1. |
V. note [9], lettre 62, pour le cardinal Guido Bentivoglio, pour sa mort, le 7 septembre 1644, qui l’empêcha de succéder à Urbain viii, et pour les Relationi [Relations] de ses nonciatures en Flandre et en France (Cologne, 1629, traduites en français, Paris, 1642). Additions et corrections du P. de Vitry « Le cardinal Bentivoglio mourut en 1644, âgé de 67 ans. Sa vie fut imprimée sous le titre de Memorie del Card. Bentivoglio, à Venise en 1648, {a} et depuis, en plusieurs autres lieux. » |
2. |
« comme mâle, féconder une autre personne et, comme femelle, se féconder soi-même. » Le Dictionnaire de Trévoux définit l’hermaphrodite, ainsi nommé par référence à l’enfant mythique d’Hermès (Mercure, v. note [7], lettre latine 255) et d’Aphrodite (Vénus, v. note [2], lettre latine 365), {a} comme : « celui qui a les deux sexes ou deux natures, d’homme et de femme. La marque de l’un et de l’autre sexe est d’ordinaire imparfaite. On distingue quatre espèces d’hermaphrodites : la quatrième sont les parfaits hermaphrodites ; il est très rare d’en trouver ; on prétend cependant qu’il y en a, qu’on a même vu deux hermaphrodites mariés ensemble qui eurent des enfants l’un de l’autre. […] D’autres ne croient point tout ce qu’on en dit, et prétendent que la mauvaise conformation des parties qui servent à la génération, les testicules cachés dans les hommes, et le clitoris plus long qu’à l’ordinaire dans les femmes, ont trompé ceux qui ont fait ces remarques. » Ambroise Paré, au livre vingt-cinquième, des Monstres, chapitre vi, Des Hermaphrodites ou Androgynes, c’est-à-dire qui en un même corps ont deux sexes (Œuvres…, Paris, Nicolas Buon, 1628, in‑fo, 8e édition), a distingué ces quatre sortes d’hermaphrodites (page 1015) : « Or, quant à la cause, c’est que la femme fournit autant de semence que l’homme proportionnément, et pour ce, la vertu formatrice, qui toujours tâche à faire son semblable, à savoir de la matière masculine un mâle, et de la féminine, une femelle, fait qu’en un même corps sont trouvés quelquefois les deux sexes, que l’on nomme hermaphrodites, desquels il y a quatre différences, à savoir : |
3. |
Gabriel Naudé citait quatre références sur les hermaphrodites.
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4. |
« Notre chère Grèce s’est exilée de l’autre côté des Alpes. »
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5. |
Écrire et imprimer que les superstitions « font la puissance de l’empire monastique » est une audace libertine qui dépasse en virulence et en aplomb tout ce que Guy Patin a pu oser contre les moines dans ses lettres. V. notes [4], lettre 692, et [18]‑[19] du Borboniana 8 manuscrit pour l’empereur germanique Maximilien ier (1493-1519), fils et successeur de Frédéric iii. La dispute sur les livres judaïques eut lieu à Cologne et à Francfort en 1510. Elle avait été déclenchée par le pamphlet de Johannes Pfefferkorn (1469-1524), boucher juif de Cologne, converti au catholicisme, qui réclamait l’autodafé. |
6. |
Petrus Galatinus (Pietro Colonna Galatino ; Galatina, Pouilles vers 1460-Rome vers 1540), moine dans l’Ordre des frères mineurs, était érudit en latin, grec et hébreu, et s’est illustré par ses études théologiques et orientalistes. V. note [15], lettre 97, pour Martin Luther, dont la révolte de 1517 contre la papauté fut l’acte fondateur de la Réforme protestante. Les Ioannis Reuchlin Phorcensis Ll. Doc. De Arte cabalistica Libri tres Leoni x. dicati [Trois livres de Johann Reuchlin, docteur ès lettres natif de Pforzheim, sur l’Art cabalistique, dédiés à Léon x] {a} relatent un dialogue entre le cabaliste juif Simon, le philosophe pythagoricien Philolaos {b} et le mahométan converti Marranus, dissertant sur le sens caché du Pentateuque {c} et du Talmud, {d} au moyen de la Cabale. {e} Ajouté à la querelle de l’autodafé, ce livre valut à Reuchlin d’être traduit pour hérésie devant l’Inquisition de Mayence.
La Vie d’Érasme, dans laquelle on trouvera l’histoire de plusieurs hommes célèbres avec lesquels il a été en liaison, l’analyse critique de ses ouvrages, et l’examen impartial de ses sentiments en matière de religion, par Jean Levesque de Burigny, {a} a décrit les interventions d’Érasme, dans sa correspondance, en faveur de Reuchlin (tome premier, pages 231‑234) : « Lorsqu’il était pendant {b} à Rome, Érasme écrivait au pape Léon x {c} que Reuchlin était un homme du premier mérite dans tous les genres de sciences ; qu’il était le phénix et l’honneur de l’Allemagne. Il sollicita pour lui dans les termes les plus pressants les cardinaux Grimani et de Saint-Georges : {d} il les assure qu’en protégeant Reuchlin, ils rendront un service essentiel aux sciences et aux gens de lettres, qui en conserveront une reconnaissance infinie. C’était plutôt par esprit de justice et par l’estime singulière qu’il avait pour Reuchlin qu’il prenait ainsi son parti. Ils avaient peu de liaison ensemble : Érasme ne vit qu’une seule fois Reuchlin à Francfort ; il est vrai qu’ils avaient commerce de lettres. Érasme lui écrivait pour lui donner d’excellents conseils : il l’avertissait de ne point traiter ses adversaires avec un si grand mépris et de ne pas attaquer un Ordre entier, {e} sous prétexte qu’il avait sujet de se plaindre de quelques particuliers. […] Le désaccord des deux humanistes sur la manière de nommer et prononcer la 7e lettre de l’alphabet grec, η, a laissé des traces en philologie : Reuchlin avait choisi le son i, créant l’iotacisme où η se dit ita ; mais plus tard, dans son Dialogus de recta Latini Græcique sermonis pronuntiatione [Dialogue sur la prononciation correcte du discours latin et grec] (Paris, 1547, v. note [6] du Faux Patiniana II‑5), Érasme opta pour le son ê, créant l’êtacisme où η se dit êta. V. notes [11] et [12] du Borboniana 3 manuscrit pour d’autres avis sur cette querelle philologique. Speculum oculare [Le Miroir oculaire] est la traduction latine du titre allemand, Der Augenspiegel, du livre que Reuchlin a fait paraître en 1511 (Tübingen, in‑4o), dont le frontispice est orné d’une paire de bésicles ; il répondait à la série de livres que Pfefferkorn (v. supra note [5]) avait publiés pour demander l’autodafé des livres judaïques : Der Judenspiegel [Le Miroir des juifs] (1507), Der Warnungsspiegel [Le Miroir de mise en garde] (1508), Der Handspiegel [Le Miroir à main] (1511), etc. Les fos xxi‑xxxii de l’Augenspiegel de Reuchlin sont rédigés en latin ; il y défend le Talmud (v. note [2], lettre latine 233) en attaquant bien plutôt Pfefferkorn que les moines. Additions et corrections du P. de Vitry « On peut rectifier cet article sur la nouvelle vie de Reuchlin que M. Majus a donnée, {a} et sur ce que M. Bayle en a remarqué sous le nom d’Hochstrat. » {b} |
7. |
Capelan est une altération péjorative de chapelain : « pauvre prêtre qui cherche l’occasion de desservir quelque chapelle, d’aller dire la messe pour quelqu’un. Cet homme se dit abbé, et ce n’est qu’un pauvre capelan » (Furetière). Urbain viii (v. note [192], lettre 34) était le pape qui détestait Richelieu en 1632-1633 : pour sa politique étrangère, dirigée contre les Habsbourg d’Espagne et d’Autriche, et pour son attitude devenue conciliante à l’égard des réformés français. V. note [12], lettre 59, pour le cardinal Bagni (Gianfrancesco Guido di Bagno) qui avait été nonce apostolique à Paris de 1627 à 1630, et dont Gabriel Naudé avait été le bibliothécaire en Italie de 1631 à 1642. On peut ici sérieusement se demander si, sous cette couverture, Naudé ne fut pas agent de Richelieu en Italie : cela expliquerait que, neuf mois avant sa mort, le cardinal-ministre ait confié le soin de sa bibliothèque à Naudé dès son retour en France, en mars 1642 (v. note [6] du Naudæana 4). |
8. |
