. notre glossaire.
- Luigi Cassola (vers 1480-vers 1540), poète italien natif de Reggio d’Émilie, surtout connu pour ses Madrigali [Madrigaux].
- Mise en exergue des mots cités (et prolongés) par le Faux Patiniana. Lui-même se serait-il ainsi mépris sur la source ?
Cette Épitaphe de l’auteur composé<e> par lui-même, quelque temps avant son trépas {a} est la première des Épitaphes, et autres poésies sur la mort de Joachim Du Bellay, gentilhomme angevin et excellent poète de ce temps, qui sont imprimées à la suite de son :
Épithalame sur le mariage de très illustre prince Philibert Emmanuel, duc de Savoie et très illustre princesse Marguerite de France, sœur unique du roi, et duchesse de Berry {b}, par J. Du Bellay, gentilhomme angevin. {c}
Elle est accompagnée de deux traductions en vers français (pages 58 vo‑59 ro), dont voici la première, par Jean Morel d’Embrun : {d}
« De noble race et maison ancienne
(Ce que mon nom assez te montrera)
Issu je suis. Or cette tombe mienne
M’enclôt (passant) tant qu’au Seigneur plaira.
Du Bellay suis, celui qui fut poète
(Assez par là tous me discerneront),
Bon ou mauvais, si savoir tu souhaites,
Mes vers bien lus mieux te le montreront.
Ceci de moi seulement te puis dire :
Que je fus bon et n’ai par mes écrits
Blessé les bons. Toi donc, ne veuille nuire,
Si tu es bon, à nos muets esprits. »
- Le 1er janvier 1560.
- V. notes [5], lettre 359, et [49] du Borboniana 10 manuscrit.
- Paris, Fédéric Morel, 1568, in‑8o de 160 pages.
- Littérateur français, autrement appelé Morel de Grigny (1511-1581).
Dire du mal des gens, tant morts que vivants, étant une distraction favorite de Guy Patin, il est difficile de lui attribuer le commentaire qui suit ces vers dans L’Esprit de Guy Patin. V. notule {a}, note [42] du Borboniana 7 manuscrit, pour l’archevêché de Bordeaux, dont une mort prématurée ôta la jouissance à Joachim Du Bellay.
Quatrain de John Owen {a} intitulé F.A.S. : {b}
« Dieu permet de monter aux cieux par l’Espoir, par l’Amour et par la Foi.
Dieu ne permet pas d’entrer aux cieux sans ces trois vertus.
L’Espoir est assis à la gauche de l’Amour, et la Foi, à sa droite ;
Placé au milieu, l’Amour se montre la plus grande vertu. »
- Épigramme 33, livre troisième, page 195 (Amsterdam, 1647, v. supra note [57]).
- Avec une note expliquant que ce sont les trois initiales de Fides [Foi], Amor [Amour] et Spes [Espoir], formant le mot Fas [Ce que permet la volonté divine], dont le contraire est Nefas.
Il n’y a là ni acrostiche (à proprement parler, v. supra note [16]), ni anagramme (réarrangement des lettres d’un ou plusieurs mots pour en faire un ou plusieurs autres), ni élan poétique admirable. Le principal intérêt de cet article est lexicographique : acrostiche a pu avoir, dès le début du xviiie s., le sens d’acronyme, américanisme récent (acronym, sigle dont les initiales forment un mot prononçable, comme ici fas), qui n’a officiellement vu le jour qu’au xxe s. (Oxford English Dictionary). Cette curiosité et l’emprunt à Owen en font une production originale des rédacteurs de L’Esprit de Guy Patin.
Emprunt à la lettre du 12 novembre 1639 (dont le manuscrit a été conservé) : v. sa note [4], pour un renvoi vers Barthélemy Pardoux (Perdulcis), sa « Médecine universelle » (Universa medicina) et son traité « sur les Maladies de l’esprit ».
Le commentaire qui suit, sur les errata, est une addition des rédacteurs de L’Esprit de Guy Patin.
Tout ce badinage, dont la dernière phrase est obscure, est d’un goût douteux quand on sait le triste sort qu’a connu la bibliothèque de Guy Patin.
Ces deux vers sont extraits de l’épitaphe (écrite en partie par lui-même) d’Adam de Saint-Victor ; {a} on la lit entre autres dans les :
Œuvres mêlées d’Étienne Pasquier. {b} Contenant plusieurs discours moraux, lettres amoureuses et matières d’État, comme aux deux précédents volumes. Tome troisième. {c}
Elle y est la première des Versions françaises du latin, les unes vers pour vers, les autres par imitation, page 542‑543 :
« Épitaphe de Frère Adam, religieux de Saint-Victor à Paris, gravé<e> en airain au cloître du monastère.
Hæres peccati, natura filius iræ,
Exiliique reus nascitur omnis homo.