Le nom latin complet des tablettes antiques d’écriture est pugillares ceræ [tablettes (de bois enduites) de cire], synonyme de tabulæ. Le mot dérive de pugnus [poing] (qui a aussi donné pugil, boxeur), en lien avec le fait qu’elles tenaient dans la main. Elles étaient réutilisables après en avoir remplacé la cire (soit avoir fait tabula rasa, « table rase »). Le papyrus (à l’origine du mot « papier », charta en latin), tiré de l’écorce des roseaux, était la principale, sinon unique, source végétale de support pour l’écriture depuis la plus haute Antquité ; mais, dans l’Empire romain, il était plus côuteux que les tablettes, car l’Égypte avait le monopole de sa fabrication et de son exportation. Le parchemin (v. note [15], lettre 117) s’y est plus tard substitué.En Europe, le papier, tiré du chanvre (v. note [9], lettre 353), du lin ou de coton (venu d’Inde), n’a été introduit qu’aux xie‑xiie s., par l’intermédiaire des Arabes, à l’imitation des Chinois et des Japonais, qui l’utilisaient déjà plusieurs siècles avant le début de l’ère chrétienne. On n’a commencé à tisser ces fibres pour en faire du linge que deux siècles après. Les anciens Romains et leurs successeurs du Moyen-Âge se vêtaient de laine. Le lin et le chanvre (lineæ) ne leur servaient qu’a tresser des cordes. V. notes [4], lettre de Claude ii Belin, datée du 4 mars 1657, pour le pantagruélion dans le Tiers Livre de Rabelais, et [30], lettre 279, pour Charles vii, roi de France de 1422 à 1461, qui avait épousé Marie d’Anjou quelques mois avant de monter sur le trône. Additions et corrections du P. de Vitry « Pugillares. Ce serait ici l’occasion de traiter de ce qui servit autrefois aux Anciens pour écrire ; mais cette matière mérite bien qu’on lui destine une dissertation entière. Ainsi, on se contentera d’indiquer ici ceux qui en ont écrit le plus judicieusement et avec plus de recherches. Voyez : Hermann. Hugo de primo scrib. orig. cap. 10 et seq. ; {a} Salmasius in Vopiscum ; {b} P. Mabillon de re Diplomat. lib. i, cap. 8 ; {c} et Is. Vossius in notis Catullianis. {d} |
9. |
« avec autorité ». |
10. |
Carême (Furetière) : « Temps de pénitence où l’on jeûne 40 jours pour se préparer à célébrer la fête de Pâques. Il faut faire une dette payable à Pâques pour trouver le carême court. Les anciens Latins faisaient trois carêmes : le grand, devant Pâques ; l’autre, devant Noël, qu’on appelait de la Saint-Martin ; et l’autre, de Saint-Jean-Baptiste ; {a} tous trois de quarante jours. Les Grecs en observaient quatre, qu’ils nommaient de Pâques, des Apôtres, de l’Assomption et de Noël. Les jacobites en font un cinquième, qu’ils appellent de la pénitence de Ninive ; les chaldéens et les nestoriens, de même. Les maronites en font six, y ajoutant celui de l’Exaltation de la sainte Croix. Les arméniens en font huit de différente durée. {b} Le carême est bas, quand il commence en février, et il est haut, quand il commence en mars. La mi-carême est une fête où les harengères se réjouissent : c’est le jeudi qui est au milieu du carême. Faire le carême, c’est observer les règles du jeûne ; rompre le carême, c’est y contrevenir, manger gras. On dit qu’on fait faire un long carême à quelqu’un quand on l’a longtemps privé de quelque chose qu’il aimait bien. On appelle fruits de carême, les fruits secs et réservés pour le carême, comme raisins, figues, pruneaux, brignoles, {c} etc. ; viandes de carême, le poisson et tous les autres mets, à la réserve de la chair. Ce mot vient de quadragesima. » {d} Gabriel Naudé se référait à trois auteurs qui ont écrit sur le jeûne du carême.
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11. |
« il a aussi écrit un poème bucolique. » Jean Boccace (Giovanni Boccaccio), fils naturel d’un riche banquier florentin, était né en 1313 à Certaldo, petite ville de Toscane, située une quarantaine de kilomètres au sud-ouest de Florence. Après des études en droit canonique, notamment menées à Paris, il se consacra à la littérature : fervent admirateur de Dante (v. note [10] du Patiniana I‑3) et ami de Pétrarque (v. note [17], lettre 93), il renonça à jamais les égaler et se consacra principalement à la prose. Son chef-d’œuvre éternel et universel a été le Décaméron, recueil de cent nouvelles écrites en italien entre 1349-1353 : ayant fui Florence envahie par la peste, une « brigade » de dix jeunes gens, sept femmes et trois hommes, se retirent à la campagne ; pendant dix journées (déka êmérai en grec), ils créent et se racontent tour à tour des histoires à contenu courtois et philosophique, souvent éloigné de la morale convenue, voire scandaleux. Boccace mourut dans sa ville natale en 1375. Ses autres œuvres citées ici par Gabriel Naudé sont latines :
Additions et corrections du P. de Vitry « Jean Boccace. On pourra consulter l’éloge que Papire Masson a fait de Boccace, qui fut premièrement imprimé avec ceux de Dante et de Pétrarque à Paris en 1587. {a} Depuis, M. Ballesdens l’inséra dans le 2e tome des Éloges du même Masson, qu’il publia en 1638. » {b} |
12. |
« Le Labyrinthe d’amour », Il Laberinto d’Amore, est le sous-titre du livre intitulé Il Corbaccio [Le Corbeau], parfois traduit en français sous le nom de Songe de Boccace. Il l’a écrit entre 1354-1355 ; on lui a donné un autre sous-titre latin qui en expose l’argument : sive contra sceleratam viduam et alias feminas invectivæ [ou les invectives contre une veuve scélérate et d’autres femmes]. |
13. |
Nouvelle iii de la première journée du Décaméron (traduction française de Francisque Reynard, Paris, G. Charpentier, 1879, in‑12, tome 1, pages 51‑55) : Le juif Melchissedech, avec une histoire de trois anneaux, évite un piège dangereux que Saladin lui avait tendu (avec méprise de Gabriel Naudé sur un diamant au lieu de trois anneaux). Dans son Traité et dispute contre les équivoques. Traduit du latin… {a}, John Barnes, {b} sans nommer Boccace, a résumé et commenté son conte (pages 127‑129) : « Nous pouvons rapporter en ce lieu ce qu’un juif, insigne imposteur et athée, disait à un certain empereur des Turcs qui lui demandait ce qui lui semblait des trois religions, savoir la chrétienne, la juive et la mahométane, et quelle était la meilleure. Il répondit que Dieu y avait procédé par simulation et qu’il avait usé d’une certaine feinte dispensatoire au fait de ces trois religions, afin de nous ôter la connaissance < de > laquelle était en possession de la vraie vérité. Et que Dieu en avait fait comme un certain père de famille qui avait trois filles {c} qu’il aimait uniquement, chacune desquelles aspirait d’être déclarée héritière par le testament de son père. Lequel en ayant connaissance, il s’avisa d’une subtilité pour terminer pour l’heure les disputes de ses filles et les retenir en paix. Ce fut qu’il fit son testament, par lequel il institua son héritière celle qui, après le décès du père, représenterait {d} l’anneau d’or d’icelui, où étaient gravées les armes de sa Maison, et avec lequel il avait coutume de sceller les actes qu’il passait pendant qu’il était vivant. Cela fait, il fit faire, en cachette de ses filles, trois {e} anneaux si semblables qu’il n’y avait moyen d’y mettre différence, ni reconnaître quel était l’anneau véritable du père. Il les appela chacune à part et bailla à chacune d’elles un de ces trois anneaux, avec grande protestation de retenir l’affaire secrète, de peur que, venant à la découvrir, cela ne causât plus grandes querelles entre elles. Chacune ayant son anneau fut grandement réjouie, ayant certaine espérance d’avoir la succession de son père. Après que le père fut décédé, chacune croyant être dépositaire de l’anneau vrai de son père, demanda la succession ; mais, étant impossible de reconnaître entre les trois anneaux quel était celui que le testateur soulait porter, {f} il survint un grand procès et dispute douteuse {g} entre elles, qui ne peuvent être terminés jusqu’à ce que le testateur, revenant de l’autre monde, ait assuré lequel de ces trois anneaux tant semblables est le vrai anneau duquel il se servait. {h} |
14. |
Gabriel Naudé a ici résumé l’essentiel de ce qui est connu du philosophe aristotélicien Kyriacus Stroza (Ciriaco Strozzi, Kyriac Strosse ; Capalle, faubourg de Florence 1504-Pise 1565), à qui il conférait, à l’imitation de Regius (v. infra), le titre de patrice (patricien, noble) florentin : peut-être était-il apparenté aux Strozzi, dont le palais est une des beautés architecturales de Florence. Se fondant sur son testament, Michaud a donné à Strozzi une épouse, Élisabeth d’Onofrio Susiana, et quatre enfants légitimes. Le Naudæana citait les : Kyriaci Strozæ de Republica libri duo, nonus et decimus. Illis octo additi, quos scriptos reliquit Aristoteles, Græci ante facti, nunc primum ab eodem Stroza Latinitate donati. Ils ont été traduits en français dans : Les Politiques d’Aristote, auxquelles est montrée la science de gouverner le genre humain en toutes espèces d’États publics. Traduites de grec en français par Louis Le Roy, dit Regius, {b} avec expositions prises des meilleurs auteurs, spécialement d’Aristote même, et de Platon, conférés ensemble où les occasions des matières par eux traitées s’offraient : dont les observations et raisons sont éclaircies et confirmées par innumérables exemples anciens et modernes, recueillis des plus illustres empires, royaumes, seigneuries et républiques qui furent onques, et dont l’on a pu avoir la connaissance par écrit, ou le fidèle rapport d’autrui. Augmentées des ixe et xe livres, composés en grec au nom d’Aristote par Kyriac Strosse, patrice florentin, traduits et annotés par Frédéric Morel, {c} interprète du roi. {d}« Malgré les éloges que plusieurs écrivains, et les Encyclopédistes entre autres (art. Aristotélisme), ont prodigués à ce travail, il faut avouer que Strozzi est resté bien au-dessous de l’original, et l’on dirait qu’il a été plutôt occupé d’imiter le style que de deviner les pensées de son modèle » (Michaud). Additions et corrections du P. de Vitry « Cyriacus Strozza. Le même Papire Masson a donné la vie de ce philosophe, qui mourut à Pise, de la pierre, le 5 décembre 1656 : voyez Elog. Massoni p. 2, fol. 223. » {a} |