Unde superbit homo, cujus conceptio culpa,
Nasci pœna, laboris vita, necesse mori ?
Vana salus hominis, vanus decor, omnia vana :
Inter vana nihil vanius est homine.
Dum magis alludit præsentis gloria vitæ,
Præterit, imo fugit, non fugit, imo perit.
Post hominem vermis, porst vermem sit cinis : heu ! heu !
Sic redit ad cineres gloria nostra simul.
Hic ego qui jaceo miser, et miserabilis Adam,
Unam pro summo munere posco precem.
Peccavi, fateor, veniam peto, parce fatenti,
Parce pater, fratres parcite, parce Deus.Version.
Héritier du péché, enfant d’ire et d’envie,
Banni pour son forfait, l’homme ici prend sa vie :
Dont vient l’orgueil en lui, qui de coulpe engendré,
Naît en ris, vite en peine, et meurt bon gré mal gré ? {d}
Vains espoirs, vains honneurs, tout est vain : mais en somme,
Entre les vanités rien n’est si vain que l’homme :
Lors que plus il se flatte, et dans sa gloire rit,
Elle se passe, ains fuit, ne s’enfuit, ains périt. {e}
D’homme il se change en vers, de vers il devient cendre :
Ainsi voit-on hélas : sa gloire en rien descendre.
Moi, pauvre Adam, qui gis misérable en ce lieu,
Une oraison je quiers {f} pour mon dernier adieu :
J’ai péché, je l’avoue, hé ! pardon frères, père,
Pardon, Dieu, veuille-moi loger en ton repère.É. Pasquier. »
- Poète et musicien français, chantre de Notre-Dame de Paris et religieux de l’abbaye Saint-Victor (v. note [2], lettre 877) au xiie s.
- V. note [16], lettre 151, pour Étienne Pasquier, mort en 1615.
- Paris, Jean Petit-Pas, 1619, in‑8o de 799 pages.
- J’ai mis en exergue les deux vers cités par L’Esprit de Guy Patin et leur traduction par Pasquier. En voici une version plus littérale :
« De quoi l’homme s’enorgueillit-il donc, lui qui a été conçu dans le péché [coulpe], qui est né dans la souffrance, qui a vécu dans le labeur, qui meurt par obligation ? »- Pour dire : « elle [sa gloire] passe, alors il [l’homme] fuit ; elle ne fuit pas, alors il périt. »
- Demande.
Il serait bien audacieux d’attribuer à Guy Patin les commentaires qui précèdent et suivent ce distique misanthropique.
Extrait de la lettre du 22 août 1641, v. ses notes [3]‑[5], avec deux citations latines :
Le commentaire qui suit est d’origine incertaine : Guy Patin (mais il dédaignait profondément les universités autres que celle de Paris, qu’il appelait « étrangères ») ou les rédacteurs de son Esprit ?
« épigramme 59, 3e centurie :
“ Le pape Pie v est mort : chose admirable en vérité, que parmi tant de saints, il y en ait seulement eu cinq du nom de pieux ! ” »
Emprunt à la lettre du 12 octobre 1641, v. ses notes [2] et [3]. Le commentaire qui suit ne vient pas d’une lettre aujourd’hui connue de Guy Patin.
Juvénal (vers 104‑105 de la Satire xiii, v. note [13], lettre 198) :
« Beaucoup commettent mêmes forfaits sans encourir mêmes peines : pour prix de leur crime, on en a crucifié un et couronné un autre. »
Dans ses lettres, Guy Patin a cité sept fois le second de ces deux vers, mais sans l’assortir du commentaire qu’on lit ici. V. note [23], lettre 206, pour la nuance qu’il établissait entre honoraire et salaire.
« Madame Chicane », que Patin a souvent maudite, apparaît sous la plume de plusieurs écrivains du xviie s. comme, par exemple, dans les Satires du poète et avocat Jacques Du Lorens (1580-1655), « président de Chasteau-neuf », {a} satire xii, page 90, sur un confrère fort affairé :
« Il faut comme Cerbère {b} avoir au moins trois têtes,
Avocat en son temps plus fameux au barreau
que Macette au bordel, {c} le plus fort de cerveau
Qui jamais ait paru chez Madame Chicane,
Sans savoir que c’était que de faire la cane, {d}
Toujours prêt à plaider et ab hoc et ab hac, {e}
Eût-il vu seulement l’étiquette du sac ; {f}
Au reste aussi lettré que routier en pratique, {g}
Confit extrêmement en l’art de rhétorique. »
- Paris, Antoine de Sommaville, 1646, in‑4o de 206 pages.
- V. notule {e}, note [29] du Borboniana 6 manuscrit.
- Maquerelle sur qui Mathurin Régnier (v. note [23] du Borboniana 10 manuscrit) a écrit une satire intitulée Macette ou l’hypocrisie déconcertée.