15. |
« faites-le vous-même » (en italien). V. note [3] du Naudæana 1 pour le pape Grégoire xv, Alessandro Ludovisi, élu en 1621. Issu d’une riche et noble famille bolonaise d’origine florentine, il ne fut guère « simple petit chanoine » : après avoir reçu un double doctorat en droit (civil et canonique) à Bologne en 1575, il avait été nommé archevêque de cette ville en 1612, puis élu cardinal en 1616. Dès son élection, il avait nommé son neveu, Ludovico Ludovisi (Bologne 1595-ibid. 1632), cardinal et archevêque de Bologne. Le pape Grégoire lui donna aussi le pouvoir d’exercer toutes les charges de la curie romaine (v. note [8] du Borboniana 1 manuscrit) per substitutum [par substitution], c’est-à-dire comme remplaçant, chaque fois que nécessaire. À la mort de son oncle (1623), il perdit ses insignes charges vaticanes pour devenir protecteur d’Irlande, et se retira dans son archevêché (The cardinals of the Holy Roman Church). Additions et corrections du P. de Vitry « Lisez Grégoire xv. Le neveu de ce pape, dont il est parlé dans cet article, est le cardinal Ludovisi. » |
16. |
V. notes [37] et [45] du Naudæana 1 pour les modestes origines du cardinal Agostino Oreggi (Origius) et du pape Sixte Quint. |
17. |
V. note [2], lettre 178, pour Ibrahim ier, Grand Turc de 1640 à 1648. |
18. |
Cette courte biographie est celle de Scipione Cicala (imprimé Ligula dans les deux Naudæana de 1701 et 1703, mais écrit Cigala dans la transcription du manuscrit de Vienne) : né à Gênes vers 1550 et mort à Dyarbakir (sud-est de la Turquie) en 1605, il s’est surtout fait connaître sous les noms de Ciğalazade Yusuf Sinan Paşa et Cağaloğlu Yusuf Sinan Kapudan Paşa. Il était fils de Vincenzo ou Visconte Cicala (Gênes 1504-Istamboul 1564), capitaine et corsaire génois, puis pirate méditerranéen (qui ne fut, semble-t-il jamais mahométan), et d’une musulmane native du Monténégro (qui se convertit probablement au catholicisme). La vie de Cicala est un véritable roman d’aventures que plusieurs historiens modernes ont reconstituée et commentée. En bref, capturé, avec Vincenzo, par les Turcs en 1560 à la bataille navale de Djerba, remportée par les Ottomans contre une coalition hispano-italienne, Scipione ne suivit pas son père, libéré contre rançon ; il se fit mahométan et acquit rapidement un très haut rang auprès du Grand Turc, qu’il servit fidèlement, sur terre et sur mer, pendant tout le restant de sa vie ; il mourut pendant la retraite des Turcs qui suivit la victoire des Perses dans une bataille qui avait eu lieu près du lac d’Ourmia, au nord-ouest de l’actuel Iran. |
19. |
La divinatio morientium, « divination [prémonition ou prescience] des mourants », n’est pas ici la nécromancie, divinatio mortuorum, c’est-à-dire le « prétendu art d’évoquer les morts pour avoir connaissance de l’avenir, ou de quelque autre chose de caché » (Académie), mais un pouvoir miraculeux qu’auraient certaines personnes de prévoir le moment de leur mort ou de faire des prédictions en mourant, comme l’illustrent les quatre auteurs cités par Gabriel Naudé : « Voyez à ce sujet Jules-César Scaliger contre Cardan, 307, num. 34 ; le pape Grégoire traite de cette divination en ses Dialogues, et Cicéron y apporte de nombreux arguments dans son livre i de Divinatione. Grégoire en fournit deux raisons : cela résulte soit d’une révélation, soit du fait que les âmes, commençant à se détacher de la matière, pourraient pressentir certaines des choses qu’elles entendent une fois libérées des liens corporels, etc., d’après l’Epitome Baronii de Sponde, à l’année 590, num. 5. »
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20. |
Nicolas Flamel (1330 ou 1340-Paris 1418) doit sa célébrité posthume aux infinies légendes qui ont couru et circulent encore sur son génie d’alchimiste faiseur d’or. Gabriel Naudé résumait la biographie écrite par François Grudé sieur de La Croix-Du Maine (1552-1592), bibliographe français, dans le : Premier volume de la Bibliothèque du sieur de La Croix du Maine, qui est un catalogue général de toutes sortes d’auteurs qui ont écrit en français depuis cinq cents ans et plus, jusques à ce jourd’hui : avec un Discours des vies des plus illustres et renommés entre les trois mille qui sont compris en cette œuvre, ensemble un récit de leurs compositions, tant imprimées qu’autrement. Dédié et présenté au roi. {a} Sur la fin de ce livre se voient les desseins et projets du dit sieur de La Croix, lesquels il présenta au roi l’an 1583 pour dresser une Bibliothèque parfaite et accomplie en toutes sortes. Davantage se voit le Discours de ses œuvres et compositions, imprimé derechef sur la copie qu’il fit mettre en lumière l’an 1579. {b} Pages 343‑344 : « Nicolas Flamel, natif de Pontoise, à sept lieues de Paris, ancien poète français, écrivain ou maître d’écriture, peintre et philosophe, mathématicien et architecte, et surtout grand alchimiste (comme l’assurent aucuns). La mystification alchimique de Flamel, conçue pour dissimuler la malhonnête origine de sa fortune, semble donc avoir été si habile qu’elle trompe encore aujourd’hui bien des gobeurs de sornettes ésotériques. |
21. |
Le Roman de la Rose est l’une des plus célèbres œuvres poétiques françaises du Moyen-Âge ; elle a en effet été écrite entre 1275 et 1280 par Jean de Meung (Chopinel ou Clopinel, vers 1240-vers 1305), qui a grandement prolongé ce qu’avait entrepris Guillaume de Lorris (vers 1200-vers 1238). Gabriel Naudé se référait sans doute au court Extrait du Roman de la Rose, où J. Clopinel, dit de Meung, parlant des faits tant de Nature que de l’art, son imitateur, écrit (Lyon, 1618, pages 57 ro‑58 vo, v. supra notule {a}, note [20]), texte dont voici quelques vers choisis (qui figurent dans le Roman original) :« Œuvre l’homme tant qu’il vivra, Additions et corrections du P. de Vitry « Nicolas Flamel : ce que l’on fait dire ici à M. Naudé est un peu plus supportable que ce qu’il avait avancé dans le Mascurat, pages 341 et 342. {a} Du moins n’y est-il point parlé {b} de l’édit de Philippe-Auguste qui chassa les juifs de France comme de la cause de la fortune de Flamel. Cette bévue était indigne de M. Naudé puisqu’entre le temps de Philippe-Auguste et celui de Flamel, il y a près de 300 ans de différence. {c} Il ne faut pas croire cependant que le sentiment de l’auteur du Naudæana soit beaucoup plus exact. Je ne sache point d’arrêt rendu contre les juifs sous Charles vi, qui les ait contraints de se retirer : {d} ainsi, ce n’est pas plus ce commerce avec les juifs et leurs débiteurs qui lui a fait amasser ces prodigieuses richesses qu’il avait, que la vertu transmutatrice qu’on lui attribue. On pourrait croire qu’étant un écrivain public, comme on n’en peut douter, et faisant à peu près les mêmes fonctions que nos notaires à présent, il ne lui a pas été plus difficile de s’enrichir qu’à mille autres de notre temps, qui n’ont point eu d’autre pierre philosophale qu’une adresse particulière à savoir profiter des avantages que leur fournissaient {e} leurs charges. Outre que le grand nombre de legs pieux qu’il a faits aux églises et hôpitaux peut faire douter que sur la fin de ses jours, il n’ait voulu rendre à Dieu ce qu’il avait pris aux hommes. Au reste, je ne puis m’empêcher de remarquer une autre bévue de l’auteur du Naudæana : c’est quand il dit que les auteurs du Roman de la Rose sont Jean de Mehun et Clopinel ; tout le monde sait qu’il fallait dire Jean de Mehun dit Clopinel et Guillaume de Lorris. » |
22. |
Le Pausilippe ou Pausilipe (Pausylippum ou Pausylipum en latin, Posillipo en italien) est un cap situé au nord-ouest de la baie de Naples, non loin du tombeau de Virgile (v. notule {a}, note [38] du Naudæana 2) ; il est dominé par un mont, percé d’un tunnel antique (crypta Neapolitana). Gabriel Naudé citait ici deux références bibliographiques.
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23. |
« Les anciens Grecs ont appelé ce mont Pausilupon, pour dire consolateur de la peine et des chagrins, et ont honoré Jupiter lui-même de ce surnom, comme on lit dans Sophocle. {a}
Additions et corrections du P. de Vitry « Selon l’étymologie du nom de cette montagne, qui est même rapportée dans cet article, il est clair qu’il fallait dire Pausilypus. {a} Les Italiens l’appellent Posilipo, et le Capaccio, dans sa description de Naples intitulée Il Forestiero, décide absolument qu’il faut dire ainsi, et non point Pausilippo. » {b} |
24. |
V. note [3], lettre 187, pour Paganinus Gaudentius (Paganino Gaudenzi, mort en 1649) et [28], lettre 240, pour le pays des Grisons. Gabriel Naudé citait d’abord le triple livre intitulé De Dogmatum Origenis, cum Philosophia Platonis, comparatione. Salebræ Terullianeæ. De Vita Christianorum ante tempora Constantini. Opus Paganini Gaudentii Theologi et I.C. [La Comparaison des dogmes d’Origène et de la philosophie de Platon. Les Aspérités de Tertullien. La Vie des chrétiens avant l’époque de Constantin. Ouvrage de Paganino Gaudenzi, théologien et jurisconsulte] (Florence, Amator Massa, 1639, in‑4o). V. note [13] du Patiniana I‑2 pour Origène, Père de l’Église au iiie s., et [10] supra pour son contemporain Tertullien, autre Père (mais contesté) de ladite Église. Flavius Aurelius Constantinus (272-337) a dirigé l’Empire romain, sous le nom de Constantin ier, de 306 à 310 (comme usurpateur), puis de 310 à sa mort (comme empereur souverain). Sa célébrité est principalement liée à la fondation de Constantinople comme capitale impériale, et à l’institution du christianisme comme religion d’État. Il a été sanctifié par l’Église orthodoxe. |
25. |
« Il a en outre écrit » :
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26. |
« par lettres, qui sont les interprètes de notre esprit » : Plaute, v. note [2], lettre latine 98. |
27. |
Quand mourut le cardinal Bagni (Giovanni Francesco Guidi di Bagno, v. note [12], lettre 59), Gabriel Naudé, son bibliothécaire, écrivit en sa mémoire la Lessus in funere domestico Eminentiss. Principis Ioannis Francisci cardinalis a Balneo [Lamentation pour les funérailles privées de l’éminentissime prélat Gianfrancesco, cardinal di Bagno] (Rome, Dominicus Marcianus, 1641, in‑4o), avec cette dédicace : Paganino Gaudentio Le livre italien que Paganino Gaudenzi a publié contre les jésuites est intitulé Dell’Anno secolare solennemente celebrato in Roma dalli Padri della Compagnia di Giesù nel 1639, lettera di Ventidio Gangapano Gentilhuomo et Academico Ricovrato di Padova [Le Centenaire des pères de la Compagnie de Jésus, solennellement célébré à Rome en 1639 : lettre de Vendito Gangapano (anagramme presque parfaite de Paganino Gaudenzi), gentilhomme et membre de l’Académie des Ricovrati (v. note [165] des Déboires de Carolus)] (sans lieu, ni nom, ni date, in‑8o de 53 pages). Additions et corrections du P. de Vitry « Paganinus Gaudentius était de Pesclat, que les Italiens appellent Puschiavo, petite ville dans le Pays des Grisons. Il mourut en 1649, si nous en croyons M. Patin, lettre 22. {a} Il a fait plusieurs autres ouvrages dont on peut voir la liste à la tête du livre dont je vais donner le titre : I fatti d’Alessandro il Grande spiegati e suppliti [con pochi avvenimenti de’ nostri tempi, massimo quelli delle Alemanniche Guerre.] Opera di Paganino Gaudenzio, Dottor Teologo, Filosofo, e Giurisconsulto, che per diecisette anni hà publicamente interpretata ed interpretata oggi nello Studio di Pisa la Politica e l’Istoria, in Pisa, 1645, in‑fo ; {b} on voit par ces paroles qu’il professait la politique et l’histoire, et non point les humanités, comme dit notre auteur. {c} Remarquez aussi que ce livre que Naudé lui a dédié est une élégie de cent vers sur la mort du cardinal Bagni : c’est faire des livres à bon marché. Au reste, l’ouvrage en question contre les jésuites est intitulé dell’anno secolare solennemente celebrato in Roma dalli padri della Compania di Giesû nel 1639. Lettera di Ventidio Gangapano Gentilhuomo et Academico Ricovrato di Padova : tout le monde voit qu’il n’est pas difficile de retrouver dans le faux nom de Ventidio Gangapano le véritable auteur, Paganino Gaudentio ; cette lettre contient deux parties, dont la seconde est une censure du P. Rho, jésuite, touchant cette même année séculaire de la Société. » {d} |
28. |
« Il a écrit bien des ouvrages concernant l’histoire ecclésiastique. » Constantinus Caietanus (Constantino Gaetano, francisé en Cajetan ; Syracuse 1568-Rome 1650) était devenu moine bénédictin en 1586 ; il avait deux frères jésuites, prénommés Ottavio et Alfonso. Constantino a publié de nombreux ouvrages d’érudition théologique à la gloire de son Ordre. L’amitié que lui vouait le cardinal Cesare Baronio (v. note [6], lettre 119) et l’aide qu’il lui procura dans la rédaction des ses Annales ecclésiastiques valurent au P. Gaetano d’être nommé abbé de San Baronzio dans le diocèse de Pistoia (Toscane) et conservateur de la Bibliothèque vaticane. |
29. |
De religiosa S. Ignatii, sive S. Enneconis fundatoris Societatis Iesu, per Patres Benedictinos Institutione. Deque Libello Exercitiorum eiusdem, ab Exercitatorio Venerabilis servi Dei, Garciæ Cisnerii, Abbatis Benedictini, magna ex parte desumpto. Constantini Abbatis Caietani vindicis Benedictini. Libri duo. [Deux livres de l’abbé Constantinus Caietanus, défenseur des bénédictins, sur l’instauration religieuse de saint Ignace, ou saint Enneco, fondateur de la Compagnie de Jésus, par les pères bénédictins. Et sur l’opuscule d’Essais que le même auteur a principalement tirés de ceux de Garcias de Cisneros, abbé bénédictin, vénérable serviteur de Dieu]. {a} Le livre s’ouvre sur cet Ex Martyrologio monastico [Extrait du Martyrologe monastique] : Pridie Kalendas Augusti, Romæ, Depositio S. Ignatij, sive S. Enneconis Confessoris. Qui Christo militaturus, novum hominem, et habitum in Monasterio Beatissimæ Virgini Mariæ Montisserrati Ordinis S. Benedicti induit : ibique Oblatorum, quos Hispani Donatos vocant, religioso schemate donatus, et sub magisterio insignis servi Dei Ioannis Clanonij, eiusdem Monasterij Monachi, ad sanctiorem vitam eruditus, ac eo accepit Exercitatorium vitæ spiritualis ; magni illius et excellenti sanctitate viri Garciæ Cisnerij, eiusdem Ordinis et Monasterij Abbatis : quo et ipse S. Ignatius mirabiles, in vita spirituali progressus fecit : et e quo potissimum post aliquot annos sua Exercitia elucubravit. Hinc admirabilem Societatis Iesu Religionem fundaturus, in S. Mariæ Montis Martyrum prope Parisios, prima suæ Societatis vota ; solemnia vero in Oratorio S. Mariæ ad S. Paulum prope Urbem, Benedictini Ordinis Asceteriis emisit : Montemque Casinum profectus (omnes enim novæ suæ Societatis solemniores Actus apud eosdem Benedictinos celebravit) ibidem in Oratorio S. Mariæ de Albaneta a Casinensibus Patribus adiutus, suæ Societatis Regulas meditatus est. Demum Sanctissimus Illustrium Religiosorum Ordinis Patriarcha, e Converso Benedictino effectus, eiusdem Ordinis lætissima incrementa videns, feliciter obdormivit in Domino ; pridie Kal. Augusti, Anno Domini Millesimo quingentesimo quinquagesimo secto. Quem Gregorius PP. xv. miraculis clarum Sanctorum numero adscripsit. Additions et corrections du P. de Vitry « Const. Cajetano était de Syracuse ; ses plus grands ennemis n’ont pu disconvenir qu’il n’eût beaucoup d’esprit et de savoir. On doit cependant avouer qu’il était trop entêté de sa famille et de la préexcellence de son Ordre, ce qui l’a fait tomber souvent dans le ridicule. Quiconque aura lu le monument qu’il s’est laissé dresser par son neveu, et qu’il a souffert être mis à la tête de l’édition