- « On dit qu’un homme fait la cane pour dire qu’il recule par lâcheté dans les entreprises périlleuses, ou qu’il manque à ce qu’il s’était vanté de faire, à cause que les canes sont si timides qu’elles baissent la tête en passant par une porte, quelque haute qu’elle soit » (Furetière).
- À tort et à travers.
- Sans connaître le dossier, v. note [31], lettre 498.
- « Routier se dit figurément en morale des gens prudents qui connaissent les choses par pratique et expérience : ce capitaine est un vieux routier qui sait toutes les ruses de guerre ; ce procureur est un vieux routier qui sait toutes celles de la chicane » (Furetière).
« le dévoreur des histoires antiques. […] armé pour l’un comme pour l’autre ».
Les Éloges des hommes savants tirés de l’Histoire de M. de Thou d’Antoine Teissier, {a} sur Onofrio Panvino, {b} tome premier, pages 340‑343, ont procuré la matière de cet article.
Dans ses Epistolarum libri xii [Douze livres d’Épîtres], {c} l’érudit imprimeur vénitien Paul Manuce {d} écrivait (de Venise, sans date) à Antonius Augustinus, légat pontifical à Vienne (Autriche), livre ii, page 41 vo :
Onuphrius Panvinius, ille antiquitatis heluo, spectatæ juvenis industriæ, et ingenio, ut probitate, præstans, hic est, eritque, ut video, in aliquot menses imprimit suos Fastos cum commentariis.[Onofrio Panvinio, ce dévoreur d’antiquité, lui qui se fait et, me semble-t-il, se fera remarquer pour l’admirable précocité de son talent et pour son intelligence, imprimera dans quelques mois ses Fastes avec commentaires]. {e}
- Genève, 1683, v. supra note [13].
- V. note [2], lettre 117.
- Venise, Alde, 1561, in‑8o de 474 pages, pour l’une de nombreuses éditions.
- V. note [16], lettre latine 38.
- Onuphrii Panvinii Veronensis fratris eremitæ Augustiniani Fastorum libri v a Romulo Rege usque ad Imp. Cæsarem Carolum v Austrium Augustum. Eiusdem in Fastorum libros Commenrarii in quis infiniti variorum auctorum loci, præcipue vero Historicorum, partim exponintur partim emendantur. His accedit Appendix in qua : Imperatorum et Consulum ordinariorum Fasti a CæsareDictatore usque ad Iustinianum Augsutum, ab Onuphrio concinnati ; M. Verrii Flacci Consularia et Triumphalia Fragmenta ; M. Aurelii Cassiodori, Prosperi Aquitanici, Incerti auctoris, Marcellini Comitis Chronica.
[Les cinq livres des Fastes {i} d’Onofrio Panvinio, ermite de Saint-Augustin natif de Vérone, depuis le roi Romulus jusqu’à Charles Quint, auguste empereur d’Autriche ; ses Commentaires sur les livres des Fastes, où une infinité de passages de divers auteurs, principalement historiens, sont à la fois expliqués et corrigés. S’y ajoute un Appendice contenant : les Fastes des empereurs et consuls ordinaires depuis le dictateur César jusqu’à l’empereur Justinien, colligés par Onofrio ; les Fragments consulaires et triomphaux de Marcus Verrius Flaccus ; {ii} les Chroniques de Magnus Aurelius Cassiodorus, {iii} de Prosperus Aquitanicus, {iv} de Marcellinus Comes {v} et d’un auteur incertain]. {vi}
- Annales.
- Philologue latin mort en l’an 20 de l’ère chrétienne, dont Pompeius Festus a abrégé le lexique : v. note [12], lettre 460
- Historien du vie s., v. notule {a}, note [16] du Patiniana I‑2.
- Prosper d’Aquitaine, écrivain chrétien du ve s. qui a notamment prolongé la Chronique de saint Jérôme.
- Dit le comte Marcellin, chroniqueur chrétien du vie s.
- Heidelberg, Officina Sanctandreana, 1588, in‑fo, augmentation de la précédente édition (Venise, 1558).
Cette liste de quelques-uns des ouvrages publiés par Onofrio Panvinio est empruntée à l’addition d’Antoine Teissier sur son éloge (v. supra note [74]) :
[Éloges de 27 souverains pontifes et leurs portraits gravés, très exactement dessinés au vif] ; {a}
[Trois livres : i. Des Jeux séculaires ; ii. Des Sibylles et des chants sibyllins ; iii. Des anciens Noms des Romains]. {b}
« Car j’ai moi-même, dit-il, la plus grande aversion pour de tels monstres ; et si je veux m’amuser d’un fou, je ne vais pas le chercher bien loin : je me vois et j’en ris. »
Emprunt à la lettre du 24 mai 1642, v. ses notes [1] et [2]. Le commentaire qui suit y est différent, il me semble donc prudent d’en laisser la paternité aux rédacteurs de L’Esprit de Guy Patin.