de l’Imitation de Jésus-Christ, sous le nom de Gersen en 1644, me pardonnera cette expression. {a} Il ne fut pas plus modéré pour la gloire de son Ordre. Il mit tout en usage pour persuader que saint Grégoire le Grand, saint Colomban, saint Bruno, saint François d’Assise, saint Thomas d’Aquin, saint François de Paule, le pape Paul iv, saint Philippe de Néri, saint Charles et plusieurs autres avaient été bénédictins ; {b} mais rien ne fut plus mal conçu que le dessein qu’il prit d’attribuer encore à son patriarche, saint Benoît, saint Ignace de Loyola, et de prétendre que les exercices spirituels de ce saint fondateur de la Société étaient copiés en partie de l’Exercitatorium du vénérable Garcias Cisnerus, abbé bénédictin. {c} Le P. Rho, jésuite, le releva un peu fortement sur cette matière. Au reste, je ne sais d’où l’auteur du Naudæana a pris que Cajetan fut appelé à Rome pour servir de second à Baronius dans son Histoire ecclésiastique. {d} Ce cardinal, au contraire, et après lui Allatius, Naudé et quelques autres, auxquels on peut ajouter Cajetan lui-même, assurent que Clément viii le fit venir pour travailler à une édition des œuvres de Pierre Damien, qui parut à Rome et 4 vol. in‑fo. {e} Cet abbé mourut le 7 septembre 1650, âgé de 85 ans. » {f} |
30. |
« suivant la règle des deux personnes qui sont en litige [pour un bien], et de la troisième qui en profite. » V. notes :
L’édition de L’Imitation donnée par Gaetano (Rome, 1654, v. supra note [8], seconde notule {a}) contient une rare gravure de Gersen, avec cette légende : Effigies Ioannis Gersen de Canabacco Abbatis Bened.i monasterii Versellensis S. Stephani ex ms. Cod. supra trecentos annos exarato, atque in Bibliotheca Aniciana Ap.a Rom.i Collegii Greg.ni de propaganda fide asservatur. |
31. |
Le juriste Charles Labbé de Monvéron {a} s’est aussi beaucoup intéressé à l’Imitation de Jésus-Christ et à Jean Gerson, {b} comme le prouve la très intéressante pièce qui figure dans le premier des trois tomes des : Joannis Gersonii, Doctoris Theologi et Cancellarii Parisiensis Opera omnia… Opera et studio M. Lud. Ellies du Pin, S. Facultatis Parisiensis Doctoris Theologi, et Philosophiæ Professoris Regii… Ce texte est la transcription d’un étonnant privilège royal, à la fin des Scriptorum testimonia [Témoignages d’écrivains] qui concluent le Gersoniana, page clxxxvii : Privilegium Regis Christianissimi ad mandatum Typis Opus De Imitatione Christi sub nomine Gersonii. {a} |
32. |
L’édition voulue par Richelieu est intitulée De Imitatione Christi Libri iv (Paris, Imprimerie royale, 1640, in‑4o de 550 pages). Une foule de savants, religieux et historiens, s’est évertuée à établir l’identité du véritable auteur d’un des livres les plus admirés et les plus édités de la dévotion chrétienne. En écartant saint Bernard de Clairvaux (v. note [36], lettre 524), faute du moindre argument solide, et Giovanni Gersen, abbé de Verceil sans doute inventé par les bénédictins (v. supra note [30]), il ne reste que deux candidats sérieux à l’honneur d’avoir écrit l’Imitation de Jésus-Christ : l’augustinien flamand Thomas a Kempis (1380-1471) paraît aujourd’hui l’avoir emporté. Il semble pourtant difficile d’écarter les arguments de Charles Labbé (parmi d’autres) en faveur du célestin français Jean Gerson (1363-1429) ; ils sont malheureusement demeurés inédits, hormis sous la forme, exclusive et discutable, d’un privilège royal accordé en 1654 et transcrit en 1706 (v. supra note [31]). Gabriel Naudé, partisan de Kempis, n’a épargné ni sueur ni encre dans cette érudite querelle monastique (Naudæana, 1701, pages 2‑4).
Bien que ceci paraisse avoir échappé aux historiens de Port-Royal, le feu de ce mémorable incendie a pu être attisé par la dispute contemporaine du jansénisme augustinien, défendant l’autorité de l’augustin Thomas a Kempis, contre celle de Johannes Gersen, bénédictin proche des jésuites, à en croire l’exubérant dom Constantino Gaetano (v. supra note [29]). Jean Gerson fut peut-être alors le malheureux dindon de cette farce. Additions et corrections du P. de Vitry « Pour apprendre la suite de ce fameux différend, qui a exercé pendant longtemps deux des plus illustres congrégations de France, il faut voir la Conjectio Causæ Kempensis de Naudé, imprimée en 1651, {a} avec cette précaution néanmoins d’être très persuadé qu’il y entrait un peu trop de chaleur dans le procédé de Naudé. Il s’en faut bien qu’il n’ait eu la modération d’un savant bénédictin, qui fait à présent l’ornement de son Ordre ; {b} lequel, sans se servir d’aucuns termes injurieux à la mémoire de Naudé, a réfuté les principaux chefs d’accusation que cet anti-gerséniste avait produits contre la bonne foi des bénédictins, et n’a laissé passer aucune occasion de faire remarquer qu’on trouvait dans les bibliothèques plusieurs manuscrits du livre de Imitatione Christi d’une écriture antérieure au temps de Thomas à Kempis, et dont certains portaient le nom de Gersen. Ajoutons aussi, pour l’honneur de l’abbé Cajetan que les manuscrits sur lesquels il se fondait, ayant été apportés en France et examinés avec exactitude en 1673, en présence du défunt archevêque de Paris, furent déclarés authentiques et non falsifiés. » {c} |
33. |
« dans la nature des choses », c’est-à-dire réel. À ce que disait ici Gabriel Naudé de l’indélicat Seton (où auditeur est à prendre dans le sens de secrétaire), le livre de Michael Questier intitulé Stuart Dynastic policy and Religious Politics 1621-1625 [Politique dynastique et diplomatie religieuse des Stuarts, 1621-1625] (Londres, Cambridge University Press, 2009) ajoute (note 271, page 180) qu’il se prénommait William (Guilielmus Setonius), était natif de Meldrum (Aberdeenshire), issu d’une ancienne et noble famille écossaise, et entretenait des relations avec le clergé séculier anglais de Rome. Seton avait étudié à Louvain auprès de Juste Lipse, puis enseigné le droit à la Faculté d’Angers, avant de partir à Rome pour devenir secrétaire du cardinal Cobelluzzi (Jan Papy, William Barclay’s Album Amicorum [Album des amis de William Barclay], Myricæ, Essays on neo-latin literature in memory of Jozef Ijsewin, édités par Dirk Sacré et Gilbert Tournoy, Supplementa humanistica Lovaniensia xvi, Leuven University Press, 2000, page 388). V. notes :
Si Patin avait recueilli le Naudæana, il me semble qu’il n’aurait probablement pas manqué de raconter l’anecdote à l’un de ses correspondants, tant il aurait eu plaisir à maudire la fourberie des Britanniques, ou à ridiculiser un de ses collègues grossièrement dupé par un escroc. Je conviens pourtant que Patin avait une très grande admiration pour Moreau et qu’il a pu taire sa mésaventure ; il se peut aussi qu’il ne l’ait écrite que dans une de ses nombreuses lettres qui ont aujourd’hui disparu. |
34. |
V. notes
Les Meditamenta propria… de libris propriis [Exercices personnels… sur ses livres personnels] ont pour titre exact Federici Borromæi cardinalis et Archiepiscopi Mediolani, Meditamenta litteraria [Exercices littéraires de Frédéric Borromée, cardinal et archevêque de Milan] (sans nom ni lieu, 1633, in‑4o de 160 pages) : liste des principaux livres rares, principalement religieux, qui composaient la collection initiale de la Bibliothèque ambrosienne. Une liste complète des ouvrages de Frédéric Borromée est disponible sur BnF Data. Additions et corrections du P. de Vitry « Frédéric Borromée n’était point neveu de saint Charles. Il était son cousin germain, fils du comte Jules-César Borromée, lequel était frère du comte Gilbert, père du saint archevêque de Milan. Frédéric fut fait cardinal-diacre le 15 juin 1586, n’ayant que 22 ans. {a} Il mourut à Milan le 22 décembre 1631. » |
35. |
Aloysius Lilius (Luigi Giglio ou Lilio), médecin et astronome italien de la seconde moitié du xvie s., originaire de Cirò (Calabre), est connu pour avoir fourni au pape Gégoire xiii (v. note [2], lettre 430) les bases scientifiques qui aboutirent, en 1582, à la réforme catholique du calendrier : passage de l’ancien style, julien, au nouveau style, grégorien (v. note [12], lettre 440). L’ouvrage qui les a établies est un opuscule dont le titre n’est pas de Epactis [des Épactes], mais Compendium novæ rationis restituendi kalendarium [Abrégé de la nouvelle méthode pour présenter le calendrier] (Rome, héritiers d’Antonius Bladius, 1577, in‑4o de 17 pages) ; sans auteur identifié, il est adressé Peritis Mathematicis [Aux habiles mathématiciens]. La méthode repose sur le calcul des épactes, bête noire des chronologistes débutants (dont je fais partie). Dans le calcul du comput (calendrier) ecclésiastique, l’épacte est (Furetière) : « la différence de l’année lunaire, qui n’est que de 354 jours, d’avec l’année solaire qui est de 365 jours. Cette différence fait que les nouvelles lunes reculent tous les ans de onze jours. On trouve l’âge de la Lune en ajoutant l’épacte de l’année {a} au nombre des jours du mois où on est, et au nombre des mois écoulés depuis celui de mars ; en observant aussi de retrancher 30 jours quand ces trois sommes ajoutées vont au-delà. {b} Le cycle des épactes est de 19 ans, répondant au nombre d’or {c} ou cycle lunaire, après lequel toutes les lunations reviennent au même jour. Les épactes commencent l’onzième des calendes d’avril. {d} Ce mot vient du grec épagô, induco, intercalo. » {e} Le nom de Lilius (que j’ai transcrit en petites capitales) apparaît en deux endroits du Compendium.
Additions et corrections du P. de Vitry « Aloisius Lilius. Cet illustre mathématicien était mort quelque temps avant le mois d’octobre 1582. Le supplément de Moréri, sans en excepter même les éditions revues, corrigées et augmentées par M. Le Cl. a fait une plaisante bévue quand il confond l’Aloisius Lilius qui a trouvé les nombres épactaux avec le Lilio Gregorio Giraldi, et lorsqu’il dit que le frère de ce dernier, qu’il appelle Lilio Antonio Giraldi, présenta à Grégoire xiii un traité posthume de son frère pour la réforme du calendrier. {a} Pour appuyer ce fait, on cite la vie de Sixte v de M. Leti, {b} mais il n’y a rien de semblable : on y lit seulement qu’Aloisio Lilio, médecin, avait fait un petit traité sur les épactes, dans lequel il donnait les moyens de réformer les erreurs qui s’étaient glissées dans le calendrier ; lequel ouvrage fut présenté en 1582 à Grégoire xiii par Ant. Lilio, frère de l’auteur. C’est aussi ce qu’il fallait dire et qui se trouve confirmé du témoignage de Clavius et du Rossi. » {c} |
36. |
Julien dit l’Apostat, empereur romain de 361 à 363 (v. note [15], lettre 300) est le sujet des deux longues dissertations que citait Gabriel Naudé :
Partant à peu près des mêmes sources historiques, ils décrivent en grand détail les deux faces de l’empereur : d’un côté, ses vertus morales, politiques et militaires qui lui ont valu les louanges des historiens païens ; de l’autre, son combat contre les chrétiens, qu’il avait abandonnés pour rétablir le polythéisme antique et s’acharner à bloquer les progrès de la nouvelle religion dans l’Empire, ce qui a mené les historiens chrétiens (les Pères de l’Église) à lui donner le prénom d’Apostat, et à en faire un objet d’effroi et de haine pour la postérité. La subjectivité des références anime la discussion des deux écrivains français, mais leurs conclusions adoptent des éclairages différents.
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37. |
Marcantonio Bragadin (Venise 1523-1571), général vénitien de noble famille (v. note [21], lettre 525, pour son petit-fils, de mêmes nom et prénom que lui, cardinal en 1641), avait été nommé, en 1569, capitaine du royaume de Chypre, qui était alors sous la domination de la Sérénissime République. Dès l’année suivante, les Ottomans débarquèrent dans l’île, s’emparèrent de Nicosie, sa capitale, puis entreprirent d’assiéger le port fortifié de Famagouste, où les Vénitiens s’étaient retranchés. Bragadin fut contraint de se rendre le 31 juillet 1571 après dix mois d’incessantes attaques turques menées sous le commandement du vizir Lala Mustafa Pacha (1500-1580). Jacques-Auguste i de Thou a raconté la capitulation et ses horribles suites dans le livre xlix de son Histoire universelle, année 1571, règne de Charles ix (Thou fr, volume 6, pages 212‑214) :« La ville capitule – Enfin, les habitants n’ayant plus ni vivres, ni poudre, ni espérance de secours, parce que Barzotto Babaro, qui leur en amenait de Candie, {a} avait fait naufrage après avoir été battu par une rude tempête, on convint d’une trêve, pendant laquelle on réglerait les articles de la capitulation. On donna les otages, {b} qui furent de notre part Hercule Martinengo, et Mathieu Colti, de Famagouste ; et de la part des Turcs, le lieutenant de Mustafa et celui de l’aga des janissaires. Il fut stipulé : que les officiers et les soldats seraient conduits en Candie avec armes et bagages, cinq pièces de canon et trois de leurs plus beaux chevaux ; que les Turcs fourniraient les galères pour les y transporter ; qu’il ne serait fait aucun mauvais traitement aux habitants ; qu’on leur laisserait tous leurs biens et qu’ils ne seraient point obligés de sortir du pays ni de changer de religion. Ces articles ayant été envoyés à Mustafa et signés de sa main, on embarqua les soldats chrétiens sur les vaisseaux turcs. |
38. |
« son souteneur. » Subactor est un dérivé du verbe latin subigere, « soumettre par la contrainte », « débaucher » ; Gaffiot a sans doute trouvé ce substantif trop grossier pour le mettre dans son dictionnaire ; mais celui de Lewis et Short (Oxford) le donne pour prude synonyme de pædico, « sodomite », « pédéraste ». V. note [32], lettre 554, pour Marie Stuart, reine d’Écosse puis de France, par son mariage avec François ii. Veuve en 1560, elle était rentrée en Écosse et avait épousé son cousin germain Henry Stuart (lord Darnley) en 1565. En 1567, après la mort de Darnley, Marie abdiqua la couronne d’Écosse et épousa en troisièmes noces son amant, le noble écossais James Hepburn (vers 1534-1578), dit lord Bothwell (Bothuelus, Bothuel dans l’orthographe française du temps), comte de Bothwell et duc d’Orkney, soupçonné d’avoir assassiné Darnley. Les deux époux furent rapidement emprisonnés et menèrent séparément de vaines tentatives pour s’emparer de la couronne d’Angleterre, que détenait Élisabeth ire (v. note [6], lettre 511), reine qui demeurait célibataire et sans descendance. Bothwell finit ses jours dans une prison danoise en 1578 et Marie fut décapitée en Angleterre neuf ans plus tard (v. infra note [39]). Alexandre Teulet (1807-1866), archiviste paléographe, membre de la Société impériale des antiquaires de France, a édité et soigneusement commenté, dans son Avertissement, huit Lettres de Marie Stuart au comte de Bothwell (Paris, Firmin Didot frères, fils et Cie, 1859, in‑8o), dont Gabriel Naudé pouvait avoir vu les copies. Rédigées en français au premier trimestre de 1567, elles sont accompagnées de douze sonnets. Le tout témoigne d’une passion amoureuse si vive que, par respect pour la mémoire et l’honneur de la reine, certains historiens en ont contesté l’authenticité (mais Teulet a opposé à cela de solides arguments). Ces vers de Marie (sonnet xi, pages 75‑76) en donnent le ton : « Mon cœur, mon sang, mon âme, et mon souci, |
39. |
Les deux historiens cités par Gabriel Naudé ont abondamment détaillé les extravagances de Marie Stuart et de Bothwell. Je me suis ici limité aux descriptions les plus parlantes de celui que Naudé qualifiait de subactor de la reine (v. supra note [38]).
Nonobstant ces accablantes turpitudes, il n’a pas manqué de dévots catholiques pour vanter la sainteté de Marie Stuart, comme en témoigne l’éloge de Richard Verstegen (historien et polémiste anglais au service des Espagnols, Londres 1550-Anvers 1640), dans son Théâtre des cruautés des hérétiques de notre temps. Traduit du latin en français (Anvers, Adrien Hubert, 1588, in‑4o, page 84) : « Marie, sérénissime reine d’Écosse et légitime héritière de la couronne d’Angleterre, douairière de France par le décès de François, second du nom, roi très-chrétien des Français, de mémoire louable, duquel elle fut épouse, fille de Jacques cinquième et mère de Jacques sixième, à présent régnant roi d’Écosse, extraite par sa mère de la très illustre Maison de Lorraine, molestée par les hérétiques en son royaume, lesquels n’épargnent leurs princes naturels, qu’ils ne leur fassent sentir combien est barbare l’hérésie, laquelle dépouille ceux qui en sont infectés d’humanité ; se retira en Angleterre à la semonce de la reine Élisabeth, avec promesses jurées, ratifiées par signals {a} de paix et amitié perpétuelles. Car nonobstant toutes telles promesses faites avec serment, sitôt qu’elle eut le pied en Angleterre, elle fut mise en arrêt et menée prisonnière ; où, contre tout droit divin et humain, vu qu’elle n’était prise par guerre, et que les égaux et pareils n’ont aucune juridiction l’un sur l’autre, elle fut détenue par l’espace de vingt ans prisonnière, plusieurs fois changée de lieu, pour l’incommoder. Finalement, demeurant constante en la foi et religion de notre Seigneur Jésus-Christ et de son Église catholique, elle fut, contre la foi jurée et contre le droit des gens, décapitée au château de Foderingham, {b} par le commandement de cette inhumaine meurtrière des saints, l’an 1587, le 18e de février. Cette bonne princesse était douée de grands dons du ciel, et au corps et en l’âme, et n’y avait personne tant destituée d’humanité qui, la voyant, ne l’admirât, et n’en eût pitié et compassion. Mais cette cruelle meurtrière ne la voulut onc {c} voir, de peur qu’étant émue de l’excellence de cette princesse, elle ne pût humecter de ce sang innocent et royal son estomac et ses poumons perpétuellement altérés des fidèles membres et serviteurs de notre Seigneur Jésus-Christ. La constance et fidélité de cette reine, martyre du fils de Dieu, l’ont rendue très recommandable au ciel et en la terre. » {d} Le roi Jacques blâma fort Buchanan et de Thou pour leurs relations croisées des infortunes de sa mère : v. notes [13] et [14] du Borboniana 2 manuscrit. |
40. |
V. note [9], lettre 367, pour Ferdinand ii de Médicis, grand-duc de Toscane de 1621 à 1670, et pour sa mésentente avec la papauté. En 1634, il avait épousé Vittoria della Rovere (1622-1694), qui lui était fiancée depuis qu’elle avait l’âge de deux ans. Elle était la dernière héritière du duché d’Urbino (ou Urbin), petit État du littoral adriatique, entre la Romagne et les Marches, dont la capitale était Urbino. Vittoria était la fille unique de Frederico Ubaldo della Rovere (1605-1623). La mort subite et prématurée de ce jeune duc (avec soupçon d’empoisonnement) avait contraint son père, Francesco Maria (1549-1631), de remonter sur le trône qu’il avait confié à son fils en 1621. Vieux, sans descendance mâle et las des convoitises de Rome, le grand-père de Vittoria s’était résigné, en 1624, à léguer son duché et tous ses biens aux États pontificaux. Les Médicis perdirent ainsi ce qui leur était promis, mais n’en conservèrent pas moins d’amertume à l’encontre du pape Urbain viii. Le grand-duc Ferdinand s’était allié à la République de Venise et au duc de Modène pour soutenir son beau-frère, Édouard ier Farnèse, duc de Parme, qui voulait recouvrer son duché de Castro (Latium), investi par le pape Urbain viii à la suite d’un différend financier (v. notes [6], lettre 27, et [14], lettre 62). Cette ligue avait alors engagé la première guerre dite de Castro (1641-1644) contre les États pontificaux. Elle se termina par leur défaite militaire et par la restitution de Castro aux Farnèse ; mais elle ne fut que temporaire car la seconde guerre de Castro (1646-1649) tourna à l’avantage de la papauté. |
41. |
Faïence (jadis Fayence) : « nom propre d’une petite ville de l’État de l’Église en Italie, que les Italiens appellent Faenza, nom formé par corruption de son nom latin Faventia. Elle est dans la Romagne, sur la rivière d’Amone, entre Forli et Imola. Faïence est renommée pour les beaux lins que produit son territoire, et par la belle vaisselle de terre qui s’y fait et qui en a pris son nom. […] On peut aussi dire en français Faenza » (Trévoux). Majolique : « nom attribué, dans le commerce de curiosités, à toutes les faïences anciennes italiennes et espagnoles. On écrit et prononce souvent maïolique. Ital. majolica et majorica, de l’île de Majorque (voir sur les monnaies du xiiie au xviiie siècle : rex Majoricarum), où cette faïence fut d’abord manufacturée » (Littré DLF).La Romagne était une petite région située sur le littoral adriatique, entre l’Émilie au nord, la Toscane à l’ouest et la Marche au sud. Sa principale ville était Ravenne. Aujourd’hui unie à l’Émilie (Émilie-Romagne), elle appartenait alors aux États pontificaux depuis le milieu du xvie s. Les vaisseaux étaient les vases ornés que les collectionneurs gardaient dans leurs galeries (cabinets) d’objets d’art et de curiosités. Les peintures du Titien (Tiziano Vecellio, Pieve di Cadore, Vénétie 1488-Venise 1576) y jouissaient déjà d’un très grand renom. |
42. |
Ce paragraphe, dont la fin reprend en partie le début, est une preuve que l’éditeur du Naudæana s’est parfois autorisé quelques additions pour mettre à jour les informations qui dataient du début des années 1640. Daniel Dumonstier (Dumoustier, Du Monstier ou Du Moustier, Paris 1574-ibid. 1646) est un portraitiste dont la spécialité était les dessins au crayon en trichromie. Il avait constitué un cabinet de curiosités et une riche bibliothèque, que Gabriel Naudé racheta à sa mort, pour le compte de Mazarin. Il était aussi connu pour son libertinage et l’ironie de ses bons mots. Tallemant des Réaux lui a consacré une historiette entière (tome i, pages 659‑662) : « La plus belle aventure qui lui soit arrivée, c’est que le cardinal Barberin, étant venu légat en France, durant le pontificat de son oncle, {a} eut la curiosité de voir le cabinet de Dumonstier, et Dumonstier même. Innocent x, alors monsignor Pamphilio, était en ce temps-là dataire et le premier de la suite du légat ; {b} il l’accompagna chez Dumonstier, et voyant sur la table l’Histoire du concile de Trente, de la superbe impression de Londres, {c} dit en lui-même : “ Vraiment c’est bien à un homme comme cela d’avoir un livre si rare ! ” Il le prend et le met sous sa soutane, croyant qu’on ne l’avait point vu ; mais le petit homme, qui avait l’œil au guet, vit bien ce qu’avait fait le dataire, et, tout furieux, dit au légat “ qu’il lui était extrêmement obligé de l’honneur que Son Éminence lui faisait, mais que c’était une honte qu’elle eût des larrons dans sa compagnie ” ; et sur l’heure, prenant Pamphile par les épaules, il le jeta dehors en l’appelant bourgmestre de Sodome, et lui ôta son livre. |
43. |
Melchior Inchofer (Kőszeg, Hongrie vers 1584-Milan 1648), luthérien converti au catholicisme, entra dans la Compagnie de Jésus et fut envoyé en 1616 à Messine pour enseigner dans le collège jésuite de la ville. Il y publia sa : Epistolæ B. Virginis Mariæ ad Messanenses veritas vindicata, ac plurimis gravissimorum scriptorum testimoniis et rationibus erudite illustrata. {a} Ce livre pour le moins curieux fut immédiatement mis à l’Index, sous condition d’amendements. Une version corrigée du livre reparut en 1630 (imprimée à Viterbe et à Messine). En récompense de sa soumission, Inchofer devint un consultant influent de la Congrégation de l’Index (v. notule {c}, note [30] du Naudæana 2) et de l’Inquisition. Il partagea le reste de sa vie à écrire des ouvrages de critique théologique et d’histoire religieuse, et à enseigner dans divers collèges d’Italie. V. note [27] du Naudæana 4 pour la Monarchia Solipsorum [Monarchie des Nous-tout-seuls] (Venise, 1645), virulent pamphlet antiloyolitique que Naudé (parmi d’autres) a attribué au R.P. Inchofer. Additions et corrections du P. de Vitry « Melchior Inchofer. Ajoutez qu’il y a eu deux éditions de ce livre : la première a pour titre Epistolæ B. Virginis Mariæ ad Messanenses vindicata, ac plurimis gravissimorum Scriptorum testimoniis et rationibus erudite illustrata, auctore P. Melch. Inchofer Austriaco e Soc. Jesu, Messanæ, 1629, in‑fo ; on l’obligea de changer ce titre et de corriger ou éclaircir quelques endroits de son traité ; il en fit une seconde édition en 1631, à Viterbe, qu’il intitula de Epistola B. Virginis Mariæ ad Messanenses conjectatio plurimis rationibus et verisimilitudinibus locuples, auctore, etc. {a} Je sais que l’Alegambe met en d’autres années les éditions de ce livre, qu’il dit que la première se fit en 1630, et la seconde en 1633, mais il ne faut que voir les titres de chaque exemplaire pour se convaincre du contraire. {b} Inchofer était né à Vienne en 1584 et mourut à Milan le 28 septembre 1648. On le fait auteur du Monarchia scriptorum. {c} Il n’a pas tenu aux ennemis de la Société qu’on n’ait cru {d} que les jésuites, ne doutant point qu’il ne fût l’auteur de cette satire, le voulurent éloigner de Rome, où il avait de puissants amis, et le faire passer en quelque lieu de la Terre où l’on pût avec plus de liberté lui faire sentir les peines que méritait son interdiction ; mais comme on ne trouve ces particularités que dans un livre de jansénistes déclarés, ce serait être injuste que d’y ajouter foi sur le simple récit qu’en a fait M. Bourgeois, docteur de Sorbonne, dans sa relation imprimée en 1695, pag. 105, 106, 107 et 108. » {e} |
44. |
« Ainsi aurait-il eu plus d’adorateurs. » Philippe Néri (Florence 1515-Rome 1595) fit très tôt preuve d’un grand mysticisme et passa l’essentiel de son existence à Rome. Ordonné prêtre en 1551, il fonda la Congrégation de l’Oratoire en 1575 (v. note [1], lettre 29). Il fut sanctifié en 1622. Trapani est une ville portuaire située à l’extrême pointe occidentale de la Sicile. Je n’y ai pas trouvé trace d’une église dédiée à saint Philippe Néri, et encore moins de son écroulement qui aurait « accablé » (écrasé) des centaines de fidèles ; catastrophe probablement imaginaire, mais Gabriel Naudé n’en tirait pas moins de sceptiques enseignements. |
45. |
Gabriel Naudé dressait un florilège libertin de la papauté.
V. note [7], lettre 112, pour le cardinal Barberin, Francesco Barberini. |
46. |
Ce paragraphe complète ce qui a déjà été écrit dans le Naudæana 2 (page 36, v. sa note [10]). Les célestins étaient un Ordre monastique (d’abord appelé Congrégation de Saint-Damien) fondé en Italie au milieu du xiiie s. par le bénédictin Pierre de Moronne, élu pape en 1294 sous le nom de Célestin v. À Paris, le couvent des Célestins et son église abbatiale se trouvaient entre la Bastille et l’Arsenal, là où s’élève aujourd’hui la caserne des Célestins (ive arrondissement). Cet Ordre a été dissous à la fin du xviiie s. Janus Nicius Erythræus {a} a donné une courte biographie de l’abbé du Bois, Olivarius a Bosco, dans sa Pinacotheca imaginum illustrium [Galerie des portraits d’hommes illustres], {b} pages 144‑145 : Inter nostri sæculi Oratores non verebor adnumerare Ioannem a Bosco, Henrici iv Regis Galliæ beneficio, ut ipse de se fatetur, nobili ac generosæ Olivariæ familiæ insertum, ejusque insignibus et cognomine donatum. Est enim ejus oratio pura, nitida, Latina, elegans, quæque nihil fere habeat ineptiarum. Hunc Paulus v Abbatis Belliloci insignibus ac titulo decoravit, cardinalis Seraphini Olivarii opera ; quem postea luculenta oratione in Æde Sanctissimæ Trinitatis ad montem Pincium, laudavit extinctum ; atque eum etiam, ob insignem eloquentiam, maximarumque doctinarum notitiam, Rex Galliæ elegerat, quem de rebus divinis verba facientem audiret : verum cum in concionibus, contra Religiosi ordinis existimationem et decus, aspere ac truculenter esset invectus, illius in se ordinis iram derivavit, et cardinalis præsertim magni a se animum abalienavit. Legi ego complures Purpurati illius ad eum epistolas, in quibus inimicum eum suum appellat, pro cujus salute ad Deum preces effundat, seque tantisper inimicum illi futurum profitetur, quoad palinodiam cecinisset, hoc est, quoad qui in suum ordinem tam graviter in concionibus esset invectus, contraria oratione correxisset : quamobrem Romæ, in molem Adriani, in arcem fortissimam S. Angeli nomine, redactam, compactus, multos ibi annos asservatus est vinctus : ac post mortem cardinalis illius, cujus præsertim opera se in illum carcerem fuisse compulsum arbitrabatur, rogatus, ecquando e vinculis dimittendus esset, Modo, inquit, nam defuncti sunt qui quærebant animam pueri. Sed fere antea e vita dimissus est, quam ex illa custodia. Traditur chymicæ in primis arti fuisse addictus, sed vanitatis suæ pœnas, rei familiaris damno, solvisse. |
47. |
La promotion du 13 juillet 1643, sous le pontificat d’Urbain viii (Maffeo Barberini), comptait 17 cardinaux (The cardinals of the Holy Roman Church) : 15 Italiens et deux étrangers, venant des « couronnes », un Espagnol, le jésuite Juan de Lugo, et un Français et Achille d’Étampes, commandeur de Valencay (v. notes [55] et [56], lettre 99). La mort de Louis xiii (14 mai 1643) avait entraîné la disgrâce de l’évêque de Beauvais, Augustin Potier de Gesvres, qui perdit toute chance de recevoir le chapeau rouge (v. note [6], lettre 83). En étant promus, quelques nouveaux cardinaux libéraient les charges (offices) qu’ils occupaient précédemment au sein de la cour pontificale. Le pape en disposait alors pour les vendre aux nombreux candidats qui les briguaient. V. supra note [40] pour la guerre du duc de Parme, Édouard ier Farnèse, contre Urbain viii, pour le duché de Castro. |
48. |
« que la fortune a engendrés chaque fois qu’elle a voulu badiner. » Le facétieux bon mot de Guillaume i de Bautru (v. note [15], lettre 198) jouait sur l’homonymie entre le nom de Cesare Facchinetti (v. note [7], lettre 982) et facchinetti, diminutif pluriel de facchino, « faquin ». Facchinetti était arrière-petit-neveu de l’éphémère pape Innocent ix, Giovanni Antonio Facchinetti de Nuce (Bologne 1519-Rome le 30 décembre 1591), élu le 29 octobre 1591. Outre Facchinetti, Gabriel Naudé nommait huit des quinze Italiens de la promotion.
Les six autres cardinaux de 1643 étaient Mario Theodoli (v. note [8], lettre 226), Francesco Angelo Rapaccioli (v. note [30], lettre 395), Vincenzo Costaguti, Giovanni Stefano Donghi, Paolo Emilio Rondinini et Angelo Giori. |